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» portoient plus nulles queues à leurs robes, mais elles >> portoient bordures de gris de létisses, de velours et aul>> tres choses de largeur d'un velours de hault; elles por>> toient sur leurs chiefs bourlets en manière de bonnets » ronds, et diminuant par dessus de la haulteur de demie >> aulne, ou trois quartiers de long, aulcunes moins, aul» tres plus (1) et deliés couvre-chiefs par dessus, pendans » par derrière jusques en terre, avec ceinture de soye de » la largeur de 4 ou 5 pouces, les tissus et ferures lar» ges et dorées, pésant 5, 6 et 7 onces d'argent; de lar» ges colliers d'or en leurs cols, de plusieurs façons. En ce >>>tems aussi les hommes se vestoient sy court, que leurs >> chausses alloient presque jusqu'à la forme de leurs fes» ses (2); ils faisoient fendre les manches de leurs robes >> et de leurs pourpoincts sy bien qu'on voyoit leurs bras, » parmy une deliée chemise qu'ils portoient; la manche » de la chemise estoit large; ils avoient longs cheveulx qui » leur venoient par devant jusques aux yeux, et par der» rière jusques en bas; sur leurs testes ils portoient ung >> bonnet de drap d'ung quartier ou quartier et demy de » haulteur, et les nobles et riches grosses chaînes d'or au

(1) Ces coiffures gigantesques avaient déjà excité en 1428 la sainte indignation d'un carme breton appelé frère Thomas Conecta. Il vint prêcher en Belgique, et, afin de rendre ses prédications plus efficaces, il exhortait les polissons à décoiffer les femmes. Les missionnaires du 19me siècle ont conservé ces traditions apostoliques. Meyer, à l'année 1428, p. 271 verso, édit de 1561, in-fol., imp. à Anvers.

(2)« On eût dit, remarque à ce sujet le naïf historien de Tournay, que

» l'on souloit vestir des singes, qui estoit chose très-malhonneste et impu

dique. Cousin, tom. IV, p. 235.

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col, avec pourpoinct de velours ou drap de soie et de longues poulaines à leurs solliers de ung quartier ou quartier et demy de long, et à leurs robes gros maheu» tres sur leurs espaules pour les faire apparoître plus gros >> et plus fournis. Leurs pourpoincts estoient garnis de » bourre, et s'ils n'estoient ainsy ils s'habilloient tout long jusques en terre de robes; tantost en habit long, tan>> tost en habit court, et ny avoit si petit compagnon de » mestier qui n'eust une longue robe de drap jusques aux » talons (1). » Le Duc Philippe de Bourgogne, qui se distinguait par son bon gout et par son luxe, jetait quelquefois sur son costume trente à quarante aunes de rubans d'argent qui s'y rattachaient d'une manière galante (2).

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Nous avons dit que les draps dont on se parait à cette époque étaient fort diversifiés; on en faisait de damas sur fleur de pécher; de damas noir et bleu brodé de fils d'or; d'écarlate, d'or et d'argent, de damas gris brodé de gros estocs, de brunette etc. Ce drap fut tellement somptueux qu'un des canons du concile tenu à Montpellier, l'an 1214 en défendit l'usage aux religieux « Districtè precipientes, » ut regulares aliqui clarâ vel nigrâ brunettâ, vel panno » alio sumptuoso sendato (3) quoque aut serico non utan

(1) Coll. de Mém., tom. IX, p. 498.

(2) Hist. gén. et part. de Bourgogne par un Relig. Bénéd. Dijon, 4 vol. in-fol., 1748, tom. IV, p. 28.

(3) Sendato nempè ex sendal seu cendalo, J. E. telâ subsericâ. DUCANGE

Gloss, in voce sendal.

Population.

Progrès de la fiscalité.

» tur. » Le Roman de la Rose l'atteste aussi par ces deux
vers qui étaient passés en proverbe :

Aussi bien sont amourettes

Sous Bureaux (bure (1)) que sous brunettes.

Barthélemy de Glanvil donne, en passant, une idée de notre population dans ces mots : multiplex in sobole et in substantia, qui justifient ce qu'avance J. J. Rousseau que partout où un homme et une femme peuvent vivre commodément, il se fait un mariage. Cependant la science fiscale travaillait déjà le corps politique outre les autres redevances féodales, on payait des droits sur les objets de consommation journalière, les comestibles et les boissons; sur le transport des marchandises à l'intérieur, sur les routes, les ponts et les rivières; on avait imaginé les gabelles, les droits à l'entrée et à la sortie des villes; les droits sur les foires et les marchés; les droits imposés par les communes; les octrois, les traites et les impositions foraines etc. (2); mais on était encore loin de l'habileté des modernes. Le fisc a fini par tout envahir : les rouages de l'administration se sont multipliés; le trésor public est devenu le tonneau des Danaïdes, et le plus sublime effort du génie de nos Terray et de nos Calonne a été quel

(1).

Et qui n'étant vêtu que de simple bureau,

Passe l'été sans linge et l'hiver sans manteau.

(2) Le comte de Pastoret, préface du XVIme vol. des Ordonn. des Rois de France de la 3me race. Loyens, Synopsis rerum gestarum à Loth. Brab. et Lymb. Ducibus. Brux., 1672, p. 102 passimq. et alii, etc.

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quefois de déplacer le mal, jamais de l'extirper. Les paroles suivantes d'un de nos plus grands politiques sont applicables à tous les états : «< certaines nations, dit Bynkers» hoeck (1), avaient imaginé pour peupler leurs villes, » de mettre une capitation sur les personnes qui vivaient » dans le célibat; mais en Hollande et en Zélande, il faut » payer pour se marier, et l'on exige une amende de ceux » qui meurent. »

Meyer remarque en 1439 l'état florissant de la Flandre qu'il compare avec la misère de la France. « Opibus, di>> vitiis, omneque genus mercatura florebat tùm Flandria : » Gallia autem ità erat desolata, ut non modò seminari » non possent agri, sed sentibus dumisque crescentibus » silvarum speciem induerent, lupis aliisque feris, vel ex » domibus sicubi erant, homines rapientibus. » Le Duc Philippe, qui avait été obligé d'accepter le gouvernement de Paris, le quitta cette année, et fut suivi en Flandre par une foule de bourgeois et de marchands de Paris, qui venaient se mettre sous sa protection et lui demander une patrie (2).

On jugera combien la Flandre l'emportait sur les autres provinces, par l'extrait suivant d'un registre autrefois conservé à Ypres, d'où il résulte que Maximilien d'Autriche, dès qu'il fut parvenu au gouvernement des Pays-Bas par son mariage, pour montrer aux états la diminution des

(1) Quæst. Juris Pub., lib. II, c. 22, p. 348.

(2) Mey. ann., p. 273 verso, édit. 1561..

finances, leur prouva que son beau-père Charles avait

reçu en 1475,

Du Duché et de la comté

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27,400 Livres tournois.

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12,754

1180

13,885

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14,300

2,685

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17,683

12,199

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Une autre preuve de la richesse de la Flandre, c'est le prix élevé de tous les objets de première nécessité. Meyer, qui faisait cette observation vers l'an 1531, attribue la cherté aux luxe des habitans et au grand nombre des marchands étrangers qui, affluant de toutes parts, étaient accueillis avec joie par ces mêmes Belges qui les avaient proscrits jadis (2).

Guill. Le Breton, auteur d'un poëme en l'honneur de Phi

(1) Jacob. Marchant. Flandria, p. 15.

L'auteur des Recherches sur le Commerce (*) cite aussi ce compte, mais avec deux légères différences:

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(*) Recherches sur le Commerce, ou idées relatives aux intérêts des différens peuples de l'Europe, 2 vol. in-8, Amsterd. 1778-79.

(2) Cæsaris Comm. de bello Belg. Meyer. Rer. Fland., fol. 46. verso.

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