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place ne soient animés du même esprit dont les Lillois viennent de leur donner un si bel exemple. Les tigres se retireront chargés de honte, de malédictions et du mépris de toutes les nations policées. On nous a assurés qu'on a trouvé dans leurs retranchemens, sous le canon du rempart de Lille, plus de deux cents morts; que le même nombre a été trouvé dans les différentes maisons que l'on a eu l'imprudence de laisser subsister, et qui leur servaient de retraite.

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› Du 10. Toute l'intrépidité, toutes les vertus qu'inspire, chez les peuples les plus libres, le sublime amour de la patrie, on en a trouvé parmi les habitans de Lille de touchans et mémorables exemples. Le quartier exposé au bombardement de l'ennemi, et que les monstres avaient choisi, comme le plus peuplé, est celui qui avait témoigné le plus de civisme : sur les ruines encore brûlantes, au sifflement des boulets rouges, un seul sentiment s'est manifesté, un seul cri s'est fait entendre: Vive la liberté! vive la République! Toutes les classes de citoyens, tous les âges ont des traits d'héroïsme à citer. Un enfant de quatorze ans vit tomber une bombe, il arracha la mèche. Un citoyen peu fortuné avait vu réduire en cendre sa maison et tout ce qu'il

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possédait, des concitoyens généreux lui offrent des secours.

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J'ai encore de quoi subsister pendant quatre jours, dit-il, après ce temps je vous en demanderai. Une bombe éclate..., c'est à qui

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il s'écrie aussitôt Voilà mon plat à barbe, qui veut se faire raser? A l'instant il rase, à la même place où était tombée la bombe, et dans cet éclat, quatorze personnes.

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› Notre garnison, pendant cette semaine calamiteuse, s'est augmentée journellement. Elle a partagé avec le citoyen ce civisme pur, cette résolution inaltérable de vivre pour la liberté et l'égalité, ou de mourir en les défendant. Les bivouacs, les patrouilles, le service de l'artillerie de remparts, les secours qu'elle portait, en bravant les dangers, partout où le feu se manifestait, tout enfin lui a mérité, tant aux officiers de tous les grades qu'aux soldats, une reconnaissance sans bornes. Les compagnies

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de Besançon et de volontaires canonniers ont également fait un service assidu et très-pénible. On apprend tous les jours quel

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que nouveau trait d'horreur de la part des Autrichiens et des émigrés assiégeans. Ces monstres ont, dit-on, tourmenté des derniers supplices des Belges qu'ils avaient pris. Une femme, l'atroce Christine, présente au siége, reprochait aux canonniers la lenteur de leur feu. A sa voix, les tubes de bronze furent remplis de cordages goudronnés, de poids de tournebroches, d'instrumens tranchans, pour vomir dans cette malheureuse ville le carnage avec plus d'abondance. Ces ennemis féroces n'ont remporté de cette horrible expédition que la certitude d'avoir avancé la chute de la maison d'Autriche.]

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OPÉRATIONS DE L'ARMÉE DU RHIN AUX ORDRES DU GÉNÉRAL

CUSTINE.

Pour comprendre ces opérations, il faut jeter un coup d'œil en arrière et nous reporter aux premiers jours de septembre.

Sur les rives du Rhin, à cette époque, les armées françaises et étrangères étaient en observation vis-à-vis les unes des autres; les premières, campées sur les limites des deux départemens du Haut et du Bas-Rhin ; les secondes, leur faisant face. Le général Biron, commandant en chef, avait massé le corps sous ses ordres à Strasbourg et à Plosheim, dans le Bas-Rhin; les divisions destinées à couvrir le Haut-Rhin étaient campées près d'Huningue, sous les ordres du général Ferrière; enfin les lignes dites de Weissembourg, qui s'étendaient de cette ville à Lenterbourg sur la rive droite de la Lauter, étaient occupées par le corps du général Custine. De son côté, l'ennemi avait deux corps campes sur la rive droite, observant Huningue, Plosheim et Strasbourg. Ces corps étaient sous les ordres du prince d'Esterhazi; et un autre corps autrichien, sous les ordres du comte d'Erbach, campé Lingenfeld, était destiné à contenir le général Custine.

Le 11 septembre, le comte d'Erbach quitta Lingenfeld avec ses

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Autrichiens, et prit, par la gorge de Newstad, le chemin de Thionville. Ce départ découvrait Spire, Worms, Mayence et même Coblentz, et tout le Rhin inférieur; le général Custine pouvait à son choix se porter sur les premières de ces places. Aussi écrivit-il le 16 au général Biron, pour lui demander l'autorisation de marcher sur Spire, où les Autrichiens avaient laissé un magasin considérable sous la garde de douze cents hommes. de leurs troupes, et d'environ deux mille de celles de l'électeur de Mayence. En même temps il proposait au ministre de la guerre de partir avec les douze mille hommes campes à Weissembourg, pour se porter sur la Moselle et y agir contre les armées allemandes qui attaquaient Thionville et notre frontière de la Meuse. Le ministre répondit par deux dépêches du 21 et du 22; il approuvait les deux propositions; il donnait cependant la préférence à la seconde, subordonnant d'ailleurs le tout à la décision du général Biron; en même temps il écrivait à ce dernier et lui faisait observer que dans la seconde hypothèse, en joignant au corps de Weissembourg trois ou quatre mille hommes tirés des places ou des cantonnemens de l'Alsace, autant de Sarre-Louis et de Métz, avec quelques renforts venus du Midi, on formerait une armée assez nombreuse avec, laquelle un général intelligent pouvait, soit en se portant sur le flanc ou sur les derrières des Prussiens, soit en coupant leurs communications, leur causer les plus grands embarras. D'ailleurs, outre cet avantage, on pouvait toujours se rapprocher du Rhin, s'il était nécessaire, et même pénétrer dans le pays ennemi.

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Nous insistons sur ces détails, que nous emprunton au travail de Servan, parce qu'ils nous expliquent comment le projet d'une invasion en Allemagne était connu à Paris dès le 20, et par conséquent put l'être par Dillon à l'époque des conférences qui eurent lieu entre les généraux de l'armée prussienne et de l'armée française de l'Argonne.

Cependant le général Biron donna l'ordre à Custine de marcher sur la Moselle; mais les chemins détrempés par les pluies étaient impraticables, il fallait leur donner le temps de se raffer

mir. Custine obtint que ce temps fût employé à l'expédition sur Spire; Servan dit qu'à tout prix d'ailleurs ce général voulait se faire un commandement particulier et éviter d'être subordonné aux ordres de Dumourier et de Kellermann.

Quoi qu'il en soit, le 29, Custine était en pleine marche. Il avait déjà passé la Queich et s'approchait de Spire, ayant son armée divisée en trois corps ; l'un commandé par le général Neuwinger, l'autre par le général Meunier, le troisième par lui-même. Le 50, les trois colonnes parurent à la vue de la ville. Le colonel Winckelmann, qui la commandait, instruit de l'approche des Français, mais en ignorant le nombre, était venu masquer les portes en se mettant en bataille, sa droite appuyée à un escarpement au-dessus de la porte qui conduit à Worms, sa gauche prolongée vers des jardins entourés de fortes haies, le front couvert en partie par des marais.

Le général Neuwinger, qui arriva le premier sur les Autrichiens, mit promptement son artillerie en batterie et ses troupes en bataille, faisant face à la ville, la droite en arrière du village de Berggausen, et commença son feu. Les Allemands l'essuyèrent d'abord avec beaucoup de fermeté et y répondirent très-vivement; mais ne pouvant se soutenir long-temps contre la supériorité du nombre, ne pouvant tirer aucun appui de leur position, et apercevant quatre bataillons qui se mettaient en mouvement pour les tourher, ils rentrèrent dans Spire et en fermèrent les portes. Celles-ci urent bientôt enfoncées, soit à coups de canon, soit à coups de ache, et les Français pénétrèrent dans la ville. Là, le combat ecommença l'arrière-garde allemande s'était retranchée dans s rues et dans quelques maisons; ce fut en les couvrant d'obus 'on la força à les évacuer. Elle se retira enfin et alla rejoindre corps principal que Winckelmann avait dirigé sur les bords du in dans l'espérance de le passer sur des barques et de mettre fleuve entre lui et les Français. Mais il se trouva que les baters, effrayés, s'étaient enfuis, en sorte que cet officier fut obligé capituler et de se rendre prisonnier de guerre avec environ is mille hommes qui lui restaient. Notre perte dans cette af

faire fut évaluée à une cinquantaine d'hommes ; celle de l'ennemi fut exagérée jusqu'au nombre de huit cents hommes. On prit cinq drapeaux, mais point de canons, car l'ennemi avait jeté son artillerie dans le Rhin. Mais le gain le plus réel fut la prise d'un magasin considérable évalué de 5 à 6 millions. Une contribution de 500,000 francs fut frappée sur le clergé et les soldats.

Le très-mince combat de Spire, dit Servan, produisit la plus étrange sensation dans le public. En effet, c'était le premier mouvement offensif; jusqu'à ce moment, les plus grands succès militaires étaient des succès de défensive, plus utiles et plus difficiles sans doute, mais moins brillans; la politique prescrivait d'ailleurs d'exalter la victoire de Custine, et l'on n'y manqua pas.

Pendant que l'on pressait Spire, le général Biron recevait du pouvoir exécutif l'ordre définitif de faire marcher Custine sur la Moselle, et de le renforcer de treize bataillons et de cinq escadrons qui venaient d'arriver en Alsace. Mais il était engagé, et les succès de l'Argonne rendirent sa coopération inutile; l'ordre ne fut pas réitéré, et cẻ général fut laïssé en quelque sorte à lui

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Un professeur de Worms, mais né à Gottinghen, nommé Bot mer, vint le trouver à Spire. Il l'instruisit de l'opinion du pe ple des campagnes et des villes, qui était toute favorable a Français; ; il lui montra la facilité d'une invasion que la popu tion favoriserait; 'il lui rappela que les magistrals de Wors avaient donné leur ville pour quartier général au prince de Coé et accueilli les émigrés. Guidé par ces renseignemens, ou pae désir de nouveaux succès, Custine envoya, le 4 octobre, le geral Neuwinger å Worms avec quatre mille cinq cents homrs. Les magistrats vinrent au-devant des Français pour leur préter les clefs de la place, et la ville fut occupée. 'On frappa asitôt une contribution de 300,000 francs sur les magistrats, de 1,180,000 liv. sur l'évêque, le chapitre et les abbayes. Les dze apôtres en argent qui étaient à Worms servirent à faire unertie de cette somme. Le 7 octobre, Neuwinger évacua la ville se replia sur Mutterstat,

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