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DE LA

RÉVOLUTION

FRANÇAISE.

OCTOBRE 1792 (suite).

CLUB DES JACOBINS.

La passion qui animait les débats de la Convention se réfléchissait dans ceux de cette société. Il serait cependant inutile de les suivre avec exactitude, car ils ne nous présenteraient qu'une amplification des discours par lesquels les Jacobins combattaient la Gironde à la tribune de l'assemblée nationale. Il suffira d'y recueillir les quelques détails qui peuvent servir à peindre la position des partis.

Lorsqu'on lit la dernière quinzaine d'octobre du journal des débats des Jacobins, il est une remarque qui frappe au premier coup d'œil: c'est que les membres de cette société représentent un parti, constitué moins par l'unité de doctrine que par une solidarité qui résulte d'une certaine communauté que leur ont faite, soit des

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actes accomplis, soit des attaques qui les menacent tous et les confondent dans une même réprobation. Les Jacobins sont les provocateurs du 10 août; les agens principaux de cette insurrection sont sortis de leur sein; ils ont gouverné la Commune de Paris et la gouvernent encore. Or, tous ces gouvernans, sortis de l'insurrection, sont poursuivis, attaqués par les gouvernans sortis de l'ancienne assemblée législative. Il s'agit de savoir si les meneurs révolutionnaires de cette législative chasseront de la place et subalterniseront les meneurs de l'insurrection qui renversa la constitution de 91, qui renversa la royauté et força l'assemblée elle-même à se démettre.

Les anciens membres de la législative, que l'on appelle tantôt Brissotins, tantôt Girondins, ont en ce moment la supériorité de position : ils possèdent le ministère, ils ont la majorité dans la Convention, ils rédigent presque tous les journaux quotidiens, ils ont avec eux tous ceux qui ont rempli un emploi public sous le régime précédent, ils ont l'appui de tous les hommes modérés, et enfin l'effroi que causent leurs adversaires. Ce sont ces derniers, il est vrai, qui ont sauvé l'indépendance nationale; mais ce fait n'était guère apercevable, lorsque toutes les forces, toute l'énergie qu'ils avaient données étaient encore maniées par des mains girondines. Les Jacobins sont donc réduits à se défendre. Ils se croient menacés jusque dans leurs personnes, soit que leurs ennemis réussissent à faire exclure de la Convention les principaux membres de la députation de Paris, soit qu'ils obtiennent l'autorisation de mesures plus sévères encore. Placés sous cette préoccupation, ils devaient penser que le premier pas des Girondins dans cette voie était d'écarter Marat et de dissoudre la Commune de Paris, leur seul appui, leur unique recours; aussi défendaient-ils Marat et la Commune avec acharnement et sans nulle concession. A cet égard leurs séances manifestent une défiance extrême. La pétition du département que nous avons vu lire dans la Convention, à l'occasion de la banqueroute de la caisse de secours, parait à Robespierre le jeune un moyen d'intrigue, un moyen d'exciter une

émeute pour donner à l'assemblée un prétexte de sortir de Paris, D'autres membres supplient le peuple de se garder de tout mouvement, de souffrir sans remuer. (Journal du club,n. CCLXXXVI.) - D'autres membres apportent des preuves du projet existant de transférer l'assemblée. Malheureusement pour l'histoire, leurs discours ne sont pas mentionnés par le journal. - D'autres font remarquer qu'à la Convention on crie lorsqu'on donne à Paris le nom de capitale.

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On remarque avec peine que plusieurs des anciennes sociétés affiliées ont rompu leur correspondance avec la société-mère entre autres celle de Marseille. On remarque encore que la majorité de l'assemblée nationale entend sans murmurer des pétitionnaires qui viennent lui demander la radiation de Marat, un de ses membres. (Journal du club, n. CCLXXXVII.)- Un fédéré, Mazuel, vient dénoncer ce fait, que des émissaires vont au-devant des troupes de toute arme qui viennent à Paris, qu'ils leur disent que la Convention n'est pas en sûreté dans la ci-devant capitale, etc. Marat accourt annoncer qu'on fait à Tours des dispositions pour y transporter la Convention. (Journal du club, n. CCLXXXVIII.) « L'erreur vient, dit Dufourny, de ce que les membres de la Convention se considèrent encore comme des députés de département: il n'y a que des députés de la nation. Merlin. Je suis, et je le dirai toujours, de la députation de la Moselle; je serais fâché d'être confondu avec d'autres députations. - Dufourny. Je suis fâché de cet égoïsme. (Journal du club, n. CCLXXXIX. )

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SÉANCE DU 24 OCTOBRE.

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Robespierre jeune. On veut, à quelque prix que ce soit, se défaire des patriotes; le premier qu'on se propose de sacrifier c'est l'intrépide Marat; et il y a deux sortes de moyens pour cela les moyens légaux et les moyens d'assassinat. On a employé le premier, c'est le renvoi au comité de législation; mais la Convention peut-elle, sans porter atteinte à la souveraineté nationale, décréter ses membres d'accusation? Et, en supposant

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l'affirmative, le décret d'accusation ne pourrait être exécuté avant d'avoir été jugé par la nation entière. Les moyens d'assassinat existent aussi : la déclaration des officiers du bataillon de Marseille porte que Marat a accusé la cavalerie d'être composée en grande partie d'escrocs, de ci-devant gardes-du-corps et de cochers de l'aristocratie; et, ce qu'il y a de plus horrible, ce qui a été applaudi à la Convention, c'est que ces mêmes officiers déclarent qu'ils ont envoyé le présent procès-verbal à la cavalerie. Je demande à quoi bon ce renvoi, si ce n'est pour faire assassiner Marat? D'après cela, citoyens, que devons-nous faire? que devons-nous espérer ? - Marat s'est justifié de la manière la plus magnanime; il n'a rien laissé à désirer; des murmures affreux l'empêchaient de parler. Il existe une faction, s'est-il écrié, et cetle faction existe contre moi seul; car personne n'ose prendre ma défense. Vous voyez qu'il prouve d'un seul mot qu'il n'y a pas de parti maratiste. Comment, a-t-il ajouté, comment pouvezvous me tenir ainsi sous le couteau! Tout m'abandonne, excepté la raison et la justice. Citoyens, nous avons trop long-temps imité la conduite de Fabius; il est temps de combattre de front les factieux; il est temps de déployer une grande énergie, si l'on veut sauver le patriotisme. (Vifs applaudissemens.)

› N... Voici un axiome sur Marat : tant que Marat ne se défera pas de l'habitude de crier au voleur, il aura toujours contre lui tous ceux qui ne veulent pas qu'on les observe de trop près.

» Bentabolle réclame contre les membres du bureau de la Convention et se plaint de ce qu'ils n'accordent la parole qu'à ceux qui ont embrassé le parti de l'intrigue. Il fait observer qu'on met en avant pour la présidence le citoyen Camus, qu'il dit avoir signé l'adresse des 20,000; enfin, il parle d'une brochure distribuée aujourd'hui, et dans laquelle on tâche de démontrer que projet de faire une salle aux Tuileries est impraticable et coûterait plusieurs millions: Bentabolle voit dans cette brochure l'ouvrage d'une faction qui veut faire rester la Convention dans un local où elle ne peut être environnée que d'un très-petit nombre de ci

toyens.

le

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