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de suivre sa doctrine. Ce fait, au reste, n'est pas trop

avéré.

Cléarque, tyran d'Héraclée, et disciple de Platon et d'Isocrate, fonda une bibliothèque dans sa capitale; ce qui lui attira l'estime de tous ses sujets, en diminuant l'horreur que leur inspiraient toutes les cruautés qu'il exerça sur eux. Camérarius parle de la bibliothèque d'Apamée comme de l'une des plus célèbres de l'antiquité. Ange Roca, dans son catalogue de la bibliothèque du Vatican, dit qu'elle contenait vingt mille volumes.

SV.- Bibliothèques romaines.

Si les anciens Grecs n'avaient que peu de livres, les anciens Romains en avaient encore bien moins. Par la suite ils eurent, aussi bien que les Juifs, deux sortes de bibliothèques, les unes publiques, les autres particulières. Dans les premières étaient les édits et les lois touchant la police et le gouvernement de l'État ; les autres étaient celles que chaque particulier formait dans sa maison, comme celle que Paul-Émile apporta de Macédoine après la défaite de Persée.

Il y avait aussi des bibliothèques sacrées qui regardaient leur religion, et qui dépendaient entièrement des pontifes et des augures, pour les livres dont elles étaient composées.

Voilà à peu près ce que les auteurs nous apprennent

Savant littérateur, mort en 1574.

touchant les bibliothèques publiques des Romains. A l'égard des bibliothèques particulières, il est certain qu'aucune autre nation n'a eu plus d'avantages ni plus d'occasions pour en avoir de très-considérables, puisque les Romains étaient les maîtres de la plus grande partie du monde alors connu.

L'histoire nous apprend qu'à la prise de Carthage, le sénat fit présent à la famille de Régulus de tous les livres qu'on avait trouvés dans cette ville, et qu'il fit traduire en latin 28 volumes, composés sur l'agriculture par Magon le Carthaginois.

Plutarque assure que Paul-Émile distribua à ses enfans la bibliothèque de Persée, roi de Macédoine, qu'il mena en triomphe à Rome; mais Isidore dit positivement qu'il la donna au public. Asinius Pollion fit plus, car il fonda, exprès pour l'usage du public, une bibliothèque qu'il composa des dépouilles de tous les ennemis qu'il avait vaincus, et de grand nombre de livres de toutes espèces qu'il acheta il l'orna de portraits de savans, et entre autres, de celui de Varron.

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Varron avait aussi une magnifique bibliothèque ; celle de Cicéron ne devait pas l'être moins, si on fait attention à son érudition, à son goût et à son rang : elle fut considérablement augmentée par celle de son ami Atticus: il la préférait, disait-il, à tous les trésors du monarque Lydien.

Plutarque parle de la bibliothèque de Lucullus comme de l'une des plus considérables du monde, tant

par rapport au nombre des volumes, que par rapport aux superbes ornemens dont elle était décorée.

La bibliothèque de César était digne de lui, et rien ne pouvait contribuer davantage à lui donner de la réputation, que d'en avoir confié le soin au savant Varron.

Auguste fonda une belle bibliothèque proche le temple d'Apollon, surle mont Palatin. Horace, Juvenal et. Perse en parlent comme d'un endroit où les poètes avaient coutume de réciter et de déposer leurs ouvrages.

Vespasien fonda une bibliothèque proche le temple de la Paix, à l'imitation de César et d'Auguste.

Mais la plus magnifique de toutes ces anciennes bibliothèques, était celle de Trajan, qu'il appela de son propre nom la bibliothèque Ulpienne. Elle fut fondée pour l'usage du public, et, selon le cardinal Volaterani, l'empereur y avait fait écrire toutes les belles actions des princes et les décrets du sénat, sur des pièces de belle toile qu'il fit couvrir d'ivoire. Quelques auteurs assurent que Trajan fit porter à Rome tous les livres qui se trouvaient dans les villes conquises pour augmenter sa bibliothèque : il est probable que Pline le jeune, son favori, l'engagea à l'enrichir de la sorte.

Outre celles dont nous venons de parler, il y avait encore à Rome une bibliothèque considérable, fondée par Simonicus, précepteur de l'empereur Gordien; Isidore et Boèce en font un éloge pompeux;

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ils disent qu'elle contenait 80,000 volumes choisis, et que l'appartement qui la renfermait était pavé de marbre doré, les murs lambrissés de glaces et d'ivoire, etc., les armoires et pupitres de bois d'ébène et de cèdre.

Telles sont à peu près toutes les bibliothèques de l'ancien empire romain, qui méritent d'être citées.

§ VI. Bibliothèques du Bas-Empire.

Les premiers chrétiens, occupés uniquement de leur salut, brûlèrent tous les livres qui n'avaient point de rapport à la religion. (Actes des apôtres.)

Ils eurent d'ailleurs trop de difficultés à combattre pour avoir le temps d'écrire et de former des bibliothèques. Ils conservaient seulement dans leurs églises les livres de l'ancien et du nouveau Testament, auxquels on joignit par la suite les actes des martyrs. Lorsque la cruauté de leurs ennemis, leur donnant un peu plus de repos, leur permit de s'adonner aux sciences, ce fut alors seulement qu'il se forma quelques bibliothèques. Les auteurs parlent avec éloge de celles de saint Jérôme et de George, évêque d'Alexandrie.

On en voyait une célèbre à Césarée, fondée par Jules l'Africain, et augmentée dans la suite par Eusèbe, évêque de cette ville, au nombre de 20,000 volumes. Quelques-uns en attribuent l'honneur à saint Pamphile, prêtre de Laodicée, et ami intime d'Eusèbe; c'est ce que cet historien semble dire luimême. Cette bibliothèque fut d'un grand secours à

saint Jérôme, pour l'aider à corriger les livres de l'ancien Testament; c'est là qu'il trouva l'Évangile de saint Mathieu en hébreu. Quelques auteurs prétendent que cette bibliothèque fut dispersée, et qu'elle fut ensuite rétablie par saint Grégoire de Nazianze et Eusèbe.

Saint Augustin parle d'une bibliothèque d'Hippone. Celle d'Antioche était aussi très-célèbre, mais l'empereur Jovien, pour plaire à sa femme, la fit malheureusement détruire. Sans entrer dans un plus grand détail sur les bibliothèques des premiers chrétiens, il suffira de dire que chaque église avait sa bibliothèque pour l'usage de ceux qui s'appliquaient aux études. Eusèbe nous l'atteste, et il ajoute que presque toutes ces bibliothèques, avec les oratoires où elles étaient conservées, furent brûlées et détruites par Dioclétien.

Passons maintenant à des bibliothèques plus considérables que celles dont nous venons de parler, c'està-dire, à celles qui furent fondées après que le christianisme fut affermi sans contradiction. Celle de Constantin-le-Grand, fondée, selon Zonare, l'an 336, mérite attention. Ce prince, voulant réparer la perte que le tyran, son prédécesseur, avait causée aux chrétiens, porta tous ses soins à faire chercher des copies des livres qu'on avait voulu détruire; il les fit transcrire et y en ajouta d'autres dont il forma à grands frais une nombreuse bibliothèque. A Constantinople, l'empereur Julien voulut détruire cette bibliothèque, et empêcher les chrétiens d'avoir des livres, afin de les plonger dans l'ignorance; il fonda cependant lui

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