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gate, écrits en lettres d'or sur vélin, bien conservés, et qu'on attribue au temps de Charlemagne. Le fameux Richard a parlé de ce manuscrit dans l'histoire qu'il a faite des Versions du Nouveau-Testament (page 112, colonne 2).

En 1261, Milon de Vergy, prieur de Saint-Martindes-Champs, augmenta de vingt sous parisis le revenu du bibliothécaire de cette communauté; on exigeait de ces conservateurs le serment de ne vendre, ni engager, ni prêter aucun volume; enfin tels étaient les soins qu'on apportait à leur conservation, qu'on allait jusqu'à les enchaîner.

SIV. BIBLIOTHÈQUE DES RÉCOLLETS,

FAUBOURG SAINT-MARTIN.

Il y avait y peu de bibliothèques en France, comparables à celle-ci par la richesse et l'admirable variété des points de vue que l'on en découvrait. Elle avait cent pieds de longueur sur vingt-huit de largeur; elle était composée de plus de 30,000 volumes, tous livres des plus curieux.

Plusieurs manuscrits chinois et autres avaient été donnés à cette bibliothèque par Zaga-Christ, prince d'Éthiopie, fils du prêtre Jéhan.

C'est aux soins des PP. Jean Dumasiène, Lebret et Fortuné Lautier qu'on était redevable de l'accroissement de cette bibliothèque.

§ V. — BIBLIOTHÈQUE DES MINIMES,

PLACE ROYALE.

Elle se composait d'environ 24,000 volumes tous excellens; on y voyait un précieux manuscrit intitulé Herbarium vivum, lequel contient une description de toutes les plantes que le P. Charles Plumier, religieux Minime (qui avait un goût déterminé pour la botanique), avait vues en différentes parties du monde, surtout en Amérique. Rien de plus exact que les descriptions qu'en donnait ce savant religieux; les figures étaient toutes de sa main, très-bien dessinées. On ne pouvait assez admirer les soins et les peines immenses qu'avait dû coûter à son auteur un manuscrit qui formerait environ 15 volumes in-fo.

§ VI.-BIBLIOTHÈQUE DE L'ABBAYE ST.-VICTOR.

Elle était ouverte au public dès l'année 1652, et c'est la première qui l'ait été à Paris.

Elle devait son principal lustre à la protection éclatante que lui accorda François Ier; et, selon Claude Héméré, Pierre-C., évêque de Paris, en partant pour la Terre-Sainte en 1208, légua par son testament, sa bibliothèque à cette abbaye. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle était déjà très-considérable sur la fin du quinzième siècle, et que l'on fit construire

un corps de bâtimens particuliers pour y placer les livres qui la composaient ce fut sous Nicaise de Lorme, trente-troisième abbé.

Par les différens legs qui lui furent faits, et par le choix des livres dont elle était composée, elle était devenue une des plus belles et des plus riches bibliothèques de Paris. M. Boucher de Bournonville fut un de ses premiers dotateurs. M. Cousin, président de la Cour des monnaies, mort en1707, légua ensuite sa bibliothèque à cette maison, et y joignit 20,000 livres pour faire un fonds dont le revenu devait être employé à l'augmen‐ tation de cette bibliothèque, sous la condition qu'elle serait publique. M. Du Tralage lui légua aussi le plus beau recueil de cartes et de mémoires géographiques qui fût peut-être au monde. Le goût que ce savant homme (dit Piganiol) avait pour cette sorte d'érudition, l'étude solide qu'il en avait faite, et les grands secours que ses recherches et ses dépenses extraordinaires lui avaient fournis,rendaient ce recueil digne de Louis-le-Grand. Elle reçut encore une augmentation considérable de l'abbé Lamasse et de Nicolas Delorme.

Au nombre des manuscrits que renfermait cette bibliothèque, se trouvait un recueil de tout ce qui a été machiné pour et contre Jeanne-d'Arc, lorsqu'on lui fit son procès c'était l'abbé qui présidait alors la communauté de Saint-Victor qui avait fait ce recueil. On y voyait aussi une Bible donnée à cette abbaye par reine Blanche de Castille, et un manuscrit tracé sur des tablettes de bois enduites de cire. Ces tablettes.

la

étaient composées de quatorze gros feuillets, y compris la couverture, dont la partie intérieure fait le commencement et la fin: elles étaient plus longues et plus larges que celles que l'on voit ailleurs ; leur conservation était parfaite, sans presque pas de lacunes elles contenaient les dépenses faites par Philippe-le-Bel, pendant une partie de ses voyages, dépuis le 18 avril 1301 jusqu'au 31 mars 1303.

On a sur les bibiliothèques ecclésiastiques et monastiques, qui existaient au 13° siècle, des indications qui font connaître qu'il y en avait un nombre assez grand et dont la composition n'était pas sans mérite. Vincent de Beauvais visitant la bibliothèque de SaintMartin de Tournay, en fut dans l'admiration. A Saint Maars el biau librairie, dit Gautier de Coinsy, en parlant de Saint-Médard de Soissons, où il était moine, et où il traduisait en vers français un livre des Miracles de Notre-Dame.

On a transcrit un très-grand nombre de livres dans le cours du 13° siècle; mais il s'en faut que ces copies manuscrites soient d'une belle exécution. Née bien avant 1200 du mélange des lettres onciales, capitales, minuscules et cursives, l'écriture gothique est devenue dominante et générale sous les règnes de Philippe-Auguste, de Louis VIII, et surtout de Louis IX. Ce nom gothique qu'elle porte n'indique aucunement son origine. Cette écriture n'est qu'un produit du mauvais goût qui régnait dans tous les arts. Ce qui la caractérise, c'est l'altération des formes simples et une com

plication bizarre de contours superflus. Elle admet, toutes les variations que peut suggérer le caprice de l'écrivain; aussi, n'y a-t-il point de siècle dont les manuscrits présentent aussi peu d'uniformité. Nous rencontrons presque d'année en année de nouvelles écritures. A cette époque les copistes étaient plus nombreux que jamais; on en comptait en France environ quarante mille, dont la plupart habitaient les monastères. On voyait même des abbés se livrer à ce travail; Odon, abbé de Condom, copia Les fleurs des saints et un Commentaire sur la règle de saint Benott. Toutefois ce n'était guère que des bibles et des livres d'église qu'on transcrivait. Parmi les copistes de cet âge, on doit citer maître Coheu qui, peu après l'an 1200, transcrivit le texte hébreu de l'Ancien Testament; mais surtout Jean de Boulogne, de la main duquel il reste plusieurs manuscrits qui semblent être du temps de Philippe-le-Hardi ou Philippe-le-Bel; tels sont les romans de Carle et d'Almont, et d'Isorer-le-Salvage.

On sait que Rabelais a donné le catalogue de ces prétendus livres, dont les titres, réels ou supposés, sont également ridicules '.

Joseph Scaliger disait que cette bibliothèque ne contenait rien qui vaille, et que ce n'était pas sans cause que Rabelais s'en était moqué; mais ce qui pouvait, à l'égard de cette bibliothèque, être vrai au seizième siècle, ne le fut plus au siècle suivant.

'Pantagruel, liv. II, chap. vi.

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