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Les hommes rassemblés en société ont commencé à communiquer leurs pensées par le secours de la parole, don céleste qu'eux seuls reçoivent du créateur. L'histoire de leurs sociétés et de leurs familles passait alors à la postérité par le moyen des traditions orales; mais cette ressource fut bientôt remplacée par des signes représentatifs des idées. L'écriture fixa d'abord sur des matières appropriées et durables les faits remarquables dont les nations avaient à se glorifier, et les lois auxquelles chaque individu devait se soumettre.

Malgré l'active exécution des moines, qui, à l'exception du temps consacré à leurs devoirs religieux, faisaient leur seule occupation de reproduire les manuscrits, et malgré le grand nombre de copistes qui faisaient leur unique métier de les multiplier, l'écriture était un moyen insuffisant de satisfaire et la curiosité des hommes et le besoin d'instruction que quelques-uns d'entre eux ressentaient vivement.

Heureusement que le désir d'affranchir de l'oubli et de communiquer à tous des pensées utiles ou intéressantes, 'occupait l'esprit des hommes chez qui une vague inquiétude laissait apercevoir des moyens plus prompts, plus parfaits. De leurs efforts naquit l'imprimerie, art prodigieux qui fit faire à la civilisation des progrès immenses, et dont la puissance lui suscita un nombre d'ennemis égal à celui de ses appréciateurs.

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La rareté des premiers écrits donna l'idée de les réunir dans des lieux de dépôt où les savans pussent venir les consulter et y puiser les matériaux nécessaires à la composition de nouveaux ouvrages. Ces collections devinrent progressivement des bibliothèques où se rassemblèrent ensuite les premiers essais de la typographie, et successivement ses productions les plus remarquables, au fur et à mesure que la marche du temps. apportait à son exécution les perfectionnemens dont nous sommes témoins aujourd'hui.

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Loin de nous l'intention d'avoir voulu écrire l'histoire complète des bibliothèques, travail immense pour lequel la vie d'un homme serait insuffisante; le titre et l'étendue de potre ouvrage prouvent suffisamment que nous n'avons voulu donner que de simples NOTICES, c'est-à-dire une espèce de catalogue raisonné des principales collections de livres qui ont existé chez les nations anciennes, et que les modernes possè dent maintenant. Notre livre ne peut plaire qu'aux hommes entièrement adonnés aux lettres, pour qui tout est intérêt dans l'histoire littéraire, et qui liront avec plaisir, au moins nous l'espérons, les résultats de nos recherches sur ces archives séculaires où sont rangées les productions des génies de tous les temps, à côté des recueils des folies humaines qui prenaient naissance aux mêmes époques.

Avant de terminer, et toutefois sans entrer dans aucun détail sur la forme des livres anciens, dont les uns étaient carrés, les autres oblongs; ceux-ci en rouleaux ou volumes, et ceux-là de la forme que la nature avait donnée aux feuilles ou aux peaux d'animaux qui les composaient, nous dirons seulement qu'on les divise en :

Livres de papier, écrits sur papier de toile ou de coton, ou sur le papyrus des Egyptiens;

Livres en parchemin qui sont écrits sur des peaux d'animaux, et principalement de mouton ;

Livres en toile tendue sur des blocs ou sur des tables, tels que les livres des Sibylles.

Livres en cuir; livres en bois ou tablettes; livres en ivoire. Nous avons cru cette courte explication nécessaire pour bien rappeler à nos lecteurs, que lorsque nous leur parlerons des volumes qui composaient telle ou telle bibliothèque ancienne, ils doivent le plus souvent, par volume, comprendre les matières diverses que nous venons d'indiquer.

SUR

LES BIBLIOTHÈQUES

ANCIENNES ET MODERNES.

CHAPITRE PREMIER.

Coup-d'œil rapide sur les Bibliothèques anciennes, depuis Moïse jusqu'à Charlemagne.

§ Ier. LIVRES SACRÉS. — Bibliothèques des anciens Juifs.

Les auteurs ecclésiastiques ont donné particulièrement le nom de Bibliothèque au recueil des livres inspirés, que nous appelons encore aujourd'hui la Bible, c'est-à-dire le livre par excellence. En effet, selon le sentiment des critiques les plus judicieux, il n'y avait point de livres avant le temps de Moïse, et les Hébreux ne purent avoir de bibliothèque qu'après sa mort: ses écrits furent alors recueillis et conservés par les Juifs, avec tout le soin et toute la vénération que devaient leur inspirer les ouvrages de leur législateur et du prophète de Dieu. Par la suite on y ajouta plusieurs autres ouvrages.

On peut donc distinguer les livres des Hébreux en livres sacrés et livres profanes : le seul objet des premiers était la religion; les derniers traitaient de la philosophie naturelle et des connaissances civiles ou politiques.

Les livres sacrés étaient conservés ou dans des endroits publics, ou dans des lieux particuliers; par endroits publics, il faut entendre toutes les synagogues, et principalement le temple de Jérusalem où l'on gardait avec un respect infini les tables de pierre sur lesquelles Dieu avait écrit ses dix commandemens, et qu'il ordonna à Moïse de déposer dans l'arche d'alliance.

Outre les tables de la loi, les livres de Moïse et ceux des prophètes furent conservés dans la partie la plus secrète du sanctuaire, où il n'était permis à personne de les lire ni d'y toucher; le grand prêtre seul avait droit d'entrer dans ce lieu sacré, et cela seulement une fois par an. Aussi ces livres sacrés restèrent-ils à l'abri de la corruption et des commentaires; et aussi furent-ils dans la suite la pierre de touche de tous les autres, comme Moïse l'avait prédit au 32o chapitre du Deutéronome, où il ordonne aux lévites de placer ces livres au-dedans de l'arche.

Quelques auteurs croient que Moïse étant près de mourir, ordonna qu'on fìt douze copies de la loi, qu'il distribua aux douze tribus; mais Maimonide assure qu'il en fit faire treize copies, c'est-à-dire douze pour les douze tribus, et une pour les lévites, et qu'il leur dit à tous, en le leur donnant : Recevez le livre de

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