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qui avoient été introduits dans le pays de Cornouailles, d'où ils s'étendirent dans d'autres districts; mais ces mystères étoient regardés comme illégaux et dépravés; car le commerce de Trystan avec sa maîtresse Essyllt étoit à la fois adultère et incestueux. Comme je l'ai donné à entendre plus haut, il semble faire allusion à l'incorporation de la religion primitive des Bretons avec les rites de la truie (98) phénicienne.

"Par le caractère de Trystan nous devons comprendre, comme le comporte son nom, un héraut de mystères, et par là un représentant du système mystique qui prévalut à une certaine période ou dans un certain état de la hiérarchie bretonne. (99)

"Nous avons à nous occuper maintenant d'Essyllt dont le nom Spectacle, ou sujet de constante contemplation, implique évidemment quelque exhibition mystique; et comme elle étoit l'épouse

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du cheval, elle est ainsi décrite ayant une crinière blanche. C'est pourquoi elle étoit une jument; mais l'aspirant, Taliesin, vit la Cérès bretonne sous la forme d'une jument orgueilleuse et lascive. M. Bryant reconnoît aussi Hippa, la jument, comme l'une des plus anciennes déesses du monde payen, et nous apprend particulièrement que la Cérès Arkite étoit distinguée par ce titre, et que même ses prêtresses étoient appelées Hippai, juments (Analysis, vol. 11, p. 27, etc.)." (100)

"Peut-il y avoir quelque chose de plus extravagant que tout cela?" dit M. Southey. "Mais M. Davies n'est pas le seul savant qui ait suivi une hypothèse, comme un feu follet, partout où elle le menoit." (101)

Essayons maintenant de déterminer ce qu'il peut y avoir d'historique dans le Roman de Tristan. Nous lisons les notices suivantes dans la Cambrian Biography:

"TRYSTAN, (102) fils de Tallwch,

célèbre capitaine qui vivoit au milieu du vie siècle. Il étoit, avec Greidiol et Gwgon, l'un des trois hérauts de la Bretagne. Trystan, avec Gwair et Cai, étoit appelé l'un des trois princes couronnés. On le comptoit aussi parmi les trois puissants porchers: les deux autres étoient Coll et Pryderi. Il étoit l'un des trois qui portoient l'épithète de chefs obstinés, que personne ne pouvoit détourner de leurs projets. Il étoit aussi désigné comme l'un des trois fidèles amants, par rapport à son attachement pour Esyllt, femme de March Meirchion, son oncle. ...Ce héros est familier aux lecteurs de romans, sous l'appelation de Sir Tristram." (103)

Si l'on en croit Jones, il étoit aussi barde gallois et disciple de Merddin. De plus, il étoit l'un des trois com-peers de la cour d'Arthur, et vivoit en 520.(104) Il reste un dialogue en vers gallois, entre lui et Gwalzmai, neveu

d'Arthur. L'éditeur de the Myvyrian Archaiology of Wales (vol. 1, p. 178179), W. Scott et M. Von der Hagen l'ont publié, le premier avec une traduction angloise par M. Owen. Voyez Sir Tristrem, appendix no 11.

"ESSYLLT VYNGWEN, fille de Culvynawyd Prydain, (105) femme de March Meirchion et maîtresse de Trystan ab Tallwch. Elle étoit l'une des trois épouses incontinentes de la Bretagne : ses sœurs, Penarwen et Bun, étoient les deux autres." (106)

"MARCH(107) ab Meirchion, capitaine qu'on suppose avoir vécu vers la fin du Ve siècle. Il étoit l'un des trois propriétaires de flottes de l'île de Bretagne. Les deux autres étoient Gwenwynwyn et Geraint." (108)

Dans la vie de saint Paul de Léon, saint qui naquit vers la fin du ve siècle, nous lisons le passage suivant: Rex quidam MARCUs nomine, in vicino (scil. Cornubia vel Cambria) florebat eodem

tempore, cujus imperii dominatus leges dabat quatuor gentibus, linguarum famine dissidentibus." (109) St. Paul convertit ce roi, soit qu'il fût payen, soit qu'il fût hérétique.

Nous parlerons actuellement des pièces qui composent notre collection.

Le fragment que contient le premier volume avoit déjà été publié par M.Von der Hagen, mais d'après une si mauvaise copie et avec si peu de soin, que le poëme, d'ailleurs fort difficile à comprendre par lui-même, est totalement inintelligible dans l'édition de Breslau. Comme le savant allemand a négligé d'indiquer le manuscrit dont il l'a tiré, nous réparerons cette omission en le décrivant.

Ce volume, qui est in-4°, et relié aux armes de l'empire, est conservé à la Bibliothèque Royale, à Paris, où il porte le n° 759 du fonds de Baluze et le n° 7989.5.dans le catalogue des manuscrits du Roi. Il est sur parchemin, à deux

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