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gestive de l'un de ces Apodes. Il paraît même que ceux-ci s'entre-devorent dans certaines occasions (Pl. 32, fig. 4).

IATROBDELLES. Iatrobdella. Corps déprimé à anneaux tresdistincts; cinq paires de faux yeux; bouche offrant trois dents, armées de denticules nombreux; anus extrêmement petit.

Ces animaux que l'on appelle plus particulièrement Sangsues, et qui ont pour type l'espèce médicinale, habitent les marais. Le froid les engourdit et pendant l'hiver ils se cachent dans la vase ou sous les pierres pour s'y abriter. On dit que ces Vers éprouvent une agitation manifeste à l'approche des orages, de manière que l'on pourrait s'en servir pour indiquer les variations atmosphériques; cela est tel que l'on assure que dans certaines régions de la France, et entre autres à Bourbonne-les-Bains, les habitants n'ont pas d'autre baromètre qu'une carafe d'eau contenant quelques Sangsues. Mais cette action n'est peut-être pas confirmée par des observations scrupuleuses. Les sens des Sangsues paraissent être presque tous extrêmement obtus. Il est probable que les odeurs ne produisent nul effet sur elles, car M. Derheims en plongeant ces animaux dans des vases qui contenaient du musc, de l'ail ou de l'assa-fœtida, n'a pas reconnu qu'ils en éprouvassent quelque sensation. On a considéré comme des yeux cinq paires de points noirs qui se trouvent sur la tête de ces Vers et qui rappellent les stemmates des Araignées; mais ils sont tellement rudimentaires que l'on n'a pu encore pénétrer leur organisation, aussi la vision doit-elle être on ne peut plus imparfaite chez les Sangsues; cependant s'il est vrai qu'elles ne discernent pas assez les corps pour les éviter ou les choisir, on s'aperçoit cependant qu'elles savent se diriger vers la lumière. Le sens du goût, que l'on a cru être assez développé chez elles, ne l'est peut-être pas autant qu'on l'a pensé, puisque M. Derheims dit leur avoir fait indifféremment sucer des liquides amers ou sucrés. Ces animaux n'ont pas d'appareil auditif connu, et probablement ils n'entendent point. Les contractions que l'on voit se manifester lorsqu'on fait un grand bruit près de leurs bocaux, sont dues simplement à l'ébranlement qu'ils éprouvent, car ces Hirudinées ont le sens du tact extrêmement delicat.

L'extrémité antérieure des Sangsues offre une cavité conformée en ventouse, au fond de laquelle existe un repli labial, formé de trois lobes peu distincts, puis trois tubercules dentifères, dont un est supérieur et deux sont latéraux et inférieurs ; ces tubercules supportent chacun une dent cornée, très-mince, et dont le bord qui est à peu près circulaire présente une rangée de petites dentelures extrêmement fines, qui semblent réunies à leur base par une membrane (Pl. 32, fig. 1, a). Ce sont ces dentelures qui, en agissant comme une scie en miniature, incisent la peau des animaux dont les Sangsues sucent le sang, et y font une blessure régulièrement triangulaire.

Le tube digestif de ces Hirudinées ressemble à peu près à celui des

autres Entomozoaires apodes. Ses parois sont fort minces, et elles adhèrent, par leur face externe, à la gaîne musculaire. L'œsophage est très-court; au delà commence l'estomac, qui s'étend presque jusqu'au sixième postérieur de la longueur totale du corps. Cet organe présente un aspect fort remarquable lorsque les Sangsues sont gorgées de sang; on trouve alors qu'il est divisé par des étranglements en un nombre assez considérable de poches latérales, ordinairement de forme sigmoïde, et que certains naturalistes considèrent comme des estomacs. Ces poches, dont le nombre est de douze paires, selon Cuvier, mais dont la quantité varie, sont considérées par de Blainville comme étant produites par les brides transverses musculaires et celluleuses qui passent de la peau du dos au canal intestinal, ou même à l'enveloppe ventrale. L'intestin proprement dit est fort court.

Les Sangsues vivent d'aliments fluides, et en peu de temps elles se gorgent d'une quantité considérable de sang, qui distend tout leur corps; mais ces Entomozoaires ne digèrent celui-ci que fort lentement, et l'on a même observé qu'il fallait plus d'une année pour que tout le liquide avalé en un seul repas eût totalement disparu. Carus dit que le plus souvent ces Vers rendent leurs excréments par la bouche, anomalie qu'il explique par l'étroitesse de l'intestin à sa terminaison, et d'une autre part par l'ampleur de l'œsophage.

Suivant de Blainville, ces Entomozoaires n'ont point d'appareil spécial pour la respiration, et cette fonction s'opère à la surface de la peau, qui lui est d'autant mieux adaptée qu'elle possède un système vasculaire considérable. Mais, selon Tiedmann et Carus, les Sangsues respirent par de petites cellules ou vésicules aériennes qui se trouvent sur les parties latérales de leur corps et communiquent à l'extérieur par une ouverture. Ce dernier anatomiste dit que l'on découvre dix-sept de ces vésicules de chaque côté du corps de la Sangsue médicinale.

L'appareil reproducteur de ces Vers est fort compliqué, d'abord parce que les deux sexes existent sur chaque individu et ensuite parce que les appareils qui les représentent sont eux-mêmes très-complexes. Le sexe male offre pour organe sécréteur une série de petites masses blanches, globuleuses, placées les unes à la suite des autres de chaque côté du corps et sous la peau. De Blainville en a compté six; mais Spix et E. Home en portent le nombre à neuf. Chacun de ces organes fournit un canal excréteur allaut se rendre dans un vaisseau commun qui parcourt longitudinalement le corps. Ce canal, parvenu à la région génitale, se plonge de chaque côté dans une masse blanche qui semble formée par l'entortillement du vaisseau. De cette masse sort un petit conduit qui va se rendre, ainsi que celui du côté opposé, à la base de l'organe excitateur qui est fort long et claviforme. Le sexe femelle se compose de deux ovaires subglobuleux, de chacun desquels nait un canal étroit qui s'unit avec celui qui provient de l'organe analogue, et ils ne forment bientôt ensemble qu'un petit tube qui va se rendre dans un utérus fort apparent et à parois contractiles. Les organes des

deux sexes s'ouvrent à la partie inférieure du corps et vers la réunion de son tiers postérieur avec les deux tiers antérieurs.

M. Thomas et quelques autres personnes avaient supposé que ces animaux, qui réunissent les deux sexes, se fecondaient eux-mêmes, mais cela n'a nullement lieu, et une observation de de Blainville est venue le démontrer, car ce savant a eu l'occasion de trouver deux individus accouplés. Le produit de la conception des Sangsues, ainsi que Bergmann l'observa d'abord, et que MM. Lenoble et Rayer sont venus ensuite l'attester, est une masse ovalaire, en forme de cocon de Ver à soie, composée d'une substance gélatineuse et représentant une sorte de capsule qui contient dans son intérieur un certain nombre d'œufs. Quelques-uns de ces Vers pondent un cocon enduit d'une matière gluante qui leur sert pour l'attacher aux feuilles; mais d'autres espèces, et telle est la Sangsue médicinale, placent leur cocon dans des trous qu'elles creusent dans la terre des rives des mares, et elles l'entourent d'une couche spongieuse qui semble formée par l'anastomose de nombreux filaments irrégulièrement disposés. La capsule, d'après M. Rayer, offre à chacune des extrémités de son grand diamètre un petit tubercule d'un tissu plus ferme et plus coloré, et c'est à la place de l'un de ces deux appendices et rarement aux deux bouts en mème temps, que se forme un trou par lequel sortent les jeunes Sangsues.

Au moment où les cocons viennent d'être émis par la mère, on ne peut apercevoir les œufs qui sont dans chacun d'eux au nombre de dix à quinze, et il paraît que le tissu spongieux n'existe pas encore, ce qui permet de croire que la formation en est due à une sorte de retrait de la matière muqueuse abondante qui se trouvait épanchée à la surface de la capsule. Mais au bout d'un temps déterminé on distingue les œufs, puis ensuite les jeunes Sangsues; celles-ci se colorent avant leur sortie du cocon, et après qu'elle a eu lieu on les voit rester un certain temps sous l'abri de son tissu spongieux, et enfin elles vont à l'aventure chercher des aliments. On ignore la durée de la vie des Sangsues.

Les Sangsues diminuent en Europe d'une manière manifeste depuis les nouvelles doctrines médicales. Presque tous les états de cette partie du monde en possèdent cependant assez pour leur consommation, à l'exception de l'Angleterre et de la France. Chez nous on en emploie tellement que nos marais n'en offrent presque plus, et nous sommes obligés d'en faire venir un nombre considérable de l'étranger, et particulièrement de l'Espagne et de la Hongrie. La statistique publiée par M. Chabrol, préfet de la Seine, porte à trois cent mille le nombre de Sangsues qui, en 1826, ont été employées dans les hôpitaux de Paris. La récolte de ces Vers demande peu de soins : des hommes, des femmes ou des enfants les recueillent parmi les marais, et ensuite on les met dans des pots pour les transporter au loin; quelques entrepreneurs les font même venir en poste dans des voitures disposées exprès, afin d'en perdre le moins possible pendant la durée du voyage.

La Iatrobdelle ou Sangsue officinale, à laquelle se rapporte tout

ce que nous avons dit, est noirâtre et offre des maculatures vertes sur le dos ainsi que deux lignes de couleur orangée. Cet animal qui se rencontrait communément autrefois dans nos marais y est rare aujourd'hui. Hippocrate ignorait son usage médical; actuellement on en emploie comme nous l'avons dit un nombre considérable (Pl. 34, fig. 1).

BDELLES. Bdella. Corps déprimé, à anneaux très-distincts. Quatre paires de faux yeux; trois tubercules buccaux sans denticules.

La Bdelle ou Sangsue du Nil, qui a été découverte en Égypte par Savigny, est le type de ce groupe; les Arabes la nomment Alak, elle est de la grosseur de la Sangsue noire, mais son corps offre une couleur d'un rouge-brun (Pl. 51, fig. 5).

GLOSSOBDELLES. Glossobdella. Corps peu alongé, déprimé. Orifice buccal donnant issue à une trompe rétractile, armée d'une sorte de tarière cornée. Ventonse postérieure très-petite.

Ces Vers n'abandonnent jamais l'eau et restent presque constamment fixés sur les plantes aquatiques dont on pense qu'ils absorbent les sucs pour se nourrir. La Glossobdelle ou Sangsue aplatie, qui se trouve dans toutes les eaux douces de l'Europe, est une des principales espèces; elle offre une assez belle coloration consistant en quatre bandes noires avec des taches blanches, et se fait surtout remarquer par la transparence de son derme, qui est telle qu'on voit parfois à travers, la forme que présente le tube digestif (Pl. 31, fig. 6).

MALACOBDELLES. Malacobdella. Corps mou, et n'offrant point

d'articulations distinctes.

Ce genre a été formé par de Blainville pour la Malacobdelle grosse, que l'on considérait autrefois comme une espèce de Sangsue. Ce Ver est transparent comme les Planaires, et se découvre principalement sur le manteau des Mollusques bivalves marins; Muller l'a rencontré dans des Vénus, et de Blainville sur des Myes. Il offre environ un pouce de longueur.

FAMILLE DES POLYCOTYLAIRES.

Animaux très-élargis en arrière; plusieurs ventouses ou suçoirs bordant la région postérieure du corps.

HEXACOTYLES. Hexacotyla. Corps ovale, déprimé, à trois paires de ventouses armées de deux crochets.

Ces Apodes ont l'anus placé sur le dos vers la jonction du cou et du tronc. L'Hexacotyle du thon vit en parasite sur les branchies de ce

Poisson.

TYPE III.

MOLLUSQUES OU MALACOZOAIRES.

XVII, CLASSE DES CEPHALIENS.

Animaux pairs, sans trace d'articulations ni de membres, et recouverts par une peau molle et contractile. Tête bien distincte du reste du corps et pourvue de tous les organes des sens spéciaux.

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Géologie et Géographie. Les Mollusques qui composent cette classe se rencontrent à l'état fossile et à l'état vivant; ce sont eux qui renferment à la fois les géants de ce type et ses espèces microscopiques 2. Mais, comme nous le dirons plus loin, ces dernières ne resteront peut-être pas parmi les Céphaliens quand on les aura mieux étudiées, car elles n'en offrent pas réellement les caractères.

On découvre des débris des Malacozoaires de cette classe dans tous les terrains où il existe des vestiges d'êtres organisés, et parfois ils y sont si abondamment entassés qu'à eux seuls on les voit constituer des couches extrêmement puissantes, et dans quelques localités ils forment en entier des montagnes 3; beaucoup de Céphaliens ne sont même connus qu'à l'état fossile. Les espèces vivantes paraissent moins abondantes que celles qui peuplaient les mers primitives, et elles résident particulièrement dans celles qui baignent les régions tempérées et équatoriales.

Anatomie et Physiologie. Locomotion. Les Mollusques de cette classe ont ordinairement la tête couronnée de huit 4 ou dix bras tentaculaires 5 plus ou moins alongés et de forme conique ou claviforme; ces organes présentent le plus souvent sur toute leur longueur une ou plusieurs rangées de ventouses, à l'aide desquelles les Céphaliens saisissent les corps avec une grande force; mais parfois aussi ils en sont dépourvus 6. Outre ces bras beaucoup de ces animaux offrent

• Poulpes.

• Milioles.

3 Nummulites.
4 Poulpes.

ZOOLOGIE ÉLÉMENTAIRE, TOME II.

5 Sèches.
6 Nautiles.

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