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exceptait Maffei, ne lui paraissait digne d'entrer en comparaison avec le dernier des tragiques français. Ce mépris pour son pays, de la part d'un jeune homme échappé à peine à la férule de son maître, et la prétention cachée d'avoir fait beaucoup mieux que les autres, lui attirèrent un grand nombre d'ennemis, qui jugèrent ses ouvrages sévèrement. En effet, l'on est obligé de convenir que parmi six volumes de tragédies qu'il a laissées, il serait difficile d'en désigner une seule dont l'Italie pût vraiment s'enorgueillir. Aspirant à la gloire d'inventeur d'un nouveau système dramatique, le comte Pepoli, en publiant son Ladislao, fixa les règles de ce qu'il appelait genre fisedico. En examinant les principes de cette nouvelle poétique, on voit que l'auteur mérite d'être rangé parmi les coryphées du romantisme; car il y encourage à la violation de toutes les règles, pour se jeter dans tous les travers. Il porta le même esprit d'indépendance dans une traduction qu'il avait entreprise du Paradis perdu de Milton, dont le premier livre parut en 1795: le traducteur n'alla pas plus loin que le second livre, qui, de même que le précédent, fut imprimé à la typographie Pepoliana, fondée à ses frais à Venise, et à laquelle on doit quelques belles éditions. Mais plusieurs ouvrages de Pepoli sortirent des presses de Bodoni, entre autres un recueil poétique intitulé: Pianti d'Elicona, infol. , pour honorer la mémoire de Thérèse Vernier. Les spectacles, les exercices gymnasti

ques et la poésie, furent les occupations de toute la vie de Pepoli. Son hôtel à Venise se transformait presqu'en salle de spectacles, toutes les fois que d'anciennes habitudes condamnaient au silence les théâtres de la ville. C'est alors que le comte Pepoli avait la satisfaction de voir ses pièces applaudies, et de s'entendre proclamer le premier poète tragique de l'Italie. Il mourut à Florence en 1796, âgé à peine de 39 ans.

PERCEVAL (SPENCER), homme d'état anglais, naquit à Londres le 1 novembre 1762; son père, Jean, comte d'Egmont, baron Lovel et Holland, était placé à la tête de l'amirauté sous le ministère de lord Bute, son ami. Il espérait profiter de sa place, et de la protection d'amis puissans, pour faire parvenir ses enfans, dont Spencer Perceval était le second, aux premiers postes de l'état. Sa mort inopinée ne lui permit pas d'atteindre ce but, où Perceval arriva par ses talens et son dévouement aux intérêts de la couronne. Les ministres n'eurent pas un plus zélé défenseur, et, ministre lui-même, il tint par sa conduite tout ce qu'il avait promis à ses protecteurs. Il ne fut point un homme d'état du premier mérite; mais il eut des qualités remarquables, et par ses vertus privées il fit oublier ses principes politiques. Formé à l'école de Pitt, c'est surtout comme ministre des finances qu'il a consacré son nom dans les fastes britanniques. Perceval, devenu orphelin dès l'âge de 8 ans, fit ses études à l'université de Cambridge, et suivit ensuite lá

carrière du barreau. Il fut un des plus grands admirateurs de Pitt, dont il fixa l'attention par une brochure qu'il publia lors du procès de Hastings (voyez ce nom), et dans laquelle il prouva qu'une accusation n'est pas interrompue par la dissolution du parlement qui l'a admise. La double influence du ministre et de la famille de Perceval, le portèrent au parlement, où il représenta le bourg de Northampton. Il ne crut pas de voir suivre l'exemple de la plupart des nouveaux élus qui, pour se faire remarquer, se rangent parmi les membres de l'opposition. Loin d'attaquer les actes du ministère, il les approuva avec chaleur, et donna un gage solennel de ses vues politiques dans l'affaire de l'insurrection de la flotte mouillée au Nore, le 2 juin 1797. Pitt proposa un bill contre tout complot tendant à exciter la sédition. Le jeune admirateur du ministre imagina un moyen ingénieux d'abréger les délais. Il ouvrit et soutint l'avis d'accorder au gouvernement un pouvoir discrétionnaire pour emprisonner ou déporter les coupables. L'année suivante, il appuya fortement le bill sur les taxes assises. Il combattit dans toutes les occasions les membres de l'opposition, et plus particulièrement le célèbre Fox. S'il ne le fit pas toujours avec succès, il le fit avec adresse et talent, et sut se rendre un auxiliaire nécessaire des ministres. Il parut s'attacher_aux matières des finances, dans lesquelles il montra des connaissances étendues. Elles lui ouvrirent les portes de la faveur. Conseil de

la couronne, en 1801, il soutint les procédures contre les clubs, et on ne doit pas reprocher à son zèle si la plus grande partie des accusés furent déclarés non-coupables par le jury. En récompense, il devint en peu de temps solliciteur-général et procureur-général. Sous Pitt, il s'était déclaré pour l'union de l'Irlande; sous Addington, il soutint avec force le bill sur les réformes dans la marine, et eut, à cette occasion, une altercation des plus vives avec lord Temple, que l'opposition comptait depuis quelque temps dans ses rangs. L'un des partisans outrés de la guerre avec la France, il déclara, en 1803,

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qu'il ne pouvait y avoir qu'une opinion sur la nécessité d'arrêter les progrès alarmans d'un ennemi si dangereux. » Il s'opposa, en 1805, comme il l'avait fait précédemment, à ce qu'on accueillît avec faveur la pétition que les catholiques d'Irlande présentérent au parlement, et il fit avec succès repousser la motion de Fox à leur égard. Pitt mourut en 1806; l'administration changea, Perceval cessa d'être procureur-général. L'opposition alors lui parut légitime, et il prit place parmi ses membres. La mort de Fox, arrivée en 1807, fit de nouveau changer le ministère. Perceval changea aussi et obtint une place dans le cabinet; il devint en même temps chancelier de l'échiquier, puis, et presque aussitôt, chancelier du duché de Lancastre, emploi très-lucratif. De plus en plus prononcé contre l'émancipation des catholiques d'Irlande, il fit une adresse à ses commettans de

Northampton, qui produisit un grand effet sur l'esprit des protestans de toute l'Angleterre, d'où bientôt ne s'éleva qu'un cri «Point de papisme!» Sans être premier ministre, puisqu'on ne considère comme tel que celui qui réunit à l'office de chancelier de l'échiquier, la place de premier lord de la trésorerie, et que Perceval n'eut alors que la première de ces deux dignités, il n'en était pas moins regardé comme le chef du ministère, et c'est pendant son administration qu'eut lieu l'incendie de Copenhague et l'enlèvement de la flotte danoise. Il s'efforça de justifier cette mesure aussi atroce qu'illégale, et crut devoir supposer une collusion entre le roi de Danemark et l'empereur Napoléon. Le 26 juin 1807, il prononça un discours où il montra beaucoup d'habileté et d'éloquence pour faire rejeter la proposition que faisaient les membres de l'opposition d'une adresse au roi afin d'obtenir le changement des ministres. En 1808, il présenta à la chambre un nouveau plan de finances où il offrait aux propriétaires des trois pour cent, âgés au moins de 35 ans, la faculté de les échanger contre des annuités viagères. Dans la discussion sur la traite des Noirs, il se prononça avec force contre ce honteux et inhumain trafic. Au mois d'octobre 1809, après la mort du duc de Portland, il lui succéda dans la place de premier lord de la trésorerie. Cette nomination surprit généralement & parce qu'il ne paraissait pas avoir une assez grande existence politique.» Ses amis le soutinrent habile

T.XVI.

ment dans cette circonstance, où ses concurrens commençaient à murmurer. Ils insinuèrent qu'il n'occupait ce poste que jusqu'à l'arrivée du marquis Wellesley, ambassadeur en Espagne. Le marquis revint; mais alors l'autorité de la régence, que la maladie mentale du roi avait fait établir, était entourée de beaucoup de restrictions. Perceval sut faire entendre au marquis Wellesley que ses nombreux partisans le verraient avec peine prendre la direction des affaires publiques tant que ces restrictions existeraient. Le marquis Wellesley n'aperçut pas le piége que lui tendait son heureux rival, et il se contenta de la place de secrétaire d'état des affaires étrangères. Perceval avait gagné la confiance du prince-régent (aujourd'hui GEORGES IV, voyez ce nom), et lorsque le prince eut entièrement saisi les rênes de l'état, Perceval fut confirmé dans ses fonctions. Le marquis Wellesley vit alors qu'il était le jouet de l'ambition du premier ministre, et en témoigna au prince tout son mécontentement. En se démettant de l'emploi de secrétaire-d'état des affaires étrangères, il dit à S. A. R. qu'il pouvait occuper une place avec M. Perceval, mais jamais sous lui. « Ce fut, au rapport de ses biographes. pendant qu'il était à la tête du cabinet, qu'eut lieu, en juillet 1809, l'affaire de Walkeren, entreprise mal concertée, et qui ent une issue peu honorable pour les armes britanniques; elle fit beaucoup de tort au ministre anglaisdans l'esprit des différentes puissances de l'Europe, et fut vivement blâ

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mée, même en Angleterre, quoique par des motifs bien différens. >> Perceval avait pris pour règle, dans la direction des affaires publiques, le système que Pitt avait suivi pendant toute la durée de son administration; mais il ne parvint point à la célébrité de son illustre prédécesseur, et peut-être ne doit-il qu'à la catastrophe qui termina sa vie l'éclat momentané qui s'est répandu sur son nom. Le 11 mai 1812, au moment où Perceval allait entrer au parlement, un ancien courtier de commerce de Liverpool, nommé Bellingham, lui tira un coup de pistolet qui, en l'atteignant au cœur, lui laissa à peine le temps de s'écrier: «Je suis assassiné!» Ce déplorable événement porta l'effroi dans les deux chambres; un puissant intérêt se répandit sur la victime, et il n'y eut qu'une voix parmi les membres de la représentation nationale pour supplier, dans une adresse au prince-régent, S. A. R., d'accorder une pension de 5,000 livres sterlings à la veuve et aux douze enfans de Perceval. On attribua à des motifs politiques la catastrophe qui avait terminé la vie du ministre ; mais bientôt l'on sut par les interrogatoires de l'assassin qu'une cause purement personnelle l'avait porté à lui arracher la vie, et que sa haine ne venait que de n'avoir pu obtenir satisfaction des réclamations qu'il lui avait adressées. Il déclara en outre qu'il n'avait aucun complice. Le peuple fut loin de partager les regrets des membres des deux chambres, et il est difficile d'exprimer la joie qu'il témoigna à la nouvelle de sa

mort. Nous terminerons cette notice en rapportant l'opinion des biographes dont nous avons déjà parlé, et qui nous paraît dictée par une exacte justice. « Perceval jouissait d'une grande réputation comme ministre des finances 9 quoiqu'il fût loin de pouvoir rivaliser avec Pitt, et qu'on ait eu à lui reprocher quelques-unes des mesures qu'il a fait adopter. Il se montra, ainsi qu'on a vu, partisan de la guerre contre la France, et adversaire prononcé de l'émancipation des catholiques d'Irlande. On a attribué dans le temps la première de ces deux opinions, au désir qu'il avait de plaire à lord Arden, son second frère, qui était greffier de l'amirauté, place dont les produits, nuls en temps de paix, étaient immenses en temps de guerre; et la seconde à ce que lord Egmont, son frère aîné, était propriétaire de 120,000 acres de terre, confisqués sur les catholiques. » L'année même de la mort de Perceval, on publia en Angleterre un Essai biographique sur M. Perceval: cet ouvrage, qui fut presque aussitôt traduit en français, a été imprimé format in-8°, Paris, 1812.

PEYRONNET (COMTE DE), aujourd'hui garde-des-sceaux. Son nom, récemment connu, ne se trouve dans aucune biographie. M. Peyronnet était avocat à Bordeaux, lorsque la restauration lui fournit les moyens de se mettre en évidence. Il se montra zélé pour la cause des Bourbons, et s'attira ainsi l'attention des royalistes. Comme son talent d'avocat n'était pas de premier ordre, il se lança dans la carrière de la magis

trature, et parvint, sous le ministère de M. Decazes, à la place de président du tribunal de première instance de Bordeaux. Il passa de ces fonctions à celles de procureur-général près de la cour royale de Bourges, où il commença à se faire remarquer. Ce fut lui qui, dans la conspiration dite du mois d'août, en 1820, porta la parole à la chambre des pairs comme procureur-général. Son début dans la capitale, comme orateur, ne fut pas très-heureux; il s'est relevé à la chambre des députés, où il a improvisé plusieurs fois avec la facilité d'un homme qui a l'habitude de la parole et de la discussion. La plus remarquable de ses productions ministérielles, est la fameuse circulaire relative aux élections de 1824, dans laquelle M. de Peyronnet enjoignait à ses agens de lui dénoncer les officiers de judicature qui se permettraient de voter pour d'autres candidats que ceux du ministère. Comme nous nous faisons une loi de l'impartialité, nous devons ajouter que pendant sa présidence du tribunal civil de Bordeaux et ses fonctions de procureur-général, il a montré beaucoup de zèle et d'activité pour terminer les procès et maintenir la justice.

POUGET (LE BARON FRANÇOISRENÉ-CAILLOUX DE ), maréchal-decamp, commandeur de la légiond'honneur, chevalier de SaintLouis, est né dans la ci-devant province de Lorraine, le 28 juillet 1767. Il entra au service en qualité de capitaine à la 1 levée des volontaires de la Meurthe (4 bataillon), le 21 août 1791,

fut nommé adjudant-général chef de bataillon sur le champ de bataille au combat de Tribstadt, le 22 messidor an 2, et réformé par suite du travail du conventionnel Aubry (voy. ce nom), le 15 messidor an 3. Rappelé au service comme chef de bataillon, le 1er nivôse an 7, il devint major au 62° régiment d'infanterie de ligne, le 11 brumaire an 12, et coIonel du 26 régiment d'infanterie légère, le 20 ventôse an 13; il combattit avec distinction, à la tête de ce régiment, à la bataille d'Austerlitz, à la suite de laquelle il fut nommé officier, puis commandant de la légion-d'honneur. Toujours à l'avant-garde, le 26 régiment sous les ordres de M. Pouget, se distingua constamment, et se fit surtout remarquer à la prise de Lubeck; de la ville d'Eylau; du château d'Ebersberg; aux combats de Hoff et de Konisberg, aux batailles d'Eylau, d'Iéna, d'Heilsberg, Landsberg et d'Essling: c'est à cette première bataille que le colonel Pouget fut atteint par un boulet qui lui coupa la moitié du pied gauche, le 21 mai 180g, en défendant le village d'Aspern; il fut nommé général de brigade à la suite de cette journée, le 31 du même mois, et reçut une dotation comme amputé. En décembre suivant, il prit le commandement du département de la Marne; passa un instant au commandement des Vosges, d'où il fut appelé en janvier 1812, pour aller commander une brigade au corps d'armée du duc de Reggio, qui se formait à Munster. Blessé le 18 août à la bataille de Pollosk, dans la Russie Blanche, le géné

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