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hautcours ou le Contrat d'union, le Mari ambitieux, l'Entrée dans le monde, Vauglas, etc. Parmi les autres compositions dramatiques de M. Picard, nous ne citerons ici que les plus remarquables. Le Conteur, ou les Deux Postes; le Cousin de tout le monde; les Conjectures; les Amis de college; les Trois Maris; la Petite Ville; la Grande Ville, ou les Provinciaux à Paris; le Vieux Comédien; M. Musard; les Tracasseries; le Susceptible; M. de Probancour, ou les Capitulations de conscience; les Oisifs; l'Alcade de Molorido; un Lendemain de fortune; la Vieille Tante; la Noce sans mariage; les Filles à marier; les Marionnettes; la Manie de briller; les Ricochets; M. de Coulainville, ou la Double Reputation; les Deux Philibert (avec M. Radet); une Matinée de Henri IV; la Maison en loterie. Le Théâtre de L. B. Picard a paru en 1812, 6 vol. in-8". Outre plusieurs poésies légères qui ont paru dans les recueils périodiques, M. Picard a encore publié trois romans: 1° les Aventures d'Eugène de Senneville et de Guillaume Delorme, 1813, 4 vol. in-8°; 2° Jacques Fauvel, 1823, 4 vol. in - 12; 3° Gabriel Desaudry, ou l'Exalté, 1824, 4 vol. in-12. Un quatrième roman, intitulé le Gilblas de la révolution, est déjà annoncé comme devant paraître sous peu de jours. Si cet ouvrage est digne des autres, il abondera en scènes piquantes, en observations fines, en portraits dessinés avec habileté; il sera - écrit d'un style à la fois spirituel et naturel, et on y trouvera une

grande connaissance du cœur humain.

PICARDET (C. N.), ancien prieur de Neuilly, et membre de l'académie de Dijon, a publié différens ouvrages, parmi lesquels on distingue: 1o les Deux Abdalonymes, histoire phénicienne, 1777; 2° Histoire météorologique, nozologique et économique, pour l'année 1785. Il avait entrepris un ouvrage immense qui, sous le titre de Grande Apologétique, devait contenir la réfutation de toutes les hérésies qui s'élevèrent dans le monde depuis l'établissement du christianisme, mais le dépérissement de sa santé le força de renoncer à ce travail. Il avait aussi fondé un prix de vertu pour une rosière, dont le couronnement eut lieu plusieurs années de suite et ne fut interrompu que par les événemens de la révolution. Il mourut vers 1794. Son frère, mort à peu près dans le même temps, avait été conseiller à la table de marbre du palais de Dijon, et comme lui, membre de l'académie de cette ville. Ce dernier est auteur d'un Journal des observations du baromètre de Lavoisier, inséré dans les Mémoires de l'académie de Dijon, en 1785, et de quelques poésies assez estimées. Ces deux littérateurs eurent pour sœur, Me Guyton-Morveau, connue par plusieurs traductions d'ouvrages allemands et suédois.

PICAULT (ANTOINE-AUGUSTEMICHEL), propriétaire dans le département de Seine-et-Marne, remplit pendant les premières années de la révolution des fonctions municipales et judiciaires, et fut,

en 1795, nommé député au conseil des anciens. Il y fit, au mois de septembre de l'année suivante, un rapport favorable aux prêtres qu'une loi rendue précédemment condamnait à la réclusion. Sorti du conseil le 20 mai 1799, une nouvelle élection l'y fit rentrer aussitôt. Après la révolution du 18 brumaire an 8 il devint membre du tribunat. En 1801, il combattit les dispositions du projet de loi portant établissement des tribunaux spéciaux, et en vota le rejet. Élu secrétaire du tribunat le 20 août 1803, il sortit peu de temps après de ce corps. En 1804, il obtint la place de directeur des droits réunis dans le département de Seine-et-Marne. Il occupait encore cette place, lorsqu'il fut nommé, dans le mois d'août 1815, membre du conseil de préfecture du même départe ment. M. Picault remplit toujours les mêmes fonctions; il est chevalier de la légion-d'honneur.

PICCINNI (NICOLAS), célèbre compositeur italien, naquit en 1728 à Bari, capitale de la province de ce nom, dans le royaumede Naples. Piccinni père, dégoûté de sa profession, avait défendu à son fils de l'embrasser; c'était celle de musicien, qui devait faire, sinon le bonheur, du moins la réputation de cet enfant. Destiné à l'état ecclésiastique, le jeune Piccinni assistait aux cérémonies religieuses, et s'amusait de ce conflit de sons et de voix, qui lui servirent néanmoins de thêmes pour s'exercer, à la dérobée, sur un vieux clavecin, qu'il trouvait chez son père. Un jour, se croyant seul, il s'était livré aux mêmes exercices dans l'anticham

bre de son évêque; ce prélat, qui l'avait entendu de la pièce voisine, vint à lui, en applaudissant, et lui fit répéter toutes ses sonates. Etonné de la précision du jeu de cet enfant, il engagea son père à le mettre au conservatoire de Sant'Onofrio, dirigé alors par le célèbre Leo. Le jeune élève fut confié d'abord à un maître inhabile, qui, embarrassé souvent par les questions qu'il lui adressait, lui faisait expier par de mauvais traitemens les élans précoces de son génie. Choqué de l'ignorance et de la brutalité de son précepteur, Piccinni prit le parti de travailler seul et d'après ses propres inspirations. C'est peut-être à cette résolution qu'il dut l'originalité de son talent. Il composa des psaumes, des oratorios, des airs d'opéras, qui firent naître la jalousie de ses camarades, après en avoir excité l'admiration. Leo, qu'on avait instruit des progrès spontanés et extraordinaires de Piccinni, voulut en juger par lui-même. Un jour il le mande auprès de lui, l'oblige à livrer la partition d'une messe qu'il venait d'achever, la feuillette d'un bout à l'autre, et sans s'expliquer davantage, il traîne le jeune compositeur dans la salle des répétitions. Piccinni le supplie vainement de lui épargner un affront; mais il voit avec frayeur qu'on se dispose à déchiffrer sa musique, et que même on lui ordonne d'en marquer la mesure. N'ayant pu sesoustraire à une humiliation publique, il rassemble toutes ses forces, et d'une main tremblante, il frappe les pre

miers coups; mais entraîné par l'effet des instrumens, il les dirigea bientôt avec l'assurance d'un maî

tre. Leo se jette à son cou, l'accable de caresses, et lui permet de ver nir tous les jours prendre de ses leçons. Il n'en profita pas longtemps: la mort surprit Leo, qui fut remplacé par Durante dans la direction de ce même conservatoire, qui a été la pépiniè re des plus célèbres compositeurs italiens. Le nouveau directeur, qui eut bientôt reconnu le mérite de Piccinni, le prit en affection, et en lui prodiguant ses soins, il disait souvent : Les autres sont mes écoliers, mais celui-ci est mon fils. Après s'être formé à l'école de deux maîtres aussi distingués, Piccinni sortit du conservatoire, sachant tous les principes, et initié dans tous les secrets de son

art. Il composa pour le théâtre dit des Florentins, l'opéra intitulé : le Donne dispettose, qu'une main puissante soutint contre les intrigues des amis de Logroscino, qui jouissait exclusivement alors de la faveur publique ; mais ces contradicteurs mêmes furent obligés de l'applau dir, et son triomphe n'en fut que plus flatteur. Ce premier succès l'encouragea à multiplier ses essais, qui fondèrent bientôt sa réputation. Son génie se déployait avec une étonnante facilité. On admira déjà dans la Zenobia, qu'il composa, en 1756, pour le théâtre de Saint-Charles, les principes qui ont toujours guidé Piccinni dans ses nombreuses compositions. Les instrumens ne sont pour lui qu'un moyen pour renforcer l'effet de la voix, ou pour exprimer ce qu'el le ne peut pas rendre. Ce luxe d'harmonie, ces accompagne

nécessité

mens figurés, sans et sans but, qui ont envahi la scène moderne, et qui établissent une lutte entre le chanteur et l'orchestre, ne lui paraissaient que des contre - sens et des abus. Sa musique avait un accent pur et naturel, dont les altérations étaient marquées par les nuances des sentimens et des idées. Il désapprouvait ces dessins obstinés d'accompagnement que Jomelli avait mis à la mode de son temps, et qui se prolongeaient uniformément dans presque toute l'étendue d'un morceau. Les effets continus d'orchestre, ces inasses indi. gestes d'harmonies, et l'affectation des dissonances, n'étaient à ses yeux que des ressources employées par des talens médiocres pour déguiser leur faiblesse. Le public, sans pénétrer dans le secret de ces théories, était séduit par cette élégance de style qui répandait dans la musique de Piccinni un charme particulier et inconnu jusqu'alors. Appelé à Rome en 1756, il y composa l'Alessandro nell' Indie, et la Cecchina, qui obtinrent le plus grand succès. Ce dernier opéra surtout y excita une admiration portée jusqu'à l'enthousiasme : cependant cette musique si belle, si originale, si brillante, n'avait coûté à Piccinni que bien peu de travail. En moins de 18 jours sa partition fut faite, les parties copiées, les rôles appris, répétés et joués. I introduisit dans les finals de cette pièce une nouveauté, que les autres compositeurs s'empressèrent de reproduire. Logroscino avait été le premier à remplacer les duos, les trios, les quatuors,

qui terminaient les actes des anciens opéras bouftons, par de plus grands morceaux d'ensemble, divisés par le poète en plusieurs scènes, et par le musicien en différens motifs, qui peignaient les changemens de situation des acteurs. Piccinni eut l'heureuse idée de les annoncer aussi par des changemens de mouvemens et de mesure, donnant, par ce moyen, au final, moins d'uniformité et plus de développement et d'étendue. Un succès bien plus éclatant et tout aussi mérité couronna l'année suivante son Olympiade, qui le mit en présence de trois rivaux redoutables, dont il eut le bonheur de triompher. Les connaisseurs comparaient ensemble les morceaux les plus marquans des partitions de Pergolėse, Galuppi, Jomelli, et Piccinni, sur le même poëme,et ils trouvaient dans ceux de ce dernier plus de vérité dans le chant, et une plus savante économie dans les accompagnemens. Ce fut dans un duo de cette pièce (ne' giorni tuoi felici), regardé comme l'écueil de tous les compositeurs, que Piccinni fit l'essai d'une nouvelle forme musicale, qui consistait à soutenir jusqu'au but, en croissant, le mouvement accéléré une fois imprimé à l'orchestre; au lieu de le faire revenir à la lenteur de l'adagio, qui sert ordinairement d'introduction à un air, et qui, avant Piccinni, lui servait aussi de fin. Cette dernière coupe, moins favorable à l'expression, n'était pas non plus dans la nature des passions, dont l'énergie et la rapidité sont en proportion de leur développement. Il n'y avait plus de réputation

que Piccinni n'effaçât. Toutes les villes, tous les théâtres se le disputaient à l'envi; et ses compositions, en remplissant l'Italie entière, enrichissaient la langue musicale d'une foule d'expressions et de motifs tous ingénieux et nouveaux. Applaudi, recherché, fêté par tout, il revenait avec prédilection à Rome et à Naples, qui avaient été les témoins de ses premiers triomphes. Tout paraissait lui assurer la faveur du public, et le tenir en possession de ses longs suffrages, lorsque Anfossi se présenta pour les lui disputer. Son Inconnue persécutée, donnée en 1773, produisit le plus grand effet sur les spectateurs. Un chant pur, une coupe d'airs régulière, des accompagnemens de bon goût, et surtout deux longs finals, qui offraient des mouvemens bien contrastés et de très-beaux effets d'orchestre, rendaient cette production d'Anfossi, digne des éloges qu'on lui prodiguait. Piccinni n'en fut point jaloux, mais ce qui le blessa profondément, ce fut de voir retirer du théâtre une de ses pièces, jusqu'alors applaudie, pour laisser la salle entièrement à la disposition d'Anfossi. La nouveauté de ce malheur, et l'acte d'injustice qui l'avait accompagné, l'affectèrent tellement, qu'étant parti précipitamment pour Naples, il y tomba malade en arrivant. Sa maladie fut longue et dangereuse. Dès qu'il eut recouvré la santé, il s'adonna de nouveau à la composition, se promettant bien de ne plus rien écrire pour une ville qui s'était montrée si ingrate envers lui. Il se consacra tout entier aux théâtres de Naples, qu'il enrichit

de plusieurs chefs-d'œuvre. Piccinni devenu l'idole de ses compatriotes, jouissait au milieu d'eux de la plus haute distinction. Les premières maisons de Naples se disputaient le plaisir de le posséder, et il n'y avait pas d'étranger de distinction qui, voyageant en Italie, n'eût le désir de le voir et de l'entendre. Ce fut dans ces circonstances qu'on renouvela auprès de lui les propositions qui lui avaient été déjà faites pour l'attirer en France. Laborde avait été chargé par Louis XV de cette première négociation, qui était près de se terminer, lorsque ce prince mourut. Dès que la nouvelle cour put s'occuper de ces objets, le marquis Caracciolo, ambassadeur de Naples à Paris, obtint de la reine la permission de renouer cette affaire. Il écrivit à Piccinni en l'éblouissant par des offres avantagenses, qu'il était autorisé de lui faire au nom du gouvernement. Piccinni se laissa ébranler il quitta l'Italie, que depuis vingt ans il remplissait nom et de ses ouvrages, et il se rendit en France, où on devait l'abreuver de dégoûts et d'amertume. Arrivé à Paris vers la fin de 1776, il dut se contenter d'un logement incommode qu'on lui avait arrêté dans un hôtel garni, et y rester près d'un mois, jusqu'à ce qu'on lui eût arrangé et meublé, à ses frais, un appartement dans la rue Saint-Honoré, vis-à-vis de la maison où demeurait alors Marmontel. Dès qu'il put s'y établir, il recommença, pour ainsi dire, son éducation, car n'ayant jamais appris le français, il dut se

de son

résigner à l'ennui de l'étudier. Ce fut Marmontel qui voulut être son maître; et quoique d'un âge avancé, et habitué à consacrer ses matinées au travail, il se donnait la peine de sortir tous les jours, de monter chez Piccinni, et de passer avec lui deux à trois heures, pour l'initier dans toutes les finesses de notre langue. Le premier fruit-de ce pénible apprentissage fut Roland, qui marque une époque dans l'histoire de la musique en France. Il eut à lutter contre les admirateurs de Gluck, qui était, à juste titre, si digne d'en avoir. Après avoir, par son Iphigénie en Aulide, naturalisé en France les formes de récitatif et de chant de l'école italienne, et la force d'harmonie de l'école allemande, il terrassa, par l'Orphée et l'Alceste, les ignorans partisans de notre vieux système mélodramatique, en rendant impossible le retour des opéras de Rameau et de Lulli; mais depuis que ses ennemis avaient disparu, il s'était formé un parti de fanatiques, dont les exagérations arrêtèrent les progrès de cette révolution musicale commencée par Gluck, en se déclarant aveuglément contre tous ceux qui venaient en partager les travaux et la gloire. C'étaient ces enthousiastes qui, devenus les arbitres des réputations musicales, jugeaient en dernier ressort du mérite d'un opéra, et en entravaient le succès par leurs préventions et leurs cabales. Piccinni, tout entier à son art, et aussi étranger aux intrigues qu'aux mœurs, aux goûts, aux usages, la langue du pays qu'il venait ha

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