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lieutenant sur le champ de bataille, par le général Rochambeau, et qu'à son arrivée en France, il fut fait capitaine de grenadiers. L'année suivante, il attira sur lui tous les regards par sa conduite, à-la-fois prudente et audacieuse, à l'attaque de Sainte-Lucie, et par la constance et les ressources

qu'il déploya pour retarder la reddition de cette île, lorsque les Anglais vinrent, avec des forces supérieures, pour la reprendre. Echangé en 1798, et nommé chef de brigade en 1799, il alla à la Guadeloupe, en qualité d'aide-decamp de Jeannet, l'un des agens du directoire dans cette île, sous l'administration du capitaine-géné rale Lacrosse. Les circonstances devinrent difficiles, et l'on vit se former plus d'un orage menaçant. La prudence du colonel Pélage contribua puissamment à les conjurer; mais les applaudissemens que cette sage conduite lui mérita firent naître l'inquiétude et la jalousie dans l'âme de ses chefs. A la mort du général Bethencourt, le commandement des troupes lui était dévolu; il en fut privé, et conserva seulement celui de la grande terre, dont il avait été investi par les délégués du gouvernement français. Le capitainegénéral ne cessait de faire l'éloge de la conduite de Pélage, de lui témoigner une confiance sans limites; cependant l'ordre de l'arrêter fut donné. Attiré, par unc simple invitation, chez le chef d'état-major, des armes furent dirigées sur sa poitrine il parvint à les écarter et à se réfugier au fort de la Victoire; mais il y trouva les troupes de couleur

en pleine insurrection. La ville de la Pointe-à-Pitre était menacée d'un horrible massacre. Ce péril, plus grand que celui auquel il venait d'échapper, n'ébranla pas sa fermeté. L'insurrection avait été causée par l'arrestation de plusieurs officiers de couleur et par les menaces faites à un plus grand nombre d'autres. Pélage ne s'opposa pas de front à la violence de ces premiers mouvemens, mais il sut rendre vaines les menaces les plus sinistres, en laissant un libre cours aux paroles et aux démonstrations. Il prit Sous sa protection ce même chef d'état-major chez lequel peu d'heures auparavant, sa vie avait été menacée. Ses efforts pour prévenir l'effusion du sang et l'égorgement des blancs se multipliaient comme le danger qui semblait croître de minute en minute. Placé entre l'alternative ou d'accepter le titre de général en chef de l'armée de la Guadeloupe, ou de voir ce titre et les pouvoirs qui y étaient atttachés passer entre les mains du mulâtre Ignace, officier fougueux,et chef de l'insurrection, Pelage dévoua sa tête. Les troupes voulaient marcher à l'instant même contre celles que coinmandait la capitaine-général. Il épuisa leur fureur en les fatigant jusqu'à la nuit par des marches et des contre-marches; mais les lenteurs, les tergiversations du chef de la colonie et des menaces imprudentes sorties de sa bouche, portèrent les révoltés aux dernières violences. Pélage recut un coup de baïonnette au visage, en protégeant le capitaine-général, assailli par les sol

dats de couleur : il parvint même à lui sauver la vie, mais le capitainé-général fut renvoyé en France. L'obligation de conserver le pouvoir fut imposée à Pélage par la nécessité de pourvoir au salut de tous. La vie des blancs se trouva menacée par des troupes qui venaient de rompre le frein de la discipline, et qui, au moment de devenir victimes elles-mêmes de leurs propres fureurs, n'étaient plus retenues que par un reste de respect pour Pélage. Il s'adjoignit un conseil provisoire, choisi par les habitans de la Pointe-à-Pitre, les plus recommandables par leurs lumières et leurs vertus. Le premier acte de ce gouvernement provisoire fut un serment de fidélité à la France. Ce serment, répété par les troupes, réveilla dans tous les cœurs l'amour de l'ordre, de la discipline et du nom français, et donna le temps à l'expédition, commandée par le général Richepanse, d'arriveret de sauver la colonie sur laquelle la torche incendiaire et le poignard des insurgés restaient suspendus. Au débarquement des troupes de l'expédition les humiliations ne furent point épargnées à Pélage: il les dévora en silence, sans irritation, sans bassesse, conservant toute la diguité que donnent la force de l'âme et le calme d'une bonne conscience. L'ordre de l'arrêter avait été signé avant le débarquement, mais la contenance de Pélage le fit révoquer; il ne tarda pas à obtenir du nouveau capitaine-général toute la confiance qu'aurait dû lui accorder celui que le général Richépanse venait remplacer. Ce général lui donna l'ordre de ras

sembler les troupes dont il voulait passer la revue. Cet ordre fut exécuté, mais les officiers nouvellement arrivés se portèrent à des actes de violence en relevant les postes, et à des menaces trop justifiées. Le lendemain, par l'embarquement d'une partie des troupes, le reste se débanda, prit la fuite, et alla porter le feu de la révolte dans tous les quartiers de la basse-terre. Cette révolte ne put être étouffée que par la force, et durant la lutte, le sang européen ne coula pas avec moins 'd'abondance que le sang africain. Pélage rendit de grands services dans cette guerre d'extermination. Il sauva la basse-terre, dont les habitans se defendaient, barricadés dans leurs maisons, contre les insurgés, qui s'étaient rendus maîtres de la ville, et allaient y mettre le feu. Ils signalaient leur retraite par le pillage et l'incendie. Pélage les suivit de près, leur enleva la forte position de Biddary, délivra au Dolé 80 femmes et enfans blancs, que le mulâtre Ignace avait réunis dans un lieu où il y avait des poudres; déjà le nègre qui devait y mettre le feu, s'avançait la mèche à la main, lorsque Pélage y parut. La Pointe-à-Pitre, dégarnie de troupes, fut inopinément menacée par un parti d'insurgés. Le général se voyant dans l'impossibilité d'y conduire sur-le-champ des soldats harassés, y envoya Pélage seul. Son activité, la confiance qu'il inspira, intimidèrent les assiégeans, et sauvèrent la ville. Ils se retranchèrent dans la redoute de Baimbridge, et c'est là que les

restes de l'insurrection furent écrasés. Tant de services méritaient une récompense. Ils recurent cel le dont le pouvoir est le moins avare. Pélage et les hommes honorables qui s'étaient dévoués au salut de la colonie, en l'absence de toute autorité préservatrice, furent embarqués avec d'autres habitaus, transportés en France, et mis en prison. La liberté leur fut rendue quand on vit qu'il était impossible de leur ravir la vie ou l'honneur sans violer trop ouvertement la justice. Pélage avait droit à de l'avancement. Il dut se trouver heureux d'être employé comme colonel, et fut envoyé en Espagne, où il donna de nouvelles preuves de valeur. Mais il ne survécut que peu de jours aux désastres de Vittoria et de la campagne de 1813. Il mourut en France, ignoré, et sans se plaindre ni du sort ni des hommes.

PELARD (N.), membre de la légion d'honneur, servait en 1796 à l'armée d'Italie, en qualité de simple carabinier. Au mois de septembre de la même année, il se fit remarquer par une action d'éclat, dont les détails se trouvent dans un compte rendu au directoire - exécutif par le général en chef Bonaparte « Au passage de la Brenta, dit le général, le brave Pelard traversa >> trois pelotons ennemis, arrêta » l'officier - général qui les com» mandait, et tua lui seul treize >> hommes. »> Cet acte d'intrépidité fit obtenir à Pelard de l'avancement, et plus tard la récompense la plus chère aux braves, la croix de la légion-d'honneur. Il se signala depuis en diverses occa

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sions, et l'armée française le comptait, en 1806, au nombre de ses officiers les plus recommandables, lorsqu'il fut tué sur le champ de bataille.

PELE (N.), ancien député et magistrat, adopta avec modération les principes de la révolution, et fut uoinmé, au mois de septembre 1792, député à la convention nationale par le département du Loiret. Dans le procès de Louis XVI, il vota la détention jusqu'à la paix, et le bannissement à cette époque. Pelé fut du nombre des conventionnels qui passèrent au conseil des cinq-cents, dont il cessa de faire partie le 20 mai 1798. Appelé aux fonctions de juge au tribunal criminel de son département, i les remplit d'une manière honorable jusqu'à l'époque de sa mort, arrrivée en 1808.

PELET (JEAN-Jacques - GerMAIN), maréchal-de-camp d'étatmajor, ancien général des chasseurs à pied de la vieille garde, commandant de la légion-d'honneur (en 1813), chevalier de Saint-Louis et du mérite militaire de Bade, est né à Toulouse en 1779. Il partit comme conscrit en 1800; dès son arrivée à l'armée d'Italie, il fut admis en qualité de souslieutenant dans le corps des ingénieurs-géographes. Ses services de guerre et de paix, ses blessusures, lui valurent un avancement assez rapide, qui ne fut jamais aidé par aucune intrigue, et qui s'est arrêté en 1814 alors s'ou vrait devant lui la grande carrière des armes, pour laquelle il était né, et qui a été l'unique passion de sa vie. Bien jeune encore, il

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mérita par ses travaux d'être admis, dans les circonstances critiques, au conseil des généraux. Il fut choisi par le maréchal Jourdan pour l'accompagner dans ses reconnaissances des montagnes du Tyrol, et, en 1805, par le maréchal Masséna pour être son aidede-camp. Il resta 6 ans attaché à cet illustre guerrier, qui l'honora de son amitié, de son intime confiance, et qui le nommait son fils d'armes. Il commanda en Russie le 48me régiment, l'un des plus beaux de l'armée. Général de brigade en avril 1813, il fut bientôt désigné pour entrer dans la garde, par l'empereur, qui l'avait di-tingué, en 1 809, dans les expéditions et les reconnaissances de l'île de Lobau, et surtout, en 1811, dans deux audiences fort orageuses, où le chef de bataillon Pelet lui rendit compte du résultat de l'expédition de Portugal. Ce fut à la fin de la seconde audience, que l'empereur le congédia en lui disant, Adieu, colonel. Napoléon le chargea, en 1811, 1813 et 1814, de divers travaux particuliers. La faveur dont jouissait le général Pelet fut purement militaire, car il ne reçut ni titres ni dotations; mais, non moins reconnaissant de tant de marques de confiance, il s'en montra digne jusqu'au dernier moment. Ce général a fait depuis 1800, avec la plus grande activité, toutes les campagnes des grandes armées; il a été blessé aux batailles de Caldiero, d'Ebersberg, Krasnoë, de Léipsick. Parmi de nombreux faits d'armes, lès Victoires et Conquêtes et les Fastés de la gloire, citent sa conduite au passage de l'Adige, en 1805,

et au siége de Gaëte, où il rendit, comme dans toute sa carrière. des services bien au-dessus de son grade; en 1809, l'enlèvement des habitans de Roking, où les Autrichiens allaient appuyer leur aile droite dans la bataille d'Eckmübl; l'expédition de l'île du Moulin (2 juillet 1809), ainsi que des autres îles autour de celle de Lobau; en 1810 et 1811, plusieurs actions en Espagne et en Portugal; en 1812, l'attaque du faubourg de Racseuska à Smolensk; l'arrière-garde de l'armée de Russie, sauvée par sa vigueur et par ses conseils; le 18 novembre, à Krasnoë, dans cette affaire, que le général anglais Wilson a nommée la bataille des héros, et où le colonel Pelet fut blessé de trois biscaïens ; en 1813 et 1814, les batailles de Dresde, Leipsick, Montmirail, Craonne, Laon, Arcis, etc., avec la garde; enfin, la défense de Planchenoit, à la bataille de Mont-Saint-Jean, et la conservation de l'aigle des chasseurs au milieu des plus violentes attaques des corps prussiens. Ces ouvrages citent aussi les paroles remarquables de Napoléon, en 1805, au sujet de mémoires historiques sur les batailles d'Italie, dont avait été chargé le jeune ingénieur, et les marques touchantes d'attachement qu'à » toutes les époques, et surtout au licenciement, la vieille garde donna au général Pelet. Il commandait alors la division des chasseurs à pied; et après la mort du général Michel, tué à Waterloo, il avait été nommé colonel en second de l'arme. Le général Pelet ne s'est pas moins distingué par ses

écrits militaires que par ses actions. Au dépôt de la guerre sont réunis beaucoup de mémoires, faits par lui comme ingénieur-géographe, ou dans le cours des campagnes. II a concouru, à diverses époques, aux travaux historiques qui s'y préparaient. Ce général a écrit des journaux fort détaillés de chaque guerre, et une grande quantité de mémoires sur les hautes parties de l'art militaire. En 1814, dans les grandes manœuvres de la garde à Nancy, il avait commencé à faire exécuter un système de tactique abrégée et perfectionnée pour l'infanterie, sur lequel il a préparé un ouvrage. En 1818, ayant été nommé membre et secrétaire de la commission de défense du royaume, le général Pelet a fourni près des deux cinquièmes de la collection des travaux de la commision, et a fait de plus un système particulier pour une défense nationale, qui est resté dans ses mains. La France y trouverait des ressources précieuses pour des temps de malheur. Il s'occupe, depuis son entrée au service, de l'histoire de nos guerres. Napoléon ayant applaudi dès 1805 aux premiers travaux du général Pelet, ce général n'a pas cessé de les poursuivre. A la fin de chaque campagne il préparait les matériaux et la rédaction de son histoire. Déjà plusieurs ouvrages ont donné des extraits de ce travail. Parmi ces ouvrages, on remarqué ceux du Précis des événemens militaires, pour 1805, et du Mémorial de Sainte-Hélène, pour Eckmühl et Wagram. Nous avons pu nous assurer nous-mêmes que, dans les

matériaux réunis par le général Pelet sur les campagnes d'Italie, il y avait une conformité parfaite avec ce que Napoléon a dicté à Sainte-Hélène. Nous devons ajouter que le récit de la campagne d'Italie, dans la notice de BONAPARTE, a été extrait des mémoires que le général Pelet communiqua à l'auteur, et a, depuis longtemps, justifié ce que nous venons de dire. On attendait avec impatience la publication de ces mémoires. Le général Pelet vient de la commencer par la campagne de 1809, en 4 volumes, avec des pièces du plus grand intérêt; deux volumes ont déjà paru. Il se propose de donner, sur le même plan, toutes les campagnes de nos grandes armées: le général écrit ce qu'il a vu, et, en partie, ce qu'il a fait. Il veut venger l'armée et Napoléon des calomnies dont ils ont été l'objet. Il porte dans son travail la loyauté et la fermeté qu'il a montrées pendant toute sa vie. Son épigraphe, Honneur et patrie, est la mesure et la garantie de ses sentimens. L'histoire de nos guerres, publiée par un homme qui les a toutes écrites sur les champs de bataille, porte avec -elle un intérêt, qu'aucun autre écrivain ne peut atteindre. C'est la gloire prise sur le fait par celui qui l'a partagée. Les faits d'armes ont besoin d'être dessinés d'après nature, sans cela leur vérité é chappe et la physionomie d'une campagne disparaît. Le général Pelet a su habilement conserver tout leur caractère aux opérations de la guerre de 1809, et en cela son ouvrage ne sera pas moins recherché par les tacticiens, que par

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