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ses (3). L'édition princeps des Lettres
de Pline, est de 1471, in-fol.; et la
première complète est celle des Al-
des, 1508, in-8°. ( Voy. GIOCONDO
XVII, 400.) La date de 1476,
donnée à la plus ancienne édition
connue du Panégyrique, paraît sus-
pecte. (Voy. le Manuel du Libr.)
Nous citerons parmi les meilleures
qui aient paru depuis, celles d'Elze-
vir, 1640, in-12; idem, Variorum,
1669, in-8°.; celle d'Oxford, 1703,
Amsterdam, 1734; Nuremberg,
1746, in-4°. Jean Masson a écrit la
vie de Pline le Jeune (V. MASSON
et GIERIG).
F-T.

tisan. Sa réserve est extrême: il ne s'ouvre avec ses amis sur aucun événement public; il ne les entretient d'aucune affaire politique. Ainsi, le fonds de sa correspondance est plus agréable qu'instructif, en raison de la différence des temps : toutefois, elle nous montre dans Pline l'homme de bien autant que l'homme aimable; et si l'on regrette de trouver trop souvent l'écrivain dans un recueil où il a répandu une variété, et quelquefois une grâce remarquables, on pardonne tout, même la vanité, à un ami si généreux, à un maîtresi indulgent, à un homme dont l'appui ne manqua jamais ni aux lettres, ni à l'innocence. Le Panégyrique ne futpas prononcédevant Trajan; ce qui fait tomber la phrase qu'il en eût été digne de tout point,s'il n'avait pas eu la faiblesse de l'entendre. Pline, nommé consul, adressa au prince, dans le sénat, un remercîment d'usage. C'était un morceau très-court; mais l'auteur l'étendit par le conseil de ses amis, et pour encourager vertueux penchants de l'empereur. Cependant le bel-esprit domine trop dans cet ouvrage on n'y ménage : aucun repos à la pensée; tout est brillant, tout éblouit et fatigue l'attention le style en est coupé et sautillant, et l'antithèse y est prodiguée. L'auteur semble avoir senti luimême ses défauts: voy. sa lettre 18 du . livre, où il avoue que les morceaux d'un genre plus sévère et plus simple feraient plus de plaisir relle, on ne peut refuser de grands éloaux auditeurs, que les endroits les plus fleuris. Ses tours ingénieux font au reste pardonner les détails minutieux sur lesquels il s'arrête on lui desirerait en général plus de force; et l'on conçoit que ce cadre cût été rempli tout autrement par Tacite, qui luimême affectionne les idées ingénieu

:

les

PLOT (ROBERT), naturaliste anglais, né en 1640, à Sutton-Baron, élève de l'université d'Oxford, y fut nommé, en 1683, professeur de chimie, après avoir été d'abord conservateur du musée d'Ashmole, qu'il enrichit d'un grand nombre d'objets d'histoire naturelle. Il fut le premier qui s'occupa de l'histoire naturelle de l'Angleterre, et commença un très-vaste plan par publication de son Histoire naturelle des comtés d'Oxford et Stafford, Natural histories of Oxfordshire and Staffordshire; la première partie parut à Oxford, 1677, in-fol., et additions et corrections, par John fut réimprimée en 1705, avec des Burman, son fils adoptif; la seconde fut publiée dans la même ville,

la

en

1686. Abstraction faite de l'état arriéré où se trouvait l'histoire natu

(3) Le traducteur allemand de Pline, J.-J. Nast, s'est efforcé de faire prévaloir l'opinion qui lui attribue le fameux Dialogue De causis corrupta eloquentia mais l'époque à laquelle se rapporte la composition de cet ouvrage (l'an 75 de J.-C.), ne permet pas de s'arrêter à ce système : Pline n'avait alors que 12 ou 13 ans; et le style de ce Dialogue est trop ferme, il porte l'empreinte d'une chaleur trop vraie, pour n'en pas faire honneur à la jeunesse de l'historien d'Agricola.

ges à son travail; et le docteur Pulte ney avoue qu'il n'a pas été surpassé par les auteurs subsequents. Plot décrit avec soin les plantes rares des provinces dont il traite, ainsi que les espèces douteuses, et celles qu'il regarde comme n'ayant pas encore été décrites. Les premiers éléments de la botanique anglaise sont consignés dans ces deux volumes. Plot s'occupait, en outre, de l'histoire et des antiquités : il a inséré des notions de ce genre parmi ses descriptions d'histoire naturelle. Les prodiges etles choses merveilleuses mêmes y ont trouvé place; on attribue au défaut de philosophie expérimentale, sa facilité à recueillir des faits auxquels personne n'ajoute foi aujourd'hui. Son intention était de visiter tous les comtés d'Angleterre et de Galles, et de recueillir des matériaux pour compléter la Britannia de Camden, et d'autres ouvrages. Il a exposéson projet dans une lettre à l'évêque Fell, laquelle a été imprimée à la fin du deuxième vol. de l'Itinéraire de Léland, édition de 1744. Il avait recueilli beaucoup de matériaux pour une histoire naturelle de Kent, de Middlesex et de Londres, sur le même plan que ses ouvrages sur Oxford et Stafford; mais ils sont restés manuscrits. Seulement on a publié de lui une Notice sur quelques antiquités de Kent, 1714, in-8°., et une Notice sur Thetford, que Hearne a fait imprimer, à la fin de son histoire de Glastonbury. S'étant démis de sa chaire de philosophie, Plot fut créé historiographe, par Jacques II, en 1686, peu de temps avant le détrônement de ce roi. En 1694, il fut nommé héraut d'armes (Mowbray-Herald), et archiviste de la cour d'honneur. Il mourut en 1696, de la pierre, dans sa maison

à Bordes. On voit, dans l'église de ce lieu, un monument qui lui a été érigé. Il avait été membre et secré taire de la société royale; le Recueil des Mémoires de cette société contient de lui plusieurs écrits, tels que des Observations météorologiques, des Traités sur l'asbeste, sur la meilleure saison pour la coupe des arbres, sur un Irlandais de sept. pieds sept pouces de haut, sur des lampes perpétuelles, etc. Il avait encore publie: De origine fontium, tentamen philosophicum, 1685, in8°. (Voy. le Journal des savants, de 1686, p. 65.)

D-G.

PLOTIN, philosophe de l'école alexandrine, ne voulait dire ni son âge ni le lieu de sa naissance : c'était un de ses travers. On sait toutefois, par Eunape, qu'il était né en Egyp te, à Lycopolis. Seulement ceux qui distinguent deux villes de ce nom, l'une dans la Thébaïde, l'autre dans la Basse-Egypte, ne savent trop laquelle a donné le jour à Plotin; c'est probablement la première. Il naquit en l'année 205 de l'ère vulgaire. A huit ans, il suivait les leçons des grammairiens d'Alexandrie; et néanmoins il voulait encore tetter sa nourrice, à ce qu'assure Porphyre, qui a écrit sa vie avec de longs détails. Eunape s'est borné à une courte Notice, que nous traduirions ici en moins de vingt lignes; mais les récits plus merveilleux de Porphyre ont acquis tant de crédit, que Bayle lui-même les a recueillis, sans les soumettre à l'examen critique dont ils ont besoin, et Brucker regrette que Bayle ait négligé ce travail. Depuis le temps où Plotin acheva ses études de grammaire jusqu'à l'âge de vingt-huit ans, où l'envie lui prit d'aller écouter les philosophes alexandrins, nous ignorons ce qu'il a pu faire: Brucker

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n'a pas manqué de remarquer aussi cette lacune. Les leçons des philosophes lui déplurent, parce qu'ils y mêlaient des notions grammaticales historiques et littéraires. Ces accessoires étaient peut-être ce qu'il y avait de plus solide et de plus instructif dans leur enseignement; mais il fallait à Plotin de la métaphysique toute pure. Il ne prit goût qu'à la doctrine d'Ammonius Saccas, qui a été fort justement représenté, dans cette Biographie universelle (II, 57), comme le fondateur d'une secte d'illuminés, et non du véritable éclectisme. Plotin, que tous les autres docteurs avaient ennuyé et attristé, n'eut pas plutôt entendu une première leçon d'Ammonius, qu'il s'écria: «Voilà ce que je cherchais.» Il fut, dit-on, pendant onze années, le disciple assidu de ce métaphysicien; et, comme celui-ci lui avait toujours vanté la sagesse transcendante des mages et des brames, il résolut d'aller, en Orient, puiser la philosophie à sa source. Il était surtout impatient d'être initié dans l'art d'opérer des miracles: on en faisait et l'on en croyait alors beaucoup dans la plupart des sectes païennes. Lorsqu'en 243, l'empereur Gordien entreprit une guerre contre les Perses, Plotin, âgé de trente-neuf ans, s'enrôla dans l'armée impériale; mais l'expédition ayant échoué, il regagna Antioche, sans rien rapporter de ces trésors de la science orientale. Iln'en professa pas moins la phi losophie à Rome, où il vint s'établir. Long-temps il s'abstint de divulguer la partie ésotérique ou occulte des doc. trines de son maître Ammonius. Ge ne fut qu'après qu'Hérennius et Origè. ne en eurent trahi le secret, qu'il se crut dispensé de le garder lui-même. Il composa, dans la quarante - neu

disci

vième année de son âge, vingt- un premiers livres, qu'encore il ne communiquait pas à tout le monde. L'année suivante, il eut pour ple Porphyre, dont les questions et les objections l'obligèrent à écrire vingt-quatre livres de plus; ils étaient achevés avant la fin de l'an 261. Depuis il en composa neuf autres, qui complétèrent le nombre de cinquante-quatre. Il comptait, parmi ses auditeurs, des sénateurs romains, dont quelques-uns, épris des charmes de sa doctrine, abandonnèrent les fonctions publiques, pour vivre, comme lui, en philosophes. On cite particulièrement le préteur Rogatien, qui, ayant donné tous ses biens et affranchi tous ses esclaves, passa le reste de sa vie en plein air et en extase. L'enthousiasme qu'inspirait Plotin, gagna plusieurs dames: l'une, nom. mée Gémina, voulut absolument qu'il logeât chez elle, afin de mieux jouir, elle et sa fille, du plaisir de l'entendre. Il passait pour si habile, et à-la-fois si vertueux, que les mourants luiconfiaient leurs biens et leurs familles, comme à une espèce d'ange gardien, dit Bayle d'après Porphyre, s iɛp@ tevi nai 0ɛía púλaxı. Surveillant d'un grand nombre de tutelles, et arbitre de cent procès, il avait le bonheur de ne pas se faire d'ennemis. A la fin pourtant il en trouva un dans un philosophe d'Alexandrie, nommé Olympius, qui employa, pour le perdre, la calomnie, et, par surcroît, la magie. C'est Porphyre qui parle de ces maléfices, en ajoutant que Plotin savait les faire retomber sur Olympius. Plotin était, selon Porphyre, un magicien si puissant, qu'un jour il annonça, sans craindre d'être démenti par les faits, qu'au moment où il parlait, le corps de son ennemi se plissait comme une

bourse, et que ses membres se frois saient l'un contre l'autre. Après cela, on ne doit être surpris de l'inpas faillibilité avec laquelle il prédisait les destinées de ses élèves, et découvrait les coupables qui échappaient aux recherches ordinaires. S'il dédaignait l'astrologie, ce n'était pas qu'il ne l'eût profondément étudiée; mais sa métaphysique sublime lui fournissait des moyens de divination plus immédiats et plus sûrs. Tel était son crédit, même à la cour, qu'en dépit des jaloux, il obtint de l'empereur Gallien et de l'impératrice Salonine, un territoire dans la Campanie, pour y bâtir une ville, qui devait s'appeler Platonopolis, et recevoir une colonie de philosophes, gouvernée selon les lois idéales de Platon. Ce projet n'eut pas d'exécution, soit parce que certains ministres de l'empereur y mirent des obstacles, soit parce que les colons transportés dans ce territoire, y périrent, pour avoir trop scrupuleusement suivi, et mal compris sans doute, le régime de vie que leur avait prescrit Plotin. Lui-même, il éproudurant la dernière année de sa vie, diverses incommodités: un violent mal de gorge, qui l'empêchait de disserter; un extrême affaiblissement de la vue, et des douleurs cuisantes aux pieds et aux mains; des coliques, auxquelles il refusait de remédier, parce que les moyens vulgaires lui semblaient indignes de sa gravité philosophique. Amélius, un de ses disciples, lui proposait d'assister à un sacrifice aux dieux: « C'est à eux, » répondit-il, de venir à moi, non » pas à moi d'aller à eux.-» Il faut assurément une rare sagacité pour, rattacher ce propos à quelque doctrine métaphysique, et pour n'y pas trouver beaucoup d'orgueil et même

va,

XXXV.

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d'impiété. Plotin ne permit pas non plus qu'on fit son portrait, que ses élèves desiraient de conserver; l'un d'eux le traça de mémoire. Pour lui, il se disait humilié d'avoir un corps, et ne consentait point à regarder cet. te enveloppe grossière comme une partie de sa personne. Lorsqu'il mou rut, d'une esquinancie, dans sa soixantième année, en 270: « Je fais » dit-il, mon dernier effort pour ra » mener ce qu'il y a de divin en moi » à ce qu'il y a de divin dans l'univers. On eut, après sa mort, les plus heureuses nouvelles de l'état de son ame. Consulté par Amélius, l'oracle d'Apollon daigna répondre, en cinquante vers, que Plotin s'était présenté à Minos, acus et Rhadamante, moins pour être jugé que pour ne pas manquer à une visite d'usage et de bienséance, et qu'il jouissait du bonheur dû à ses lumières et à ses vertus. Il était indispensable de donner une idée des détails dont Porphyre a composésa Viede Plotin, parce qu'ils contribuent à faire connaître les opinions et les mœurs des philosophes du troisième siècle : on ne doit d'ailleurs considérer comme historique que ce qui concerne le lieu et l'époque de la naissance de Plotin, ses études grammaticales et philosophiques, les leçons qu'il reçut d'Ammonius Saccas, son voyage en Perse, son séjour à Rome, la composition de ses livres, et sa mort en Campanie. Il paraît qu'il rédigeait ses ou vrages avec une négligence excessive: comme il était fort myope, il les écrivait en caractères menus, qu'il ne prenait pas la peine de rendre lisibles; il n'achevait pas les mots; il ignorait ou dédaignait l'orthographe. Revoir ses écrits, en rétablir l'ordre, était un soin dont ses habitudes et les caprices de son imagination l'auraient

6

rendu incapable: il en chargea Porphyre, qu'on a soupçonné d'avoir souvent substitué ses propres idées à celles de son maître. Il existait une copie très-différente de ces livres, faite par Eutochius, autre disciple du philosophe de Lycopolis. Tels qu'ils nous sont parvenus, ils sont au nombre de cinquante-quatre, et distribués en six Ennéades ou neuvaines, qu'on pourrait être d'abord tenté de distinguer par les titres de Morale, de Physique générale, de Théologie naturelle, de Psychologie, d'Idé ologie et d'Ontologie: mais, au fond, il y règne trop peu d'ordre pour qu'il soit facile d'en assujétir les matières à une classification systématique; et le nom de métaphysique est le scul qui leur convienne pleinement. On a voulu aussi, et cette idée remonte à Porphyre, diviser les cinquantequatre livres de Plotin en trois ordres, ou trois âges; savoir: vingt-une productions de sa jeunesse, vingtquatre de sa maturité, et neuf de sa décadence. Nous ne pensons pas non plus qu'il y ait lieu d'y regarder de si près les nuances du délire y sont fort peu sensibles. Ces livres, dit M. Buhle, sont précisément ceux où les spéculations extravagantes des Alexandrins se peignent de la manière la plus évidente: la philosophie de Plotin est obscure et inintelligible; pour prendre quelque intérêt à son système, pour apprécier la manière dont il extravague, il faut se mettre à la place d'un homme qui s'abandonne sans réserve aux égarements d'une imagination échauf. fée et presque en délire. Toutefois M. Buhle ajoute, que, si l'on n'exige pas des idées claires et précises, auxquel les correspondent des objets réels, on admirera, dans Plotin, un esprit trèsprofond, et, dans son système, un

chef-d'œuvre de philosophie transcendentale (1). Pour démêler s'il y a des traits de génie, ou seulement de l'extravagance dans les six Eunéades, il en faudrait entreprendre une analyse exacte et complète : nous ne pouvons en extraire ici qu'un petit nombre d'idées générales. Plotin est persuadé que l'état d'extase ou de ravissement est la première condition de la philosophie; et il appelle cela la simplification de l'ame : il exige la concentration de toutes les facultés dans la contemplation; et il promet à l'ame qui saura être ainsi attirée par un unique objet, qu'elle se reconnaîtra elle-même pour l'unité absolue.Il déclare que l'existence ne peut cesser d'être ; et que, par cela même qu'elle est absolue, elle est éternelle. De cet argument et de quelques autres il conclut l'éternité du monde; et il arrive, ainsi que Bayle et d'autres le lui ont reproché, au panthéisme, ou spinosisme. Il est cependant si loin de se montrer athée, qu'on a cru retrouver dans quelques-uns de ses textes, le dogme des trois personnes divines (Voy. Feustking, De tribus hypostasibus Plotini. Wittemberg, 1694, in-4°.) Ailleurs, son mysticisme aboutit à la théurgie, à la magie, à l'astrologie même, dont il méprisait ordinairement les applications pratiques. Pour expliquer l'univers, il admet trois réalités distinctes: la matière, la forme, et le corps qui se compose de la forme et de la matière. Ce sont à ses yeux, ou dans son langage, trois substances; et, par substance, il entend ce qui n'existe pas dans un sujet, mais ce qui existe

(1) Nous ignorons ce que la terminaison al ajoute à la signification du mot français transcendant. « Les » humeurs transcendantes des philosophes, disait >> Montaigne, m'effraient comme les hauteurs inac»cessibles. » Qu'eût-il dit de leurs doctrines transcendentales ?

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