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in-4°. IV. Principes du droit francais, 12 vol. in-12. Ce dernier ouvrage, classique en Bretagne, comme les précédents, a été très-utile à M. Toullier, son élève, pour la composition de son Cours de droit civil. F-T.

POULCHRE (FRANÇOIS LE), seigneur de la Motte-Messemé, gentil homme angevin, chevalier de l'ordre de Saint-Michel, etc., né en 1546, au Mont-de-Marsan, avait la prétention singulière de descendre en droite ligne du consul Appius Claudius Pulcher. Suivant lui, les successeurs de cet ancien romain vinrent, après le sac de Rome, s'établir en Anjou :

Sont cinq on six cents ans et plus que j'en ay
tiltre
Autantique et probant, receu en maint registre,
Toujours continué, comme toujours depuis
Mariage ensuivy tousjours de père en fils...
Dont enfin suis venu de ce premier parent
Dit à l'heure Pulcher, à l'heure qu'apparent
L'idiome latin estait vulgaire à Rome,
Et par corruption de langage on me nomme
Le Pulchre... (1).

Fils du surintendant de la maison de la reine de Navarre, Le Poulchre naquit dans le palais de cette princesse. Il eut pour parrain et maraine François Ier., et Marguerite de Valois, qui prit elle-même soin de sa première enfance. Le Poulchre demeura pendant trois ans près de Marguerite, qui le comblait des marques affection; elle voulut, dit-il,

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de son

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Poulchre exprime, avec une sensibilité qui n'est pas dénuée de grâce, sa douleur enfantine en apprenant la mort de son illustre protectrice: Mais la fière Atropos à sa vie contraire En couppa le filet par un cruel destin, Meltant ce mesme jour à mon heur une fin Que je ne sentis pas pour ma grande jeunesse. A toute heure cherchant ma royne, ma maîtresse, Qu'on me disait tousjours devoir venir demain.

Mais depuis ce temps-là, l'ay attendue en vain, Comme encore je fais; car Charon ne repasse Jamais, pour cry, ni pleur, ny plainte qu'on luy face,

Ceux qui dans son bateau sont entrés une fois (3). Le Poulchre commença ses études à l'université de Paris; mais il dit luimême que n'y ayant pas son cœur, il en a peu profité (4). Il prit bientôt le parti des armes, et fut d'abord simple archer,

Voulant estre soldat premier que capitaine (5). Nous ne le suivrons pas dans le récit de sa vie militaire. Il eut le regret de ne rejoindre l'armée que le lendemain de la bataille de Dreux; mais il se distingua à celles de Saint-Denis, de Jarnac et de Moncontour. Charles IX, l'aimait; il l'admit plusieurs fois à l'honneur de courir la bague avec lui (5), et il le nomma gentilhommede sa chambre, et chevalierde son ordre.Il n'eut pas autant à se louer de Henri III. Le monarque ne parut pas se souvenir de ses services; et Le Poulchre, n'obtenant rien de son nouveau maître, se retira dans sa terre de la Motte-Messemé, auprès de Luçon, où il chercha, dans l'étude, le repos et la philosophie, des adoncissements et des consolations, que l'agitation des cours n'aurait pu lui

offrir:

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La plus gentille Qui fut lors à la cour, et la plus belle fille; Et on la tient encor aujourd'hui à l'instant Pour la plus belle femme à présent y estant On l'appeloit Charlotte, et l'a Charles aymée Pour les perfections dout elle estoit ornee (7).

La passion qu'il eut pour Charlotte, l'entraîna, parfois, un peu loin pour un catholique, qui dispute ailleurs très-vivement contre les huguenots; on en jugera par ces rimes:

Je me fusse damné pour cueillir un tel bien,
Et l'enfer m'eust semblé pour son paradis rien,
S'il y a un enfer ordonne par justice
Pour punir ceux qui font à leur dame service (8).

Il assure, au reste, que sa maîtresse ne paya ses empressements que par des rigueurs, et que le roi Charles IX ne fut pas plus heureux que lui. Nous ferons remarquer, en passant, que cette demoiselle est probablement la maîtresse de Charles IX, que Brantôme indique sans la nommer (9). Dreux du Radier a pensé, sans aucun motif solide, que cette maîtresse anonyme était Madelène de Bourdeille, sœur de Brantôme (10). Le Poulchre se maria, en 1570, avec Émée Savary, dame de Sache et de la Haulte Chevrière,

Bref, dame de valeur de deux cent mille francs,
Et d'aage volontiers quelques vingt et deux ans (11).

Mais cette union, qu'il peint sous les couleurs les plus douces, fut trop tôt

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terminée : une maladie violente enleva Émée à Le Poulchre, après huit mois de bonheur. Malgré ses hauts faits d'armes, Le Poulchre serait oublié si dans sa retraite, il n'avait pas composé le récit des principaux événements de sa vie. Il le publia, en 1587, dans un petit volume, devenu rare, à la suite duquel on trouve des poésies diverses. Il a pour titre: Les sept livres des honnestes loisirs valier de l'ordre du roi, et capitaine de M. de La Motte Messeme, chede cinquante hommes d'armes de S. M.,intitulés chacun du nom d'une des planètes, Paris, Marc Orry 1587,petit in-12 de 288 feuillets. Ce sont des Mémoires rimés, qui contiennent des détails militaires sur les guerres de Charles IX. On a encore de lui un autre ouvrage qu'aucun biographe, à notre connaissance, n'a indiqué; il est intitulé: le Passetemps de messire François Le Poulchre, seigneur de La Motte Messeme, chevalier des ordres du roi, deuxième édition, augmentée par lui-même d'un second livre outre la précédente, Paris, Jean Le Blanc, 1597, petit in-8°. en deux parties, formant ensemble 124 feuillets. On voit

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par ce titre, qu'il existe une première édition qui ne renferme qu'un seul livre: nous ne l'avons pas vuę. La prose de Le Poulchre ne vaut pas mieux que ses vers; mais on rencontre dans le Passetemps, des faits singuliers, des observations sur les changements introduits dans la manière de combattre, depuis François Ier. jusqu'à Charles IX. Le poète y a aussi entremêlé quelques pièces de vers qu'il n'avait pas jointes à ses honnêtes Loisirs. L'extrême rareté sidérée comme son unique mérite. de ce volume ne doit pas être conL'époque précise de la mort de l'au

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teur est inconnue on voit seulement, par l'avertissement qui précède la 2o. édition du Passe-temps, que ce poète ne vivait plus en 1597. L'abbé Goujet, dans sa Notice sur Le Poulchre (Biblioth. française, tom. xIII, p. 86), lui donne pour femme Philippe de Ludres, dame de Bouzemont. C'est une erreur contredite par l'ouvrage même de Le Poulchre. -Renée LE POULCHRE, sœur, ou seulement parente de celui qui précède, a inspiré la muse du capitaine Lasphrise, poète encore plus singulier que Le Poulchre (V.LASPHRISE, XXIII, 410). Elle était religieuse ou pensionnaire dans un couvent du Mans (12). Lasphrise l'a célébrée, sous le nom de Théophile, dans une multitude de pièces de vers, dont deux présentent l'anagramme du nom de Renée (13). Celle-ci ayant repous sé les voeux de Lasphrise, il s'adressa à Esther de Rochefort, qu'il a chantée sous le nom de Noëmi; et, s'il faut l'en croire, elle ne suivit pas les sages exemples de la première.

M-É.

POULIN (AMABLE - FIDÈLE ), théologien, né vers 1740, au Biefde Bourg, bailliage de Salins, fit de bonnes études, et embrassa l'état ecclésiastique. Après avoir professé quelque temps la philosophie, il fut pourvu de la chaire de théologie au collége de Besançon, qu'il remplit d'une manière distinguée. Ses talents lui méritèrent bientôt des protecteurs. L'évêque de Lausanne le nom. ma l'un de ses vicaires-généraux; et l'abbé de Saint-Gall, en lui donnant le titre de professeur honoraire de physique et de mathématiques, lui assigna une pension. A l'époque de

(12) OEuvres poétiques du capitaine Lasphrise,

Paris, 1599, p. 93, 106 et 137. (13) Ibid., p. 110 et 111.

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la révolution, l'abbé Poulin suivit M. de Durfort, archevêque de Besançon, forçé d'abandonner son siége, et lui prodigua les soins et les consolations qui dépendaient de son ministère. Après la mort de ce prélat, il continua de rester en Suisse, donnant à l'étude tous les loisirs que lui laissaient les devoirs de son état. Ayant obtenu, en 1799, la permission de rentrer en France, il vint habiter au milieu de sa familie; et il mourut au Bief-du-Bourg, en 1801, à l'âge de soixante-un ans. Outre quelques Dissertations dans les Recueils de l'académie de Besançon, dont il était membre, on a de l'abbé Poulin: De Deo revelante prælectiones theologica, Besançon, 1787-88, 3 tomes en 4 vol. in-12. C'est la première partie d'un cours complet de théologie, que les circonstances ne lui ont pas permis de terminer. W-s.

POULLAIN. V. POULAIN - DUPARC et SAINT-FOIX.

POULLE (LOUIS), célèbre prédicateur, était natif d'Avignon. Il fit ses études d'une manière distinguée, annonça de bonne heure une grande vivacité d'imagination, et se fit connaître, très-jeune encore, par deux poèmes (le Triomphe de l'amitié, et Codrus), couronnés, en 1732 et 1733, à l'académie des jeux floraux. Ayant quitté la carrière de la magistrature, à laquelle on le destinait, pour embrasser l'état du sacerdoce, il renonça aux muses pour se jeter dans la carrière de l'éloquence, où il porta l'empreinte de son génie poé tique. Il se rendit à Paris, en 1733, dans le dessein de s'y consacrer à la prédication. A l'époque où l'abbé Poulle parut dans la chaire, l'esprit de la nation était totalement changé: les mœurs graves du siècle précé dent avaient disparu; et la société,

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emportée par l'esprit de frivolité et de licence qui leur avait succédé, semblait peu disposée à prêter l'oreille aux vérités austères de la morale chrétienne, si elles n'étaient embellies de tous les charmes de la diction. Les prédicateurs furent contraints, comme il le dit lui-même, de déployer tout l'appareil de l'éloquence. L'abbé Poulle se laissa d'abord entraîner par le goût général : il lui sacrifia même plus que bien d'autres; et on le vit donner à l'éloquence sacrée toute l'enluminure de l'éloquence académique. Son début, d'un éclat extraordinaire, obtint les plus vifs applaudissements; mais si ces applaudissements lui furent honorables, ils ne lui furent pas moins nuisibles, en ce qu'ils l'empêchèrent de perfectionner son talent, car il en avait un véritable. Dès son entrée dans la carrière, il se crut orateur parfait: il ne prit soin, ni de régler l'essor de son imagination, ni de mûrir son style, ni d'aprofondir la science de la religion; et voilà le principe des défauts qui prédominent dans la plupart de ses discours, et empêcheront toujours de le ranger parmi les modèles. Seulement il sembla se surpasser lui-même, dans deux Discours qui pourront seuls lui être un titre de gloire durable. Ce sont ses Exhortations de charité, prêchées, l'une au GrandChâtelet, en faveur des pauvres prisonniers; la seconde, dans une autre assemblée religieuse, en faveur des enfants trouvés. C'est là qu'il est véritablement éloquent, parce que son éloquence est toute dans son cœur : il serait difficile de se faire une idée des effets que produisirent ces Exhortations, et de la renommée qu'elles donnèrent au jeune prédicateur. La cour, tout Paris, retentirent de ses

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succès; mais ce qui dut le flatter encore davantage, ce fut la victoire complète qu'il avait remportée sur le dédain, l'avarice et la dureté de l'opulence. « Là, dit Laharpe, l'o<< rateur entendit un bruit plus doux » à ses oreilles que celui des applau» dissements; c'était l'or et l'argent >> tombant de tous côtés, avec une >> abondance qui prouvait une ému»lation de charité. Beaucoup de >> personnes donnèrent tout ce qu'el» les avaient; et c'étaient des som» mes: en un mot, on ne se souve>> nait pas d'avoir rien vu de sem» blable. » Pour le récompenser, et le peut-être aussi pour l'encourager, roi lui donna une riche abbaye, celle de Notre Dame-de-Nogent, avec le titre de son prédicateur; et, en 1748, il fut appelé à prononcer le panégyrique de saint Louis, en présence de l'académie française. Son Discours fut trouvé médiocre ; seulement son style y est plus soutenu, plus châtié, plus élégant que dans ses autres ouvrages, parce qu'il connaissait la : délicatesse de son auditoire mais aucun de ces mouvements qui frappent, qui entrainent, aucun de ces traits qui se gravent d'eux-mêmes dans l'esprit. Les sermons de l'abbé Poulle se suivaient de loin à loin. Depuis qu'il se vit possesseur d'une soit pafortune assez considérable, resse naturelle, soit défaut de zèle ou d'ambition, il prêcha plus rarement. On ne l'entendit plus quedans quelques circonstances solennelles, comme à l'ouverture des états de Languedoc en 1764,à des professions religieuses, etc. Encore, dans le petit nombre de Discours qu'il nous a laissés, si l'on excepte quelques fragments épars çà et là, surtout dans les sermons sur le Ciel et sur l'Enfer, on n'aperçoit au cune trace de la véritable éloquence,

L'invention est très-faible, et pour ainsi dire nulle. Ses plans sont vaguement conçus, vaguement exécutés; et ses divisions rentrent souvent l'une dans l'autre quelquefois sa pensée n'est ni claire, ni juste; quel quefois aussi il veut être neuf et original, et il n'est que ridicule et bizarre. En vain on y chercherait cette plénitude de raisonnement, cette abondance de doctrine, qui portent la conviction dans l'ame. Il est aisé d'entrevoir, par quelques morceaux vraiment pathétiques (1), le parti que l'abbé Poulle eût pu tirer des Livres saints: mais incapable peutêtre d'une application sérieuse, il n'a presque pas touché à cette mine inépuisable; de sorte qu'on doit moins le regarder comme un orateur chrétien que comme un moraliste ingénieux, qui donne à sa morale, quelquefois un peu légère et superficielle, la sanction de la religion. Mais s'il manque de profondeur, il manque également de variété et de solidité. La rapidité du style est tout pour lui, ; il lui subordonne tout, et affecte de resserrer sa pensée dans le moins de mots possible. Il flatte, il plaît sans presque jamais émouvoir. Ceux qui se laissent éblouir par les saillies et les figures brillantes, ont pu comparer Poulle avec Massillon. Mais la comparaison sera toujours à l'avantage de ce dernier. Massillon a embrassé la doctrine évangélique dans toute son étendue; ses ouvrages

(1) Dans une Ode sur l'Étre infini, par M. Gence (à la suite du Livre des Méditations, traduit du docteur Brunner), on trouve une application , ou à-peu-près, d'un mot énergique de l'abbé Poulle, que s'était déjà approprié un poète moderne (M. Gaston), d'après ce passage de l'orateur sur les incrédules, au lit de la mort : « Ah

forment un cours complet de reli-
gion, qui ne laisse rien à desirer sous
le double rapport des choses et du
style. Poulle, au contraire, n'en a sai-
si que quelques points; et dans le peu
de sujets qu'il a traités, il lui manque
beaucoup du côté des développe-
ments et de l'élocution. C'était à
son contemporain, l'abbé de Bois-
mont, qu'il fallait le comparer. Tous
deux eurent la même trempe d'es-
prit; tous deux ne nous ont laissé
qu'un petit nombre de Discours, par-
mi lesquels un ou deux, forts de pen-
sées et bien écrits, produisirent des
effets prodigieux; tous deux nous
offrent, dans le reste, quelques aper-
çus heureux, quelques beaux mou-
vements, mais clair-semés, et nul-
lement capables de racheter ce qui
leur manque; tous deux sont ex-
trêmement brillants, et le sont mê-
me jusque dans leurs défauts, qui
tiennent beaucoup de l'esprit du
temps; tous deux enfin ne revêtirent
les livrées d'aucun des partis qui do-
minaient alors: et voilà probable-
ment la cause de la vogue si univer.
selle dont ils jouirent de leur vivant.
Dans l'un comme dans l'autre, vous
cherchez de l'éloquence, et vous ne
trouvez le plus souvent que de l'es-
prit et l'abus de l'esprit. Il faut dire,
à la décharge de l'abbé Poulle, que,
s'il ne contribua pas, autant qu'il au-
rait pu, à l'édification, il ne démen-
tit jamais non plus, dans sa condui-
te, la morale qu'il avait annoncée.
Sa vie fut constamment décente et ré
gulière; et sa fortune ne fut pas inu-
tile aux malheureux. Ajoutons qu'il
se contenta de la réputation que lui
fit le débit de ses Sermons, et qu'il
nesemontra jamais empressé de jouir
de la gloire d'auteur; et, ce qui est

malheureux ! sur le point de se plonger dans le gon- peut-être un phénomène inoui dans

fie effroyable de la destruction, ils appellent le néant : L'ETERNITÉ LEUR RÉPOND. » C. M. P.

la république des lettres, il garda

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