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sait toutes les influences étrangères, et surtout celle de la Russie. Peutêtre l'extrême popularité de ce parti, qui en minorité dans les diètes avait pour lui l'immense majorité de la nation, aurait séduit le comte Félix; mais l'impossibilité de voir jamais renaître par des mesures violentes l'indépendance polonaise, et l'exaltation ambitieuse sans doute de ceux qui marchaient à la tête de la minorité, l'éloignèrent de l'opposition, et le jetèrent dans les de la majorité russe. Bien loin cependant de consacrer par son suffrage les caprices ou les fautes de l'autorité, il se déclara fortement contre ceux qui demandaient que les dettes du roi fussent acquittées sur le trésor public; et au lieu d'imposer de nouveaux sacrifices à un peuple épuisé, il offrit de lever et d'entretenir un régiment à ses frais, invitant les autres à suivre son exemple. Malgré la décence et les ménagements avec lesquels il s'exprima en cette occasion délicate, ses sentiments déplurent à la cour; et le roi dit même, en présence de plusieurs témoins, que souvent trop de générositévoile bien des choses. Blessé de se voir soupçonné d'ambition et d'infidélité, Potocki se contenta d'écrire à Stanislas, le lendemain, avec une respectueuse fermeté, et partit de la capitale sans prendre congé. Les applaudissements et les vœux de ses compatriotes l'accompagnèrent sur sa route: on por tait ses couleurs; on frappait des médailles en l'honneur de son courage; et, disgracié du souverain, il fut un moment l'idole du peuple. Depuis long-temps le comte Félix avait médité sur la triste situation politique de la Pologne, et s'était persuadé que le moyen le plus simple de la replacer dans son rang, était

et re

d'abolir la forme ancienne de gou vernement pour organiser une république fédérative, composée de trois grandes divisions principales, soumises chacune à la protection de l'empire voisin. Par-là, pensait le comte, la Pologne pourrait d'abord satisfaire l'ambition de trois grandes puissances; ensuite, au moyen des rivalités qui nécessairement viendraient bientôt les diviser, elle parviendrait à se soustraire, peu-à-peu, au joug des unes et des autres, viendrait à cette ancienne indépendance, qu'il était impossible de reconquérir uniquement parla forcedes armes. Ce plan comptait en Pologne un nombre déjà remarquable d'approbateurs : le gouvernement même de Varsovie avait, à diverses reprises, demandé à Catherine II, que l'influence fût changée en alliance. D'un autre côté, quelques politiques de Pétersbourg s'étaient prononcés contre le partage. Ainsi tout semblait faire croire à la possibilité d'une union complète de la Pologne et de la Russie. Cependant, à cette époque, on s'aperçut que celle-ci perdait sa majorité dans les délibérations. Potocki crut donc ne pas prendre les armes contre l'indépendance de sa patrie, en acceptant un emploi dans les troupes russes, et en les dirigeant vers la capitale qui voulait les repousser même de ses frontières ; et l'impératrice ne négligea rien pour entretenir long-temps encore l'erreur du comte, auquel, peut-être, elle ne s'imaginait pas devoir sitôt manquer de parole. Toutà-coup, la Prusse déclare qu'elle se détachera de la coalition formée contre les révolutionnaires français, si on ne l'indemnise, en Pologne, des frais de la guerre de France. Ces demandes, déjà approuvées à Vienne, furent consenties à Saint-Pétersbourg:

tion. On lui a reproché quelquefois des arrière-pensées ambitieuses; luimême lut un jour, dans un dictionnaire biographique, qu'il avait visé au trône: « L'auteur se trompe, >> dit-il; mais qu'on se trompe tou» jours ainsi : ambitionner une cou» ronne n'est point l'ambition d'une » aine vile. » (Voyez les notes du Sophiewka, poème polonais, traduit en français par Trombecki. )

la Pologne fut sacrifiée; et le comte Potocki apprit enfin, par expérience, que tôt ou tard le protectorat se termine par l'asservissement. En vain il tenta de fléchir l'impératrice, et de parler de patrie: Notre patrie, dit Catherine, est ici. Ce mot lui révéla l'anéantissement total de la Pologne; et regrettant à-la-fois de voir son pays opprimé et d'avoir combattu dans les rangs de ses oppresseurs, il quitta l'armée russe, et se retira dans les Etats-unis. Quelque temps après, éclata la révolution de Varsovie: des vengeances souvent injustes, toujours barbares, l'ensanglantèrent. Potocki était absent: on ne pouvait rien sur sa vie; mais les hommes qui dirigeaient les affaires, confisquèrent ses biens et flétrirent son nom. Indigné de cette flétrissure et de ces spoliations, il se crut quitte désormais envers ceux qui avaient été ses compatriotes, et redemanda du service à l'impératrice. Une réponse prompte et flatteuse lui annonça sa nomination à la place de lieutenant - général. Potocki alors quitta l'Amérique, et revint jouir en Europe des honneurs dont le comblait sa souveraine, et des douceurs de la vie privée. Mais la faiblesse de sa santé l'empêcha de les goûter long-temps il expira, âgé à peine de cinquante-cinq ans, en 1805. Recommandable, dans sa carrière politique, par la hardiesse, la grandeur de ses vues, et le désintéressement de son caractère, le comte Félix se faisait aimer dans son intérieur par une simplicité et une douceur sans égales. Sa physionomie, un peu froide, cachait une ame ardente et passionnée. Sa franchise était extrême; cependant il parlait rarement pour contredire: un silence significa tif était la marque de son improba

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P-OT.

POTOCKI (IGNACE Comte DE), grand-maréchal de Lithuanie, né, en 1751, d'une famille célèbre de Pologne, se destina, après ses études et ses voyages, à la carrière publique, et fut chargé de plusieurs emplois. Ses vœux tendaient sans cesse à voir l'esprit du tiers-état se relever dans sa patrie: son esprit éclairé lui fit sentir la nécessité de propager l'instruction dans toutes les classes; il y travailla sans relâche pendant qu'il fut membre de la commission de l'instruction publique. Pour substituer des doctrines plus modernes à la vieille scolastique, il traduisit lui-même la logique de Condillac, et l'introduisit dans l'enseignement public du royaume. Il fit aussi voyager, à ses frais, plusieurs savants. Son dévoùment pour sa patrie ne fut pas moins vif. L'indépendance de la Pologne fut son grand but; à cet effet, il s'unit à quelques-uns des hommes les plus considérés et les plus opposés à l'influence du cabinet russe : ils s'attachèrent en commun à renverser la constitution imposée en 1776; et, après qu'elle eut été supprimée, Potocki coopéra, auprès du roi Stanislas Auguste, au projet de la nouvelle constitution, qui fut proclamée en 1791. Au sujet de la vente projetée des starosties, il avertit la diète 34

de ne pas prendre la France pour
modèle dans la vente des domaines
nationaux. « Gardez-vous, dit-il,
>> d'imiter en ceci une nation si
>> digne de nos respects à tous au-
>>tres égards; les fautes qu'elle a
>> commises, ont pour principe une
>> seule erreur : elle a toujours con-
» sidéré les hommes pris en masse;
» elle a perdu de vue les individus:
» elle a voulu être juste envers tous;
» elle a été injuste envers les indivi-
» dus.... L'esprit saisira toujours ces
» grandes vérités générales, et les
» approuvera; mais un cœur vrai-
» ment généreux, et ami de la vertu,
>> ne se permettra point, dans la plu-
» part des cas, l'application et l'exé-
»cution de ces mêmes principes
» dont l'esprit est convaincu (1). »
Potocki accepta ensuite une mission
en Prusse, qui avait pour objet de
le cabinet de Berlin à la
gagner
nouvelle constitution. Mais, tandis
qu'il employait tous les moyens pour
déjouer les projets de la Russie, son
proche parent, Stanislas-Félix Po-
tocki, les secondait de tout son
pouvoir. D'autres nobles furent ga-
gnés au même parti la confédé
ration eut lieu, le manifeste de Tar-
ainsi les
que
gowitz parut; et,
triotes polonais l'avaient prévu, la
Pologne fut envahie et partagée.
Ignace Potocki, persécuté pour son
patriotisme, et dépouillé de ses di-
gnités et de ses biens, se réfugia en
Saxe. Mais aussitôt que l'insurrec-
tion des Polonais, en 1794, et la
victoire de Kosciusko à Praclawice,
curent affranchi sa patrie du joug
des Russes, Ignace Potocki se rendit
auprès de Kosciusko, et fut chargé
par lui d'organiser, à Varsovie, un

pa

(1) Voy. ce discours, parmi les pièces justificatives de l'Histoire du règne de Frédéric -Guillaume 11, par le comte de Ségur.

gouvernement provisoire; ce qu'il fit,
en se réservant le portefeuille des
affaires étrangères. Cependant les
Russes et les Prussiens coalisés en-
vahirent de nouveau le sol polonais :
le gouvernement indépendant fut
renversé; et le comte Potocki fut
arrêté, et traîné dans la forteresse
de Schlusselbourg. Ce ne fut qu'a-
qu'il
près l'avénement de Paul Ier.,
obtint la liberté. Fixé dès-lors en
Gallicie, il y vécut dans la retrai-
te, mais étroitement surveillé par la
police autrichienne, surtout lorsque
l'armée française, s'approchant de
la Pologne, annonça hautement le
projet d'en changer le gouverne-
ment. Potocki fut arrêté et trans-
porté à Cracovie; et ce ne fut qu'au
bout de quelques mois qu'on lui per-
mit de retourner dans ses terres.
Comme il n'avait rien perdu de son
patrimoine, il se proposait de se
rendre auprès de Buonaparte, et de
l'aider à révolutionner la Pologue;
mais la mort arrêta ses projets, le
D-G.
30 avril 1809.

POTT (JEAN-HENRI ), chimiste allemand, né à Halberstadt, en 1692, étudia d'abord la théologie à l'université; mais il abandonna bientôt cette science pour la médecine e tla chimie, qui avaient pour lui un attrait irrésistible. Ayant soutenu une thèse, publiée ensuite avec d'autres sous ce titre : Exercitationes chimica de sulphuribus metallorum, Berlin, 1738, in-4°., il fut reçu docteur en 1720. Il alla s'établir à Berlin, y fut admis dans l'académie des sciences; et lors de la fondation du college de médecine et de chirurgie, il fut appelé à la chaire de la chimie, à laquelle on joignit ensuite la direction des pharmacies royales. Des querelles qu'il eut avec ses collègues, Eller, Lehman, Margraf,

:

etc., l'engagèrent, vers la fin de sa vie, à se retirer de l'académie. Après une vie laborieuse, et marquée par des découvertes importantes en chimie, il mourut le 20 mars 1777. On doit à ses recherches la composition d'un tombac ou demi-or, plus malléable que le Pinchbeck anglais (V. PINCHBECK); et il a perfectionné le procédé pour la rectification de l'éther sulfurique. Il croyait que toutes les parties du corps animal contiennent un acide particulier. Mais il est principalement connu par ses nombreuses expériences sur les pierres et les terres qui peuvent fournir la pâte de la porcelaine, et qu'il réussit à découvrir près de Berlin, en 1741 c'est à ses travaux que les produits de la manufacture de cette capitale de la Prusse sont redevables de pouvoir rivaliser avec la porcelaine de Saxe. Outre le recueil de thèses annoncé ci-dessus, il a publié: I. Observationum et animadversionum chymicarum collectio, Berlin, 1739 et 1741, t. 1 et 11. II. Recherches chimiques sur la litho-géognosie, etc., Potsdam, 1746, 1757; la suite, Berlin et Potsdam, 1751 et 1757. Ces recherches, qui traitent, entre autres objets, de l'emploi des terres dans! 'art du potier, ont été traduites en français, par Montamy, sous ce titre Litho-géognosie ou Examen chymique des pierres et des terres, Paris, 1753, 2 vol. in-12. Parmi le grand nombre d'expériences dont est rempli cet ouvrage, les plus intéressantes sont celles par les quelles l'auteur constate que certaines espèces de terres et de pierres, qui, tant qu'elles sont seules, résistent à la violence du feu sans entrer en fusion, se fondent au contraire, avec la plus grande facilité dès qu'elles sont mêlées ensemble dans

:

I

des proportions convenables. III. Traité physico-chimique du sel d'urine, Berlin, 1787, nouvelle édit., 1761. IV. Mélanges physico-chimiques, avec beaucoup d'expériences importantes et nouvelles, Berlin, 1762, in-4°. Il a déposé un grand nombre de ses Observations dans les Miscellanea Berolinensia, et dans la Bibliotheca dissertationum de Halle. Voy. son Éloge, dans les Nou veaux Mémoires de l'acad. de Berlin, 1770, 1, p. 55. D-G.

POTT (PERCIVAL), chirurgien anglais, naquit à Londres, en 1713. La mort de son père le laissa, dès l'âge de quatre ans, sous la protection de l'évêque de Rochester, Wilcox, parent éloigné de sa mère. Cette circonstance semblait le destiner à la carrière de l'Église; mais il montra de bonne heure, pour celle où il s'est illustré, une prédilection qui heureusement ne fut pas contrariée. Placé, en 1729, chez un chirurgien attaché à l'hôpital Saint-Barthélemi, il profita si bien des avantages de sa situation, pour s'instruire dans l'anatomie et se préparer aux opérations chirurgicales, qu'on le distingua bientôt comme un sujet de la plus grande espérance: l'attente publique ne fut pas trompée. S'étant établi en 1736, non-seulement il obtint de grands succès dans le traitement des maladies et des plaies, mais il mérita éminemment de l'humanité, en substituant des moyens plus doux aux expédients cruels, tels que le cautère actuel, employés jusqu'alors. Il fut élu en 1745 chirurgien adjoint, et en 1749 l'un des principaux chirurgiens de l'hôpital où il s'etait formé: il y donna des leçons sur son art, qui ajoutèrent à sa réputation. Elle s'étendit encore après qu'un accident l'eut, en quelque sorte, con

traint à communiquer le fruit de ses observations au public, par la voie de l'impression. Tout entier à ses occupations, il avait seulement inséré dans les Transactions philosophiques (tome XLI.) un mémoire sur les tumeurs accompagnées de ramollissement des os; mais en 1756 une fracture compliquée de la jambe, causée par une chute de cheval, l'ayant retenu long-temps chez lui, il employa ce loisir forcé à rédiger un Traité sur les hernies, qu'il mit au jour la même année; et l'accueil que cet ouvrage reçut, l'encouragea à publier d'autres écrits. La société royale l'admit dans son sein, en 1764. L'année suivante, il joignit à ses travaux, des cours particuliers de leçons qu'il improvisait avec autant de facilité que de talent. Il était consulté par les personnes du plus haut rang; et cette préférence, justifiée par son mérite supérieur, lui a attiré le reproche de ne savoir jamais trouver du temps à donner aux indigents qui venaient réclamer ses soins: mais l'imputation était, à ce qu'il paraît, très-injuste; et on ne pouvait l'accuser que de quelque rudesse dans les manières. En 1787, il résigna sa place de chirurgien à l'hôpital SaintBarthélemi, où son service datait d'un demi siècle. Il mourut en décembre 1788. P. Pott possédait des connaissances étendues et très variées, une grande sagacité, un jugement sûr, beaucoup de sang-froid et de dextérité. Le style de ses ouvrages, dont la liste suit, est remarquable par une précision et par une élégance regardées comme classiques: 1. Traité des hernies, 1756, in-8°.; deuxième édition, 1763. II. Memoire sur un genre particulier de hernie, qu'on rencontre fréquemment dans les enfants nouveau-nés,

et quelquefois dans les adultes, 1756, in-8°. III. Observations sur l'affection du coin de l'œil, commu nément appelée fistule lacrymale, 1758, in-8°. IV. Observations sur la nature et les conséquences des plaies et contusions à la téte, des fractures du crane, des concussions du cerveau, etc., 1760, in-8°. V. Remarques pratiques sur l'hydrocèle, ou hernie aqueuse, et sur d'autres ma ladies du scrotum, etc.; c'est un supplément au Traité des hernies, 1762, in-8°.- Observations sur une hernie de la vessie urinaire, renfermant une pierre (Trans. phil., Live. vol., 1764). VI. Remarques sur la maladie communément appelée fistule à l'anus, 1765, in 8°. VII. Observations sur la nature et les conséquences des lésions auxquelles la tête est exposée par l'effet de violence exté rieure; suivies de Remarques sur les fractures et les dislocations en général, 1768, in-8°.; c'est proprement une deuxième édition du traité indiqué numéro IV. VIII. Exposé de la méthode pour obtenir la guérison radicale de l'hydrocèle, au moyen d'un seton, 1772, in-8°. IX. Observations chirurgicales relatives à la cataracte, au poly pe du nez, au chancre du scrotum, aux différentes espèces de hernies, et à la mortification des orteils et des pieds, 1775, in-8°. X. Remarques sur l'espece de paralysie des mem bres inférieurs, qui accompagne fréquemment la courbure de l'épine. et qu'on suppose en étre l'effet, avec la méthode de guérison, 1779, in8°. XI. Nouvelles remarques sur l'état de nullité des membres inférieurs par suite de la courbure de l'épine, 1783, in-8°. Tous ces ouvrages de Percival Pott furent recueillis et publiés par lui, in-4°.,

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