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le thyrse et le vase à boire (c'est ainsi que Pausanias le nomme), étaient évidemment l'emblème des banquets, où des amis réunis boivent à la ronde, en s'exprimant leurs vœux pour leur commune prospérité; et l'aigle de Jupiter, au-dessus du thyrse, ennoblissait encore cette pensée, en mettant l'union des citoyens sous la protection du plus puissant des dieux. Un autre ouvrage n'honora pas moins Polyclète : ce fut une statue de Jupiter Meilichius, ou de Jupiter qui touche les ames, de Jupiter Conciliateur, élevée dans la ville d'Argos. Cette statue était en marbre. Le fait à la suite duquel elle fut consacrée, nous en indique la date et l'esprit. Les Argiens, afin de se trouver constamment en état de défense contre les Lacédémoniens, établirent un corps permanent de mille soldats. Bias, chef de cette troupe, abusa si étrangement de la force mise à sa disposition, qu'il alla jusqu'à enlever une jeune fille, le jour de son mariage, et à la violer. Sa victime le laissa s'endormir; alors elle lui creva les yeux, parvint à s'échapper, et se mit sous la protection du peuple. Les Argiens prirent sa défense; et il fut livré un combat où les Mille furent tous massacrés. La statue de Jupiter Meilichius fut le gage du rétablissement de l'ordre. Cet événement eut lien peu temps après l'époque où Philippe, roi de Macédoine, père d'Alexandre, obligea les Lacédémoniens à se départir des terres qu'ils avaient usurpées sur le domaine d'Argos. La guerre des Argiens contre les Lacédémoniens dura plusieurs années. Démosthène dit, dans la sixième Philippique, qu'au moment où il le, Philippe envoie des troupes dans le Péloponnèse au secours des Ar

des trépieds de bronze consacrés par les Lacédemoniens, dans le temple d'Apollon, à Amycles, en mémoire de la bataille d'Egos-Potamos? Le texte de Pausanias porte seulement Polyclète d'Argos; mais il est vraisemblable qu'il s'agit de l'Ancien, attendu qu'à l'époque de ce grand événement, qui eut lieu la 4. année de la XCII. Olympiade, 405 ans avant J.-C., le second Polyclète ne pouvait être âgé, au plus, que de seize à dixhuit ans. Dans la xcvi. olympiade, cet artiste exécuta la statue d'Antipater de Milet, qui remporta le prix du pugilat: c'est Antipater lui-même qui la fit ériger. Polyclète accrut sa réputation par une statue de Jupiter Philéus, ou de Jupiter protecteur de l'amitié, élevée à Mégalopolis, à l'époque de la fondation de cette ville. On sait que la cons. truction de Mégalopolis date de la 2o. année de la cire. olympiade, ou de l'an 371 avant J.-C. Les ha bitants de plusieurs petites villes de l'Arcadie abandonnèrent alors leur patrie, et se réunirent pour fonder une grande ville, capable de résister aux attaques des Lacédémoniens, leurs perpétuels ennemis. Ce fut sans-doute en mémoire de l'attachement fraternel qui les avait rapprochés les uns des autres, et afin de perpétuer chez leurs fils ce généreux sentiment, qu'ils consacrèrent une statue au dieu de l'amitié. La composition de la figure fut conforme à cette pensée. Le dieu était chaussé d'un cothurne; d'une main il tenait un thyrse, de l'autre, un vase à boire. Jusque-là, dit Pausanias, il ressemblait à Bacchus; mais un aigle était posé sur le thyrse, et ce symbole faisait reconnaître Jupiter. L'intention de Polyclète se manifestait clairement dans ces signes réunis : car

de

par

giens, et qu'il y est attendu lui-même à la tête d'une puissante armée. Or, la harangue dont il s'agit, fut prononcée la 2e. année de la cix. olympiade. La statue de Jupiter Meilichius d'Argos, dut par conséquent être érigée au plutôt la 2o année de la cixe. Olympiade, 343 ans avant J.-C. L'époque où florissait le second Polyclète, se trouve ainsi fixée de la XCIV. olympiade à la cixe. ; et com, me entre cette dernière date et celle de la naissance du premier Polyclète, il y a un intervalle de cent quarante ans, il est encore évident, par ce rapprochement, qu'il a existé deux PoLyclètes: l'un célèbre par les progrès qu'il fit faire à l'art; l'autre, illustre par deux statues qui se lient à des événements importants de l'histoire de la Grèce, E.-C D-D

POLYCRATE, tyran de Samos, vivait au sixième siècle avant J.-C. II employa, pour retenir le peuple dans la soumission, tantôt la voie des fêtes et des spectacles, tantôt celle de la violence et de la cruauté. Il sut le distraire du sentiment de ses maux, en le conduisant à des conquêtes brillantes; de celui de ses forces, en l'assujétissant à des travaux pénibles. On le vit s'emparer des revenus de l'état, quelquefois des possessions des particuliers; s'entourer de satellites, tromper les hommes, se jouer des serments les plus sacrés, favoriser en même temps les lettres (V. ANACREON), réunir auprès de sa personne ceux qui les cultivaient, et rassembler les plus belles productions de l'esprit humain dans sa bibliothèque. Toutes les années de son règne, toutes ses entreprises, avaient été marquées par des succès. Ses peuples s'étaient accoutumés au joug; ils se croyaient heu reux de ses victoires, de son faste,

et des superbes édifices élevés par ses soins à leurs dépens: mais les jours de revers que lui préparait la destinée n'étaient pas éloignés. Amasis, roi d'Égypte, avec lequel des liaisons d'hospitalité l'avaient uni lui écrivait : « Vos prospérités m'é »pouvantent. Je souhaite à ceux » qui m'intéressent, un mélange de » biens et de maux: car une divi

nité jalouse ne souffre pas qu'un » mortel jouisse d'une félicité inal»térable. Ménagez-vous des peines » et des revers pour les opposer aux » faveurs constantes de la fortune. >> Polycrate, frappé de cette lettre, se condamne au sacrifice d'une pierre précieuse qu'il avait au doigt, en la jetant à la mer. Quelques jours après, un de ses officiers, l'ayant retrouvée dans le gosier d'un poisson, la lui rapporte. Il se hâta d'en instruire Amasis, qui, dès ce moment, rompit tout commerce avec lui. Les craintes du monarque égyptien ne furent que trop réalisées. Pendant que Polycrate méditait la conquête de l'Ionie, et de la mer Égée, Oronte, l'un des satrapes de Cambyse, qui commandait dans une province voisine, parvint à l'attirer dans son gouvernement; et après l'avoir fait expirer dans des tourments horribles, il ordonna d'attacher son corps à une croix élevée sur le mont Mycale, en face de Samos; monument terrible de la vicissitude des choses humaines. Cet événement arriva vers l'an 524 avant J.-C. T-D.

POLYDORE-VIRGILE ou VERGILE, historien, né, vers 1470, à Urbin, embrassa l'état ecclésiastique, et professa les belles-lettres à Bologne. Ses talents l'ayant bientôt fait connaître, il fut choisi par le pape Alexandre VI, pour aller recevoir le denier de saint Pierre,

que l'Angleterre payait au Saints Siege (1). Le cardinal Corneto, son parent (Voyez GASTELLESI, VII, 322), l'avait annoncé comme un homme fait pour propager le goût de la bonne latinité; et il y reçut des savants un accueil distingué Après avoir rempli l'objet de sa mis sion, il se disposait à quitter l'Angleterre mais le roi Henri VII le retint à sa cour; et il fut aussi en grande faveur auprès d'Henri VIII. Adrien Castello, son parent, évêque de Bath et Wells, lui donna, en 1507, l'archidiaconé de cette dernière vil le. Richard Fox, évêque de Winchester, l'ayant déterminé à écrire l'Histoire d'Angleterre, tous les dépôts publics lui furent ouverts pour puiser les matériaux de cet ouvrage. L'indifférence avec laquelle Polydore parut voir l'Angleterre se séparer de l'Église romaine, a fait suspecter son attachement aù catholicisme. Cependant on ne cite aucun acte, dans toute sa conduite, qui paraisse justifier ce soupçon. 11 y avait près de cinquante ans qu'il était éloigné de son pays, quand l'affaiblissement de sa santé lui fit pren dre la résolution de revoir l'Italie. It obtint, en 1550, la permission d'y retourner en conservant les revenus de sa prébende. Il revint donc à Urbin, sa ville natale, où il mourut, au plus tard, en 1555. On a de Polydore - Virgile I. Proverbio rum libellus, Venise, 1498, 1506, in-4°. Bâle, 1521, in-fol., et 1541 in-8°. (2) Polydore se flattait d'être le

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premier auteur, depuis la renaissance des lettres, qui eût publié un Recueil de sentences. Il se plaignit amèrement qu'Érasme eût voulu le priver de cette faible gloire (gloriola), en affectant de ne point le nommer dans la préface de son livre d'Ädages. Erasme se justifia par une lettre, et Polydore lui rendit son amitié (3). II. De inventoribus rèrum, Venise, 1499, in-4o.; ibid., 1503, Strasbourg, 1509, 1512, même format (4). Ces différentes éditions ne renferment que les trois premiers livres : Polydore y en ajouta cinq, en 1517, et les adressa à son frère Matthieu Virgile, professeur de philosophie à Padoue, par une lettre qui contient des particularités curieuses (5) Les huit livres furent imprimés, pour la première fois, à Bâle, 1521, in fol. La seule édition que recherchent les amateurs, est celle des Elzeviers, Amsterdam, 1671, in-12: De inventoribus rerum libri #111; necnon de prodigüis libri tres. Les huit livres des Inventeurs des choses ont été traduits en français, par Belleforest, Paris, 1576, 1582, in-8°. Cet ouvrage, dans lequel on trouve une érudition indigeste et dénuée de critique, fut mis à l'index à Rome, et censure par la Sorbonne, parce que l'anteur, en rapportant l'originé de diverses cérémonies religieuses, avait prétendu qu'elles étaient empruntées des Païens. Becman à in

(3) Bayle a recueilli dans son Dictionnaire, à l'art. Virgile (Polydore), les détails de sa querelle avec Erasme.

(4) Les deux éditions de Strasbourg, qui sont fort rares sans être recherchées, contiennent un petit traité d'Antoine Sabellicus: De artium inventoribus.

(5) Cette Lettre se trouve dans l'édit. de Paris, 1528 ou 1529; mais elle a été mutilée, on ne sait pourquoi, dans les éditions suivantes : c'est ce qui a déterminé Bayle à en donner les passages les plus

intéressants.

séré, dans son Histoire des inventions (tome III, pag. 564-78, en allemand), un long et curieux article bibliographique sur les diverses éditions de ce livre (6), que Lambeck (Lambecius) a pris pour texte de ses leçons, à Hambourg, en 1657 et 58 (Voy. la préface de son Prodromus). III. Deprodigiis libri tres, Bâle, 1531, in-8°.; ibid., 1545, et à la suite de l'ouvrage qu'on vient de citer dans l'édition des Elzeviers; traduit en français, avec le Traité d'Obsequens (V. ce nom), qui porte le même titre, par George de La Bouthière, Autunois, Lyon, 1555, in-8°. Le but de l'auteur est de combattre les préjugés populaires touchant la divination, et de démontrer que la plupart des faits cités comme des prodiges, n'ont rien que de naturel. IV. In Dominicam precem Commentariolus. Cette paraphrase de l'Oraison dominicale a été imprimée plusieurs fois à la suite des denx ouvrages précédents. V. Anglica historiæ libri 26. Cette Histoire, qui va jusqu'à la fin du règne d'Henri VII, fut publiée, pour la première fois, par Simon Grynæus, Bâle, 1534, in-fol. L'auteur y fit diverses corrections, qu'il s'empressa d'adresser à Grynæus, comme on l'apprend par la Préface de la seconde édition, qui parut en 1536: elle a été réimprimée depuis, en 1556 et en 1570, in-fol.; enfin Ant. Thysius l'a reproduite à Leyde, en 1649 et 1651, in-8°. « J'accorderai aux écrivains anglais, dit Tiraboschi, que cette histoire est superficielle et rem

(6) Becman en décrit 38 éditions du seizième siècle, 13 du dix-septième, une seule du dix-huitième (Cologne, 1726, in-8°. ), augmentée d'une deuxième partie, Auctorum qui à Polydoro relicti sunt: total 54 éditions, compris la traduction allemande de M. T. Alpinus, imprimée à Francfort, qui est sans date.

plie d'erreurs, et que le style n'en est pas très-élégant : mais, que Polydore, comme on le raconte, ait jeté au feu les anciennes Chroniques dont il s'était servi, pour donner plus de prix à son ouvrage, c'est une fable à la

quelle aucun homme de bon sens ne pourra jamais ajouter foi (Storia del la letteratura italiana, VII, 1027).» VI. De patientiâ et ejus fructu libri 11; de vitá perfectá lib. unus; de veritate et mendacio lib.unus. La Préface que Polydore a mise en tête de ces trois Opuscules, est datée de Londres, 1543; ils ont été imprimés, avec son Traité des prodiges, dans l'éd. de Bâle, 1545, in-8°. (V. GILDAS, XVII, 366.) W-s.

POLYEN, historien grec, né en Macédoine, exerçait la profession d'avocat à Rome, sous le règne de MarcAurèle, qui associa Lucius Verus à l'empire, vers l'an 161 de notre ère. C'est tout ce qu'on sait de cet écrivain, et ce qu'il nous apprend lui-même dans la préface de ses Stratagèmes : il les dédia à ces deux princes, étant déjà avancé en âge. Ces Stratagèmes ou ruses de guerre, distribués en huit livres, furent publiés pour la première fois en 1589, par Isaac Casaubon, d'après un manuscrit extrêmement imparfait, et qu'il avait payé fort cher; il y fit un nombre considérable de corrections, soit d'après ses propres conjectures pres conjectures, soit d'après la traduction latine de Juste Vulteius, imprimée auparavant à Bâle, en 1550. Pancrace Maasvicius, aidé de deux nouveaux manuscrits, donna une édition de Polyen, à Leyde, en 1690, in-8°. ; et s'il améliora le texte en beaucoup d'endroits, il le défigura en beaucoup d'autres par ignorance. Samuel Mursinna reproduisit cette édition à Berlin, en

;

1756, sans y rien ajouter que l'index des mots grecs. Enfin M. Coray, fondant habilement dans son travail celui de ses devanciers, fit sortir des presses d'Eberhart, Paris, 1809, in-8°., le texte grec, considérablement épuré. La comparaison des endroits où il s'est écarté des précédentes éditions, occupe à-peu-près les cent dernières pages du volume, avec quelques notes qui servent à l'explication des passages, ou des expressions les plus difficiles; une Table des chapitres et un Index fort étendu des mots grecs et des nomspropres ajoutent à l'utilité du livre, en offrant de plus grandes facilités pour s'en servir. La manière la plus simple et la plus naturelle de juger Polyen, c'est de le comparer avec Elien comme celui-ci, il a pris chez les écrivains qui l'avaient précé dé, tout ce qu'il raconte; et le temps, ayant détruit un grand nombre des ouvrages où il a puisé les faits qu'il nous transmet, les Stratagèmes de Polyen sont devenus, comme les Histoires diverses d'Elien, un livre nécessaire pour la connaissance de l'histoire. Ces deux écrivains ont

encore entre eux ce trait de res

semblance, qu'ils ont compilé, sans goût et sans jugement, les livres qu'ils avaient sous les yeux. Polyen, oubliant son titre, met au nombre des stratagèmes, tantôt des apophtegmes, tantôt des actions qui n'ont rien de commun avec ce qui mérite véritablement ce nom; quelquefois il rapporte, sous ce titre, des traits de bassesse dignes des plus vils esclaves, ou des actions que le soin de sa propre conservation peut inspirer à l'homme le plus borné; d'autres fois il vous donne pour des stratagèmes, des injustices atroces, des injures, des actes de cruauté qui

seraient punis partout du dernier supplice; enfin il lui arrive de rapporter des faits, ou entièrement faux, ou mêlés de circonstances qui y répandent de la confusion et de l'incertitude, soit que sa mémoire l'ait mal servi, soit qu'il les ait copiés, sans discernement, tels qu'il les a trouvés dans d'autres historiens peu dignes de foi. Son style, quoique meilleur que celui d'Ælien qui lui est postérieur, a d'assez nombreux défauts: il multiplie jusqu'à satiété les expressions synonymes, employées sans conjonctions; il pèche souvent contre la propriété des termes, contre l'emploi régulier des temps, des modes ou des formes des verbes, genre de fautes qu'on peut reprocher à la plupart des écrivains qui ont vécu vers la même époque. Nous avons une traduction des stratagemes de Polyen, par D. G. A. L. R. D. L. C. D. S. M. (Dom Gui-Alexis Lobineau, religieux de la congrégation de Saint-Maur), avec des notes et la version de Frontin, par d'Ablancourt, Paris 1739, 2 vol. in12.- Cicéron, dans ses Questions académiques, parle d'un autre PoLYEN, géomètre profond, qui finit par soutenir, avec Épicure, la fausseté de la science à laquelle il s'était appliqué la moitié de sa vie. Z.

POLYGNOTE DE THASOS peintre grec, florissait vers la xce. olympiade, et fut un des premiers qui fit prendre à son art un dévelop pement remarquable; ce que Théophraste a voulu, sans doute, exprimer, en lui attribuant l'honneur d'avoir inventé la peinture. En effet, on compte antérieurement plusieurs peintres monochromes; lui-même fut élève de son père Aglaophon, qui paraît avoir connu le secret des couleurs: mais on ne se servit long

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