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il reprochait une trop grande affectation dans l'emploi des mots vieillis. Ce défaut était précisément celui de Pollion : dans le Dialogue des orateurs, attribué à Tacite, l'un des interlocuteurs trouve que Pollion, dans ses Oraisons, comme dans ses Tragédies, paraît s'être modelé sur Pacuvius et sur Accius (Voy. ch. 21); et Quintilien, qui lui accorde beaucoup d'invention et d'exactitude, ajoute que son style est si éloigné de la douceur et de la pureté de Ciceron, que l'on croirait qu'il l'a précédé d'un siècle (Institut. oratoriæ, I, 10). De tous les écrits de Pollion, il ne reste que trois Lettres, parmi celles de Cicéron (Epistol. ad familiar. lib. x); mais l'amitié d'Horace et de Virgile suffit pour lui assurer l'immortalité : on a déjà parlé de l'Ode qu'Horace lui adressa; et Virgile a donné le nom de Pollion à l'une de ses plus belles Églogues. (Voy. Commentatio de C. Asinii Pollionis vita et studiis doctrinæ, auct. J. R. Thorbecke, Leyde, 1820, in-8°.) C. H. Eckard, en 1743, et P. Ekerman, en 1745, avaient aussi composé, chacun, sur Pollion, une Dissertation particulière. M. de Bugny a intitulé: Pollion ou le Siècle d'Auguste, un tableau historique de cette brillante époque de l'histoire W-s. POLLION (TREBELLIUS), l'un des écrivains de l'Histoire Auguste, florissait à Rome, sous le règne de Constance Chlore, vers l'an 300 de notre ère. Il nous apprend que son aïeul avait vécu dans l'intimité de Tétricus; et l'on voit, par un autre passage de son histoire, qu'il jouissait d'une certaine fortune, puisqu'il avait à ses gages un secrétaire pour écrire ses compositions. Trebellius était auteur des Vies des empereurs

romaine.

il

depuis les Philippe; mais il ne nous en reste qu'une partie, qui comprend la fin du règne de Valérien, les Vies des deux Galliens, celles des trente tyrans qui se disputèrent tour-à-tour l'autorité sous ces princes, et enfin, la vie de Claude-le-Gothique, aïeul de Constance. Il avait entrepris cet ouvrage à la prière d'une personne dont il regardait les moindres desirs comme des ordres ; et il lui en faisait passer les différentes parties, à mesure qu'il les terminait, pour les soumettre à la censure des gens de lettres qui s'assemblaient dans le temple de la Paix. En terminant la vie de Gallien, Trebellius avertit qu'il n'a pas dit tout ce qu'il savait sur ce prince, craignant de s'exposer à la vengeance de ses descendants. Afin de compléter le nombre des trente tyrans, dont il promettait la vie, y avait ajouté la fameuse Zénobie, et Victoire, mère de Victorin; mais on le railla d'avoir placé deux femmes parmi les tyrans: docile à la critique, il leur substitua Tite et Censorin, quoiqu'ils ne vécussent pas à la même époque, et renvoya l'ouvrage à son Mécène, en lui disant : « Communiquez à qui vous voudrez cette histoire tracée avec plus de vérité que d'élégance; je me suis engagé, non à donner des ornements mais des faits. » En commençant l'histoire du règne de Claude, Trebellius annonce qu'il se propose de l'écrire avec plus de soin que ses autres ouvrages, en considération de César Constance; mais, prévoyant bien qu'on ne manquerait pas de le soupçonner de flatterie, il proteste qu'il ne demande aucune faveur, et en appelle au témoignage de tous ceux qui le connaissent. Cette vie de Claude, écrite du style le plus déclamatoire, p'e qu'un panegyrique de ce prince,

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ses talents et ses vertus rendaient digne d'un meilleur historien (V. CLAUDE II). On reproche à Trebellius d'avoir passé sous silence, ou du moins à peine indiqué, des faits trèsimportants; mais il s'est justifié d'avance en avertissant qu'il n'a pas voulu répéter ce que d'autres avaient dit avant Ini: souvent il renvoie le lecteur à des ouvrages qui, malheureusement, ne subsistent plus (1); ou bien il avoue qu'il n'a pas pu se procurer les matériaux dont il avait besoin. Malgré ses défants, l'Histoire de Trébellius est précieuse par une foule de détails qu'on chercherait vainement ailleurs; on la trouve à la suite des Fragments de J. Capitolin, dans le Recueil des Historia Augustæ scriptores (V. SPARTIEN). Casaubon conjecture que Trebellius avait laissé d'autres ouvrages; mais on en ignore même les titres.

W-s.

POLLNITZ. V. POELLNITZ. POLLUCHE (DANIEL), membre de la société littéraire d'Orléans, né dans cette ville, en 1689, s'appliqua sans relâche à recueillir et étudier les monuments qui pouvaient servir à faire connaître ou illustrer sa patrie: mais dans le temps qu'il concevait et commençait à exécuter le plan d'un grand travail sur l'Orléanais, dont l'histoire l'avait occupé toute sa vie, il fut atteint d'une maladie qui le priva de l'usage de ses facultés; et après avoir langui quelque temps, il mourut le

(1) Dans la Vie de Valérien, Trebellius cite l'his.

torien Celestin, et rapporte des Lettres tirées du Recueil de Julius Cordus; dans celle de Gallien, il indique Palfurius Sura, qui avait tenu un Journal des actious de ce prince; dans la Vie de Victorin, il cite l'historien Julius Aterianus; dans celle de Macrien, Maonius Astianax; dans celle d'Odenat, Cornel. Capitolin; dans celle d'Emilien, le grammairien Proculus; dans la Vie de Tetricus, Gellius Furens; dans celle de Tite, Dexippe; et enfin, dans celle de Claude, Gallus Antipater, qu'il nomme l'opprobre des flatteurs et des historiens.

5 mai 1768. Son principal ouvrage est la Description de la ville et des environs d'Orléans, avec des remarques historiques, 1736, in-8°. La description est celle que dom Duplessis destinait à servir d'introduction à l'Histoire d'Orléans dont il s'occupait alors. Polluche y joignit des Remarques pleines d'érudition et de sagacité, et deux Mémoires sur des points d'antiquité de l'Orléanais. Beauvais de Préau ajouta, dans la suite, de nouvelles observations à celles de Polluche, son parent, et en donna une édition sous ce titre : Essais historiques sur Orléans, ou Description topographique et critique de cette capitale et de ses environs, Orléans, 1778, in-8°.; le savant éditeur l'a fait précéder d'une Notice abrégée sur la Vie de Polluche, avec le Catalogue de ses ouvrages, dont plusieurs sont restés en manuscrit (1). Outre quelques Disserta. tions, insérées dans le Mercure et les Mémoires de Trévoux, on a de Polluche divers Opuscules, parmi les-. quels on doit citer: I. Dissertation sur une médaille de Posthume, 1726, in-12. II. Description de l'entrée des évéques d'Orléans, 1734, in-8°. III. Discours sur l'o rigine du privilége accordé aux évêques d'Orléans, de délivrer les prisonniers le jour de leur entrée solennelle, 1734, in-8°. IV. Dissertation sur l'offrande de cire appelée les Goutières, 1737, in-8°. V. Dissertation sur le GEN ABUM (de D. Duplessis), avec des Remarques sur la Pucelle d'Orléans, 1750, in-8°. Polluche pense, comme Duplessis, que

(1) A la mort de Polluche, ses nombreux manuscrits, demandés à sa famille, au nom du duc d'Orléans, furent déposés aux archives du PalaisRoyal. Par l'effet de la révolution ils ont disparu avec tant d'autres objets précieux que contenait ce riche dépôt. D. L. P

l'ancien Genabum est Orléans et non pas Gien, ainsi que la ressemblance du nom l'avait fait conjectu rer à d'autres érudits. VI. Problème historique sur la Pucelle d'Orléans, 1750, in-8°. L'auteur, en faisant naître quelques doutes sur le genre de mort de cette héroïne, cherche à établir qu'elle n'a point été brûlée par les Anglais. Malheureusement ce fait n'est que trop bien prouvé par les témoignages les plus authentiques (V.JEANNE-D'ARC). VII. Examen des Remarques de l'auteur des Nouveaux Mémoires de littérature ( d'Artigny), sur Jeanne-d'Arc, dans le Mercure; d'Artigny a insé ré ce morceau dans le tome vii de son Recueil, p. 57-67, avec des Notes. VIII. Un Recueil d'épitaphes et d'inscriptions, in-4°., de 354 pag. Ce volume, devenu très-précieux par la destruction des anciens châteaux et des abbayes, fait partie des manuscrits de la bibliothèque d'Orléans, dont Polluche est un des bienfaiteurs. (Voy. le Catalogue des Manuscrits de la bibliothèque d'Orléans, par M. A. Septier, p. 244). W-s.

POLLUX (JULIUS), grammairien et sophiste célèbre du siècle de MarcAurèle, naquit, vers la fin du règne d'Adrien, à Naucratis, en Egypte (1). Il passa ses premières années dans sa patrie, où il apprit, à l'école de son père, les premiers éléments de la littérature, et cette partie de la grammaire que les anciens nommaient critique. Il vint ensuite à Rome s'initier sous Adrien de Tyr, aux secrets de l'art oratoire, ou plutôt de l'art sophistique. Ce n'était plus le temps où les grandes improvisations délibératives de Dé

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(1) Philost. Vita Soph. liv. 11; Suid., art, POL

LUX.

mosthène et des Gracques gouvernaient un peuple libre: la foule n'admirait que de belles et harmonieuses périodes, de brillantes et ingénieuses images. Dénué de génie, Pollux avait la dose d'esprit, de mémoire et d'audace nécessaire pour donner à des phrases ce vernis d'éloquence. Aussi, au bout de quelques années, sa réputation balança-t-elle celle de son maître. Une foule de disciples, parmi lesquels on pourrait en citer de célèbres, entre autres Antipater de Tyr, s'attachèrent à lui. Enfin Marc-Aurèle lui-même, juge habile, autant que protecteur des sciences, des lettres et des arts, Marc-Aurèle, séduit et par la spirituelle subtilité du sophiste et par la mélodieuse élégance du rhéteur, voulut qu'il fût un des instituteurs du jeune Commode, son fils. Rien ne manqua dès-lors à la gloire de Pollux, ni les louanges ni les critiques. Deux sophistes surtout, Athénodore et Lucien (2), employèrent contre lui l'arme du ridicule, non moins puissante sans doute alors que de nos jours, puisqu'ils la préférèrent au raisonnement et à l'analyse. On ignore si Pollux riposta aux sarcasmes; ce qu'il y a de certain, c'est que le public, tout en riant, lui continua ses suffrages; et qu'à la mort d'Adrien de Tyr, Commode, alors

(2) Dans son Lexiphane, et dans le Maître des Rhéteurs. On sait qu'Hemsterhuys a voulu réconcilier ensemble le sophiste de Samosate et celui de Naucratis: mais il se borne presque partout à nier; et comme des dénégations, quoique en bon latin, ne sont pas desTM* raisons, on peut s'en tenir à l'opinion ancienne, sauf pourtant à faire quelques restrictions. Ainsi, par. exemple, nous croyons que par ces mots : Je m'appelle ainsi que les fils de Jupiter et de Léda, Lucien pouvait désigner quelque rhéteur du nom de Dioscore, aussi bien que Pollux; qu'un grand nom

bre de ces mots ridicules de désuctude ou de néolo

gisme, employés à chaque instant par Lexiphane, ne se trouvent point dans l'Onomasticon, et qu'enfin l'histoire hideuse des bassesses et des crimes attribués par Lucien à son Maître des rhéteurs, ne peut convenir à l'homme que Marc-Aurèle plaça auprès de son fils,

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empereur, lui donna la chaire d'éloquence d'Athènes, qui, jusqu'alors, n'avait été accordée qu'aux sophistes les plus distingués de leur siècle. C'est là que Pollux mourut, âgé de cinquante-huit ans, peu de temps après la mort du prince, son protecteur, laissant un assez grand nombre d'ouvrages, dont voici les titres, d'après Suidas: I. Des Déclamations composées la plupart à Athènes, dans le temps où il occupait la chaire d'éloquence. II. Des Dissertations sur divers points de mythologie et d'histoire. III. Un Eloge de Rome. IV. Un Epithalame à Commode. V. Une Accusation contre Socrate. On ignore si c'est un jeu d'esprit ironique, ou bien simplement une déclamation, comme celles qui se récitaient continuellement dans les écoles des rhéteurs. VI. Une Accusation contre les Sinopéens. VII. Deux Panegyriques en l'honneur, l'un de toute la Grèce, l'autre de l'Arcadie. VIII. Enfin, un Lexique, en dix livres, dédié à Commode, et connu sous le nom d' Onomasticon. Get ouvrage, le seul du genre onomasticographique, et le seul de Pollux que nous possédions aujourd'hui, mérite, sous ce double rapport, un examen un peu plus aprofondi. D'abord, qu'entendaient les anciens par Onomasticon? On voit, par celui de Pollux, que ce n'était autre chose qu'une nomenclature de mots, les uns synonymes, autres analogues, rangés sous quelques mots principaux, qui servent de titres aux chapitres. Une telle nomenclature, n'étant point assujétie à l'ordre alphabétique, devrait, ce semble, être faite avec un esprit de méthode; et la multitude, presque innombrable, des mots d'une langue, devrait s'y trouver distribuée en ordres, genres, espèces, etc., par des

les

divisions et sous-divisions parallèles à celles qui existent naturellement dans les objets représentés par chacun de ces mots. C'est ce qu'aucun des onomasticographes anciens n'avait songé à faire avant Pollux, et ce que Pollux lui-même n'a pas toujours fait mieux que ses prédécesseurs. Cependant le livre second, qui traite de l'homme, et le quatrième, où il passe en revue les arts, sont presque, d'un bout à l'autre, irréprochables sous ce rapport. On peut aussi remarquer que souvent les nuances, si légères, si délicates, qui séparent et différencient les synonymes, sont expliquées avec autant de grâce que de précision et de clarté. Quelques narrations viennent de temps en temps couper la longue monotonie de la nomenclature, et reposer l'attention. Enfin de nombreuses citations, tantôt de poètes, tantôt de philosophes et d'orateurs, varient son style, et démontrent ses assertions. Nous devons à Pollux plusieurs milliers de passages extraits la plupart d'ouvrages entièrement perdus pour nous; et ne fût-ce que sous ce rapport, il aurait des droits à notre reconnaissance. Aussi, de tous les lexicographes de l'antiquité, Pollux est-il un de ceux que les philologues des siècles modernes ont fait le plus souvent reparaître dans le monde littéraire, tantôt borné au texte même de son ouvrage, tantôt offrant à sa suite l'auxiliaire indispensable des variantes et des commentaires. La première édition est celle d'Alde, Venise, 1502; elle n'eut pour base que quelques manuscrits remplis de fautes, et non revus par la critique: aussi fourmille-t-elle de passages, ou absurdes, ou inintelligibles. Nous ne dirons qu'un mot de celle des Juntes, Florence, 1520, qui

quoique faite sur deux manuscrits de la bibliothèque des Médicis, et par conséquent moins imparfaite, quant à la correction du texte même, n'offre presque rien de remarquable que des prolégomènes écrits en grec,et placés à la tête du dictionnaire, par Scipion Forteguerri (Carteromachus). La traduction latine, publiée à Bâle, par Rodolphe Gualter, en 1541, est dé parée par des fautes grossières et si nombreuses, qu'à peine semblentelles excusables, même en songeant, d'un côté, à la rapidité forcée avec laquelle l'auteur poussa l'entreprise, et de l'autre, à l'absence totale de manuscrits. Elle a reparu à Venise, ensuite à Bâle, avec des notes, et une préface de Simon Grynæus. Parmi les éditions grecques-latines, on doit citer honorablement celle de Wolfgang et de Seber, Francfort, 1608. Ce qui donne principalement du prix à cette édition, c'est que les éditeurs curent à leur disposition, et collationnèrent ensemble, un grand nombre de manuscrits, entre autres, deux de la bibliothèque Palatine, et un de celle des Augustins. En outre, ils joignirent à leurs propres remarques, des observations de Sylburge, corrigèrent quelques passages d'après ses indications, et firent entrer dans la version latine de Gualter, un grand nombre de corrections nécessaires, parallèles le plus souvent à celles du texte grec. Enfin se présente la magnifique édition de Wetstein, faite par Lederlin et Hemsterhuys, Amsterdam, 1706, 2v.in-fol. On y trouve: 1o. son texte plus correct, et presque irréprochable, fixé d'après d'excellents manuscrits d'Isaac Vossius, de Démétrius Chalcondyle, et de la bibliothèque de Paris, et d'après les savantes corrections de Canter; 2o. la version de Seber,

purgée d'un grand nombre d'infidélités; 3°. de longs commentaires de Lederlin, pour les sept premiers livres, et d'Hemsterhuys pour les trois autres, mêlés aux remarques de Jungermann et de Kuhn; 4°. une division de chaque livre de Pollux, en paragraphes plus courts que les chapitres, ce qui facilite et accélère singulièrement les recherches ; 5o., enfin, après une préface savante et curieuse d'Hemsterhuys, des préfaces des éditions antérieures, des tables latines et grecques des auteurs et ouvrages cités; on trouve, ce qui était nécessaire à tous les lecteurs de Pollux, une récapitulation alphabétique de tous les mots de l'ouvrage. L'édition de Wetstein est vraiment la seule dont on puisse se servir. P-oт.

POLLUX (JULIUS), historien grec, a été confondu plusieurs fois avec le grammairien du même nom, auquel il est pourtant postérieur de plus de deux siècles, puisqu'il florissait sous le règne de Valens dans l'Orient. Il faisait profession du christianisme. Il est auteur d'une Chronique, qui commence à l'origine du monde; le P. Gretser en promettait la publication, dans une note du livre De cruce, d'après un ancien manuscrit de la bibliothèque de Munich. C'est près de deux siècles plus tard, que le texte grec de cette Chronique a été mis au jour pour la première fois, accompagné d'une version latine, par Ignace Hardt, sous ce titre : Historia physica seu Chronicon ab origine mundi usque ad Valentis tempora, cum lectionibus variis et notis, Munich, 1792, in-8°. de 423 p. J. B. Bianconi en avait déjà donné une Traduction latine, Bologne, 1779, infol. de 209 pag.; mais sa version, faite d'après un manuscrit de la bi

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