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ges n'eurent pas moins de succès. Rubens, qui à cette époque, vint visiter cette ville, logea chez Poelenburg, dont il estimait le talent, et le pria de peindre pour lui quelques tableaux dont il enrichit son cabinet. Un tel suffrage est sans doute le plus bel éloge qu'on puisse faire de l'artiste. Charles Ier, appela Poelenburg à sa cour. Il lui offrit en vain les mêmes avantages que ceux dont Van Dick jouissait le peintre préféra revenir dans sa patrie, où il mourut, en 1660, se livrant, jusqu'au dernier instant de sa vie, à ses travaux accoutumés. Ce qui distingue la manière de Poelenburg, c'est la suavité et la légèreté de sa touche: le travail s'y fait peu sentir; ses masses sont larges et franches.Lorsque ses ouvrages étaient secs, il se plaisait à les retoucher, et leur donnait alors le dernier fini. Le choix de ses fonds est fait avec goût; sont, en général, embellis par des édifices des environs de Rome: les devants, peints avec la vigueur nécessaire pour servir de repoussoir, servir de repoussoir, sont bien entendus; la science du clair-obscur est une de ses principales qualités. Ses tableaux sont ordinairement ornés de petites figures defemmes, bien coloriées, mais elles sont défectueuses sous le rapport du dessin, qui, en général, manque de finesse. Ses paysages offrent les mêmes qualités; et il lui est arrivé souvent d'en faire peindre les animaux et les figures par d'autres peintres plus habiles dans cette partie, et par ticulièrement par Berghem. Le Musée du Louvre possède cinq tableaux de ce maître : I. Un Ange annonçant aux bergers la nativité de J.-C. II. Un Paysage, dans lequel on voit un homme et une femme qui gardent des animaux. III. Un Paysa ge orné de ruines, et sur le devant

trois baigneuses. IV. Un Paysage, sur le premier plan duquel se trouvent. des baigneuses. V. Enfin un Paysage orné de ruines, de figures et d'animaux: sur le devant on voit un berger avec son chien. Les dessins de Poelenburg ne sont pas communs; il les arrêtait d'un trait de plume, et les lavait au bistre, en y mêlant de l'encre de la Chine, pour lui donner une teinte violette; la touche de ses arbres est pointillée et pleine d'esprit, ainsi que ses figures. Ses fabriques sont excellentes. En général ses dessins se font remarquer par leur propreté. Cet artiste mérite d'être compté parmi les peintres qui se sont distingués comme graveurs à l'eau-forte. On a de lui quelques paysages exécutés d'une pointe très-spirituelle; mais les épreuves en sont de la plus grande rareté. P-s.

POELLNITZ (CHARLES-LOUIS, baron DE), aventurier allemand, qui changea plusieurs fois de religion, courut après la fortune dans presque toute l'Europe, et se fit un nom par ses Mémoires, était né, en 1692, à Issouin, pays de Cologne, où son père, fils d'un ministre d'état, était en quartier avec son régiment. Devenu orphelin de bonne heure, il fut placé à l'école des enfants des nobles, que le roi de Prusse avait fondée sous le nom d'Académie des princes. En sortant de cette institution, le jeune Poellnitz fit la campagne de Flandre, en 1708, comme volontaire; et,à son retour en Prusse, le roile nomma gentilhomme de la chambre, et lui promit d'avoir soin de sa fortune. Mais quelques négligences dans le service indisposèrent le monar que, au point qu'il humilia le pauvre gentilhomme devant la cour. Poellnitz quitta Berlin. Ce fut alors que commença sa vie aventurière. A la

cour d'Hanovre, il perdit tout son argent au jeu, et il n'aurait pu continuer sa route sans les secours de sa mère. L'électrice d'Hanovre l'ayant recommandé à la duchesse douairière d'Orléans, son amie, il se rendit en France, pour solliciter des faveurs à la cour. Il fut présenté à Louis XIV, qui remarqua qu'il saluait très-bien. Les courtisans félicitèrent Poellnitz de l'opinion favorable qu'il avait inspirée à leur maître. Malheureusement cette bonne opinion fut tout-à-fait stérile pour le gentilhomme prussien, qui voyait ses ressources s'épuiser en attendant la fa veur du roi de France. Al'occasion de la paix, il donna des bals, qui furent des cohues, et où tout le monde, étouffant de soif et de chaleur, maudissait l'ordonnateur de la fête, que presque personne ne connaissait; ce qui le divertissait beaucoup. Étant devenu amoureux d'une jolie personne, il se ruina pour elle, et se vit obligé de retourner dans sa patrie, afin d'aller chercher des suppléments de fonds. A Berlin, il essaie inutilement de 'se remettre en faveur; et s'étant muni de quelque argent, il retourne à Paris: une dame eut la charité de lui appren dre que la personne qu'il adorait, le trompait, et qu'il ferait bien de l'oublier. Le voilà épris de celle qui lui avait donné un si bon avis. Puis, ayant appris que le nouveau roi de Prusse formait sa maison, il courut à Berlin, faisant en route des tentatives pour être employé à la cour d'Hanovre. Arrivé à Berlin, il sut que la maison du roi était formée: il alla solliciter, en Pologne, où il ne reçut, comme il l'avoue dans ses Mémoires, que de l'eau bénite de cour. Pendant qu'il continuait ses sollicitations en Saxe, on vint l'arrêter pour dettes; un des minis

tres du roi de Pologne le tira cette fois d'embarras. N'ayant pas été plus heureux à Hanovre, dont l'électeur venait d'être appelé au trône d'Angleterre, il voulut tenter de nouveau la fortune à Paris. Afin de mieux réussir à la cour, il crut devoir embrasser le catholicisme: mais quand il eut fait cette démarche, on lui dit qu'on réformait les troupes, et qu'on ne pouvait l'employer. La duchesse douairière d'Orléans lui fit cadeau de mille écus: ce fut tout ce qu'il obtint à la cour. Alors il se tourna d'un autre côté, et s'attacha par spéculation, à une vieille présidente très-riche, qu'il peint, dans ses Mémoires, comme laide, avare et folle, et, pour comble de perfection, aimant les procès à la fureur. Il eut le bonheur de lui plaire, et d'obtenir un appartement et le couvert chez elle, « Il fallut dit-il, jouer un rôle très - embarrassant ; je fus obligé de contrefaire l'amoureux de la plus désagréable femme de l'univers, précisément dans le temps que j'aimais encore Mme. de R**, qui était, sans contredit, une des plus belles personnes que l'on pût voir. Les parents de la présidente cherchèrent à faire renvoyer l'amant: elle tint à son chevalier; et il était déjà question de mariage, lorsqu'un beau jour la vieille expira devant lui. Ce qu'il put faire alors de plus salutaire, ce fut de déloger au plus vite de l'hôtel. Décrété de prise de corps, il obtint, par protection, un arrêt de défense : le duc d'Orléans lui accorda une pension de deux mille livres; mais les réformes qui eurent lieu peu de temps après, annulèrent cette faveur. Un particulier lui offrit une somme considérable s'il pouvait obtenir le privilége de donner des bals, et de tenir

des jeux aux Champs-Élysées. Le régent, amides plaisirs, goûtait assez ce projet; mais d'Argenson le fit changer d'avis. N'ayant plus rien à espérer, Poellnitz se rabattit encore sur Berlin, nia d'avoir embrassé la religion catholique, et pratiqua le culte réformé; sur quoi le roi lui promit la première pension de gentilhomme de la chambre qui viendrait à vaquer. Mais comme on envoya au prince la profession de foi qu'il avait faite en France, il fut près d'être arrêté, se réfugia d'une petite cour de l'Allemagne à l'autre, arriva insensiblement à Paris, sous prétexte de se faire guérir d'une fistule: ayant trempé dans la conspiration de la duchesse du Maine, et de Cellamare, il s'enfuit, fut arrêté à Toul; mais, se disant domestique, il fut relâ ché, et se dirigea, cette fois, sur l'Autriche. Par la protection du prince Eugène, il obtint une compagnie dans un régiment, en Sicile; et n'ayant pas de quoi s'équiper, il reçut des aumônes de la cour

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le titre de présents: c'était, à ce qu'il avoue, pour l'empêcher de redevenir protestant: car, dans les pays catholiques, il était toujours de la religion dominante; et probablement il insinuait que, si on ne le secourait, il irait apostasier. Il prit la route de Paris, afin de rejoindre son régiment, et se faire traiter de la fistule: on y était précisément au plus fort du système de Law. Poellnitz joua comme tout le monde, se vit millionaire en papier, et n'eut plus rien au bout de quelques jours: « Mes millions, dit-il, disparurent à-peuprès de la même façon qu'ils étaient venus, c'est-à-dire que, sans savoir ni pourquoi ni comment je me trouvai les mains vides. » N'ayant plus rien à faire à Paris, il se dirigea

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sur la Sicile, et s'arrêta d'abord à Rome, où le pape le loua fort de sa conversion, lui fit présent de quelques Agnus et médailles, et lui donna une dispense pour manger gras en carême. Voyant le saint-père si bien disposé, l'aventurier prussien présenta à l'un des cardinaux une trèsbelle profession de foi, remplie de citations de la Bible, et terminée par l'aveu qu'il aspirait à la dignité du sacerdoce. Il renonça, en effet, à son brevet de capitaine autrichien; mais, comme le pape ne lui reconnut probablement pas une grande vocation pour l'état ecclésiastique, Poellnitz, désespérant de percer à la cour papale, jeta les yeux sur l'Espagne. Au moment de passer les Pyrénées, il fut arrêté à Baïonne, mis au secret dans la citadelle; et l'on vendit ses hardes pour payer ses dépenses à l'auberge. Quand on le remit en liberté, sa bourse se trouva si légère qu'il arriva dans un état assez pitoyable à Madrid. En humble solliciteur, il ne se lassa point de se trouver dans les antichambres de la famille royale, et du P. Daubenton, se targuant fort de ses sentiments catholiques: on lui accorda enfin gracieusement un brevet de lieutenantcolonel; mais ayant sollicité en vain qu'on y joignît une paye, ce qui, apparemment, n'était pas l'usage, et mourant de faim avec son titre d'officier, il accepta les charités de l'ambassadeur anglais, fit ses adieux à l'Espagne, et se rendit en Angleterre. Dans ce pays, roi ne voulut même pas lui donner audience, et le renvoya avec une somme d'argent. Obligé de frapper à d'autres portes, Poellnitz s'embarqua pour la Hollande ayant contracté des dettes à la Haye, et poursuivi par ses créanciers, il s'en

le

fuit en Allemagne. A Dessau, il implora les bons offices du duc régnant: pour toute réponse, il reçut ordre de quitter sur-le-champ ses états. Une entrevue qu'il eut avec son frère, lui donna au moins l'espoir de satisfaire ses créanciers, par le moyen de leurs biens paternels. A Ratisbonne, il eut encore l'effronterie de se proposer au cardinal de Saxe, pour l'Église. On lui fit entendre que l'Église ne se souciait point de cette acquisition. Il assure qu'il retourna en Hollande pour payer ses créanciers; ce qui, certes, dut leur attente. surpasser Tout ce qu'on vient de lire, a été consigné par Poellnitz lui-même, d'une manière assez piquante dans ses Mémoires, quoique le rôle qu'il y joue, soit souvent bas et méprisable. Il n'a pas donné la suite de ses aventures. La voici sommairement: Frédéric II, étant monté sur le trône, leva la défense qui avait été faite à Poellnitz, de paraître dans la résidence royale, l'admit au nombre de ses gentilshommes, et l'aida même à payer les dettes dont il était accablé. Il le créa grand-maître des cérémonies; et, comme il contait agréablement, ce prince l'admit dans sa société intime. Mais, soit que le chambellan fût quelquefois humilié par le mordant Frédéric, soit que ses revenus ne fussent pas suffisants, il prit son congé, ayant l'espoir d'épouser une riche héritière à Nuremberg. Il fallait être catholiquepour obtenir sa main, et pour la troisième fois il n'hésita pas à faire une profession de catholicisme. Malheureusement le mariage étant venu à manquer, l'aventurier, très-embarrassé de sa position, écrivit au roi pour le supplier de le reprendre à son service, promettant de rentrer tout de bon dans le sein de

l'Eglise protestante. Frédéric répondit: «Que vous soyez calviniste, catholique ou luthérien, peu m'importe; mais si vous voulez vous faire circoncire, je vous reprendrai à mon service.» Cependant le prince se laissa toucher, et reprit son ancien courtisan par une espèce de traité rempli de persiflage, et portant : « 1o. On proclamera dans tout Berlin qu'il est défendu, sous peine de cent ducats, de faire crédit au sieur de Poellnitz. 2o. Il lui est expressément interdit de mettre le pied dans les hôtels des ministres étrangers, et de rapporter ce qui a été dit à la cour. 3o. Toutes les fois que je l'admettrai à ma table pour divertir mes hôtes, il lui sera défendu de faire un visage de pénitent. » On prétend que quand Poellnitz demanda son congé et un certificat de bonne conduite, Frédé ric en écrivit un, portant en substance ce qui suit : « Je certifie que le sieur de Poellnitz a rendu des services éminents à la cour de notre père, par ses plaisanteries; qu'il n'est ni brigand, ni empoisonneur ; qu'il sait par cœur toutes les anecdotes des châteaux royaux; qu'il possède l'art de saisir le ridicule des gens ; qu'il n'a jamais excité notre indignation, excepté par son importunité, qui passe les bornes du respect; et qu'après son départ, nous sommes résolus de supprimer son emploi, ne jugeant personne capable de le remplir après ledit baron. » Il est certain que Frédéric, tout en le méprisant, le tolérait dans sa société, parce que Poellnitz le divertissait. Aussi Flögel, auteur de l'Histoire des fous de cour, l'a t-il compris dans la liste des plaisants salariés. Cependant le baron obtint la direction des théâtres; ce qui, peut-être, fut encore une ironie de la part du roi. La fin

de sa vie fut plus paisible et plus régulière que sa jeunesse; et il mourut octogénaire, en 1775. Dans un de ses voyages à Paris, il y avait vendu le manuscrit de ses Mémoires. Ce manuscrit fut envoyé dans les PaysBas, et imprimé sous le titre de Me. moires du baron de Poellnitz, contenant les observations qu'il a faites dans ses voyages, et le caractère des personnes qui composent les principales cours de l'Europe, Liége, 1734, 3 vol. in 8°. Le public qui trouvait dans ces Mémoires, outre la relation des voyages et aventures de l'auteur, racontées avec beaucoup de naturel et de mesure, une foule d'anecdotes et de portraits des cours et des hommes d'état d'alors, les lut avec une vive curiosi. té; et il en fut fait plusieurs éditions. Poellnitz avait eu soin de peindre tous les princes et princesses comme des personnages d'un air noble, d'un caractère généreux, d'un esprit accompli; ce qui fit que ses Mémoires purent circuler partout sans obstacle. Encouragé par ce succès, l'auteur vendit deux autres volumes de Mémoires, qui n'eurent pas moins de vogue, quoiqu'il y revienne quelquefois sur les événements dont il avait parlé précédemment. On a publié, en 1747, une cinquième édition des 5 vol., à Londres, chez J. Nourse, mais en donnant aux trois derniers volumes, le titre de Lettres. Ce ne fut qu'en 1791 que parurent, à Berlin, chez Voss, en deux vol. in-8°., les Mémoires de Poellnitz, pour servir à l Histoire des quatre derniers souverains de la maison de Brandebourg royale de Prusse, dont le professeur Brunn donna en même temps une traduction allemande; ils sont écrits dans le même style léger et anecdotique que les autres : le jour

nal littéraire Allgemeine deutsche Bibliothek, a signalé, dans son 108e vol., plusieurs inexactitudes qu'ils contiennent. On attribue aussi à Poellnitz divers ouvrages anonymes, savoir: I. Histoire secrète de la duchesse d'Hanovre, épouse de George Ier.; Londres, 1732, in-8°. II. Etat abrégé de la Cour de Saxe. sous le règne d' Auguste III, Francfort, 1734, in-8°. III. La Saxe galante, 1737, in-8°., ouvrage con tenant l'histoire des amours du roi Auguste de Pologne: on l'a réimprimé et traduit plusieurs fois. IV. Lettres saxonnes, Berlin, 1738, 2 vol., qui, peut-être, ne sont que l'ouvra ge précédent sous un autre titre. Tous les écrits de Poellnitz sont en frangais. D-G.

POERNER (CHARLES-GUILLAUME), chimiste allemand, né à Leipzig, en 1732, reçut le degré de docteur en médecine à l'université de sa ville natale, et fut nommé dans la suite conseiller des mines de Saxe, et chimiste à la fabrique de porcelaine à Meissen. Il

est auteur de : I. Comment. duo de officiis medici quatenus felicitatem ejus promovent, Leipzig, 1753, in-4°. II. Experimenta de albuminis ovorum et seri sanguinis conve nientiá, ad declarandam nutritionis rationem,ibid., 1755, in-4°. III. Delineatio pharmacie chemico-pharmaceuticæ, ibid., 1764, in-8°. IV. Selectus materiæ medicæ, ibid. 1767, in-8°. V. Essais chimiques à l'usage de la teinturerie, ibid., 1772-73,3 vol. in-80. VI. Guide de la teinturerie, surtout pour teindre le drap et les étoffes, tissues de laine, ibid., 1785, in-4°., traduit en français, par ordre du gouvernement, sous ce titre : Instruction sur l'art de la teinture',

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