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que poisson, d'après le système de Linné, et même compter le nombre des rayons. Bloch a emprunté un assez grand nombre de ces dessins et il en cite beaucoup d'autres, ainsi que les descriptions. Le même volume offre des crabes, des plantes marines, des tortues, des gre nouilles, etc., etc.; et il est surtout remarquable, ajoute Bloch, par une anatomie exacte (expression relative) du crocodile, de la tortue de mer, etc., etc. Trente-cinq feuilles sont consacrées à des détails anatomiques. Ce serait, selon lui, une perte, si ce manuscrit, surtout la partie de l'anatomie des animaux, n'était pas publié. Le P. Feuillée n'a pas été aussi juste envers Plumier, auquel il a, sans le citer, emprunté plusieurs objets dans sa Description des plantes médicinales de l'Amérique. Gautier, dans son Journal de Physique, le cite, au contraire, plusieurs fois, et donne, entre autres (ann. 1775, 15o. part.) deux mémoires curieux sur l'anatomie et les mœurs du crocodile ; mais les figures sont si mal copiées et coloriées, qu'elles ne pour raient que donner une idée défavorable du talent de Plumier. On lit, dans le Journey to Paris, de Lister, un passage fort intéressant sur notre auteur, dont il cite une grande quantité de découvertes et de dessins, entre autres celui d'une scolopendre d'Amérique, d'un pied et demi de long, qu'il joint lui-même à son ouvrage. Plumier lui dit qu'il avait de quoi faire dix volumes aussi considérables que ceux qu'il avait déjà mis au jour il n'avait pas encore pu (en 1698) obtenir de les faire publier par l'imprimerie royale; mais il espérait que cela aurait lieu sous peu, etc. Parmi plusieurs Dissertations de

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Plumier, contenues dans des Recueils de cette époque, nous citerons de préférence celle sur la cochenille (Journal des Savants pour l'année 1694), sur laquelle on n'avait avant lui que des notions fort incomplètes. Plumier, qui l'avait découverte à la Martinique, la décrit fort en détail, et prouve que c'est un insecte. C'est aussi le sujet d'une lettre à Frédéric Richter, de Leipzig (Mém. de Trévoux, septembre, 1703), dans laquelle il allègue de nouvelles preuves et de nombreux témoignages. Si l'on compte tout ce qui a été publié, l'on verra en admettant qu'il y ait beaucoup de répétitions, que plus de la moitié des dessins de Plumier sont encore inédits. Plusieurs étrangers ont reproché avec raison cette négligence aux Français. Toute fois ces nombreux volumes ne sont point exposés à être dévorés par les insectes, comme le fait entendre Burmann (Préface): ils sont dans le meilleur état de conservation; et chacun a, pour les consulter, les faci lités que l'on rencontre toujours dans les magnifiques établissements qui les renferment. La science recueillerait, sans doute, un grand avantage de la publication d'un choix de ces dessins et descriptions, tirés du Penu, des Ombellifères, de l'Hortus botanicus, du Botanographia, et des xvie.-XIXe. volumes. On a de la peine à concevoir qu'une si prodigieuse quantité de travaux de cette nature ait été exécutée par un seul homme; mais l'étonnement redouble quand on songe que cela eut lieu dans l'espace de quinze années (16891704), pendant lesquelles Plumier fit trois voyages en Amérique, en parcourant les Antilles françaises dans toutes les directions; qu'il fut trèssouvent malade pendant son troisiè

me voyage; qu'enfin, lorsqu'il était en France, les devoirs très-assujétissants de son état occupaient une grande partie de son temps. L'isolement, la vie du cloître, et l'enthousiasme pour la science, expliquent ces prodiges. On peut voir, dans la Préface du Solum, Salum, Cœlum, comment Plumier parle lui-même de son ardeur pour les voyages et les ré cherches d'histoire naturelle. Ce mor ceau est d'un grand intérêt; et il prouve en même temps, par de nombreuses imitations, combien l'auteur était nourri de la lecture des anciens. Indépendamment de ses immenses travaux en histoire naturelle, on a de cet infatigable religieux, l'Art de tourner ou de faire en perfection tou tes sortes d'ouvrages au tour, Lyon, 1701, in - fol., de 187 pages, avec So pl. Cet ouvrage, écrit en français et en latin, et qui a eu l'honneur d'être traduit par une tête couronnée (V. PIERRE, XXXIV, 360), offre le résultat de la grande pratique de l'auteur dans un art où il était fort adroit, et de ce qu'il avait eu occásion de voir à Paris, à Marseille et Rome, chez les meilleurs ouvriers en ce genre: aussiest-il encore estimé et recherché aujourd'hui, quoique Hulot et Bergeron aient publié depuis, sur le même sujet, des traités bien plus détaillés. Comme ce livre n'avait pas été imprimé sous les yeux de l'auteur, il s'y glissa des fautes que Plumier se proposait de corriger dans une deuxième partie; mais la mort l'empêcha de la publier (V. sa Réponse à M. Baulot, dans les Mémoires de Tré voux, de nov. 1702, p. 112): elle n'a paru que dans la réimpression de Paris, 1749. On trouve, dans la même lettre à Baulot, une description détaillée de l'organe de l'ouïe dans la grande tortue de mer. Le même

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Recueil offre (janv. 1704, p. 165) ses Observations sur le crocodile, le colibri, etc. Plumier était remarquable par sa bonté et sa candeur. Aussi a-t-il été trompé plus souvent qu'un autre. Le P. Labat, qui fait un grand éloge de son caractère, comme de ses connaissances et de ses talents, cite, entre autres, son exposé du procédé employé pour l'extraction de l'indigo (Voyage aux îles, t. 1er, p. 287). Il faut lire aussi dans le quatrième vol., ch. 4, l'histoire fort amusante de la prétendue découverte de la pourpre, et d'une liane qui préservait des serpents. Labat assure qu'il était très-mystérieux, et ne communiquait qu'avec beaucoup de peine ses découvertes; ce qui ne paraît pas s'accorder avec les traits principaux de son caractère. Tournefort a consacré à Plumier le genre Plumeria (le Frangipanier), très-beau genre des apocynées, composé d'arbres et d'arbustes d'Amérique. D-u...

PLUNKETT (OLIVIER), issu d'une illustre maison d'Irlande, connue par son inviolable attachement à la religion catholique, naquit au château de Rathmore, au comté de Meath, en 1629. Après avoir reçu sa première éducation au sein de sa famille, il se rendit à Rome, pour y finir ses études; et le pape lui confia, bientôt après, une chaire de théologie. Ses vertus et ses talents le firent élever à la dignité d'archevêque d'Armagh et de primat d'Irlande. Malgré les périls dont elle était environnée il l'accepta de préférence à l'évêché de Montefiascone. Le retour d'Olivier Plunkett, dans sa patrie, fut célébré par de nombreux témoignages d'enthousiasme, que sa conduite apostolique justifia complètement; mais quoiqu'il n'eût cessé de mettre

la tolérance au nombre des devoirs religieux, son zèle le rendit suspect aux protestants; ses aumônes abondantes le firent accuser d'ambition et de projets factieux. Sous le prétexte d'une conspiration que ses ennemis avaient imaginée, il fut arrêté, conduit à Londres, et condamné, par un jury non moins ignorant que fanatique, à la peine de mort, qu'il subit, le 1er juillet 1681, après avoir prononcé sur l'échafaud un discours plein de uoblesse et de dignité. Son corps fut inhumé dans le cimetière de Saint-Gilles - des - Champs, sous une lame de cuivre, portant l'inscription suivante, en anglais : « Ce tombeau renferme la dépouille » mortelle du révérendissime Olivier » Plunkett, archevêque d'Armagh, » et primat d'Irlande, qui fut, en » haine du catholicisme, accusé de >> haute - trahison par de faux té» moins, condamné et exécuté à Ty» burn. Son cœur et ses entrailles lui >> furent arrachés et jetés au feu. Il » souffrit le martyre, le 1er juillet » 1681, sous le règne de Charles II.» Plunkett a laissé des Mandements et des Instructions pastorales, regardés comme des modèles. On les a recueillis en 2 vol. in-4o, Londres, 1686. Il avait charmé ses loisirs, à Rome, par la culture des arts; et l'on trouva dans ses papiers une description des plus beaux monuments d'architecture antique, qui n'a point été imprimée.

ST-T.

PLUQUET (FRANÇOIS-ANDRÉADRIEN), savant et judicieux écrivain, né à Baïeux, le 14 juin 1716, fit ses humanités au college de cette ville, sous la direction d'un père éclairé, et de l'abbé Le Guédois, son oncle maternel, curé de SaintMalo. A l'âge de dix-sept ans, il fut envoyé à Caen, où il étudia la

philosophie sous l'abbé Delarue. Il était âgé de vingt-six ans lorsqu'il vint à Paris (1742), suivre un cours de théologie, et prendre ses grades dans l'université. Pour n'être pas à charge à ses parents, dont la fortunc était bornée, il fit l'éducation de deux jeunes seigneurs espagnols, et devint bientôt précepteur de l'abbé de Choiseul, depuis archevêque d'Albi et de Cambrai. Il resta toute sa vie attaché à son élève, qui lui fit obtenir une pension de deux mille livres. Dès-lors, l'abbé Pluquet put vivre indépendant, et se livrer entièrement à l'étude. Il devint ba chelier en 1745, licencié de Sorbonne en 1750. Admis à la faculté des arts, dans la nation de Normandie, ses collègues le nommèrent leur procureur auprès du tribunal de l'université. A cette époque, la librairie française avait dans son sein des hommes instruits et distingués. Les savants et les littérateurs aimaient à se réunir dans les maisons des Barrois, des Latour, des Mercier, des Desaint: c'est là que l'abbé Pluquet connut les membres les plus recommandables des académies des sciences et des belles-lettres, et qu'il se concilia leur estime par la justesse de son esprit et l'étendue de son savoir. Le Nestor de la littérature, Fontenelle, fit du jeune abbé son ami particulier : Helvétius le rechercha; Montesquieu se l'attacha, en lui donnant un pricuré qui était à sa nomination. L'abbé Pluquet avait quarante-deux ans, lorsqu'il publia son premier ouvrage, l'Examen du fatalisme, Paris, 1757, 3 vol. in-12. L'auteur, cn s'instruisant dans les sciences relatives à son état, n'avait point négligé les études d'un autre genre; et il était principalement versé dens celle de l'antiquité. Il expose, avec

clarté et précision, tous les systèmes que la hardiesse de penser a produits depuis les premiers tempsde la philosophie jusqu'à nos jours, sur l'origine du monde, la nature de l'ame, le principe des actions humaines, la cause productrice des êtres, leur origine et leur destination. L'auteur remonte à l'introduction du fatalisme chez les peuples les plus anciens, dans l'Égypte, la Chaldée, les Indes et les autres contrées de l'Orient. Il suit ses progrès dans les différentes écoles de la Grèce, jusqu'à l'origine du christianisme, et depuis cette époque jusqu'à la destruction du Bas-Empire. Il fait connaître, avec les principales sectes de fatalistes qui se forinèrent parmi les Chrétiens d'Orient et d'Occident, la part que les Juifs prirent à leurs querelles et à leurs erreurs. On sait qu'elles avaient ou recevaient pour base, soit les principes de Platon, soit les opinions d'A. ristote, qui partageaient alors l'empire des sciences. Mahomet avait fait du fatalisme son dogme favori; et il devint celui de toutes les religions de l'Orient. Le Koran engendra des sectes opposées, qui ne s'accordèrent que dans le fanatisme sanglant de leur propagation. Après avoir exposé leurs désolantes doctrines, Pluquet recherche l'origine et les progrès du fatalisme dans l'Inde, la Chine, au Japon et dans le royaume de Siam. Revenant ensuite sur ses pas, il trace la révolution qu'amena dans l'Occident la chute de l'em. pire de Constantin. L'ancienne philosophie et ses systèmes suivirent l'émigration des savants grecs en Italie. De nouvelles opinions s'y propagèrent. Les sentiments d'Aristote, de Pythagore, de Platon; les dogmes de Zénon; les doctrines d'Anaximandre, de Diogène d'Apollonie, et kes

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principes d'Epicure, avaient enfanté de nouvelles sectes de fatalistes, lorsque Bacon vint porter la lumière dans les sciences, en substituant à la tyrannie des noms célèbres, l'autorité de la raison, et en adoptant le doute méthodique, qui lui fut dans la suite emprunté par Descartes. Cette mé thode ébranla l'empire des préjugés, rendit à la pensée sa liberté naturelle, et ouvrit le chemin le plus sûr pour arriver à la vérité. Mais l'on abusa bientôt du doute méthodique. Hobbes et Spinosa reprodui. sirent le fatalisme sous de nouvelles formes. L'abbé Pluquet expose leurs systèmes, ainsi que les opinions de Toland, de Collins, de La Mettrie et de quelques autres écrivains moins fameux; mais il ne lui suffisait pas de donner l'histoire des nombreuses sectes du fatalisme : il reproduit, sans les dissimuler ni les affaiblir, toutes les difficultés des diverses hypothèses; il les combat, dans les deux derniers volumes, avec autant de force que de succès. Comparant enfin le système du fatalisme à celui de la liberté, il démontre que le fatalisme ne propose à l'homme aucun moyen suffisant pour loigner du vice et le porter à la vertu, tandis que le dogme de la liberté morale est le frein le plus salutaire contre les passions, et qu'il inspire les sentiments vertueux que le fatalisme détruit. Le premier ouvrage de Pluquet lui fit une réputation qui attira bientôt les regards des encyclopédistes: ils cherchèrent à l'engager dans leur parti, et lui demandèrent des articles pour leur grand dictionnaire: mais Pluquet refusa de former aucune liaison avec des hommes qu'il regardait comme ennemis du trône et de l'autel; et, loin de atribuer à la confection de l'Encyclopédie,

l'é

il présenta cet ouvrage, moins comme le trésor des connaissances humaines, que comme un vaste dépôt des erreurs anciennes et nouvelles il publia, en 1762, les Mémoires pour servir à l'Histoire des égarements de l'Esprit humain, Paris, Barrois 1762, 2 vol. in-8°. Cet ouvrage, plus connu sous le nom de Dictionnaire des hérésies, montre partout l'historien exact, le savant théologien, et, en général, le critique sans partialité. Il existait déjà un livre sous le même titre. Le libraire Barrois voulut en donner une nouvelle édition, et desira que l'abbé Pluquet revît le style, et rectifiât les fautes et les erreurs de ce Dictionnaire. Mais Pluquet sentit bientôt la nécessité de le refondre en entier ; et il composa un ouvrage nouveau. On a trop loué, sans doute, le Discours préliminaire, en le comparant au Discours de Bossuet sur l'Histoire universelle; mais il peut être regardé comme un tableau rapide des égarements de l'esprit humain. Cependant l'auteur ne se trompe-t-il pas lui-même en supposaut à Alexandre, d'après le témoignage de Plutarque, le projet de conquérir la terre, pour réunir tous ses habitants sous une même loi qui les éclairât, « qui les «< conduisît tous, comme le soleil » éclaire tous les yeux? » N'est-ce pas donner trop de poids à une déclamation de la jeunesse de Plutarque, et pas assez à la vie du conqué

rant,

ou traités historiques et théologiques, dans lesquels, après avoir retracé la naissance, les progrès et les effets de chaque hérésie, l'auteur en réfute les principes avec solidité et précision. Les protestants, en l'accusant de partialité, ont rendu justice à sa modération, bien éloignée de l'emportement des anciens controversistes. L'excellent Dictionnaire des hérésies a été réimprimé à Besançon, en 1818, 2 vol. in-8°. L'éditeur y a ajouté quatre longs articles de sa façon (Constitutionnels, Jansénisme, Quesnelisme et Richer), dans lesquels on a cru voir des personnalités et des injures. M. Pluquet, neveu de l'auteur, a réclamé, dans un journal (le 16 juin de la même année), contre cet esprit de haine, mêlé à l'ouvrage d'un homme qui « jamais » n'injuria personne, dont les écrits » se distinguent par une critique » éclairée, une piété sincère, une sage » tolérance, etc. » (Voy. l'Ami de la religion et du roi, du 24 juillet 1819, xx, 337). L'abbé Pluquet avait dédié le Dictionnaire des hérésies à son élève, devenu archevêque d'Albi. Ce prélat voulut attacher à la conduite de son diocèse, un théologien si profond et un esprit si sage. Il nomma l'abbé Pluquet son grandvicaire, et le mena à Cambrai, lorsqu'il fut placé sur ce siége en 1764 :le prélat lui fit rédiger ses meilleurs mandements. C'est dans les délassements de ses nouvelles fonctions que l'abbé Pluquet composa son Trai té de la sociabilité, Paris, Barrois, 1767, 2 vol. in-12. Les plus hautes questions politiques sont traitées dans cet ouvrage, avec la sagesse, la force de raisonnement et le style pur et correct qui caractérisent les autres écrits de l'auteur. Il combat le système de Hobbes, et s'attache à prou

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écrite par le même historien dans un âge mûr? L'Histoire des égarements de l'Esprit humain avant et depuis le christianisme, si bien tracée en masse, d'époque en époque et de siècle en siècle, dans le Discours préliminaire, est exposée en détail dans le Dictionnaire. La plupart des articles sont des Mémoires

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