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ligieux d'une vie mondaine dont elle con

servait tous les sentimens.

Le moyen de faire cesser cette opposition à une piété véritable et intérieure, est de reconnaître avec humilité qu'on l'a méritée, et qu'il est juste que de nombreux péchés commis, non dans l'ignorance mais dans la lumière, soient punis par le peu de succès de ce qu'on sait et de ce qu'on lit, puisqu'on l'a si long-temps méprisé; que la punition. due à un commerce de vanité, d'amusement, est la stérilité de l'esprit pour les bonnes pensées, son inconstance, sa légéreté, son impuissance pour se fixer dans la vérité; et qu'il est de la bonté de Dieu, ainsi que de sa justice, d'accorder lentement la consolation et la joie, qui sont les fruits d'une piété sincère, à une personne qui n'en a voulu que le dehors.

Si Dieu, par une conduite différente,

vous remplissait de sentimens vifs et consolans, s'il vous rendait tous les exercices de la piété faciles, s'il joignait à chaque vérité salutaire une impression vive et profonde, il vous cacherait le fond de votre misère, et il vous laisserait ignorer l'immense intervalle que vous aviez mis entre lui et vous.

Il vous a rappelée, par une maladie et par la crainte, dans un temps où vous vous aimiez uniquement. Votre conversion, quoique sincère, se ressent de ces faibles commencemens. Quand vous aimerez beaucoup, Vous serez plus consolée. Et vous devez regarder comme une preuve que vous n'aimez pas assez, et comme une puissante exhortation à le faire davantage, le peu de sentiment de consolation et de ferveur dont vous vous plaignez.

Si vous vous contentiez d'en gémir, rien ne serait plus juste qu'une telle disposition;

mais vous en tirez des conséquences contraires à l'espérance, parce que vous confondez des choses qu'il faut séparer, et que les faiblesses qui vous restent vous cachent ce

que

pas Dieu a fait en vous. Tout n'est sespéré, parce que tout n'est pas rétabli. Votre esprit est encore inconstant et léger; mais votre cœur est dans une situation plus égale et plus ferme. Vous êtes stérile en bonnes pensées; mais vous ne l'êtes pas en saints désirs. Vos anciens penchans vous sollicitent; mais vous résistez. Vous sentez renaître une secrète inclination à la malignité, à la médisance, à la censure; mais Dieu vous fait la grâce de la réprimer. Vous avez de la peine à prier avec instance; mais vous souhaiteriez ardemment de prier ainsi. L'attrait et l'onction vous manquent; mais vous ne trouvez rien de plus désirable que d'éprouver combien le Seigneur est doux.

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Ainsi les restes de l'ancien pécheur sont mêlés en vous avec les prémices du nouvel homme. Ce mélange, qui est inévitable en cette vie jusqu'à un certain degré, est en vous trop grand, et je dois l'avouer avec vous. Mais ce mélange inême est une grande preuve de la bonté de Dieu à votre égard; et bien loin de confondre ses dons avec votre misère, comme vous le faites, il faut les discerner avec une humble reconnaissance, et admirer la puissance de sa grâce qui a produit dans un si mauvais fond et qui y conserve des dispositions dont l'origine est véritablement céleste.

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« Je le crois, dites-vous; mais qui me

répondra que ces dispositions s'affermi<«< ront? J'ai commencé tant de fois, et n'ai <«< rien fini ». Mademoiselle, j'ai lieu de penser qu'il a manqué beaucoup de choses à vos premiers essais de conversion qui ac

compagnent aujourd'hui votre pénitence. Vous connaissez plus la nécessité de l'humilité, vous vous défiez plus de vos forces, vous êtes plus profondément détrompée de la vanité du siècle, vous voyez d'une manière plus sérieuse l'approche de l'éternité, vous joignez à cela beaucoup de prières, beaucoup de saintes lectures; et c'est avec beaucoup de fondement que j'espère qu'une conversion, très-différente des premières, sera aussi plus persévérante.

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