Page images
PDF
EPUB

» Les défenseurs de Louis n'ont pas le droit d'attaquer les grandes mesures prises pour la sûreté générale, adoptées par les représentans de la nation; ils n'ont pas le droit de produire des mesures dangereuses à la puissance des représentans et à la mission qu'ils ont reçue, enfin à tous les principes de la liberté publique. Cet acte doit être regardé comme nul, et il doit être interdit à tout citoyen d'y donner aucune suite, sous les peines qui doivent être décernées contre les perturbateurs du repos public et les ennemis de la liberté : cette mesure est indispensable, puisque si vous ne l'adoptez pas vous semblez consacrer l'appel, et que vous laissez pour ainsi dire un ferment de discorde au milieu de la nation, ou plutôt que vous donnez la permission de faire un véritable acte de rébellion contre l'autorité publique, désigné sous des couleurs spécieuses.

» Je finis par une simple réflexion: il ne suffit point d'avoir rendu le décret provoqué par la nation; il faut, citoyens, prendre les mesures nécessaires pour que ce décret soit réellement utile. Or pour qu'il soit utile il ne faut pas qu'il soit un prétexte d'apitoyer les citoyens sur le sort du tyran, de réveiller des sentimens personnels aux dépens des sentimens généreux et d'amour de l'humanité qui caractérisent les vrais républicains; il ne faut pas que cet appel puisse attacher à ce décret aucun signe de mépris, aucune espérance de trouble, de désordre, de rébellion, de division et d'insurrection de la part de la tyrannie et de la royauté! Je demande donc que vous déclariez citoyens, que le prétendu appel qui vient de vous être signifié doit être rejeté comme contraire aux principes de l'autorité publique, aux droits de la nation, à l'autorité des représentans, et que vous interdisiez à qui que ce soit d'y donner aucune suite, à peine d'être poursuivi comme perturbateur du repos public.

[ocr errors]

Guadet reproduit quelques considérations déjà présentées sur les formes du procès. Il rejette l'appel formé par Louis; mais il demande l'ajournement au lendemain pour entendre Malesherbes, et statuer sur les observations que ce respectable magistrat a promises touchant le nombre de voix qui devaient former la majorité. Il demande également qu'on place à l'ordre du jour du lendemain la question de savoir s'il est utile ou non à l'intérêt public de surseoir à l'exécution du jugement rendu contre Louis. Sur la première de ces propositions Merlin (de Douai) prend la parole.

Merlin (de Douai). « Je demande qu'au moins la Convention nationale n'accorde pas les honneurs de l'ajournement à

une erreur grossière avancée à cette barre par le citoyen Tronchet, et qui a été répétée par Guadet; et cette erreur est d'autant plus dangereuse, et elle mérite d'autant plus d'être relevée, qu'elle a plus de consistance par les lumières de son auteur. Le citoyen Tronchet vous a dit que d'après le code pénal il fallait les deux tiers des voix pour appliquer la peine... Je dis que c'est une erreur. Non pas le code pénal, mais la loi sur les jurés distingue le jugement des faits d'avec le jugement sur l'application de la peine pour la déclaration du fait la loi exige non pas les deux tiers des voix, mais dix sur douze, ou douze sur quinze pour condamner; au lieu que lorsqu'il s'agit d'appliquer la peine la loi exige, lorsqu'il y a quatre juges, trois sur quatre, et lorsqu'il y a cinq juges trois sur cinq. Voilà la loi textuellement, et j'en suis d'autant plus sûr que je l'ai pratiquée moimême pendant neuf mois. L'allégation de Tronchet tombe d'elle

même. »

La Convention déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la première proposition de Guadet, et passe à l'ordre du jour sur la demande de Malesherbes.

Elle rejette l'appel interjeté par Louis, et adopte sur ce point la proposition de Robespierre. (Voyez ci-après le décret.)

Elle ajourne au lendemain la discussion sur la question de savoir s'il y aura sursis à l'exécution du décret de mort contre Louis, conformément à la proposition de Mailhe. La séance est levée à onze heures du soir.

Séance du 18. Quelques erreurs s'étaient glissées dans le recensement du troisième appel nominal: on en fit un grand bruit; elles ne portaient que sur les amendemens indépendans des votes. La vérification, c'est à dire le réappel de cet appel employa une grande partie de la séance du 18; on trouva le même résultat. (C'est le tableau rectifié que nous avons donné plus haut.) L'Assemblée passa ensuite à la question du sursis; après de longs et vifs débats sur le point de savoir s'il était utile, s'il était humain de l'admettre, elle fut remise au lendemain.

Le 19 on la discuta. La demande de l'appel au peuple, celle du bannissement ou de la réclusion, avaient un objet, des vues bien déterminées; la grâce après le jugement, ainsi que l'avaient proposé quelques orateurs, aurait eu un caractere digne de la nation française mais la demande d'un sursis, tout en cachant une arrière pensée qui sans doute n'avait rien que de louable, ne pouvait s'appuyer d'aucun argument péremptoire, Aussi Buzot et Brissot, qui récla

On pro

mèrent ce sursis avec le plus de chaleur, ne purent-ils opposer à leurs adversaires que des considérations politiques que ceux-ci réfutèrent par un dilemme selon eux bien simple. Si Louis meurt, dites-vous, toutes les puissances s'armeront pour venger son supplice; mais si, jugé, il ne meurt pas, elles s'armeront pour le délivrer. Ainsi de toute manière une guerre extérieure est inévitable. Évitons du moins la guerre civile en ôtant aux conspirateurs un point de ralliement et un espoir fondé. Il n'y a donc qu'à opter entre la mort et la grâce... Mais un décret a prononcé la mort. Barrère pensait que tout bon esprit devait rejeter ce sursis: pose, dit-il, de suspendre l'exécution, et de faire de cet objet un moyen d'arriver à la paix... Quelle est donc cette diplomatie nouvelle qui s'en va promenant une tête dans les cours étrangères, et stipuler le salut ou le bannissement d'un condamné pour premier article des traités? Quel est cet horrible et machiavélique procédé de composer avec la tyrannie à la manière des tyrans? Je craindrais d'insulter à votre humanité et aux principes moraux de la République si je réfutais plus longtemps cette objection.. Quant au sursis il ne me paraît pas même digne d'être attaqué. Je ne conçois pas de procédé plus cruel, plus inhumain que de tenir un glaive suspendu sur la tête d'un homme en lui disant à chaque mouvement des armées ennemies : Ta téte tombera! Non, je ne peux me faire à l'idée que c'est le législateur qui ferait ainsi boire à longs traits à un condamné la coupe tout entière de la mort! Condorcet prit aussi la parole sur le sursis, mais pour exposer qu'il ne pouvait à ce sujet se former un avis: il ne vota point en effet dans le quatrième appel. Condorcet dans son discours demandait l'abolition de la peine de mort.

[ocr errors]

Après avoir entendu Barrère l'Assemblée ferme la discussion, et, sur la motion de cet orateur, elle décrète qu'il sera immédiatement procédé à l'appel nominal sur la question du sursis, que chaque membre répondra simplement oui ou non, et que le décret sera prononcé sans désemparer.

QUATRIÈME APPEL NOMINAL. Question: Sera-t-il sursis à l'exécution du jugement de Louis Capet, oui ou non? (Extrait du procès verbal, séance du samedi 19 janvier 1795.)

[blocks in formation]
[blocks in formation]
[blocks in formation]

Guimberteau. Non.

Ribereau.

Non. Mottedo.

Chazaud. Non. Salicetti.

Chedaneau. Oui. Casa-Bianca. Oui. Lamarque.'

Non.

DORDOGNE.

Non.

Lacoste.

Non.

[blocks in formation]

Malade.

[blocks in formation]

Brun.

Non. Chiappe.

Cambert.

Malade.

Crevelier. Non.

Malade.

Bozio.

[blocks in formation]
[blocks in formation]

Absent.

[blocks in formation]
[blocks in formation]

Roux-Fazillac. Non.

[blocks in formation]

Beaucheton. Oui. Gautier jeune. Oui. Martinel,

Qui.

« PreviousContinue »