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l'espère, la preuve du zèle que j'ai toujours apporté à l'accomplissement des devoirs qui m'étaient imposés.

Maintenant il me reste encore une tâche importante et difficile à remplir; c'est la confection du Catalogue de nos beaux et précieux manuscrits. Soyez persuadés, Messieurs, que j'apporterai à ce travail, la même ardeur et les mêmes soins que j'ai mis à celui que je viens de terminer.

Veuillez croire en même temps que jamais je n'aurai rien de plus à cœur qne de justifier la confiance dont vous m'avez honoré.

Agréez, je vous prie, l'assurance du plus profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être,

Messieurs,

Janvier 1846.

Votre très-humble et très-obéissant serviteur,

P. J. LAUDE,

BIBLIOTHÉCAIRE.

NOTICE HISTORIQUE

SUR

LA BIBLIOTHÈQUE PUBLIQUE DE BRUGES.

En agrandissant le domaine de l'activité intellectuelle, la société moderne a dû, dans la même proportion, étendre la sphère des moyens d'instruction. Après les écoles publiques, elle ne pouvait offrir aux nouvelles générations de plus précieuses ressources que les bibliothèques, autrefois patrimoine exclusif des monastères et des académies, où l'on se faisait un devoir de les garder avec une sollicitude ombrageuse. C'eût été bien peu comprendre les besoins du siècle que de dérober plus longtemps au public avide de s'instruire, ces dépôts de la science, si utiles à tous les âges de la vie; où la jeunesse peut aller puiser les connaissances qui lui sont indispensables, dans la carrière qu'elle se propose de parcourir; où l'âge mûr vient éclairer ses doutes et chercher les enseignements et les leçons qui peuvent lui manquer; où la vieillesse et l'infortune trouvent des consolations contre les déceptions de la vie et contre les coups du sort. L'antiquité avait su résumer tous ces avantages dans une courte inscription; elle avait gravé sur le fronton d'une des plus belles bibliothèques Egyptiennes ces mots connus et trop peu médités: Trésor des remèdes de l'âme.

Un bon livre est un maître que l'on peut consulter à tous les instants, qui est toujours prêt à répondre. Un des plus célèbres écrivains du XVIIIe siècle n'eut pour toute école, qu'un cabinet de lecture, pour tout maître, que des livres qu'il dévorait nuit et jour.

Or, si les bibliothèques publiques présentent des avantages incontestables, ne doit-on pas s'étonner qu'elles aient pour la plupart une origine si récente? Il y a un demi-siècle, on en comptait à peine deux ou trois dans toute la Belgique. Aujourd'hui, il est fort peu de villes de quelque importance, qui ne possèdent la leur. Voici comment, et dans quelles circonstances furent créées la plupart de celles qui existent dans les chefs-lieux de nos provinces.

La France venait d'être le théâtre d'un orage qui avait eu en Belgique des retentisssements terribles. Une monarchie de quatorze siècles avait été renversée et avait entraîné dans sa ruine toutes les institutions anciennes. Mais ce n'est pas tout de démolir, quand on ne voit plus autour de soi que ruines et débris, il faut bien songer à réédifier. Au nombre des mesures réparatrices que l'on prit plus tard, on doit citer la loi du 3 brumaire an III, (24 octobre 1794), qui prescrivait l'érection d'une école centrale dans tous les chefs-lieux des départements. L'article IV du titre II de cette même loi, ordonnait qu'une bibliothèque fût attachée à chacune de ces écoles. Le bibliothécaire était assimilé aux professeurs pour la nomination et pour le traitement.

Dans le courant de l'année 1795, la Belgique ayant été réunie à la France, Bruges fut choisie pour chef-lieu du département de la Lys, et par conséquent pour siége de l'école centrale qui devait être organisée. La belle et vaste abbaye des Dunes, de l'ordre de Citeaux fut désignée pour servir d'emplacement à la nouvelle école. Ce couvent nous offre un exemple frappant des vicissitudes et de l'instabilité des choses humaines. Dans une période de quarante ans, il a été tour à tour, Abbaye, Musée, Hôpital militaire, École centrale, Lycée, Athénée, et il est devenu aujourd'hui Séminaire Épiscopal.

La bibliothèque de ce monastère, qui avait été confisquéc.

comme celles de toutes les autres Abbayes, au profit de l'État, devint naturellement le noyau de celle qui, en vertu de la loi précitée, devait être attachée à l'établiseement d'instruction publique, que l'on allait créer. A ce noyau, l'on réunit les débris des bibliothèques des autres couvents du département, qui tous avaient été supprimés, en vertu de la loi du 15 Fructidor, an IV. (1" Septembre 1796.)

Il s'agissait de nommer les fonctionnaires de l'école centrale. En tout temps pour une seule place vacante, il se présente une foule de solliciteurs. Ce fut surtout pour la place de bibliothécaire, que les candidats furent nombreux. Un jeune homme de vingt ans M. W. F. Edwards, né à la Jamaïque, d'une famille anglaise, qui à l'époque de la guerre de l'indépendance, avait quitté le nouveau monde pour venir habiter Bruges, fut préféré pour cet emploi, à tous ses concurrents. La brillante carrière qu'il a parcourue depuis, a pleinement justifié ce choix.

Cependant on travaillait à transporter à Bruges, de tous les points du département, les bibliothèques des communautés religieuses supprimées. D'après un rapport adressé au préfet par M. Edwards, le 9 Messidor, an VI, (27 juin 1798), quarantedeux mille volumes se trouvaient, à cette époque, entassés dans les différentes salles de l'abbaye des Dunes. Mais la plupart étaient des ouvrages de théologie, qui ne pouvaient pas servir pour le but qu'on se proposait. Il fallait faire un triage dans cet amas de livres, et les neuf dixièmes en furent mis au rebut. Pour combler les lacunes qui existaient dans la partie historique aussi bien que dans celle des sciences, une somme de trois mille cinq cents francs fut allouée par l'autorité départementale.

D'un autre côté, le jeune bibliothécaire se mit en rapport avec M. J. Van Praet, l'un des conservateurs de la bibliothèque nationale, qui, depuis et dans toutes les circonstances, a donné tant de preuves d'attachement à sa ville natale. Grâce à la puissante intervention de ce digne citoyen, (c'était le seul titre dont il fut permis de s'honorer à cette époque), le gouvernement Français fit à diverses reprises, des envois assez considérables de bons ouvrages, afin de mettre le nouvel établissement, à peu

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