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pourriez-vous m'expliquer ces paroles que Jésus dit à ses apôtres : vobis datum est nosse mysterium regni Dei, cæteris autem in parabolis, ut audientes non intelligant? Pourriez-vous encore m'expliquer le verset 12 où il est dit que le diable emporte la parole semée? Mais le démon peut-il nous enlever soit le sens, soit l'audition de la parole humaine qu'on nous adresse? Evidemment non... Vous donnez donc à cette phrase semen est verbum Dei un sens absolu qu'elle n'a aucunement dans le texte sacré. Mais consultons encore l'Evangile grec. Dans votre sens il faudrait omópos datív á hóyog toŭ Oɛçã, ce qui voudrait dire comme vous l'entendez: la parole de Dieu est une semence; mais le grec porte ὁ σπόρος ἐστὶν ὁ λόγος τοῦ Θεοῦ, ce qui signife : la semence, dont je vous ai parlé dans la parabole, est la parole de Dieu : or cela change la question du tout au tout. Cela fait de ó amópos le sujet de la│ phrase, tandis que votre interprétation n'en fait que l'attribut, et transporte le privilége du sujet sur ó λóyog roυ Oɛcũ. Pardonnez-moi, monsieur, d'entrer dans des explications si détaillées et presque minutieuses; mais depuis longtems je vois toujours dans vos Annales une fausse explication donnée à ces deux textes, qu'il paraît bien que vous la considériez comme véritable et légitime.

Nous admettons encore le sens attaché à ce texte par notre correspondant; mais nous ne comprenons pas non plus comment il peut rendre fausse la conclusion que nous en avons tirée. Que notre honorable contradicteur veuille bien y faire attention; nous ne prétendons pas que le Christ, en disant la semence est la parole de Dieu, a voulu établir un système philosophique, mais nous disons qu'il s'est servi d'une comparaison; il a comparé la semence à la parole de Dieu; réciproquement il a comparé la parole de Dieu à une semence. C'est tout ce que nous voulons établir; nous reprenons cette comparaison et nous disons à nos adversaires : « Vous dites, vous, que la >> parole de Dieu et la parole de l'homme ne donnent pas, à pro» prement parler, la connaissance d'une chose qu'on n'avait pas, » c'est-à-dire ne donnent pas le germe; suivant vous, germe » semé, non par la parole, mais a été infusé (inditum ), inné dans » l'âme lors de la création. La parole ne fait que le développer, le faire » grandir; on doit la comparer à l'eau ou à la chaleur, qui font » croître et développent la plante. Or, le Christ a comparé la pa» role à une semence: c'est ce que nous faisons nous-mêmes. façon de raisonner laisse intact le sens littéral, et nous semble tout-à

le

a été

Cette

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fait conforme aux règles les plus strictes du raisonnement. Aussi croyons-nous erronée la conclusion de la lettre, qui s'exprime ainsi :

Que résulte-t-il maintenant de ces rectifications? Deux choses : la première c'est que vous compromettez votre cause en appelant à son secours de telles interprétations, et qu'aux yeux de vos adversaires incroyans vous pourriez apparaître comme déguisant la vérité; la seconde, et cette conséquence est plus directe; c'est que si votre système sur l'origine de la raison n'avait d'autre appui que ces textes-là, il ne se soutiendrait pas; toutes ces discussions seraient vaines et n'auraient amené aucun résultat; et vos adversaires reprenant votre travail en sous-œuvre, le saperaient par la base, en demandant d'autres preuves de la doctrine que vous émettez. J'aimerais donc que vous laissassiez de côté ces deux textes puisqu'évidemment ils ont un tout autre sens que celui auquel vous les soumettez, et qu'ils ne sont nullement propres à porter la lumière dans les esprits que vous cherchez à éclairer. Je suis, monsieur, etc.

L'abbé Ch. M.....

Nous n'ajouterons ici qu'une chose, c'est que notre opinion n'a pas seulement pour preuve ces deux textes de la Bible; ils servent seulement de comparaison. Nous pouvons, comme le Christ, comparer la parole, soit de Dieu, soit de l'homme, à une semence; ce que nos adversaires ne peuvent pas faire; ils sont obligés, comme ils le font toujours, de prendre ce mot dans un sens impropre, et de dire que le Christ s'est servi d'une comparaison impropre. Pour nous, nous ne le pensons pas. Nous espérons que notre correspondant et nos lecteurs seront satisfaits de ces explications.

A. B.

ITALIE.

NOUVELLES ET MÉLANGES.

Nouvelles et Mélanges.

ROME.

EUROPE.

Encyclique de Notre S. P. le pape

Pie IX, pour la réforme des ordres religieux.

Religieux, nos chers Fils, salut et bénédiction apostolique.

A peine, par un secret dessein de la Providence, fûmes-nous élevé au gouvernement de l'Eglise universelle, que parmi les grandes obligations et les graves sollicitudes de notre ministère apostolique, aucune ne nous fut plus vivement à cœur que celle d'entourer vos familles de Religieux des sentimens tout particulièrement affectueux de notre paternelle charité, de leur témoigner toute notre beinveillance, de les protéger, de les défendre et de travailler de toutes nos forces à augmenter leur bien-être et leur splendeur. Etablies en effet par de très-saints personnages que l'Esprist divin inspirait, pour procurer la plus grande gloire de Dieu et le salut des ames, et confirmées par ce Siége apostolique, elles concourent, par la multiplicité de leur forme, à cette admirable variété qui répand un merveilleux éclat sur l'Eglise ; et elles composent ces phalanges d'élite, ces colonnes auxiliaires de soldats de Jésus-Christ qui furent toujours, pour la société civile comme pour la société chrétienne, un puissant secours, un ornement et un rempart. Leurs membres, appelés par une grâce spéciale de Dieu à pratiquer les conseils de la sagesse évangélique, n'estimant rien de comparable à la sublime science de Jésus-Christ, méprisant avec une grande ame et un cœur invincible les choses de la terre pour ne considérer que celles du ciel, se sont montrés constamment appliqués à ces œuvres éminentes et à ces glorieux travaux par lesquels ils ont si bien mérité de l'Eglise catholique et des gouvernemens temporels. Assurément, personne n'ignore ou ne peut ignorer que ces congrégations religieuses, dès le premier moment de leur institution, se sont illustrées en produisant d'innombrables personnages qui, distingués par la diversité de leur savoir et la profondeur de leur érudition, resplendissants de l'éclat de toutes les vertus et de la gloire de la sainteté, revêtus quelquefois des dignités les plus hautes, brûlant d'un ardent amour pour Dieu et pour les hommes, offerts en spectacle au monde, aux anges et aux hommes, ne connurent d'autres délices que d'appliquer tous leurs soins, tout leur zèle, toute leur énergie à méditer nuit et jour les choses divines, porter dans leur corps la mortification du Seigneur Jésus, propager la foi catholique de l'Orient à l'Occident, combattre courageusement pour elle, souffrir

avec joie les amertumes de tout genre, les tourmens, les supplices, jusqu'à sacrifier leur vie même, arracher des peuples ignorans et barbares aux ténèbres du mensonge, à la férocité de leurs mœurs, à la fange des vices, pour les conduire à la lumière de la vérité évangélique, à la pratique des vertus, aux habitudes de la civilisation; cultiver, conserver, et ressusciter les lettres, les sciences et les arts; former soigneusement à la piété et aux bonnes mœurs l'ame tendre et le cœur de cire des enfans, les remplir de saintes doctrines, ramener dans les sentiers du salut ceux qui se sont égarés. Ce n'est pas tout encore prenant des entrailles de miséricorde, il n'est pas d'acte d'héroïque charité qu'ils n'aient exercé, même au prix de leur vie, pour prodiguer avec amour tous les secours opportuns de la bienfaisance et de la prévoyance chrétienne, aux esclaves, aux prisonniers, aux malades, aux mourans, à tous les malheureux, aux pauvres, aux affligés, pour adoucir leur douleur, essuyer leur larmes, et pourvoir par toute sorte de secours et de soins, à leurs nécessités. C'est pour cela qu'avec tant de justice et de raison les Pères et les docteurs de l'Eglise ont fait les plus grands éloges de ces pieux observateurs de la perfection évangélique, et en ont pris si vigoureusement la défense contre les ennemis qui accusent témérairement ces instituts sacrés d'être inutiles et funestes à la société. A leur tour, les Pontifes romains, nos prédécesseurs, pleins d'une bienveillante affection pour ces ordres religieux, n'ont jamais cessé de les couvrir de la protection de l'autorité apostolique, de les défendre et de les enrichir d'honneurs et d'amples priviléges, sachant parfaitement quels grands biens et quel nombreux avantages la république chrétienne a de tout tems recueillis de ces mêmes instituts. Cette portion choisie de la vigne du Seigneur fut tellement l'objet des tendres sollicitudes de nos prédécesseurs, que dès qu'ils s'aperçurent que l'homme ennemi avait clandestinement semé l'ivraie parmi le bon grain, ou que les petits des renards dévastaient les ceps en fleur, ils mirent sans retard tous leurs soins à arracher et à détruire tout ce qui pouvait ema pêcher de croître les fruits abondans et précieux de la bonne semence.

C'est ainsi en particulier que les Papes, d'heureuse mémoire, Clément VIII, Urbain VIII, Innocent X, Alexandre VII, Clément IX, Innocent XI, Innocent XII, Clément XI, Pie VII et Léon XII, soit par de salutaires conseils, Soit par de très-sages décrets et des constitutions, employèrent toute la vigueur de l'autorité et de la vigilance pontificale pour faire disparaître entièrement les maux que les tristes visissitudes des choses et du tems avaient introduits dans ces congrégations religieuses, et pour y assurer le maintien ou le rétablissement de la discipline régulière.

Excité nous mêmes par l'amour ardent que nous portons à ces ordres religieux, jaloux de suivre les illustres exemples de nos prédécesseurs, et voulant particulièrement nous conformer aux sages décrets des Pères de Trente, (Sess. xxv, de Regular, el Monial.) nous avons résolu, comme notre suprême

apostolat nous en fait un devoir, de tourner nos soins et nos pensées avec tout l'amour de notre cœur vers vos religieuses familles, afin d'y fortifier ce qui serait faible, d'y guérir ce qui serait malade, d'y rattacher ce qui serait rompu, d'y ramener ce qui serait perdu, d'y relever ce qui serait tombé, et de cette sorte y faire revivre, fleurir et croître chaque jour davantage la pureté des mœurs, la sainteté de la vie, la pratique fidèle de la discipline, les lettres, les sciences, les sciences sacrées surtout, et enfin les règles particulières de chaque ordre. Car, si le Seigneur nous donne l'immense joie de voir dans les congrégations religieuses un grand nombre de membres qui, toujours fidèles à leur sainte vocation, se distinguent par l'exemple de toutes les vertus et par l'étendue de leur savoir, s'efforcent de marcher sur les traces glorieuses de leurs pères, se livrent aux saints travaux du ministère des ames et répandent partout autour d'eux la bonne odeur de Jésus-Christ, nous avons aussi la douleur de savoir qu'il s'en trouve quelques-uns qui, oublieux de leur état et de leur dignité, se sont tellement écarté de l'esprit de leur ordre, qu'au grand détriment de leur propre communauté et des fidèles, ils n'ont plus que l'apparence et l'extérieur de la piété, tandis que leur vie et leurs mœurs démentent la sainteté, le nom et l'habit de l'institut qu'ils ont embrassé.

Voilà pourquoi, Nos très-chers Fils, en votre qualité de supérieurs de ces ordres religieux, nous vous adressons les présentes lettres comme un témoignage de notre tendre affection pour vous et pour vos communautés, el comme l'annonce de la résolution que nous avons prise de rétablir la discipline régulière. Ce dessein n'a d'autre but que de prescrire avec l'aide de Dieu ou de perfectionner tous les moyens qui seront les plus propres pour conserver ou obtenir le bon état et la prospérité de chaque communauté, procurer le bien des peuples, étendre le culte divin et propager de plus en plus la gloire de Dieu. En rétablissant ainsi la discipline dans vos instituts, nos efforts et nos désirs ont surtout pour objet de pouvoir trouver dans leur sein d'infatigables et d'habiles ouvriers, non moins doués de piété que de sagesse, hommes de Dieu parfaits, aptes à toutes bonnes œuvres, que nous puissions employer à cultiver la vigne du Seigneur, à propager la foi catholique particulièrement parmi les peuples infidèles, et à traiter les affaires les plus graves de l'Eglise et de ce Siége apostolique. Et pour qu'une entreprise de si haute importance ait un succès heureux et favorable à la religion ainsi qu'aux ordres religieux eux-mêmes, comme c'est notre plus vif désir, et pour que le but que nous nous proposons soit atteint, à l'exemple de nos prédécesseurs nous avons établi une congrégation spéciale de nos Vénérables Frères les cardinaux de la sainte Eglise romaine, sous ce titre : « De l'état des ordres réguliers, » afin que ces Vénérables Frères par leur rare sagesse, leur prudence, leur conseil, leur expérience et leur habileté dans les affaires, nous fournissent pour une œuvre aussi grande le secours de leurs mains.

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