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qu'il est très-effritant. Sa multiplication s'opère par graines qu'on sème à l'exposition du levant, lorsque les gelées ne sont plus à craindre, ou plus communément par le déchirement des vieux piés pendant l'hiver ou au commencement du printems. Toutes ses parties, et surtout ses calices, contiennent une huile essentielle, jaune, très-odorante, et abondamment chargée de camphre. On les fait entrer dans les parfums; on les emploie à l'assaisonnement des mets, et dans la médecine comme stomachiques et carminatives. La dessiccation, loin de leur faire perdre cette odeur semble l'aviver.

On ne doit pas manquer de planter le serpolet dans les pelouses des parties sèches des jardins paysagers dont ils forment le plus bel ornement; mais il faut le proscrire des gazons proprement dits; car il nuirait à l'uniformité de couleur qu'on exige d'eux, et il ne tarderait pas à les détruire par le prolongement de ses tiges. Cette dernière considération a lieu aussi pour le pâturage; ainsi l'on conseillerait d'y arracher la totalité des piés qui s'y trouvent, pour faciliter la reproduction de la bonne herbe, si l'idée qu'on attache à son influence sur la chair des moutons, et l'agrément de son parfum, ne dictaient pas leur conservation (1).

LXIV. GLASTRUM, ou Vitrum (2), et selon Pline GLASTUM, Guède, pastel, plante propre à la tein

(1) Nouveau cours complet d'agriculture. Paris, 1809. Article Thym.

(2) Oribasius, de Simplicibus.

T. V. II PART.

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ture. Jules César l'appelle vitrum dans le passage suivant (1) Omnes verò se Britanni vitro inficiunt, quod cæruleum efficit colorem ; atque hoc horridiore sunt in pugna aspectu. « Tous les insulaires de la <«< Grande Bretagne se teignent le corps avec du pas<< tel, ce qui leur donne une couleur azurée, et rend « leur aspect horrible dans les combats. >>

Le Pastel ou Guède, en latin Isatis, est une plante du genre de la tétradinamie siliqueuse et de la famille des crucifères, que l'on cultive en grand dans quelques parties de la France, à raison de ses feuilles, qui, convenablement préparées, fournissent une couleur bleue très-solide à la peinture. Les Gaulois l'appelaient Glastrum du mot Glas, qui signifie encore aujourd'hui vitrum ou du verre, en Allemagne.

Le pastel a la racine pivotante, fusiforme, bisannuelle, assez grosse et très-pourvue de fibrilles; la tige haute de trois à quatre piés, c'est-à-dire de 97 à 130 centimètres, velue, très-rameuse à son sommet; les feuilles alternes, presque glabres; les inférieures pétiolées, lancéolées et fort grandes; les supérieures amplexicaules et sagittées; les fleurs jaunes, disposées en panicules à l'extrémité des tiges et des rameaux, et chacune composée d'un calice de quatre folioles, d'une corolle de quatre pétales, de six étamines, dont deux plus courtes; d'un ovaire supérieur surmonté d'un stile à stigmate épais. Le fruit est une silicule en cœur allongé, monosperme, à deux valves carinées.

(1) De Bello Gallico, lib. v, cap 14.

Cette plante croît naturellement dans plusieurs contrées de l'Europe, et principalement sur le bord de la mer Baltique. Elle ne craint point les plus fortes gelées.

On cultivait le pastel plus abondamment qu'aujourd'hui avant la découverte de l'Amérique; elle était alors la seule plante dont on pût obtenir une teinte solide. L'introduction de l'indigo dans nos fabriques l'en a presque expulsée; je dis presque, parce qu'on y a reconnu que son union avec l'indigo augmentait la fixité et l'intensité de la couleur que cette dernière fécule donne aux laines, et qu'en conséquence on l'y emploie toujours, mais en petite quantité.

La cause qui fait préférer l'indigo au pastel, vulgairement appelé guède ou guesde, et vouède, malgré son infériorité, c'est qu'il est bien plus riche en parties colorantes, et que, quoique venant de loin, et produit par des mains esclaves, c'est-à-dire étant beaucoup plus cher, il est cependant d'un usage plus économique.

Quoi qu'il en soit, cette plante ne mérite pas moins toute l'attention des cultivateurs français, non-seulement sous le rapport qui vient d'être cité, mais encore comme propre à nourrir les bestiaux pendant tout l'été, et même pendant tout l'hiver, c'est-à-dire à une époque où les alimens verts leur sont le plus nécessaires.

C'est dans les environs de Toulouse, dans ceux d'Avignon, non loin de Caen et de Valenciennes,

que l'on cultive le plus le pastel: celui des deux premières contrées est plus recherché comme contenant plus de parties colorantes, avantage qu'il doit uniquement à la chaleur du climat.

Une terre substantielle et profonde est celle qui convient exclusivement au pastel destiné à la teinture, parce que plus ses feuilles sont grandes et nombreuses, et plus il y a de bénéfice à en tirer; il faut de plus qu'elle ne soit pas trop argileuse et trop humide, parce que, dans le premier cas, les racines ne pénétreraient pas assez facilement, et que, dans le second, les feuilles pourriraient. Celui qu'on sème dans l'intention d'en nourrir les bestiaux, doit l'être dans la plus médiocre; car il y aurait de la perte à faire autrement. En Angleterre, on lui consacre toujours, au rapport d'Arthur Young, de vieux prés qu'on veut rompre, et dont des cultivateurs voyageurs, ce sont ses expressions, paient par an, pour deux ans, une rente triple de la rente ordinaire; ce qui démontre suffisamment les avantages de cette culture.

Il y a deux variétés de pastel, l'une plus petite, plus velue, à graine jaune; l'autre plus grande, presque glabre, et à graine violette. C'est cette dernière qui mérite la préférence, non-seulement à raison de sa grandeur, mais encore parce que la pous sière est moins retenue par les feuilles, et que la pâte qu'on en fabrique est moins impure.

On doit, par un ou deux labours profonds, faits

avant et pendant l'hiver, préluder à celui qui précède immédiatement les semailles.

Si l'on veut tirer tout le parti possible de la culture du pastel, il ne faut pas épargner le fumier, et le fumier bien consommé, avant ce dernier labour.

Il est bon de diviser le terrain en planches bombées, de trois à quatre piés (ou de 97 à 130 centimètres) de large, et de donner, par des rigoles convenablement disposées, de l'écoulement aux eaux, si l'on a lieu de craindre leur abondance.

C'est au mois de février qu'on sème ordinairement le pastel. Sa graine doit être répandue trèsclair; car chaque pié occupe beaucoup d'espace, dixhuit à vingt pouces (ou de 49 à 54 centimètres) de diamètre. Dans quelques endroits on le sème en rayons, et cette pratique est dans le cas d'être recommandée.

Lorsque le pastel est levé et qu'il a déjà acquis une certaine force, c'est-à-dire vers le mois d'avril, plus tôt ou plus tard, selon le climat, il convient de le débarrasser des piés qui sont faibles et trop rapprochés des autres, et de lui donner un binage.

Les feuilles du pastel commencent à mûrir en juin. Elles sont bonnes à cueillir lorsqu'elles ne peuvent plus se soutenir droites et qu'elles jaunissent. Il est très-important de faire cette opération par un tems sec, pour qu'elle s'exécute plus facilement; et que les feuilles soient moins chargées de terre.

La récolte du pastel se fait de deux manières; ou l'on arrache les feuilles avec la main en les tor

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