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blable, pareil, dans les diverses langues, tant germaniques que celtiques; témoin gleich, semblable, pareil, en langue belgique ou flamande, qui est un reste de l'ancienne langue des Celtes. C'est cette même marne que les Latins appellent colombine, c'est-à-dire chatoyante ou gorge de pigeon (1).

LIV. EMARCUM, nom que les Gaulois donnaient à une sorte de vigne. Nous devons la connaissance de ce nom à Cornélius Celsus qui vivait sous Tibère. Ses ouvrages sur la médecine lui ont mérité le titre d'Hippocrates latin. Columella dit (2) qu'il connaissait parfaitement, non-seulement l'agriculture, mais encore la nature entière. Quintilien (3), qui ne lui donne d'ailleurs qu'un génie médiocre, convient cependant qu'en écrivant sur l'histoire, l'éloquence, la guerre, l'agriculture et la médecine, il avait au moins montré qu'il était instruit dans tous ces arts.

Columella, après avoir parlé de deux classes de vignes, ajoute (4): « Celsus fait une troisième classe des vignes qui ne sont recommandables que par «< leur fertilité, telles que les trois Helvenaca, dont « les deux plus grandes sont regardées comme pa<< reilles entre elles, parce que leur vin n'est ni de << moindre qualité, ni moins abondant dans l'une <«< que dans l'autre. L'une des deux, que les habitans « des Gaules appellent Emarcum, ne rend qu'un vin

(1) Histoire naturelle de Pline. Paris 1772. VI, 42.

(2) Livre II, chap. 2.

(3) 12, 11.

(4) Livre III, chap. 2.

n

« médiocre. » Earum altera, quam Galliarum incolæ Emarcum vocant, mediocris vini.

LV. EPOREDIÆ. Pline dit (1) que les Gaulois appelaient ainsi ceux qui dressaient les chevaux : Eporedias Galli bonos equorum domitores vocant. Selon Poinsinet de Sivry (2), vred en celtique signifie une bride, en italien redina; et bride n'est autre chose que ce mot différemment prononcé. Eu-vred qui s'écrit en celtique ewred, signifie donc bonne bride, c'est-à-dire bon écuyer, d'où Eu-vredia, nom de plusieurs villes dont les Latins font Eu-orédia, Eboredia, Ep-orédia. Cette dernière prononciation l'a emporté sur les deux premières comme plus conforme au génie de la langue latine : de là, dis-je, le nom de ville Eporedia Salassorum, aujourd'hui Evrea ou Ivréa, que nous appelons Ivrée, dans l'ancien pays des Salasses, à l'occasion de laquelle Pline donne ce nom gaulois.

LVI. ESSEDUM, nom que l'on donnait à une voiture à quatres roues, que les Romains avaient prise des peuples de la Grande Bretagne (3). Nonseulement Jules César en parle dans le passage que j'ai cité, mais Cicéron y fait allusion lorsqu'il écrit à Trébatius (4): « gardez-vous des chariots bretons; » in Britannia ne ab essedariis decipiari,

(1) Hist. nat. Livre III, chap. 17.

(2) Note sur ce passage de sa traduction. II, 190.

(3) Jules César, de Bello Gallico, IV, 33. J'ai rapporté la traduction de ce passage à l'article Covinus. Le texte de cet article de Jules César se rapporte aux Esseda et non aux Covini.

(4) Epistolæ ad famil. VII, 6.

caveto. Il nomme encore ces chariots dans une autre lettre au même Trébatius (1). Mais les Belges avaient cette même espèce de voitures comme on le voit par ce vers des Géorgiques de Virgile:

Belgica vel molli mclius feret esseda collo (2).
Un jour tu le verras, ce coursier généreux,
Ensanglanter son mors et vaincre dans nos jeux;
Ou, plus utile encor, dans les champs de la guerre,
Sous de rapides chars faire frémir la terre.

Les commentateurs de Virgile ont conclu de ce passage et du nom de Belgica omis dans la traduction de l'abbé Delille, que les Belges avaient imaginé l'usage de ces chars (3). Mais les Romains en firent aussi des voitures de luxe destinées aux voyages. On croit que ce fut César qui les introduisit à son retour des Gaules. Cicéron reproche à Antoine d'avoir adopté cette innovation. « Un tribun <«< du peuple,>> dit-il dans une de ses Philippiques (4), voyageait porté sur un essedum (5); des licteurs << ornés de lauriers le précédaient au milieu d'eux, << une comédienne s'offrait aux regards dans une li« tière ouverte; les honnêtes habitans des cités, obligés de sortir à sa rencontre, ne l'appelaient « pas de son nom de théâtre; ils la saluaient du

«

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(1) Id. Epist. 10.

(2) Georg. III, 204.

(3) Junius Philargirius, in III Georg. Virgil.

(4) Philipp. II, chap. 24.

(5) Un traducteur moderne, Paris 1821, traduit ici essedum par un char gaulois. Mais on a vu que ce char était breton ou belge.

« nom de Volumnia,» parce que Volumnius l'avait mise en liberté. « Venait ensuite un char à quatre «< chevaux (rheda), rempli de jeunes débauchés, son « cortège ordinaire. » Nous trouvons encore ici une troisième dénomination pour les chars; elle est aussi gauloise comme nous l'apprend Quintilien et comme nous le verrons dans la suite. Il paraît ici que rheda était une calèche ou voiture découverte.

Quant au mot esseda, Cicéron l'emploie encore avec rheda dans le passage suivant où il écrit à Atticus (1), en parlant d'un ami de Pompée, dont le luxe lui a paru ridicule. Hic Vedius venit mihi obviàm cum duobus essedis et rhedâ equis junctâ et lecticá, in familia magná, pro quá si Curio legem pertulerit, HS centum pendat necesse est. Erat præterea cynocephalus in essedo; nec deerant onagri. « Ce Védius « est venu au-devant de moi avec deux chariots, une <«< chaise roulante attelée à des chevaux, une litière << et un si grand nombre d'esclaves, que si la loi de « Curion passe, Védius sera assurément taxé à plus « de cent mille sesterces. Il avait de plus un cino«< céphale (espèce de singe à tête de chien) sur un « de ses chariots, et des onagres dans son équipage. » On observera que cette épître n'a été écrite que l'au de Roine 703 (2), quatre ans après l'expédition de Jules César en Bretagne (3). Pitiscus qui dit le con

(1) Ad Attic. VI, 1.

(2) Suivant la chronologie adoptée par M. Le Clerc, Paris, 1821, p. 111 de son édition.

(3) Chronologie de Tacite, sous l'an 699 de Rome,

traire (1), se trompe. Sous Auguste, Horace en fait mention (2):

Esseda festinant, pilenta, petorrita naves.

« Après cela viennent en grande hâte, des chariots, « des litières, des carrosses, et jusqu'à des navires.»> Ce passage nous donne encore un mot (petorritum) que Festus et Varron disent être gaulois, et qui signifie aussi chariot, comme on le verra à l'article de ce mot dans la suite de ce glossaire. On voit par ces quatre noms donnés aux chars en Bretagne et dans les Gaules avant Jules César (sans compter celui de Benna dont l'article a été donné plus haut), que de grandes routes y étaient tracées depuis long-tems et que la civilisation devait y être fort avancée. Le petorritum ou petoritum était une voiture suspendue à quatre roues. L'Essedum est donné aussi pour breton par le poète Properce (3).

Esseda celatis siste Britanna jugis.

Les hommes en dignité en fesaient usage, puisque selon Suétone (4), l'empereur Caligula combattant contre les Germains, se trouvait au-delà du Rhin, sur son essedum, resserré avec ses troupes dans un défilé, cùm Caius trans Rhenum inter angustias, densumque agmen iter essedo faceret. Plus tard, l'em

(1) Lexicum antiquitatum romanorum. 1737. Art. Esseda. (2) Epistol. lib. II, ép. 1, vers. 192.

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