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ciens habitans de cette contrée, le trouvèrent si bien à leur gré, qu'ils le préférèrent même à leurs habits: cùm inter Gallos Franci militantes virgatis eos sagulis lucere conspicerent, novulate gaudentes, antiquam consuetudinem dimiserunt et eos imitari cœperunt (1).

De sagum Ciceron a fait res sagi pour désigner ce qui regarde la guerre ; c'est encore cette expression qu'il adopte pour dire: être sous les armes, in sagis esse; prendre les armes, endosser le harnais, saga sumere, ad saga ire; enfin il en a dérivé le mot sagatus, pour désigner celui qui porte l'habit de guerre. Ces trois dernières locutions sont réunies au commencement d'un discours de l'orateur romain (2). On trouvera une foule de passages sur le sagum et le sagulum des Gaulois dans Pitiscus, qui prouve très-bien que ce vêtement était ouvert et n'était attaché qu'avec une boucle (3).

XCVI. SAMOLUS, nom que les Druides gaulois donnaient à une plante qui croissait dans les marais. On la cueillait à jeun de la main gauche, pour les maladies des bœufs et des porcs. Celui qui la cueillait ne devait pas la regarder, ni la mettre ailleurs que dans l'auge où s'abreuvaient ces animaux: et on l'y broyait, pour qu'ils pussent l'avaler en boisson (Pline, Hist. nat. livre XXIV, chap. xi). On croit que c'est l'herbe que nous appelons pulsatille.

(1) Sangallensis, in vitâ Caroli magni.

(2) Quatorzième philippique, chap. I.

(3) Lexicon antiquitatum romanarum. Hagce-Comitum, 1737, III, 320.

XCVII. SAPANA, nom que donnaient les Gaulois à cette herbe que les Grecs appelaient avaya et les Romains Macia. Ανάγαλλις, Ρωμαῖοι μακία, Γάλλοι σañáva (1). C'est notre mouron rouge.

Le mouron est un genre de plantes de la pentandrie monoginie et de la famille des primulacées, qui renferme une douzaine d'espèces, dont deux sont trèscommunes dans nos champs.

Les mourons rouge et bleu ont la racine annuelle; les tiges tétragones, couchées, rameuses; les feuilles opposées, sessiles, ovales, aiguës; les fleurs solitaires et axillaires. Ils ont été confondus comme deux variétés; mais ce sont deux espèces très-voisines qui se distinguent facilement par la couleur de leurs fleurs. On donne au premier, sans raison connue, le nom de mouron male, et au second celui de mouron femelle. Leur tige a au plus six à huit pouces ( 16 à 22 centimètres) de long. Ils fleurissent pendant tout l'été. Les vaches et les chèvres les mangent sans les rechercher. Leurs feuilles ont une légère odeur aromatique qui devient désagréable quand elles sont trop froissées; leur saveur est d'abord douce et ensuite amère. Elles passent pour vulnéraires, détersives et céphaliques. On les a indiquées comme un spécifique contre l'hidrophobie, mais cela n'est pas confirmé (2).

XCVIII. SAPO, savon en français; les Saxons l'appellent sepe; les Allemands seipfen ou seiffe; les (1) Dioscorides.

(2) Nouveau cours complet d'agriculture; Paris 1809, art. Mou

ron.

Flamands seep ou zeepе; les Danois seepe; les Anglais sope; et les Turcs sapoun (1). Pline (2) dit que les Gaulois ont inventé le savon. Voici ses expressions: prodest et sapo. Gallorum hoc inventum rutilandis capillis ex sevo et cinere. Optimus fagino et caprino, duobus modis spissus ac liquidus. Uterque apud Germanos majore in usu viris quàm fœminis. « Un « autre remède est employé (pour la guérison des << écrouelles ). C'est le savon, inventé dans les Gaules « pour rendre les cheveux blonds; on le compose avec « du suif et des cendres. Le meilleur est fait de cen<< dres de hêtre et de suif de chèvre. Il y en a de deux « sortes, épais et liquide; l'un et l'autre, chez les « Germains, sont plus à l'usage des hommes. que des

<< femmes. >>

Le père Hardouin observe que le savon des modernes diffère de celui des anciens, en ce qu'il entre de l'huile dans la composition du savon moderne. En effet, selon M. Guettard, le savon dont notre auteur attribue l'invention aux Gaulois, est de nos jours une substance composée essentiellement d'huile et d'alcali fixe; par sa partie saline, il est dissoluble dans l'eau; par sa partie huileuse, il agit sur les résines et sur les corps gras: on peut le regarder comme une espèce de dissolvant universel. On estimait à Rome le savon d'Allemagne, puis celui de Gaule. Voyez l'auteur du livre de Simplicibus Medicinis Galeni, dans les OEuvres

(1) Voyez Isaac Pontanus, dans son Glossaire celtique, au mot Sapo.

(2) Hist. natur. XXVIII, 12.

T. V. II PART.

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de Galien (1): Sapo conficitur ex sevo bubulo, vel caprino, aut vervecino et lixivio cum calce: optimum judicamus Germanicum; est enim mundissimum, et veluti pinguissimum: deinde Gallicum.

On voit que cet auteur croit le savon fabriqué premièrement en Germanie. En effet Martial (2) qualifie ce même savon germanique de Mattiacæ pilæ, par allusion à la ville de Mattiacum, Baden, en Germanie:

Si mutare paras longævos cana capillos,

Accipe Mattiacas (quò tibi calva?) pilas.

«Ma vieille, si tu veux teindre tes cheveux gris, prends des boules de ce savon. Mais à quoi bon? << N'es-tu pas chauve? »

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Il le qualifie plus haut de spuma caustica et de teutonique (3)

Caustica Teutonicos accendit spuma capillos.

« Un caustique roussit les cheveux des Teutons. » Comme la principale base de ce savon était un sel lixiviel tiré des cendres, plusieurs auteurs ont parlé du savon sous la dénomination de cinis, ou de unguentum cineris, et ont qualifié cinerarios les peuples qui s'en servaient: c'est pourquoi on lit chez Valère Maxime (4): Romanæ feminæ quo formam suam concinniorem efficerent, summa cum diligentiá ca

(1) Tome 13, ad Patern. page 100.

(2) Lib. XIV, epigr. 25.

(3) Id. epigr. 24.

(4) Lib. II, cap. I, no 5.

pillos cinere rutilarunt. « Les femmes romaines pre<< naient un soin extrême de rehausser leur beauté << naturelle, en donnant à leurs cheveux une couleur « blonde au moyen du savon. »

Un traducteur moderne (1) croit que cinere doit être traduit ici par le mot poudre: il justifie sa traduction par le passage de Pline qui vient d'être rapporté et qu'il cite mal (2): cinere et sebo; il traduit ces mots par de la poudre et de la pommade; mais Pline dit formellement, comme on l'a vu, que les Germains employaient pour rendre les cheveux blonds (rutilandis capillis) du savon fabriqué avec du suif et des cendres.

On lit aussi chez Quintus Sérénus:

Ad rutilam speciem nigros flavescere crines
Unguento cineris, prædixit Tullius auctor.

où ungeuntum cineris veut dire du savon.

Enfin Tertullien, en parlant des Germains (3), écrit d'eux cinerarios peregrinæ proceritatis.

Théodore Priscien fait mention du savon gaulois (4) en ces termes: Gallico sapone caput lavabis: « tu « te laveras la tête avec du savon gaulois. >>

Martial (5) qualifie ce même savon d'écume batavique :

(1) M. C. A. F. Frémion, dans son Valère Maxime; Paris 1827. I, 137.

(2) XXVIII, I au lieu de XXVIII, 51, dans l'édition de Hardouin, 12 dans celle de Franzius.

(3) Lib. 2 ad uxorem chap. 8.

(1) Livre I chap. 3 de crementis capillorum.

(5) Livre 8, epigr. 33.

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