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a changé plusieurs fois de signification; car il a signifié d'un côté un extravagant et un étourdi, puis un goujat ou un valet de soldat. En effet le satirique Perse s'exprime ainsi :

Baro, regustatum digito terebrare salinum

Contentus perages, si vivere cum Jove tendis (1).

<< Pauvre sot! si tu aspires à vivre en bonne intelli»gence avec Jupiter, résous-toi à racler ta salière >> avec le doigt toute la vie. » Le scholiaste de Perse dit sur ce passage: Linguâ Gallorum barones vel varones dicuntur servi militum, qui utique stultissimi sunt, servi videlicet stultorum. Il est remarquable qu'encore aujourd'hui les Italiens appellent barone un homme méprisable et sans esprit. Au lieu de baro, quelques manuscrits de Perse ont varo.

D'un autre côté on a prétendu que les Romains avaient entendu par le mot baro un homme fort et vaillant (2). Hirtius Pansa, au premier livre de la Guerre d'Alexandrie (3), parlant de Quintus Cassius Longinus, gouverneur de l'Espagne ultérieure, s'exprime ainsi : Concurritur ad Cassium defendendum ; semper enim Barones, compluresque evocatos cum telis secum habere consueverat. «On accourt pour défendre Cassius, car il avait toujours avec lui un certain nombre de Barons et d'évoqués armés ;» mais tous les manuscrits écrivent Berones et non Barones.

(1) Persii satyra v, vers 138 et 139.

(2) Ménage, Dict. étym, au mot Barou. (3) Cap. 53.

M. Lemaire, qui le reconnaît, ne peut expliquer ce mot. Le Deist de Botidoux traduit de braves; les évoqués étaient des chevaliers attachés au service du général. Voyez Pitiscus dans son Lexicon, édition de 1737, à l'article Evocati; il n'a point consacré d'article au mot Buro ni Bero. Les Bérons étaient une nation gauloise établie en celtique (1). C'est peut-être dans cette nation que Cassius avait pris des gardes, en sorte que ce passage ne pourrait servir ici de preuve, tandis qu'il est certain que Cicéron (2) emploie le mot baro dans le sens de sot, comme Perse.

Ce qu'il y a d'aussi certain, c'est que dans les tems modernes, soit que le sens du mot baro eût changé, soit qu'il eût conservé une autre acception plus ancienne, ce nom fut donné comme un titre d'honneur aux personnes les plus nobles; Ubinam est, dit saint Augustin, Cæsaris corpus præclarum, ubi арраratus deliciarum, ubi multitudo dominorum, ubi caterva Baronum, ubi acies militum (3)? et dans un autre endroit Dic ubi Imperatores et Reges, ubi Duces, Principes aut Barones (4). Ce mot, dans les lois saliques des Germains, des Ripuaires et des Lombards, est pris simplement pour un homme. Les Barons, dans l'ordre féodal, étaient les grands vassaux, c'est-à-dire ceux qui tenaient immédiatement des fiefs

(1) Voyez mon Histoire de Portugal. I, 40.

(2) Epistolæ ad familiares, 1x, 26, ad Pætum. (3) S. August. serm. x ad Fratr. in Erem. (4) Id. serm. LXVI ad eosdem.

du roi : Si quis Baronum meorum comitum, vel aliorum qui de me tenent, mortuus fuerit (1).

XXIII. BASCAUDA; c'était un baquet ou cuvette où l'on rinçait les pots et les verres, ainsi que nous l'apprend le scholiaste de Juvénal sur ces vers :

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Adde et bascaudas, et mille escaria, multùm
Caelati, biberat quo callidus emtor Olynthi (2).

Ajoutez des cuvettes, mille bassins et quantité de >> coupes cizelées, dont s'était servi ce personage » rusé qui acheta la ville d'Olinthe» (Philippe, roi de Macédoine, père d'Alexandre-le-Grand ).

Martial dit expressément que ce mot leur était venu à Rome des îles Britanniques :

Barbara, de Pictis veni Bascauda Britannis;
Sed me jam mavult dicere Roma suam (3).

« Cuvette étrangère, je proviens des Bretons bi» garrés; mais déjà Rome préfère de me compter au » nombre de ses fabrications. >>

XXIV. BECCO. L'histoire romaine, qui parle avec éloge d'Antonius Primus, général du parti qui fit périr l'empereur Vitellius, dit qu'il était natif de Toulouse, conséquemment Gaulois, et qu'il porta dans son enfance le surnom de Becco, ce qui signifie bec de coq (4). Il est vrai que ce mot signifie non-seulement

(1) Henricus I, In constitutione quæ legitur apud Matt. Paris. (2) Juvenal, satire x1, vers 46 et 47.

(3) Martial, livre xiv, ép. 97.

(4) Suétone, Vie de Vittellius, à la fin, chap. 18.

cela, mais encore le bec de tout autre oiseau, et qu'il est en usage parmi toutes les nations celtiques, comme il l'était apparemment du tems que Suétone écrivait, puisqu'on dit en France bec et becqueter, en suisse Bicken, en Angleterre Pic, en Espagne Pico et Picar, et en plusieurs endroits de l'Allemagne Picken ou Pecken. Ce qui est surtout remarquable, c'est que le mot, tel qu'il est dans Suétone, subsiste à Toulouse, où l'on s'en sert encore aujourd'hui quand on chatouille les petits enfans (1).

XXV. BÉLÉNUS ou BÉLÉNOS, est le nom que les Gaulois donnaient à Apollon, et sous lequel ils honoraient cette prétendue divinité. Ce mot est celtique, et signifie blond, jaune. Les Gaulois le regardaient comme le dieu qui présidait à la médecine, et qui avait une vertu singulière pour guérir les maladies. Ausone en fait mention dans ces vers:

Nec reticebo senem nomine Phoebitium
Qui, Beleni ædituus, nil opis inde tulit (2).

Apollon était aussi honoré à Aquilée sous le nom de Bélénus, comme le font voir diverses inscriptions que l'on a trouvées dans cette ville. Il est prouvé par un passage de Capitolin (3) que Bélénus était le même qu'Apollon. Voici ses expressions: Deum Belenum

(1) L'Histoire des Gaules par Marcel. I, 13.

(2) Ausone, in professor. carm. 194. et 200. Voyez les notes de l'éditeur d'Ausone, ad usum Delphini, sur ces deux endroits, pages 140 et 150.

(3) In Maximin, cap. 22.

per aruspices spopondisse, Maximinum esse vincendum. Unde etiam posteà Maximini milites jactasse dicuntur, Apollinem contrà se pugnasse. Hérodien confirme la même chose (1): Belin (les inscriptions disent indifféremment Belinus et Bélénus) vocant indigenæ, magnáque eum religione colunt, Apollinem interpretantes.

Élias Schédius (2), persuadé que le nom de Bélénos était mistérieux dans ses lettres, les a considérées selon leur valeur numérique en grec, puisque Jules César nous apprend que les Gaulois fesaient usage des lettres grecques, et a trouvé qu'elles fesaient 365, nombre des jours que le soleil met à parcourir le zodiaque.

ΒΗ ΛΕΝΟΣ

2. 8. 30. 5. 50. 70. 200.

Ces valeurs réunies ensemble composent en effet le nombre 365.

XXVI. Belinuncia. Les Gaulois donnaient ce nom à la Jusquiame, que les Romains appelaient Apollinaire, parce qu'elle était consacrée à Apollon. C'est ce que nous apprend Dioscorides (3). Yoσnúaμos Táλo Bikvovvtíav. Les Espagnols l'appellent encore velenno, et les Hongrois belend (4).

XXVII. BÉLIOCANDIUM, herbe que l'on a depuis

(1) Herodian. vin, 3 19.
(2) De Diis Germanorum.

(3) Lib. iv, cap. 67.

(4) Dict. de Moréri. Paris 1759, art. Bélénus.

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