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sirer que l'histoire pût recueillir l'entretien qu'ils eurent ensemble. Le prince royal de Suède entra en campagne après avoir réuni sous ses ordres une armée de 100,000 hommes, tant Suédois que Russes et Prussiens, qui formait sous le nom d'armée du Nord la droite de la grande-armée alliée. Il se mit en marche; et, après avoir obtenu un succès à Gros-Beeren, il gagna, le 6 septembre 1813, la bataille de Dennewitz sur les maréchaux Ney et Oudinot. Cette victoire sauva Berlin, et décida du succès de la campagne en empêchant Napoléon de profiter des avantages considérables qu'il avait remportés à Dresde. Le prince royal se dirigea ensuite à marches forcées sur Leipsick, dans le dessein de couper la retraite de l'empereur. Il arriva assez à temps pour attaquer les 16, 17 et 18 octobre, et eut une part assez importante au succès de ces journées, dont les résultats ont été si déplorables pour la France. Le 17, il entra dans Leipsick avec l'empereur de Russie et le roi de Prusse. Après la bataille de Dennewitz, le prince royal écrivit au maréchal Ney une lettre qui se terminait ainsi : «Quoi>>>> que les intérêts que nous ser>>vons soient différens, j'ai du » plaisir à penser que nos senti» mens sont toujours restés les mê»mes, et je saisirai avec le plus >> vif empressement toutes les oc>>casions de vous assurer que je >> suis constant dans ceux que » vous m'avez connus pour vous. » Depuis long-temps nous rava» geons la terre, et nous n'avons » encore rien fait pour l'humanité.

>> La confiance dont vous jouissez »à si juste titre auprès de l'em»pereur Napoléon, pourrait, ce »me semble, être de quelque poids » pour le déterminer à accepter en»fin la paix honorable et généra>>le qu'on lui a offerte, et qu'il a repoussée. Cette gloire, prince, » est digne d'un guerrier tel que >> vous; et le peuple français ran>> gerait cet éminent service au »> nombre de ceux que nous lui >> rendions, il y a vingt ans, sous » les murs de Saint-Quentin, en » combattant pour son indépen» dance. » Dans le mois de décembre 1815, il arriva à Lubeck, et continua ensuite sa marche sur le Rhin; mais arrivé près de ce fleuve il hésita quelque temps à le passer. Enfin il entra dans Cologne, et publia une proclamation explicative de ses motifs, dont les derniers passages prouvent qu'en remplissant ses devoirs envers la Suède, il n'avait pas oublié son ancienne patrie. On sait qu'il était entièrement opposé au projet d'une invasion en France, qu'il fit tous ses efforts pour déterminer l'empereur Alexandre à s'arrêter sur le Rhin, et qu'il ne prit aucune part à la campagne, qui se termina par l'entrée des alliés à Paris; cette inaction lui a été vivement reprochée par le parti anti-libéral, ou plutôt anti-français. Ce ne fut qu'après l'abdication de Napoléon, que le prince royal vint à Paris. On a prétendu que des raisons politiques l'empêchèrent de faire un long séjour dans cette capitale. En effet, il ne tarda point à reprendre la route de la Suède, où la réception la plus flatteuse

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et qu'un traiteur, nommé Limborn, révéla. Le 14 mars 1817, l'instruction légale prouva qu'il n'y avait ni complot ni conspiration; que Limborn était un imposteur, qui par un mensonge officieux voulait se mettre en crédit, et il fut puni comme il le méritait. Une fausse politique aurait pu tirer parti de cet événement; mais une telle politique n'appartient qu'à la faiblesse ou à l'ineptie. Cependant l'occasion était offerte aux Suédois de manifester leurs sentimens pour le prince royal, et ils la saisirent avec empressement. Ils lui témoignèrent de la manière la moins équivoque, combien ils étaient disposés à prendre sa défense. Sa réponse à l'adresse des bourgeois de Stockholm, est très - remarquable. Nous n'en citerons que quelques passages: « Je vins au milieu >> de vous, et j'apportai comme

l'attendait : son arrivée fut un véritable triomphe. La population entière de Stockholm, le roi lui-mêallèrent à sa rencontre. Les puissances alliées, et le Danemarck par le traité de Kiel, avaient accordé la cession de la Norwège à la Suède. Le prince royal, à la tête de l'armée suédoise, renforcée par 15 à 20,000 Russes, et soutenue par une flotte anglaise, pouvait prendre possession de la Norwège, et l'incorporer sans obstacle à la Suède. Mais il ne regarda ni l'acte de cession, ni les traités avec les puissances alliées, comme des titres suffisans, et ce fut des Norwégiens eux-mêmes qu'il voulut obtenir leur réunion à la Suède. Il tâcha de les éclairer sur leurs vrais intérêts. Les représentans de cette nation s'assemblèrent pour se donner une constitution assortie aux besoins du pays, et fondée sur les droits légitimes des citoyens. Ce qu'il y a de plus remarquable, c'est que ce pacte fondamental est religieusement observé, qu'il n'est permis à aucun pouvoir ni à aucune faction d'y porter atteinte. Dans le mois d'août 1815, le prince royal visita la Norwège avec le prince Oscar son fils, et ils y furent reçus avec enthousiasme. Peu de temps après, il affecta un fonds de 200,000 rixdallers, à l'établis->> peuple libre. Là-dessus je fonde sement d'une académie d'agricul- » mes droits; et aussi long-temps ture, et fit présent à la bibliothé- >> que l'honneur et la justice ne seque d'Upsal d'une précieuse col- >>ront point bannis de la terre, ces lection de livres qui avait appar» droits seront plus légaux et plus tenu à l'évêque Nordin, célè- » sacrés que si j'étais descenbre par son savoir et ses talens. » du d'Odin. L'Histoire montre On a beaucoup parlé, dans le »>qu'aucun prince ne monta sur temps, d'une conspiration qui a- >> le trône, si ce n'est par le choix vait pour but de l'empoisonner, des peuples, ou par la conquête.

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titre et garantie, mon épée et >> mes actions. Si j'avais pu vous >> apporter une série d'ancêtres de>> puis le temps de Charles Mar» tel, je l'aurais désiré, seulement par rapport à vous. Pour moi, je »suis également fier des services » que j'ai rendus, et de la gloire »qui m'a élevé. Ces prétentions » se sont accrues par l'adoption du >> roi, et le choix unanime d'un

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Je ne me suis point frayé une » voie à la succession du trône » de Suède par les armes ; le choix >>libre de la nation m'a appelé, >> et voilà le droit sur lequel je » m'appuie. Rappelez-vous votre » état à mon arrivée, et voyez ce » que vous êtes maintenant!.....» Ces belles paroles ont fait une impression profonde sur les Suédois; l'histoire ne peut les oublier. Au commencement de 1818, le roi Charles XIII, dont la santé était très-affaiblie, fut atteint de la maladie qui le conduisit au tombeau; il mourut le 5 février de la même année, regretté du peuple, dont il s'était efforcé de faire le bonheur. Le prince royal monta paisiblement sur le trône, prit le nom de CHARLES XIV, annonça sa ferme détermination de gouverner les deux royaumes d'après leurs lois fondamentales, et signa l'acte de garantie exigé par la constitution. Le 7, il renouvela dans la diète générale le serment exigé par la loi, et reçut celui des états-généraux. Son couronnement, comme roi de Suède, eut lieu le 11 mai, à Stockholm, et le 7 septembre, à Drontheim, comme roi de Norwège. Depuis l'époque de son avénement au pouvoir, le roi de Suède a été fidèle à ses promesses, il en est récompensé par l'amour du peuple. De tous les rois qui sont montés sur un des trônes de l'Europe depuis l'expulsion des Stuarts, il est le seul étranger Y qui y ait été appelé par le choix libre d'une nation généreuse et indépendante; il est aussi le seul dont la puissance se soit affermie au milieu des orages, et

T. II

qui soit à l'abri des révolutions. Sa fidélité dans l'exécution des lois constitutionnelles, son respect pour les droits des citoyens, sont des titres plus solides à la vraie gloire, que ses plus brillans exploits comme guerrier. Le prince Oscar, son fils, élevé dans les mêmes principes, s'est déjà rendu cher aux peuples de la Scandinavie, par la loyauté de son caractère et son attachement à leurs constitutions. Un décret des états-généraux lui accorde la faculté de gouverner le royaume en cas de maladie du roi son père. Cette marque signalée de confiance lui impose de grands devoirs à remplir, et prouve tout l'attachement des Suédois à la nouvelle dynastie.

BERNARD (N.), lieutenantgénéral du génie. Distingué par ses talens et par son courage, il avait donné des preuves de l'un et de l'autre dans toutes les campagnes de la révolution, comme officier du génie ; et cependant il n'était encore que colonel lorsqu'il fut présenté à l'empereur, qui le fit son aide-de-camp, et le nomma successivement général de brigade et général de division. Le général Bernard, attaché à Napoléon par la reconnaissance, se rangea sous ses drapeaux pendant les cent jours. Il le suivit dans la campagne de la Belgique, se distingua aux batailles de Ligny et de Waterloo, accompagna Napoléon jusqu'à Paris après cette dernière et funeste affaire, et ne le quitta qu'à son départ pour Rochefort. Depuis, le général Bernard est passé en Amérique, et est entré au service des États-U

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nis en qualité d'officier-général dans l'arme du génie.

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BERNARD (ADRIEN-ANTOINE), était, en 1791, président du tribunal de Saintes, que l'on lui donne quelquefois pour surnom. Il fut nommé par le département de la Charente-Inférieure, à l'assemblée législative, où il ne se fit point remarquer, et passa ensuite à la convention nationale, où il ne resta pas dans la même obscurité. Ses votes dans le procès de Louis XVI sont conçus en ces termes : «En ma qualité d'homme de bien, » je regarde ce prince comme coupable, et je vote sa mort ». Dans la question de l'appel au peuple, il répondit que ce serait trop honorer le crime et le criminel. Nommé membre du comité de sûreté générale, il fut envoyé dans les départemens de la Côte-d'Or et de la Charente-Inférieure. De retour de cette mission, il devint secrétaire de la convention, et fut, après la chute de Robespierre, proposé par Barrère pour entrer au comité de salut public, en remplacement de l'un des membres expulsés par suite de cet événement. Tallien parvint à l'en écarter; mais Bernard de Saintes rentra de nouveau au comité de sûreté générale. A la fin de l'an 2, étant président de la convention, il répondit en cette qualité aux plaintes faites par les jacobins, sur l'incarcération des patriotes, et l'élargissement des aristocrates et des suspects : « La convention, » dit-il, qui a vaincu toutes les fac>>tions, ne sera pas arrêtée par les » clameurs des aristocrates impru»>dens; elle saura maintenir le » gouvernement révolutionnaire;

» elle reçoit avec plaisir les récla>>mations des patriotes opprimés». Par suite des événemens du mois de prairial an 3, qui renversèrent le parti de Barrère, Bernard de Saintes fut décrété d'arrestation avec Robert Lindet, Jean-BonSaint-André, David, et plusieurs autres membres des comités. Dé

claré, par la loi du 5 fructidor suivant, inéligible au corps-législatif, il n'obtint sa liberté, malgré les plus vives réclamations, qu'après l'amnistie du 4 brumaire an 4.Il a rempli pendant le gouvernement impérial des fonctions judiciaires. En 1815, il fut envoyé, par le département de la Charente, à la chambre des représentans. Contraint bientôt de sortir de France, non-seulement comme votant et signataire de l'acte additionnel, mais encore comme proscrit spécialement par la liste dite des trente-huit, il se retira d'abord en Belgique, où il publia un écrit sur l'Instruction publique, et créa un journal intitulé le Surveillant. Quoique ces écrits ne fussent rien moins qu'hostiles, on le persécuta par cela seul qu'il savait écrire. Sur la réquisition de la diplomatie, le gouvernement des PaysBas lui donna l'ordre de quitter le royaume. C'était lui ordonner de quitter l'Europe; il s'embarqua en mai 1816 pour les États-Unis; fit, dit-on, naufrage sur les côtes de l'île de Madère, et arriva ensuite en Amérique, où il est mort depuis deux ans, s'il faut en croire des bruits que nous n'avons pu vérifier.

BERNARD DE SAINT-AFRIQUE. Ministre protestant avant la révolution, il espéra trouver dans

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le nouvel ordre de choses, des garanties contre les vexations auxquelles les religionnaires étaient livrés depuis long-temps. Mais il ne s'écarta jamais des principes de modération qui devaient faire remarquer sa conduite. Appelé en 1792 à la convention nationale, par le département de l'Aveyron, il vota, dans le procès de Louis XVI, la réclusion et le bannissement à la paix. Commissaire à l'armée du Nord en 1792, il fut, à son retour, élu secrétaire de l'assemblée, et passa, en 1795, au conseil des cinq-cents, dont il fut successivement secrétaire et président, et où il ne démentit point ses principes de tolérance politique et religieuse. Cet homme de bien est mort dans la retraite il y a quelques années. Bernard de Saint-Afrique avait épousé en secondes noces la mère du lieutenant-général Maurice Mathieu; il était également beau-père, mais à un autre titre, du général Rampon, à qui il avait donné sa fille. Son beau-fils et son gendre sont tous deux pairs de France.

BERNARD DES SABLONS (CLAUDE), député à la convention nationale par le département de Seine-et-Marne, il vota, dans le procès de Louis XVI, la mort et le sursis. Après la chute du parti de la Gironde, il donna sa démission. Arrêté pour cet acte de timidité, il ne recouvra la liberté, et ne rentra à la convention qu'après la mort de Robespierre. En 1795, il devint membre du conseil des cinq-cents, d'où il sortit trois ans après. Depuis lors il n'a plus reparu dans les assemblées législatives, et n'a

exercé aucune fonction publique.

BERNARDI (JOSEPH-ELZÉARDOMINIQUE), légiste profond, mais peut-être un peu trop attaché aux coutumes de l'ancienne monarchie, a très-bien commenté la République de Cicéron, et s'est fortement opposé aux actes de la république française. La classe de littérature ancienne de l'institut a mentionné honorablement son ouvrage de la République de Ciceron); mais il est encore incertain si la conduite politique de M. Bernardi mérite les mêmes éloges que son érudition et son goût. Il est né à Montjeu, en Provence, le 16 mars 1751. Avant la révolution, il était lieutenant-général au siége du comté de Sault. Un Eloge de Cujas (1770, in-12); un Discours sur la justice criminelle, couronné par l'académie de Châlons-sur-Marne(1780); un Essai sur les révolutions du droit français (1782), et un Mémoire sur les jugemens par jury, couronné par l'académie des inscriptions (1789), l'avaient fait remarquer comme un jurisconsulte habile et un écrivain distingué, lorsque la révolution éclata. Il s'en déclara l'adversaire; refusa, dit

on,

des fonctions importantes, qu'on voulait lui confier; accepta seulement une place de juge dans un tribunal de district; manifesta toujours des opinions contraires au vœu général, et fut destitué après le 10 août : il est tout simple que l'homme qui lutté contre le courant soit emporté par sa violence. Arrêté en 1793, il aurait péri infailliblement victime de cette époque désastreuse, sans l'insurrection des fédéralistes,

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