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Liberté des cultes et des concordats, est la seule où ces grandes questions aient été envisagées sous leur véritable point de vue. Dans son livre, de la Liberté religieuse, en remontant aux sources de cette liberté, il lui a donné des fondemens inébranlables, 'et en a déduit les rapports désormais nécessaires de la religion et de la politique. Si la hardiesse des principes et la nouveauté des conséquences ont empêché les écrivains patriotes de dire de cet ouvrage tout le bien qu'ils en pensent, les grossières injures qu'il a valu à son auteur, les regrets qu'ont exprimés ses adversaires, parce qu'il n'était pas au pouvoir des ministres d'un roi très-chrétien de l'envoyer à Botany-Bay, doivent le consoler du silence de ceux dont il cherchait le suffrage. M. Benoit se propose de publier incessamment un nouvel ouvrage ayant pour titre : De la liberté et de la souverai

neté.

BENOIT

FRANÇOIS-ALBINEPuzin de la Martinière, femme), naquit à Lyon en 1724. Elle a donné plusieurs ouvrages estimés, entre autres, les suivans: 1° Mes principes ou la vertu raisonnée, 1759, in-12; 2° l'Erreur des désirs, 1769, 2 vol. in-12; 3° Sophronie, ou Leçon d'une mère à sa fille, 1769, in-12; 4° Folie de la prudence humaine , 1771, in12. Le but de ce dernier ouvrage est de démontrer que tout est folie dans la prudence humaine. Il y a dans ce livre des idées saines et philosophiques. Madame Benoit a publié aussi plusieurs comédies: la meilleure, en deux actes et en prose, imitée de Goldo

ni, est intitulée le Triomphe de la probité. Cette dame mourut à Lyon, en 1789.

BENONI(LE P.), capucin, connu à Naples par ses prédications, avait beaucoup d'éloquence. Lorsque la révolution éclata dans le royaume des Deux - Siciles, en 1798, il en embrassa la cause avec enthousiasme, et lui consacra ses talens. C'était sur les places publiques que, l'évangile et le crucifix à la main, il haranguait le peuple et l'exhortait au nom du ciel à briser le joug du despotisme. Lorsque l'armée royale, commandée par le cardinal Ruffo, rentra dans Naples, le P. Benoni fut arrêté et condamné à mort a vec un autre moine qui s'était é◄ galement signalé dans cette noble cause.

BENTABOLLE (PIERRE), était avocat avant la révolution, et s'en montra dès le principe un des partisans les plus exaltés. L'ardeur qu'il déploya dans la place de procureur-général-syndic du département du Bas-Rhin, le fit nommer député à la convention nationale. C'est alors qu'il donna le plus grand essor à la violence de son caractère; extrêmement entêté, et d'ailleurs dépourvu d'instruction, il se réunit aux démagogues de l'assemblée. Dans le procès du roi, il vota la mort sans sursis ni appel. Le général Dumouriez ayant perdu la bataille de Nerwinde, Bentabolle saisit cette occasion pour demander l'établissement d'une commission qui serait chargée d'exa- * miner la conduite des généraux. Les succès des révoltés de la Vendée lui fournirent encore l'occa

sion de proposer de cesser toute affaire civile et criminelle, de former une armée de 40,000 hommes, de tirer le canon d'alarme, et de sonner le tocsin dans tous les départemens voisins de la capitale. Républicain de bonne foi, peut-être, mais sans talent et sans vertu, il regardait les girondins comme des ennemis de la liberté, et il se montra un de leurs ennemis les plus déclarés, lors de la révolution du 31 mai. Peu de temps après, il proposa la mise hors la loi de Félix Wimpfen, chef des fédérés du Calvados; et le 3 octobre de la même année, il s'opposa à ce que Ducos, Fonfrède et Vigié se défendissent à la tribune. Dans le mois d'août il fut envoyé en mission à l'armée du Nord, et il y destitua le général Hédouville. Bentabolle parut alors revenir à des idées moins exagérées, ou du moins il s'écarta souvent des principes qu'il avait d'abord adoptés. Il attesta le patriotisme d'Hérault de Séchelles, et dit qu'il regardait comme injuste pour quelques-uns d'entre eux, le rappel des nobles et des prêtres qui étaient en mission. Le bon sens ne lui était cependant pas tout-à-fait revenu; car le 9 janvier 1794, six mois après que Châlier eut été exécuté à Lyon, pendant la révolte de cette ville contre la convention, il n'eut pas honte de solliciter pour l'épouse de cet autre Marat, une pension égale à celle de la veuve de J. J. Rousseau, qu'il mettait bien au-dessous de Châlier. La mort de Danton, avec qui il avait eu des relations intimes, lui avait inspiré des craintes pour

lui-même; aussi avait - il juré une haine implacable à Robespierre. Après la révolution du 9 thermidor, il vota pour faire adopter des mesures favorables aux détenus d'après la loi des suspects, et pour faire rapporter le décret qui donnait aux deux comités le droit de faire arrêter les représentans du peuple. Le 15 vendémiaire an 3 (6 octobre 1794), il entra au comité de sûreté générale, et dès lors il se montra plus incertain que jamais entre ses anciens principes et ceux qu'il avait récemment adoptés. Après avoir dénoncé le libelle de Lebois, continuateur de Marat, connu sous le nom de l'Ami du peuple, il s'éleva contre l'Orateur du peuple, rédigé par Fréron. Ainsi on le vit presqu'en même temps voter contre la rentrée des députés mis hors la loi, s'opposer à la restitution des biens des personnes condamnées par le tribunal révolutionnaire, s'élever contre toute proposition de suspendre les radiations de la liste des émigrés; enfin, se plaindre que ces derniers occupaient tous les emplois publics, et se prononcer contre la mise en jugement des terroristes. Tous ses actes, à cette époque, sont marqués au coin de l'intérêt personnel. Il fut un de ceux qui firent nommer le général Barras commandant de l'armée de l'intérieur. Il porta une accusation contre Henri Larivière, comme ayant assassiné les patriotes par la loi du 4 fructidor; fit rappeler Thibaudeau à l'ordre pour avoir qualifié la commission des cing de chambre ardente, et demanda le réarmement des patriotes qui

avaient défendu la convention. Après l'établissement de la constitution de l'an 3, il entra au conseil des cinq-cents. Dans le mois de floréal an 4, il parla en faveur d'un arrêté du directoire qui interdisait aux prévenus d'émigration l'entrée des assemblées publiques. Mais en même temps il s'opposa à la clôture des assemblées populaires, que demandait le directoire. Bentabolle s'éleva ensuite contre les dilapidateurs des deniers publics, et se plaignit des calomnies répandues contre lui au sujet d'une lettre dans laquelle on avançait, mais faussement, qu'il existait un projet de correspondance entre le directeur Rewbell et le général Bonaparte, et que lui Bentabolle entrait dans la confidence de ce projet. Après avoir demandé que les rebelles amnistiés fussent exclus des élections, il émit, quelques jours après, une opinion en faveur des personnes inscrites sur la liste des émigrés, qui n'avaient point porté les armes contre leur patrie. Bentabolle mourut à Paris, le 3 floréal an 6. Si sa conduite, sous le rapport politique, annonce de grandes erreurs, elle est du moins irréprochable sous le rapport de sa fortune, qui était et qui resta médiocre. Il avait une voix de stentor, et des prétentions très-mal fondées à l'éloquence. Il était aussi brave qu'emporté. A la suite d'une discussion violente avec Goupillau de Fontenay, il se battit avec lui, et le blessa d'un coup d'épée.

BENTHAM (JÉRÉMIE), l'un des plus profonds jurisconsultes de l'Angleterre, a fait une sorte de

T. II.

révolution dans l'étude des lois. C'est à Montesquieu qu'il doit le germe de ses doctrines, quoiqu'il ne partage pas toutes les opinions de ce grand homme: sur ses traces, il s'est mis à la recherche de l'origine des lois; et sur ses principes, il a fondé les plans hardis et quelquefois périlleux de ses systèmes de législation. La grande idée qui domine chez Bentham, c'est que l'uniformité de jurisprudence est une chimère impraticable; que la jurisprudence de chaque peuple doit reposer sur les localités et les variétés de climat, de gouvernement, de coutumes, et que la politique doit être intimement liée à la morale. Il a également développé avec une grande supériorité le principe de l'utilité, qu'il regarde comme la base la plus sûre de la législation, et comme le régulateur le plus certain des rapports sociaux. Il prouve avec beaucoup de sagacité que ce principe de l'utilité, bien établi, n'a rien de contraire à la morale et à la justice, et c'est particulièrement lorsqu'il combat l'ascétisme, c'est-à-dire la doctrine qui tend à nous imposer des privations sans utilité, qu'il déploie toute l'originalité de ses vues. Il y a quelque chose de dédaigneux dans son langage, et d'amer dans son éloquence. On s'aperçoit aisément qu'il a peu d'estime pour l'espèce humaine. Il parle avec autorité, il écrit de conviction, et comme pour soulager son esprit et son cœur. Dès qu'il a produit, peu lui importe que l'ouvrage paraisse; plusieurs de ses meilleurs Traités ont été longtemps ensevelis dans son cabinet,

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et sa fameuse Théorie des peines et des récompenses y est restée pendant trente années; un de ses amis, M. Dumont de Genève, a été obligé de lui en arracher le manuscrit, qu'il a publié en français. Inexplicable insouciance chez un homme qui n'est point insensible à la gloire littéraire, qui répond avec amertume aux critiques des journalistes, et qui soigne ses ouvrages au point de les refondre ou du moins de les corriger presque tous à diverses reprises! Mais ce qui étonne davantage, et ce qu'on doit regarder comme un exemple curieux d'indifférence littéraire, c'est que malgré les éloges de l'Édimbourg Review, et des principaux journaux anglais, ni cet ouvrage célèbre, ni sa Tactique des assemblées populaires, n'ont encore paru en langue anglaise, tandis que déjà le professeur Runez, docteur en droit à l'université de Salamanque, en a préparé une traduction qu'il doit enrichir de ses Commentaires. M. Bentham est né à Londres, vers 1749. Après de bonnes études il se destina au barreau; mais un organe faible et une antipathie extrême pour l'éloquence verbeuse des avocats de son pays, le détournèrent de l'exercice de cette profession. Il étudia les lois en elles-mêmes; médita long-temps sur leurs rapports avec les gouvernemens, les hommes et les moeurs; alla résider quelque temps en Crimée; et, de retour en Angleterre, publia, sous le voile de l'anonyme, ses premiers ouvrages qui firent beaucoup de sensation : leur hardiesse paradoxale, leur vive et

ferme dialectique captivèrent l'attention générale. Il commença par attaquer de front Blackstone, l'oracle de la jurisprudence anglaise, dans ses fragmens sur le gouvernement (1778, in-8°), puis le Code même des lois anglaises, dans son Plan d'un Code pénal, un volume in-4°, tiré d'abord à soixante exemplaires seulement. Il publia l'ouvrage intitulé : Quelques Idées morales, établies depuis des siècles dans la défense de l'usure (1787, in-8°). Bientôt après parut son Introduction aux principes de la morale et de la législation (1787, in-4°), où il développa son système de réforme. On le combattit vivement. M. Bentham a passé sa vie entière à défendre ces principes, à les systematiser. En 1791, il donna au public son Panopticon (3 vol. in-12), ouvrage philanthropique, dans lequel il s'occupe des moyens de rendre meilleurs les criminels détenus, au lieu de les dépraver, comme on fait dans presque toutes les prisons. C'est à l'occasion de ce livre que l'auteur écrivit ces paroles remarquables à un membre de l'assemblée législative de France: « Mais voulez-vous sa» voir jusqu'à quel point s'est éle>>vée ma persuasion de l'impor>>tance de ce plan de réformation, >> et des grands succès que l'on peut » en attendre? Qu'on me permet>>te de construire une prison sur » ce modèle, et je m'en fais le geô»lier; ce geôlier ne veut point de ¦ »salaire, et ne coûtera rien à la »> nation.» Ses Traités de législation civile et pénale (3 vol. in8°, Paris, 1802), ouvrage classique, ont été mis en ordre par son

traduits en espagnol par M. de Mora; l'auteur prouve dans cet ouvrage le danger d'établir une chambre haute. M. Bentham a ádressé à ses amis, en Espagne, plusieurs lettres remarquables sur les affaires de ce pays, et sur la marche tenue par le ministère depuis le rétablissement du gouvernement constitutionnel. Ces Lettres sont inédites, on a lieu d'espérer qu'elles paraîtront bientôt en français. M. Bentham jouit enco

ami M. Dumont, ainsi que sa Théorie des peines et des récompenses, dont nous avons parlé plus haut (1811, 2 vol. in-8°). M. Bentham a aussi publié quelques autres petits ouvrages, tels qu'une traduction du Taureau blanc de Voltaire; une Chrestomathie, etc., etc., que nous laissons aux bibliologues le soin d'énumérer. Il a écrit, en 1793, une Lettre curieuse à la convention nationale. Dans cette lettre, il expose son opinion sur les colonies, et sur la nécessité de les déclarer indépendantes. Il publia, en 1790, une Esquisse (et non un Dessin, comme il a plu à un biographe de traduire le mot anglais), d'un plan nouveau pour l'organisation de la justice en France. Le marquis de Landsdowne en envoya cent exemplaires au duc de La RochefouCault, et ce vertueux philantrope fit à l'assemblée constituante une motion pour faire traduire l'ouvrage à l'usage du comité de jurisprudence; mais la motion fut écartée par l'abbé Sieyes, dont les idées étaient très-différentes de celles de Bentham. Celui-ci reçut en revanche l'approbation de lord Grenville et de sir Samuel Romilly. Il a inséré quelques articles dans les Annales d'agriculture d'Arthur Young. On a encore de lui Plan d'une réforme parlementaire, où il indique les moyens d'obtenir une représentation nationale réelle et non illusoire, 1818. Réforme radicale, 1819; Pièces sur la confection des Codes et l'instruction publique, 1817; l'Administration des pauvres per fectionnée, 1812; Conseils aux cortès et à la nation espagnole,

re,

quoique âgé de 72 ans, de toutes ses facultés, et d'une santé excellente. Il semble être toujours dans toute la vigueur de son talent, et les années n'ont altéré en rien la chaleur de son ârne. Jamais homme n'a été plus entièrement dépouillé des préjugés nationaux qui tendent à éloigner les peuples de l'estime mutuelle et de la bonne intelligence qui assureront peut-être un jour leur tranquillité. On doit considérer M. Bentham comme un des patriarches de cette famille européenne qui grandit avec le progrès des saines idées politiques, et qui, au milieu des divisions que sèment les intrigues éphémères de la diplomatie, fraternise dans une éternelle paix, et correspond des points les plus éloignés du globe par le langage universel de la raison. M. Bentham est un vrai philosophe cosmopolite : tout homme qui aime la liberté et qui désire le bonheur de l'espèce humaine est son compatriote.

BENTHAM (JACQUES), antiquaire anglais, né en 1708, à Ely, fit ses études à Cambridge, au collége de la Trinité. Sa vie fut presque entièrement consacrée à

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