Page images
PDF
EPUB

cettesession, Barère s'opposa d'abord à ce que les ministres à département eussent la faculté de se faire remplacer à la chambre par des ministres d'état non responsables; opina en faveur de la proposition du ministre de la police, tendant à établir une commission spéciale de surveillance; appuya la motion de Garat, surla déclaration des droits de la nation, et voulut que le libre exercice des cultes et le maintien du jury y fussent expressément consacrés, il défendit avec chaleur la liberté de la presse, et proposa à cet égard plusieurs articles qui furent décrétés. Lorsque, après la convention du 5 juillet, on fit connaître à la chambre la proclamation de la commission du gouver nement, Barère proposa de régler le sort de la représentation natio nale, de la placer sous la protec→ tion du peuple, et notamment de la garde nationale parisienne; il ajouta: «Tout acte de violence » pour dissoudre la chambre, ou » pour gêner ses délibérations, se>> ra déclaré attentat contre la sou→

>> veraineté du peuple; elle en appel» le d'avance à l'armée et aux dé »partemens fidèles. Tout gouver>>nement, tout prince qui préten» drait établir son autorité sans la »participation de la chambre des >> représentans, est déclaré anti»> national; la représentation na» tionale changera de lieu de rési>>dence; dès lors toutes les contri>>butions et les impôts cesseront » d'être perçus, et il sera fait un » appel au courage de tous les » Français. » Aucune de ces dispositions ne fut adoptée. Barère se prononça dans la même ses

sion contre l'érection de tout monument public aux souverains vivans, et cita à cette occasion le refus qu'en firent les états de Languedoc à Louis XIV., qu'après sa mort ils honorèrent cependant d'un monument où l'on plaça cette inscription:

Ludovico magno post mortem.

[ocr errors]

Il s'opposa à l'hérédité de la pairie, et dit que: « Après avoir a»boli la noblesse ce serait la >> ressusciter, que de rendre héré»ditaire la pairie, dont la déno>>mination elle-même est féoda »>le. » Dans cette dernière époque de la vie politique de Barère, on retrouve les principes, les opinions, les mœurs qui lui étaient naturels; le membre du comité de salut public a disparu toutà-fait dans le député de la nouvelle constituante; et le biographe recueille avec religion les actions qui peuvent donner quelque consolation au devoir rigoureux que la vérité lui impose; de ce nombre sont les ouvrages plus ou moins distingués que la littérature et la politique doivent au ta lent de Barère, depuis la restauration du 18 brumaire. Voici la notice complète des ouvrages qu'il a publiés : 1° Esprit des séances des états-généraux, in-8°, 1789; 2° Opinion sur le jugement de Louis XVI, in-8°, 1792; 3° Rẻ→ ponse à Dubois-Crancé, in-8° 1795; 4° Pensée du gouvernement, in-8°, 1797; 5o Réponse d'un répu blicain français au libelle de sir Fr. D'Yvernois contre le premier consul, in-8°, 1801; 6° les Beautés poétiques d'Ed. Young, traduit de l'anglais avec le texte en

[ocr errors]

regard, in-8°, 1804; 7° les Veillées du Tasse, in-8°, 1804; ouvrage mal fait par la tâche singulière que Barère s'est imposée de traduire mot à mot un poète souvent sublime et quelquefois extravagant; 8° les Anglais au 19 siècle, in-12, 1804; 9° les Chants de Tyrtée, traduit de l'italien en français, in-8°, 1805, réimprimé en 1806; 10° Cinq Nouvelles athéniennes, sybarites, italiennes, traduites de l'italien de F. Pepe, 2 vol. in-18, 1808; 11° la Vie de Cléopâtre, traduite de l'italien de J. Landi, in8°, 1808; 12° Voyage de Platon en Italie, traduit de l'italien, 3 vol. in-8°, 1807; 15° Esprit de Mme Necker, in-8°, 1808; 14° Géochronologie de l'Europe, traduit de l'anglais, in-8°, 1810; 15° Nouveau voyage en Turquie, par Griffils, trad. de l'anglais, in-8°, 1812; 16° Histoire des révolutions de Naples depuis 1789 jusqu'en 1806, in-8°; 17° la Liberté des mers, ou le Gouvernement anglais dévoilé, 3 vol. in-8°, 1798; 18° Montesquieu peint d'après ses ouvrages, in-8°, 1797; 19° Essai sur le gouvernement de Rome, traduction d'un ouvrage anglais de W. Moyle, in-8°, 1802; 20° Lettres politiques, commerciales et littéraires, sur l'Inde, par Taylor, que Barère a traduites de l'anglais avec Madgett, in-8°, 1801; 21° les Epoques de la nation française, et les quatre Dynasties, in8°, 1815; 22° Théorie de la constitution de la Grande-Bretagne, ou de ses trois pouvoirs séparés et réunis, 1815. On a encore de Barère les éloges de J. J. Rousseau, de Montesquieu, de Louis

[ocr errors]

XII, de Georges d'Amboise, de Séguier, etc. Il a aussi rédigé, sous le gouvernement de Bonaparte, un journal intitulé Mémorial Anti-Britannique. Compris dans l'ordonnance royale de 1815, Barère a dû quitter la France, et continue, dit-on, dans un royaume voisin, des travaux littéraires, qui feront regretter, avec ses autres écrits, qu'une partie trop fameuse de sa vie ait été enlevée à une carrière où il eût obtenu l'estime et les suffrages de ses concitoyens.

BARET, membre du conseil des anciens, naquit dans les environs de Boulogne, et était employé dans le département de la Lys en qualité de commissaire, lorsqu'il fut nommé au conseil des anciens. Il se prononça pour les fêtes décadaires, s'éleva avec force contre l'introduction des marchandises anglaises, et ne tarda point à être nommé secrétaire. Dans le mois de thermidor an 7, il fit annuler la nomination d'Antonelle et des autres députés du département des Bouches-du-Rhône. Après l'établissement du gouvernement consulaire, il fut envoyé dans le département du Nord pour y organiser les administrations. Sa mission était remplie, et il devait faire partie du tribunat, lorsqu'il mourut à Valenciennes.

BARETTI (JOSEPH), poète burlesque italien, fut un des adversaires déclarés de Voltaire et de Jean-Jacques Rousseau. Il disait souvent que l'Emile ne pouvait convenir qu'aux femmes de chambre, et que le philosophisme francais perdrait la nation et l'Europe. Il est vrai que cet Italien émi

res,

verve plaisante et satirique fait tout le mérite, fut celui qui sembla convenir le mieux au talent de Baretti; c'est un genre bien distinct, en Italie, de la plaisanterie française, caustique et légère, et de l'humour britannique, exagérée, et profonde. Une profusion d'images grotesques, un grand luxe de gaieté, forment le caractère du genre de poésie cultivé par Baretti, qui fut l'imitateur heureux du Burchiello et du Berni; bizarre, mais original comme le premier, il est assez souvent spirituel comme le second. Les Versi piacevoli (vers burlesques) parurent à Turin, 1750, in4°, et furent bien accueillis. Il traduisit ensuite, avec plus de fidélité que de chaleur, l'Art d'aimer et le Remède d'amour d'Ovide, vol. 29 et 30 de la grande Collection des poètes latins, traduits en italien, imprimée à Milan. Baretti retourna dans son pays, voyagea quelque temps en Italie, et s'arrêta successivement à Mantoue, å Venise, à Milan. Ce fut pendant son séjour à Venise qu'il entreprit la traduction de Corneille en vers libres, entreprise singulière pour un poète burlesque (Venise, 1747 et 1748, 4 vol. in-4°, texte original en regard). Dans cette traduction, assez fidèle, malheureusement les défauts de l'original y sont singulièrement exagérés. A Turin, il publia quelques opuscules, et partit pour Londres en 1751. Son projet était d'établir dans cette ville un opéra italien; il se lia bientôt avec Johnson et les premiers littérateurs du temps. Son peu d'économie le força d'écrire pour vivre; et des produc

gré vivait en Angleterre, où il passa une partie de sa vie à flatter poétiquement ses hôtes : il fit contre Voltaire, qu'il comprenait fort bien, et pour Shakespeare, qu'il n'entendait guère, une dissertation en forme sous le titre de Discours sur Shakespeare et Voltaire, in-8°, 1777: mais peu importe, comme l'a très-bien remarqué un des plus sévères et des plus ingénieux critiques modernes (Ginguené); peu importe que Scarron estimât ou dédaignât la philosophie des Descartes. Baretti, versificateur habile traducteur élégant, voyageur inexact, grammairien et critique des plus ordinain'est d'aucun poids dans la balance, quand il s'agit de juger des hommes tels que Voltaire et Rousseau. Né à Turin, le 22 mars 1716, il fut d'abord destiné au barreau. Cette carrière n'eut pas d'attraits pour lui; il alla de Turin à Guastalla demander la protection d'un oncle, qui le fit entrer comme secrétaire chez un riche négociant. Ce négociant avait un associé, nommé Cantoni, qui faisait en secret de fort bons vers. Un jour Cantoni tire de son portefeuille quelques poésies manuscrites, et, sans dire qu'elles sont de lui, les donne à lire à Baretti. Ce dernier les trouve excellentes : Cantoni soutient qu'elles sont détestables. La querelle s'échauffe, et l'auteur modeste a le plaisir de s'entendre dire Qu'il est un sot, et qu'il se mêle de juger ce qu'il ne connait pas. Ce fut là le commencement de la fortune du jeune Baretti. Soutenu par Cantoni, il se mit à cultiver lui-même la poésie. Ce style badin et burlesque, dont une

tions sans intérêt se succédèrent sous sa plume: lui-même l'avoue: « J'ai écrit par nécessité, dit-il, >>ma plume rapide n'a rien soi» gné; je m'abandonne à la criti>> que. >> Un auteur qui fait de pareils aveux a droit à quelque indulgence. On ne s'attachera donc pas à relever les inexactitudes et les erreurs de l'Introduction à la langue italienne, in-8°, 1755, ni de la Bibliothèque italienne, in-8°, 1757, ou de quelques Grammaires et ouvrages élémentaires, qu'il a publiés à Londres. Quant à sa réponse à Voltaire, où il cherche à réfuter l'Essai de ce grand poète sur la poésie épique, elle peut être jugée plus sévèrement: les idées en sont communes, le style vulgaire; et, ce qui est pis. encore, l'intention en est basse. Dans son Voyage de Londres à Gênes, par l'Angleterre, le Portugal, l'Espagne et la France, 1770, in-8°, et dans son Tableau des mœurs et coutumes d'Italie, il a relevé quelques erreurs importantes de différens voyageurs. C'est lui qui a surveillé l'édition italienne de Machiavel, Londres, 3 vol. in-4o, 1772. Probe, agréable dans la société, mais dissipé, négligent, il mourut pauvre à Londres, le 5 mai 1789. Il possédait plusieurs langues, et ne manquait ni de goût ni de connaissances. Quant à ses opinions sur la philosophie française, tout ce qu'on peut en dire, c'est qu'elles sont à la fois injustes et ridi

cules.

BARHAM (N.), membre de la chambre des communes d'Angleterre. On ignore également son âge, sa naissance et les autres cir

constances de sa vie. Mais un fait politique, qui l'honore, ne doit point rester dans l'oubli. Le 19 avril 1815, il présenta un bill tendant à défendre à tout Anglais, sujet de l'Angleterre, ou résidant en Angleterre, d'avancer de l'argent pour faire la traite des nègres. Le bill ne fut pas appuyé.

en

BARHAM (CHARLES MEDDLETON, LORD), né en Ecosse, 1736, d'un receveur du port de Dundée, fut successivement dans la marine, lieutenant, capitaine, vice-amiral, amiral, enfin lord de l'amirauté : c'est-à-dire qu'il parcourut tous les degrés du service maritime, depuis le dernier jusqu'au premier. Le changement de ministère, en 1806, déplaça lord Barham, qui se retira dans sa belle maison de Teston, comté de Kent, où il passe sa vie loin de la cour et des affaires.

BARJAUD (J. B.), né à Montluçon, département de l'Allier, a droit comme poète et comme militaire à une mention que jusqu'ici les biographes ne lui ont pas accordée. Né pendant la révolution, et digne de son siècle et de son pays, Barjaud, qui avait fait d'excellentes études, consacra aux muses ses talens naissans, et quelques années plus tard dévoua sa vie au service de son pays. Il publia un poème sur Homère, qui fut accueilli avec bienveillance du public et des gens de lettres. Ce succès l'ayant encouragé, il traça le plan d'un poème en vingt chants, dont le héros était Charlemagne; plusieurs chants de cet ouvrage furent publiés, et entre autres le neuvième à la suite de ses Odes nationales (Paris, in-8°,

[ocr errors]

1811), où l'on remarque celles qui sont adressées à la France, sur le passage du Mont-SaintBernard, sur la conquête de la Prusse, sur la mort du duc de Montebello, à la garde impériale, et sur la naissance du roi de Rome. Dans cette dernière ode, le poète, se livrant à son enthousiasme, s'écrie:

Le berceau d'un enfant touche au trône du monde;
Du souverain des rois, ò sagesse profonde!
Cet enfant doit un jour enchaîner les hasards;
Sa gloire s'étendra du couchant à l'aurore;
Sa main, si faible encore,
Soutiendra tout le poids du sceptre des Césars.

On voit que, si dans cette ode écrite tout entière avec verve, Barjaud se montre animé du feu divin, il ne s'est pas montré prophète. Il n'est pas au reste le scul qui se soit trompé en cette circonstance. M. le vicomte de Châteaubriand lui-même est tombé dans une semblable erreur dans / son discours de réception à l'académie, où il parle d'un berceau qui contient les destins du monde, Peut-être le premier vers de la strophe que nous avons citée, n'est-il qu'un emprunt fait à la prose de cet orateur, à moins que ce dernier ne soit le plagiaire. Après avoir chanté sa patrie, Barjaud voulut la servir de son épée. Il partit comme sous-lieutenant dans la grande-armée. Il avait reçu la croix de l'ordre de la Réunion dans une circonstance assez singulière. Napoléon passait en revue le corps d'armée dont Barjaud faisait partie; et, suivant sa coutume, il distribuait des encouragemens. Barjaud, qui n'en avait pas obtenu, sort des rangs et s'avance au devant de l'empereur. Sire', donnez-moi la déço

neur.

[ocr errors]

ration. - Qu'as tu fait ? lui dit ce prince. Je me bats et je fais un poème épique en votre hon-Si je te donne la décoration, tu ne finiras pas ton poème épique, répondit Napoléon' en riant, mais en lui accordant toutefois sa demande. Barjaud ne manquait ni de bonne volonté ni de talent, mais le poème épique ne fut cependant pas achevé. Peu de temps après avoir été décoré, Barjaud, à peine âgé de 26 ans, fut tué par un boulet à la bataille de Leipsick.

BARJAVEL (FRANÇOIS), né à Carpentras, département de Vaucluse, venait de prendre sa licence, et entrait dans la carrière du barreau, quand la révolution commença; il se déclara pour la réunion du Comtat à la France, parce qu'il le considérait comme un fief de la couronne, de laquelle il n'avait pu être détaché. Son père, avocat fort estimé, manifesta une opinion absolument opposée. Après la réunion de ce comté, et la formation du département de Vaucluse, Barjavel fut nommé accusateur public près le tribunal criminel de ce département. On a voulu en vain ternir la réputation de cet estimable citoyen par les imputations les plus calomnieuses: il n'est pas vrai qu'il ait rempli ce ministère près de la commission d'Orange; l'accusateur public près cette commission, nommé par le comité de salut public, était un militaire de Lille en Flandre, appelé Viot. Comme accusateur public près le tribunal criminel de Vaucluse, Barjavel était obligé d'envoyer à la commission d'Orange toutes les

« PreviousContinue »