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ou autres qui voudront prendre la peine de le conferer soient exacts et diligens, ne faisant pas trainer l'affaire en longueur. Je sçay que l'ouvrage est long et pénible, mais l'obligation que Son Eminence leur en aura en sera d'autant plus grande.

Vous me dites dans vostre lettre que M. Valois s'est offert à conferer aussi le Theophanes. J'accepte tres volontiers cette offre, mais pour ce que je ne puis envoyer la copie de Son Eminence parce que j'en ay tous les jours afaire, je voudrois vous supplier, Monsieur, de vouloir envoyer vostre manuscrit de Theophanes audit sieur de Valois, lequel le pourra conferer avec celuy de la Bibliotheque du Roy et mettre les variantes à la marge du vostre, lequel par après vous pourriés m'envoyer par quelque voye seure et je vous le renvoyerois quand je l'auroy conferé avec le nostre ainsi je recevrois double profit des variantes du manuscrit Royal et du vostre qui me semble estre plus correct que les nostres à voir ce que vous m'avés envoyé. Si le Léon Grammaticus est derrière le vostre, M. Valois fairoit aussi la faveur de le vouloir conferer.

Que si vous trouvés quelque difficulté à envoyer vostre manuscrit à Paris, et donner la peine à M. Valois de le conferer, au moins, Monsieur, vous prie je de nous le vouloir envoyer à Rome, avec promesse qu'il vous sera rendu seurement, mais il profiteroit beaucoup, s'il pouvoit faire ce voyage de Paris. Que si pour soulager ces Mil estoit besoin de prendre quelqu'un qui leut la cople pendant qu'ils verroient le manuscrit, vous pourriés escrire à M" du Puy qu'ils le facent et payent ce qu'il faudra, pour ce que je le leur fairay rendre: celuy mesme qui nous a transcrit le Syncellus seroit bon à cola. Avertisses les qu'ils prennent garde surtout aux Abbreviations, nombres et noms proprès.

Je serviray M. Valois pour le premier ordinaire tou

chant les conférences d'Ammian Marcelin (1), ce que je n'ai peu faire jusques à cette heure, parce que la Vaticane n'a esté ouverte que depuis quinze jours en ça pendant lequel temps nous avons esté à Castel Gondolfe.

Pour le sieur Leo Allatius il y a un mois qu'il a envoyé ses Epitres Socratiques à Mr du Puy et Mr Doni est après la dernière feuille de son livre Dei generi et modi delli Antichi (2).

J'ai esté une fois ou deux chés M. Holstenius pour voir M. Dormalius (3), mais nous ne sommes encore peu rencontrer ensemble. Pour M. Holstenius je m'entretiens avec luy le mieux qu'il est possible, mais l'antipatie qu'il a contre nostre Nation jointe aux mauvaises impressions que luy a donné quoyque très faussement, nostre Evesque (4) le font un peu tenir sur son quant à moy, ce que je dissimule neantmoins, et espère avec le temps de venir à bout de toute ces férocités et défiances allemandes (5), à quoy je vous prie de me vouloir ayder dans les occasions lorsque vous lui escrirés.

(1) L'Ammien Marcellin ne parut qu'en 1681 (Paris, in-folio). Le savant H. de Valois était mort depuis cinq ans (7 mai 1676). (2) Jean-Baptiste Doni naquit à Florence en 1593 et mourut dans la même ville en 1617. Le livre dont parle Bouchard parut en cette même année 1635 (Rome, in-fo) sous un titre quelque peu différent de celui qu'il indique: Compendio del Trattato dei Generi e Modi della musica, etc.

(3) Henri Dormalius était un des savants amis et correspondants de Peiresc. Son nom manque dans tous les recueils biographiques qu'il m'a été donné de consulter. Voir sur Domalius une note de M. Boissonade (Lucæ Holstenii epistolæ, p. 230). (4) L'évêque de Vaison, J. M. Suarès.

(5) Bouchard et Holstenius étaient en bien meilleurs termes, cinq ans plus tard, quand Balzac écrivait au premier, le 14 mars 1640 (OEuvres, tome I, p. 534: A Monsieur l'Abbé Bouchard:

« Je ne doute point des grandes richesses de M. Holstenius, je

Pour les poesies de M. Grotius (1), Monseigneur le cardinal au commencement me refusa tout à fait de les vouloir rendre, disant qu'il les voulait garder dans sa Bibliothèque, et m'a offert deux ou trois fois le dernier volume que vous leur avés envoyé, où il n'y a que les tragédies, lequel je n'y ai point voulu accepter; mais luy ayant fait, l'autre jour, un grand discours là-dessus à Castel (2), il me dit qu'au moins il les vouloit lire, de sorte que je ne désespère pas de les luy tirer des mains et en ce cas je les feray desrelier puis relier ostant premièrement ces sylves dont est question, et l'envoyeray par après à Monseigneur le cardinal Bagni de vostre part, estant infiniment aise d'avoir cette occasion de servir M. Grotius que j'ayme et honore infiniment pour les excellentes qualités que j'ay reconnües en luy dans sa conversation, que j'ay eue autrefois assés familière avec luy, et desirerois qu'il sceut le désir que j'ay de le servir. Il y a icy une de ses lettres qu'il a escritte au chancelier Oxenstern que l'on dit avoir esté interceptée, laquelle l'on estime fort; l'on m'a promis de me la faire voir.

Mr du Puy vous envoyeront bientost une petite balle de livres pour Monseigneur le Cardinal Barberin. Je serois bien ayse quand vous l'envoyerés icy à son Eminence, que vous faciés, s'il vous plaist, mettre ses addresses en sorte qu'elle vienne entre mes mains, parce

me plains seulement de son bon mesnage. Que sert l'abondance sans la libéralité...? Soyez-donc nostre solliciteur auprès de sa docte seigneurie. >>

(1) Les poésies latines de Hugues Grotius avaient été publiées pour la première fois par son frère Guillaume (Leyde, 1617, in-12). L'on en compta dix éditions, jusqu'à celle d'Amsterdam (1670, in-12).

(2) C'est-à-dire Castel-Gandolfo où, près de la maison de plaisance des papes construite par Urbain VIII, s'élevait la ville Barba

que c'est moy qui ay eu la charge de faire acheter ces livres; il faudra neantmoins, comme je pense, faire la dernière adresse de dessus à Son Eminence pour plus grande seureté, tant de la guerre que de l'Inquisition; et ainsi l'on pourroit faire trois adresses l'une à son Eminence, la seconde à moy, et la dernière à son Eminence, laquelle dernière aura desja esté faite par Mr du Puy, remettant neantmoins le tout à ce qui vous semblera plus à propos.

J'oubliois à vous dire que ma version de Théophanes est achevée, il y desja quelque temps, de sorte que je l'ay faite dans l'espace d'un an (1). Si vous en vouliés escrire quelque chose à Son Eminence, vous pourrés, en passant, luy resveiller la volonté qu'il a desja fort grande de le faire imprimer, en luy loüant l'Autheur, et lui donnant à entendre qu'il est desiré et attendu avec impatience de touts les sçavans, sur tout de là les Monts. C'est, Monsieur, vostre, etc.,

A Rome ce 2 Novembre 1635 (2).

BOUCHARD.
(A suivre).

(1) Dans une lettre du 12 juillet 1639 (Appendice IV), Bouchard annonce qu'il doit bientôt mettre la main à l'édition de Théophane. (2) Bibliothèque Mejanes, correspondance de Peiresc, vol. II, • 423. Copie,

NOTE

SUR LES

ORIGINES DE L'ÉMAILLERIE FRANÇAISE

Il y a déjà longtemps que les archéologues semblent s'être désintéressés de la question de l'origine de l'émaillerie française; depuis les travaux de MM. de Laborde, Ferdinand de Lasteyrie, Labarte et Darcel, qui firent faire de grands pas à la question sans toutefois la résoudre, aucun travail spécial n'a été publié. Aujourd'hui que quelques monuments nouveaux sont connus, il ne nous semble pas inutile de rechercher en quoi les conclusions de nos devanciers peuvent être modifiées. Au surplus, un des savants qui prirent autrefois part à la discussion, M. Hucher, vient de republier son travail (1). Qu'on nous permette donc à propos de cette publication de rouvrir le débat.

Il y a quelque vingt ans, le travail de M. Hucher souleva de nombreuses et intéressantes controverses ; M. Labarte surtout, prit à cœur de réfuter une à une toutes les assertions du savant du Mans; à vrai dire le

(1) L'émail de Geoffroy Plantagenet au Musée du Mans, par M. Hucher (Bulletin Monumental, tome XXVI, 1860, p. 668 et ss.) L'émail de Geoffroy Plantagenet au Musée du Mans, reproduit en photochromie par le procédé Vidal et accompagné d'une dissertation sur l'origine et le but de cet émail, par le même; Paris et Le Mans, 1880, in-fo.

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