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et en même tems un juste jugement de Dieu, jugement plein de miséricorde? Car si nous étions châtiés selon nos mérites, déjà depuis longtems il en aurait été de nous comme de Sodome et de Gomorrhe

» Mais pourquoi mettons-nous maintenant ces choses devant vos yeux? Est-ce pour vous couvrir de confusion? Oh! non, mais c'est plutôt pour vous avertir comme nos pères et nos frères chéris, et surtout nous-mêmes, comment nous pouvons éloigner de nous, les fléaux dont nous sommes affligés, et ceux plus graves encore qui nous menacent si nous ne venons à resipiscence, afin que nous évitions, ce terrible jugement de Dieu, terrible pour tous ceux qui ne se repentent pas, mais surtout pour ceux qui sont élevés au-dessus des autres. « Car, comme le dit l'Écriture, une grave justice sera faite envers ceux qui président 1. » Or, nous voyons commencer maintenant ce jugement par la maison de Dieu 3. »

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Ces paroles tirèrent des larmes des yeux de la plupart des pères, et c'est à la vue de ces larmes que les légats fondent l'espoir que l'esprit de Dieu, viendra habiter parmi eux, pour les éclairer et les diriger. -Ayant à parler des Princes, ils se servent de ces admirables paroles: « Quoique nous sachions et confessions avec joie que nous » avons des princes chrétiens, ce que nos pères n'avaient pas dans » l'ancienne et la nouvelle Eglise, cependant avant toutes choses, nous devons toujours avoir pour règle dans ce concile, que ce n'est » point ici le lieu d'accorder des louanges à qui que ce soit, si ce » n'est à DIEU SEUL dans JÉSUS-CHRIST, de le justifier lui seul, » et de condamner tout homme, et d'abord nous-mêmes qui vous » parlons, etc. »

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Nous croyons qu'après un tel exemple et de semblables paroles, il ne restera de scrupule à personne sur le droit et le devoir de rechercher avec liberté dans notre enseignement, les principes qui pourraient être dangereux et de les proscrire avec le plus de soin.

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Enseignement Catholique.

RÉPONSE A QUELQUES OBSERVATIONS

SUR

L'EXAMEN QUE NOUS AVONS FAIT DE QUELQUES ERREURS RATIONALISTES ET PANTHÉISTes professées DANS LES ÉCOLES DÈS LE 13° SIÈCLE.

1. Etat de la question. — Danger de certaines tendances.

Les détails que nous avons donnés sur les principes rationalistes et panthéistes, qui commencaient à se glisser dans les écoles dès le 13e siècle, ont été lus avec intérêt par toutes les personnes qui s'occupent d'enseignement et de science théologiques. Plusieurs, de vive voix et par écrit, nous en ont remercié, comme d'un vrai service rendu à la polémique catholique. Cependant un professeur de grand séminaire a cru devoir remarquer que quelques-unes de nos expressions avaient une portée trop générale, et nous a adressé une lettre très-convenable pour nous reprendre et nous engager à les modifier. Comme nous ne cherchons, ainsi que lui, que la vérité, nous publions sa lettre. Mais avant, nous devons signaler une disposition fâcheuse que nous avons déjà remarquée dans la polémique de M. l'abbé Maret, de domn Gardereau, et que nous retrouvons encore ici. C'est celle de ne pas répondre directement aux reproches que nous faisons à cette philosophie, que nous ne croyons pas catholique.

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Nous avons fait observer que, dès le 13e siècle, on voyait se glisser certaines erreurs qui s'étaient continuées jusque dans les tems actuels. Nous avons nommé ces erreurs : Abandon de la méthode traditionnelle; prétention de trouver dans l'homme les vérités qu'il faut croire ou qu'il faut pratiquer. — Don gratuit que l'on fait à l'homme d'avoir l'intuition directe de la vérité, communications naturelles directes et cachées avec Dieu même, participation nécessaire de la raison humaine avec la raison divine, etc. Nous avons cité les papes, qui ont reproché aux docteurs et professeurs, cette tendance et ces erreurs, les évêques qui les ont condamnées,

es corps entiers de docteurs qui les ont soutenues, etc. Et puis, que fait-on? Excuse-t-on ces propositions? dit-on que nous avons mal cité? Non. Mais on passe à côté, et l'on nous parle des éloges que l'on a donnés aux universités pour toute autre partie de leur enseignement, de la sainteté de tels ou tels docteurs, de la réputation qu'ils ont, de la pureté de la foi et de la sincérité de la croyance de ce siècle, etc., etc. toutes choses qui n'ont jamais été mises en doute. Nous allons voir plusieurs de ces défauts se manifester dans la lettre que l'on va lire. Et cependant, il serait tems que le clergé abordåt franchement, de front et dans toute sa profondeur, la polémique ; car s'il ne le fait, tandis qu'il s'amuse à défendre tel ou tel ornement de l'édifice qui n'est pas mis en doute, il ne s'aperçoit pas que la mine est attachée aux fondemens, et que, si elle éclate, l'ouvrage croulera de fond en comble. Cette mine est ostensible et claire : On veut élever un Christianisme naturel, à la place du Christianisme surnaturel; une révélation directe, intérieure, individuelle, à la place de la révélation extérieure, générale, traditionnelle,. historique, la seule que Dieu ait faite pour être obligatoire à l'homme. Nous le répétons encore: caveant consules.

Voici la lettre; elle est de M. l'abbé Espitalier, professeur au grand séminaire de Marseille.

Monsieur le directeur,

Lecteur assidu de vos Annales qu'on ne saurait assez estimer, formé même en grande partie sur leur esprit, j'attendais avec impatience votre dernier numéro de novembre, pour voir la manière dont se terminerait enfin la polémique importante, que vous soutenez avec tant de zèle et tant de science sur la première des questions philosophiques. Dès le commencement de cette intéressante polémique, nous partagions vos convictions, sur certaines méthodes et certaines expressions, qu'il est tems de voir disparaître de l'enseignement philosophique et théologique, aujourd'hui surtout que le Rationalisme nous déborde de tout côté. Tout catholique, qui sait comprendre les tems où nous vivons, ne doit pas avoir des pensées différentes, et ce n'a pas été une surprise pour nous de voir vous arriver de toute part des lettres d'approbation. L'article du dernier numéro n'est pas inférieur à ceux qui précèdent, et vous avez fort bien montré que l'autorité de saint Bonaventure est nulle, pour le savant bénédictin dom Gardereau; puisque ce docteur ne parle pas de l'état purement naturel; mais de l'état surnaturel et mystique d'une âme qui

s'élève à Dieu par la grâce. Quant à certaines expressions dont il se sert, vous dites fort bien que saint Bonaventure, comme tant d'autres saints docteurs, s'en serait abstenu, s'il avait vécu de notre tems.

1. Argumens généraux en faveur de la scholastique.

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A propos de cela et comme ex abundantiâ juris, vous avez fait précéder la polémique d'un article sur le 13° siècle ayant pour titre : Examen de quelques erreurs rationalistes et pantheistes professées dans les écoles au 13° siècle (et qui se sont continuées jusqu'à nos jours)1. Ici, monsieur le directeur, malgré ma bonne volonté, j'allais dire mes préjugés en votre faveur, tant vous nous avez accoutumés à voir la science et la bonne foi dominer dans vos productions, j'ai apperçu, avec surprise et avec peine, une attaque générale contre le 13° siècle et contre la scholástique, qui d'ailleurs n'était pas nécessaire à votre thèse assez défendue par la force des raisons. La série de vos Annales semblait nous promettre tout autre chose d'un examen de la science catholique dans le moyen-âge qu'une critique, qui, malgré vos intentions droites, vous ferait l'écho des vieilles haines et des vieilles passions du ProLestantisme, de la Renaissance payenne et de la Philosophie des deux derniers siècles.

En effet, M. le directeur, â priori et sans examen, un catholique serait déjà porté à croire que l'époque de la scholastique fut une grande époque, précisément parce qu'elle est devenue l'épouvantail et l'objet des haines rancuneuses et passionnées de l'hérésie et du rationalisme. L'erreur, vous le savez, n'attaque jamais l'erreur, comme les ténèbres ne repoussent jamais les ténèbres; mais elle a le sens délicat pour poursuivre de ses haines la vérité, comme les ténèbres ne sont opposées qu'à la lumière. Ce serait un grand argument général en faveur de la scholastique; mais il n'est pas le seul.

A priori encore, peut-on concevoir que les siècles des grandes expéditi ons catholiques de l'Occident contre l'Orient; que les siècles des plus belles productions de la poésie chrétienne, de l'architecture et de la peinture chrétienne; que les siècles qui ont produit tant de belles figures dans tous les rangs de la société, qui furent gouvernés par tant de saints et d'illustres pon. tifes; en un mot que les siècles du plus beau tems de la milice chrétienne, de l'art chrétien, de la société chrétienne, aient été des siècles d'ignorance, des siècles de barbarie, des siècles de sophisles par rapport à la science? Surtout quand ces siècles ont pour représentans dans la science des saint Anselme, des saint Bernard, des Hugues et des Richard de Saint-Victor, des Pierre Lombard, des Alexandre de Halès, des Vincent de Beauvais, des

• Nous rétablissons le titre complet de notre article dont M. l'abbé Espitalier n'avait cité que la moitié. A. B.

Albert-le Grand, des saint Bonaventure, des saint Thomas, des Roger-Bacon, pour ne parler que des sommités, durant l'espace de 200 ans seulement.

Je ne sais, mais il me semble que c'est d'avancé une forte présomption en faveur de la scholastique. Aussi je suis fermement persuadé que c'est plutôt une préoccupation passagère, qu'un jugement arrêté, qui vous a entraîné dans une critique aussi défavorable pour ces beaux siècles et surtout pour le 13 qui est le plus remarquable. D'autant plus, comme je l'ai observé déjà, que cela était peu nécessaire à la question que vous défendez, et pourrait même devenir nuisible à votre thèse dans l'esprit de plusieurs personnes.

Nous reconnaissons tout, ce qu'il y a de mesure et de loyauté dans ces observations, d'autant plus que, pour le fonds des idées, nous sommes de l'avis même de M. l'abbé Espitalier; mais il nous permettra de faire deux observations sur sa critique.

1° Nous n'avons point attaqué la science, la foi, la croyance catholique du 13° siècle, et surtout de ses plus fameux docteurs. Nous avons dit seulement, en nous servant des termes des théologiens, qu'ils avaient adopté une méthode de discussion ou d'enseignement qui pouvait être dangereuse; nous avons parlé seulement de quelques erreurs professées dans les écoles, et qui se sont continuées jusqu'à nous; enfin, pour montrer plus spécialement et plus sûrement ce qu'il fallait reprocher à ce siècle, nous nous sommes servis des paroles mêmes de Grégoire IX, de Jean XXII, de Grégoire XII, de l'évêque de Paris, etc. Leurs paroles sont nos paroles; nous renfermons nos reproches dans les leurs ; nous signalons à l'attention de nos lecteurs les propositions mêmes signalées et condamnées par ces maîtres de la doctrine. Il n'y a pas de réputation, de préjugé, de présomption, pris à priori, qui empêchent ce siècle de tomber sous les reproches que lui ont faits les papes et les évêques.

2o Nous ne saurions admettre le principe que pose ici notre adversaire, qu'il n'est pas permis de répéter un reproche, ou de relever un défaut dans l'enseignement, précisément parce que les Protestáns auraient formulé le même reproche. Nous ne pouvons admettre comme un axiome que l'erreur n'attaque jamais l'erreur. C'est là une maxime erronée, propre à repousser tout rapprochement, et qui, en elle-même, est injuste. Nous disons, nous, qu'il y avait des choses justes dans les reproches des protestans, comme le disaient les légâts du pape au concile de Trente, dans le discours si grand, ŝi ma

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