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beaux cheveux, blonds dans la jeunesse, blancs dans un âge a vancé, le faisaient paraître un esprit angélique à 20 ans, un apôtre ou un philosophe platonicien à 60. La jalousie ne devait pas épargner sa renommée, ni la malice sa sensibilité ombrageuse. Sur sa tombe même l'envie n'a pas expiré. Mais l'homme qui a tracé Paul et Virginie, celui qui a consacré sa vieillesse à l'instruction de ses enfans; celui qui, séparé de ses créanciers par des mers immenses, ne vécut que de riz et de maïs pour les satisfaire; celui qui, pressé par le besoin, et dans le pays où l'esclave est une propriété, aima mieux affranchir son nègre que de le vendre, cet homme, si bizarre qu'il fût, ne peut avoir été méchant. Avec un amour-propre très-irritable, il ir rita beaucoup d'amours-propres, cela explique tout. Des théories de Bernardin de Saint-Pierre celle qui parut la plus hasardée est la Théorie des marées; elle donna lieu à de grandes réclamations de la part des savans. L'un d'eux, qui a joui d'une grande faveur sous plus d'un régime, profita de son crédit pour faire persécuter un homme qu'il eût da se contenter de réfuter. Les physiciens sont quelquefois aussi intolérans que les théologiens. La prévention que le mathématicien suivant la cour avait inspirée à Napoléon, qui d'abord avait recherché l'auteur des Études et de Paul et Virginie, ne s'est jamais entièrement dissipée. On la retrouve jusque dans la quotité de la pension qu'il accorda an premier écrivain de l'époque. Elle est de 2,000 fr.;

il en donnait de 6,000 à l'auteur d'une tragédie qui lui plaisait. La pension de Bernardin de SaintPierre était assignée sur les bénéfices du Journal de l'Empire (antérieurement et postérieurement le Journal des Débats), feuille dans laquelle l'auteur des Etudes de la nature était habituellement déchiré. « Le plaisant »de cela, disait Bernardin de Saint>> Pierre, c'est que voilà les chiens >> qui me mordent, obligés qu'ils » sont de tourner ma broche. »

BERNERON (FRANÇOIS, CHEVALIER DE), d'abord officier dans le corps de l'ancienne gendarmerie, passa aux Indes en 1784, et servit en qualité de capitaine dans le régiment de l'Ile-de-France; pendant les trois années qu'il résida dans ces contrées lointaines, le chevalier de Berneron fut envoyé successivement auprès de Tippo-Saëb et du pacha des Marattes, et s'acquitta avec beaucoup de distinction des différentes missions dont il fut chargé. De retour en France en 1790, il fut compris dans la nouvelle création des adjudans-généraux, et fut employé dans ce grade sous les ordres du maréchal Luckner, lorsque la guerre éclata en 1791. I servit sous Dumouriez dans les campagnes de 1792 et de 1793. Chargé du siége de William-Stadt, il attaqua cette place sans succès. Le chevalier de Berneron, dévoué à la personne de Dumouriez et à ses projets, suivit le sort de ce général; il s'associa à sa révolte, et prit la fuite avec lui. Le chevalier de Berneron s'arrêta à Bruxelles, où il ne tarda pas à devenir suspect aux Au

trichiens, qui l'arrêtèrent sous prétexte d'intrigues révolutionnaires, et le retinrent en prison pendant dix-huit mois. Il profita de la liberté, qui lui fut rendue aux sollicitations réitérées du général autrichien Clairfayt, contre lequel il avait combattu, pour aller rejoindre Dumouriez à Londres. Il y mourut dans l'obscurité et dans un état voisin de l'indigence. BERNHARD (HENRI-EMMANUEL), fils d'un négociant de Breslau en Silésie, est né dans cette ville, en 1774. Littérateur, économiste, militaire, négociant, il s'est fait connaître sous ces différens rapports en Allemagne et en France. M. Bernhard appartient spécialement à l'époque présente, par la bizarrerie de sa vie politique. Après avoir servi dans l'artillerie prussienne, il se chargea de traiter auprès du gouvernement français des intérêts de quelques petits états d'Allemagne, et fut tour à tour secrétaire de Kellermann et du comte de Witzingerode., Historien, publiciste, traducteur et même poète, il a été nommé, sous le gouvernement impérial, censeur pour la littérature allemande, etc., etc. Il a traduit en allemand l'ouvrage de la célèbre miss Héléna Williams, sur les Moeurs et les opinions en France, à la fin du 18e siècle, et a publié, en 1815, une brochure sur l'illé galité de la Constitution de l'an 8. Il a encore dans son portefeuille un Essai dramatique dans le genrelyrique. Plusieurs articles de lui sont insérés dans la Biographie universelle. Une ordonnance du roi, en date du 24 octobre 1814, l'a nommé censeur honoraire..

BERNHOLD (JEAN-MICHEL), medecin célèbre, excellent praticien, mais qui n'a laissé aucun livre sur la science dont il s'est occupé toute sa vie, exerçait à Uffenheim en Bavière. Il a publié plusieurs ouvrages latins, avec des notes et des index. On estime son édition des Distiques de Caton, et celle de l'Art de la cuisine, ouvrage attribué à Apicius, et qui n'a, quoi qu'on en dise, qu'un rapport très-éloigné avec la méde. cine. Les éditions de Theodorus Priscianus et de Lesbonius Targus, sont moins recherchées. Bernhold, qui était né en 1736, mourut en 1797.

BERNI (TITUS), fils de Frédéric Berni, de Ferrare, descendant du poète célèbre de ce nom, est né en 1788, à Bitonto, ville de la province de Bari. Après avoir étudié la littérature dans sa patrie, le jeune Berni se rendit à Naples, où il suivit les cours de jurisprudence du célèbre professeur Valletta. Ces nouvelles études ne lui firent point négliger les belleslettres; il fut reçu membre de plusieurs sociétés littéraires, notamment de la Sebezia, dont il exerça l'emploi de secrétaire pendant plusieurs années. La pureté de ses mœurs et la noblesse de son caractère l'ont fait nommer à la députation nationale, comme s'il offrait le modèle du portrait qu'il avait tracé lui-même d'un vrai représentant du peuple, dans le n° 3 du journal l'Impartial, à la rédaction duquel il est attaché. Un grand nombre de ses compositions, en prose et en vers, sont répandues dans différens recueils. La traduction des meilleurs ou

vrages grecs et latins sur la politique, dont on a déjà publié deux volumes, sans nom d'auteur, fait également honneur au talent et à la modestie de M. Berni.

BERNIER (ÉTIENNE-ALEXANDRE), prédicateur vendéen, ancien curé de Saint-Laud, évêque d'Orléans, et membre de la lé gion-d'honneur, naquit à Daon, département de la Mayenne, le 31 octobre 1764. Ayant embrassé l'état ecclésiastique, il obtint, jeune encore, la cure de SaintLaud, et s'y fit remarquer par un zèle prétendu apostolique. Lors de la révolution, il refusa de prê ter le serment exigé par la constitution civile du clergé, et parvint à se soustraire à la déporta tion qui menaçait les prêtres insermentés. En 1793, il fut l'un des premiers instigateurs de la guerre de la Vendée; il se rendit à l'armée d'Anjou, où sa réputation l'avait précédé, ce qui le fit d'abord nom mer membre du conseil supérieur du gouvernement insurrection nel. Alors commença le rôle actif que le curé de Saint-Laud a joué dans cette guerre déplorable. L'abbé de Folleville, président de ce conseil, et soi-disant évêque d'Agra, perdit bientôt son in fluence : l'abbé Bernier, qui était insensiblement parvenu à le rem placer, devint aux yeux de son parti, l'Apotre de la Vendée. Il écrivait avec chaleur, s'exprimait avec facilité, et prêchait d'abon. dance. Sa voix était forte, et son éloquence fanatique entraînait fa cilement son grossier auditoire Il ne négligeait d'ailleurs aucun moyen pour frapper une populas tion crédule, et ce prétendu apô

tre de Jésus-Christ semblait avoir pris Mahomet pour modèle. On assure (nous craindrions cependant de l'affirmer), qu'il osa célébrer la messe sur un autel formé des cadavres de républicains: A quel dieu, par quel pontife, pour quel culte, cet autel fut-il élevé?.. Dans un jour de bataille le curé de Saint-Laud donnait des conseils aux généraux, animait les soldats, et ne se laissait point décourager par les revers; mais ce zèle si ardent ne couvrait que l'hypocrisie d'ambitieux projets, et cette autorité qu'il exerçait sur l'armée ne servit qu'à en diviser les chefs. La défiance remplaça bientôt l'enthousiasme qu'il avait usurpé, et cette défiance dut être implacable. L'abbé Bernier fut accusé, après la défaite de Gran→ ville, d'avoir voulu quitter l'armée avec le prince de Talmont, pour passer en Angleterre. La dés route de Savenay, qui dispersa entièrement l'armée vendéenne, comprima l'effet de cette accusátion; mais il dut long-temps se tenir caché en Bretagne. Dans sa retraite il écrivait des sermons, qu'il faisait passer aux habitans de la campagne, afin de les insurger de nouveau. Digne occupation d'un prêtre qui servait Dieu et le roi! Les malheureux paysans avaient assez de ses sermons, ils restèrent chez eux. L'abbé Bernier se décida alors à passer la Loire, et à reparaître à l'armée que commandait Charette. Il n'y fut que peu de jours, et se rendit près de Stofflet, qui, le lendemain de son arrivée, fit tuer l'infortuné Marigni, général royalis te, sur lequel des soupçons d'in

telligence avec les républicains s'étaient élevés. Cette mort fut généralement attribuée au curé de Saint-Laud, dont l'empire était absolu sur l'esprit de Stofflet, simple garde-chasse, homme grossier et stupide. L'abbé Bernier devint, par ce moyen, le véritable chef de l'armée catholique et royale; et à l'époque du premier traité entre les généraux de la république et ceux de la Vendée, il fut choisi pour négociateur. Stofflet demeura fidèle, même quand Charette, rompant la paix, avait repris les armes. Mais cette fidélité céda bientôt, et l'abbé Bernier eut le triste plaisir de rallumer la guerre. Cette guerre ne fut pas longue : elle ne produisit que la perte de Stofflet, qui par les mesures qu'avait prises le général Hoche, ne put pas même rassembler son armée. Ce malheureux errait en fugitif, lorsque l'abbé Bernier que l'on poursuivait aussi, lui fit dire, le 25 février 1796, de venir le trouver dans une métairie où il était cáché. Stofflet se rendit au lieu désigné, mais il n'y trouva point le curé de Saint-Laud; bientôt la maison fut investie par des troupes républicaines; le général vendéen fut pris et fusillé. Cette mort devint un nouveau grief contre le prêtre. Cependant, il eut encore assez d'adresse et de crédit pour s'emparer de l'esprit de M. d'Autichamp, successeur de Stofflet, et pour obtenir sa confiance. Il fut même nommé agent-général des armées catholiques, près des puissances étrangères. Mais, soit qu'il commencât à désespérer d'un parti

sur lequel ses prédications n'avaient plus d'empire, soit qu'une autre influence le dominât luimême, son ardeur guerrière parut tout à coup se ralentir; il refusa même de se rendre à Londres pour y remplir sa nouvelle mission, et fléchissant devant l'enne mi qu'il avait méprisé, il demanda au général Hoche, qui le lui accorda, un passe-port pour se retirer en Suisse. C'était une trahi son; il feignit de partir, mais il resta caché dans le pays. L'esprit d'intrigue qui caractérisa cette retraite, dut faire naître de nouveaux soupçons dans son parti, et peut justifier les interprétations infamantes qui furent données à une conduite si étrange. Aussi, quand les hostilités recommencèrent, en 1799, l'abbé Bernier ne put-il pas parvenir à jouer aucun rôle dans la nouvelle guerre. Mais aussitôt que Napoléon eut pris en main les rênes du gouvernement, et qu'il s'occupa sérieusement de pacifier la Vendée, l'abbé Bernier ne manqua pas de saisir l'occasion de recouvrer une partie de son impor tance. La plupart des chefs montrait encore de l'hésitation, Bernier se présenta au gouvernement consulaire comme le représentant des Vendéens. L'idée exagérée qu'il donna de ses moyens et de son pouvoir, produisit d'abord quelque illusion : on écouta ses avis, on lui demanda beaucoup de renseignemens; mais on ne fut pas long-temps à s'apercevoir qu'il ne pouvait être que d'une utilité secondaire, et qu'il n'était réellement chargé que de sa propre amnistie. Pour tirer parti du nouveau converti,

on le fit prêcher à Paris, le jour anniversaire du 2 septembre, dans l'église des Carmes, où tant de prêtres avaient été massacrés; une foule nombreuse était rassemblée pour l'entendre. Le sujet, le lieu, auraient inspiré un véritable apôtre. Il eût pleuré sur les victimes des discordes civiles; il eût prêché au nom d'un Dieu de paix, la paix et le pardon: mais l'apôtre de laVendée ne savait prêcher que la guerre et la vengeance; les os des martyrs ne l'inspiraient pas comme l'aspect des cadavres républicains: il ne pouvait être ému que par les meurtres qu'il avait ordonnés lui-même! l'auditoire ne fut frappé que de l'insensibilité du prédicateur. Après ces deux essais, le gouvernement en tenta un troisième qui ne fut guère plus heureux. Il choisit l'abbé Bernier pour être un des plénipotentiaires chargés de traiter du concordat avec l'envoyé du pape; mais il n'eut pas assez d'influence pour diriger cette négociation, ni pour obtenir le chapeau de cardinal, objet de tous ses vœux. Cependant il obtint, par forme de compensation, le sié ge d'Orléans. On put à cette occasion lui appliquer ce beau vers : N'importe de quel bras Dieu daigne se servir. Peu de temps après, le 1er octobre 1806, un fièvre bilieuse emporta, à Paris, l'évêque d'Orléans. «Veut-on le faire cardinal? disait»>on quand il fut question de con»férer à l'abbé Bernier cette dignité, que l'abbé Maury avait ob>> tenue à des titres plus pacifi>>ques : c'est dans le sang qu'il faut >>teindre son chapeau. »>

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BERNIER (LOUIS-FRANÇOIS),

était cultivateur à Passy en Valois, quand il fut élu, en 1791, membre de l'assemblée législative. En 1792, il entra à la convention. Ses principes populaires étant sans exagération, son langage et ses votes furent modérés. Dans le procès du roi, il se déclara pour la détention de ce prince jusqu'après l'acceptation de la constitution de 1793, et plus tard pour l'appel au peuple et pour le sursis. Après le 9 thermidor, il fut envoyé à Évreux, où il ordonna le désarmement des comités révolutionnaires. Assailli à coups de pierre, dans une insurrection au sujet des grains, il échappa, par un bonheur inespéré, à la fureur du peuple, et vint rendre compte à l'assemblée de sa mission et des périls qu'il avait courus. Membre du conseil des cinqcents, il fut, après le 18 brumaire, nommé commissaire près le tribunal de première instance du 3e arrondissement de Seine-etMarne.

BERNIGAUD-DEGRANGE (N.) était lieutenant-général du bailliage de Châlons-sur-Saône, lorsqu'en 1789 il fut nommé député du tiers aux états - généraux. En 1790, il publia un Recueil des erreurs et des bévues, qu'il reprochait au comité des finances de l'assemblée constituante, et signa, contre les opérations de l'assemblée elle-même, les protestations des 12 et 15 septembre 1791. M. Bernigaud - Degrange rentra ensuite dans toute l'obscurité de la

vie privée, et il ne fut plus question de lui qu'en 1814. A cette époque, il reçut du roi d'abord des lettres de noblesse, puis la dé

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