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berger supposé, pour détromper les deux bergères qui se disputent sa conquête, finit par leur laisser entrevoir son sein. Avec quelque grace, avec quelque modestie que la demoiselle Asselin désabuse ses compagnes, cette pantomime a toujours partagé les spectateurs, et les voix qui ont crié bis n'ont pas étouffé la critique des autres.

Le bruit s'est répandu depuis quelques semaines que les Mémoires ou les Confessions de J.-J. Rousseau allaient paraître, que l'ouvrage avait été imprimé en Hollande, qu'il en existait deux exemplaires à Paris. Plusieurs personnes ont prétendu les avoir vus. Tous ces bruits cependant ne se sont point confirmés, il n'a mêine jamais été possible de remonter à leur véritable source. Ce que nous savons de bonne part, ce que Rousseau luimême a dit, il y a quelque temps, à des personnes de notre connaissance, c'est qu'il en avait égaré le manuscrit et qu'il en était peu surpris, rien de ce qu'il possédait ne pouvant être en sûreté chez lui. Ce que nous savons plus sûrement encore, c'est ce qu'il a dit depuis à un de nos amis communs, que l'ouvrage n'était pas perdu, soit qu'il eût retrouvé la copie qu'il avait égarée, soit qu'il en eût deux, et qu'il l'avait déposée entre les mains d'un Académicien dont la probité ne pouvait lui laisser aucun doute. On nous a assuré depuis que cet Académicien était M. de Malesherbes.

C'est une charmante petite comédie que le Jugement de Midas: il y a bien long-temps que nous n'avons vu au Théâtre Italien une nouveauté aussi agréable et aussi bien accueillie. Le fond du sujet est tiré d'un opéra burlesque du Vadé de l'Angleterre. Il n'y a d'ailleurs aucun

rapport entre la conduite de la pièce française, qui est en trois actes, et celle de la pièce anglaise, qui n'en a que deux. Le développement de l'intrigue, le dialogue, l'esprit, le ton et le mouvement de la scène, tout appartient à M. d'Hèle. Nous n'avons pu nous empêcher d'être fort étonnés à Paris qu'un étranger eût si bien saisi et les convenances de notre théâtre et le génie de notre langue, même dans un genre d'ouvrage où les nuances du style échappent plus aisément peut-être que dans aucun autre. La pièce a été donnée pour la première fois sur le théâtre de la Comédie Italienne, le samedi 27, et quelques jours après à Versailles avec le même succès.

La conduite de cette jolie pièce est simple et ingénieuse, le dialogue plein de mouvement, de naturel et de vérité; l'intrigue attache par elle-même indépendamment du sens allégorique qu'elle renferme, et la fable se trouve combinée avec tant d'adresse, que les deux intérêts, celui de l'intrigue et celui de l'allégorie, se suivent et se développent sans se nuire jamais, sans embarrasser un moment le spectateur. Il ne fallait pas moins d'art sans doute pour vaincre les difficultés du sujet, et la hardiesse du dénouement, qui pouvait révolter une bonne partie des loges et du parterre. Si la dernière scène fait un peu moins de plaisir que les autres, c'est qu'après avoir pris tant d'intérêt aux amours de Lise et Chloë, on est presque fâché à la fin de voir que tout ce qu'on vient d'entendre n'est qu'un jeu de l'imagination, une simple allégorie. C'est le seul défaut qu'on soit tenté de reprocher à l'auteur, et ce défaut était inévitable, il tient essentiellement à la nature du genre et du sujet.

La musique du Jugement de Midas est remplie de choses agréables. Si le rôle d'Apollon paraît un peu

berger supposé, pour détromper les deux bergères qui se disputent sa conquête; finit par leur laisser entrevoir son sein. Avec quelque grace, avec quelque modestie que la demoiselle Asselin désabuse ses compagnes, cette pantomime a toujours partagé les spectateurs, et les voix qui ont crié bis n'ont pas étouffé la critique des autres.

Le bruit s'est répandu depuis quelques semaines que les Mémoires ou les Confessions de J.-J. Rousseau allaient paraître, que l'ouvrage avait été imprimé en Hollande, qu'il en existait deux exemplaires à Paris. Plusieurs personnes ont prétendu les avoir vus. Tous ces bruits cependant ne se sont point confirmés, il n'a même jamais été possible de remonter à leur véritable source. Ce que nous savons de bonne part, ce que Rousseau luimême a dit, il y a quelque temps, à des personnes de notre connaissance, c'est qu'il en avait égaré le manuscrit et qu'il en était peu surpris, rien de ce qu'il possédait ne pouvant être en sûreté chez lui. Ce que nous savons plus sûrement encore, c'est ce qu'il a dit depuis à un de nos amis communs, que l'ouvrage n'était pas perdu, soit qu'il eût retrouvé la copie qu'il avait égarée, soit qu'il en eût deux, et qu'il l'avait déposée entre les mains d'un Académicien dont la probité ne pouvait lui laisser aucun doute. On nous a assuré depuis que cet Académicien était M. de Malesherbes.

C'est une charmante petite comédie que le Jugement de Midas: il y a bien long-temps que nous n'avons vu au Théâtre Italien une nouveauté aussi agréable et aussi bien accueillie. Le fond du sujet est tiré d'un opéra burlesque du Vadé de l'Angleterre. Il n'y a d'ailleurs aucun

rapport entre la conduite de la pièce française, qui est en trois actes, et celle de la pièce anglaise, qui n'en a que deux. Le développement de l'intrigue, le dialogue, l'esprit, le ton et le mouvement de la scène, tout appartient à M. d'Hèle. Nous n'avons pu nous empêcher d'être fort étonnés à Paris qu'un étranger eût si bien saisi et les convenances de notre théâtre et le génie de notre langue, même dans un genre d'ouvrage où les nuances du style échappent plus aisément peut-être que dans aucun autre. La pièce a été donnée pour la première fois sur le théâtre de la Comédie Italienne, le samedi 27, et quelques jours après à Versailles avec le même succès.

La conduite de cette jolie pièce est simple et ingénieuse, le dialogue plein de mouvement, de naturel et de vérité; l'intrigue attache par elle-même indépendamment du sens allégorique qu'elle renferme, et la fable se trouve combinée avec tant d'adresse, que les deux intérêts, celui de l'intrigue et celui de l'allégorie, se suivent et se développent sans se nuire jamais, sans embarrasser un moment le spectateur. Il ne fallait pas moins d'art sans doute pour vaincre les difficultés du sujet, et la hardiesse du dénouement, qui pouvait révolter une bonne partie des loges et du parterre. Si la dernière scène fait un peu moins de plaisir que les autres, c'est qu'après avoir pris tant d'intérêt aux amours de Lise et Chloë, on est presque fâché à la fin de voir que tout ce qu'on vient d'entendre n'est qu'un jeu de l'imagination, une simple allégorie. C'est le seul défaut qu'on soit tenté de reprocher à l'auteur, et ce défaut était inévitable, il tient essentiellement à la nature du genre et du sujet.

La musique du Jugement de Midas est remplie de choses agréables. Si le rôle d'Apollon paraît un peu

faible, il ne faut pas oublier que, s'il eût été d'une composition plus forte et plus savante, le seul acteur capable de le bien jouer, le sieur Clairval, n'aurait pas eu assez de voix pour le chanter; et comment faire chanter Apollon, et surtout en France Il y a infiniment d'esprit et de gaieté dans les différens accompagnemens qui parodient les airs de Pan et de Marsias; tous les morceaux d'ensemble sont du plus grand effet. La pièce a été, en général, parfaitement bien jouée; mais madame Dugazon s'est surpassée dans le rôle de Chloë: il est permis de douter si madame Laruette y eût mis autant de grace, autant de finesse, un naturel plus naïf et plus piquant. On a obligé l'auteur de la musique et celui des paroles de paraître sur le théâtre ; l'un et l'autre y ont été reçus avec les plus grands applaudissemens, surtout l'auteur du poëme, qui est Anglais, et qui a servi même autrefois dans la marine. Nous avons trouvé qu'il était fort doux d'applaudir ces messieurs à l'Opéra-Comique, et de les siffler, s'il est possible, dans la Manche.

On n'a jamais laissé échapper à Paris l'occasion de faire une pointe. Comme Apollon tombe des nues au commencement de la pièce, on n'a pas manqué de dire à l'auteur, en le félicitant de son ouvrage : « Votre pièce, Monsieur, tombe des nues; il faut bien qu'elle y remonte.... » Il est certain que depuis long-temps on n'avait vu à ce théâtre un succès plus éclatant.

Madame Denis a promis à M. de Villette de conserver le cœur de M. de Voltaire, qu'il a fait embaumer, et pour lequel il se propose de faire élever un petit monument dont M. Houdon a déjà fait l'esquisse; c'est une urne cinéraire

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