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en même temps paroisse ; une église de Notre-Dame, un couvent de Cordeliers et un de Capucins. Les Jésuites, persécutés en France l'an 1828, établirent à Fribourg un collége qui devint bientôt trèsflorissant. En 1830, les dames du Sacré-Cœur y établirent également un pensionnat. Parmi les quinze maisons religieuses du canton, il y a le couvent de la Val-Sainte, occupé quelque temps par les Trappistes venus de France, et qui a été érigé en abbaye. Depuis le commencement du dix-neuvième siècle, l'esprit d'anarchie révolutionnaire a fait aussi effort pour pénétrer à Fribourg; le bon sens du peuple et la sagesse du clergé y ont mis obstacle jusqu'à présent. Un bon séminaire y a été établi par les deux derniers évêques.

La ville de Soleure, chef-lieu du canton de ce nom, est depuis 1825 la résidence de l'évêque de Bâle, dont la juridiction s'étend, comme on l'a vu, sur plusieurs cantons. La collégiale de SaintUrse et de Saint-Victor est devenue cathédrale, et les chanoines sont nommés par les divers cantons qui dépendent de l'évêché. La population de ce canton est de soixante-trois mille âmes, dont six mille protestants. Le clergé séculier se composait, en 1857, de deux cent vingt-deux prêtres. La ville avait autrefois un beau couvent de Jésuites. Il y a de plus à Soleure des Cordeliers, des Capucins et des religieuses. Dans le canton, il y a en tout cinq couvents d'hommes et trois de femmes. L'aristocratie gouvernementale de ce canton est aussi entrée dans la voie des innovations et des violences contre le clergé catholique. La nomination d'un prévôt, en 1834, a montré son mauvais vouloir. Elle a fait choix pour cette place d'une professeur de théologie étranger au chapitre, et mal noté pour ses principes religieux et politiques. La commune, de son côté, présenta un autre professeur, homme fort estimé. Le chapitre refusa d'admettre le premier, et le Pape approuva ce refus. Le gouvernement, agissant en despote, s'empara de la caisse et des archives du chapitre. Le nonce apostolique réclama vivement; on n'a eu aucun égard à ses représentatious. On s'est emparé de l'administration des biens du chapitre. On a bouleversé le collége, renvoyé la plupart des anciens professeurs, et mis à leur place des professeurs protestants ou de principes fort suspects. Un seul trait suffira pour caractériser l'esprit de ces gouvernants de Soleure. Autour de la cathédrale il y avait des pierres tumulaires qui recouvraient d'anciennes tombes; les magistrats les firent enlever, pour construire en place un abattoir ou boucherie. D'un autre côté, ce qui manquait au clergé de ce diocèse, c'était l'unité et la fermeté dans la doctrine catholique, c'était un bon séminaire: on eût désiré

à l'évêque Salzman plus de zèle et de courage pour ces deux objets.

Bâle est un canton protestant; on compte dans la ville plus de trois mille catholiques, et ils y ont une église. Ce canton a été divisé en deux depuis 1850. La campagne se plaignait de. la suprématie de la ville. Alors que plusieurs cantons ont changé leur constitution dans le sens de la révolution française, la campagne a demandé et obtenu d'avoir un gouvernement particulier. Il y a eu à ce sujet beaucoup d'agitation, et même des combats et du sang répandu. Il y a des catholiques dans la campagne, surtout à Liesthal, où l'on a établi une église. Bâle-Ville a vingt-quatre mille âmes et la campagne quarante-un mille.

La ville et le canton de Schaffouse sont presque tout-à-fait protestants. C'est un petit canton; sa population est de trente-un mille âmes. Nous avons vu le président de son consistoire, le docteur Hurter, le célèbre historien du pape Innocent III, se déclarer catholique avec sa famille. Hurter est une des gloires de la Suisse moderne, et même de l'Europe.

Appenzell est le dernier des treize cantons suisses, dans l'ordre de sa réception dans la ligue. Le pays est très-montueux et entouré par le canton de Saint-Gall. Il est divisé en deux parties, dont chacune a une demi-voix à la diète, les Rhodes intérieures qui sont catholiques, les Rhodes extérieures qui sont protestantes. Dans la première est le bourg d'Appenzell, abbatis cella, parce que l'abbé de Saint-Gall y avait báti un hospice; il y a là une église paroissiale, un couvent de Capucins et un de religieuses. La population totale est de cinquante-un mille ames.

Les Grisons étaient autrefois alliés des Suisses; ils forment aujourd'hui un canton. Le pays a beaucoup d'étendue, mais il est très - montueux; il se partage en trois ligues. La population est mixte, mais les protestants sont plus nombreux. L'évêché de Coire est fort ancien; l'évêque réside dans un château. A côté est la cathédrale. Le chapitre est composé de vingt-quatre chanoines qui élisent l'évêque. Celui-ci avait le titre de prince de l'empire. Il y avait autrefois à Coire deux couvents, les Dominicains et les Prémontrés; mais ils ont été supprimés. L'abbaye de Dissentir, de l'ordre de Saint-Benoit, a de beaux bâtiments; l'abbé avait une juridiction étendue; il battait monnaie. Il y a dans tout le pays six autres couvents d'hommes ou de femmes. La ligue haute est celle où il y a le plus de catholiques. La population totale de ce canton

L'Ami de la Religion, et Hurter.

369 est de quatre-vingt-huit mille âmes. Quelques paroisses dépendent de l'évêché de Côme.

L'abbaye de Saint-Gall, de l'ordre de Saint-Benoit, était autre→ fois alliée des Suisses. L'abbé était seigneur de la ville et des environs, et prince du saint empire. Une ville s'était formée autour de l'abbaye. Cette ville embrassa l'hérésie protestante au seizième siècle. De là des dissensions et des guerres. L'abbé comptait environ cent mille sujets. La révolution a renversé cet ordre de choses. Le pays est devenu un canton, et l'abbaye a été supprimée. A sa place on a érigé un chapitre. En 1823, le Pape établit un évêché pour Saint-Gall, mais uni à celui de Coire. Le gouvernement du canton y donna son assentiment. Mais en 1833, à la mort de l'évêque, ce même gouvernement n'a plus voulu reconnaître l'union qu'il avait consentie neuf ans auparavant, il a dissous le chapitre et s'est emparé des biens de l'évêché. Cet acte de despotisme, cette violation arbitraire d'un traité solennel, avaient été sollicités par quelques mauvais prêtres, contempteurs de l'autorité épiscopale, mais serviles adulateurs de l'autorité séculière, comme ces prêtres libertins que nous avons vus en solliciter l'abolition du célibat ecclésiastique. Les chefs de la cabale schismatique du canton étaient les sieurs Elbling et Aloys Fuchs, ce dernier professeur à Rapperschwil, et interdit pour un sermon hérétique prêché en 1852. C'est ce club de prêtres révolutionnaires qui fit adopter au gouvernement les articles schismatiques de Baden. Le salut de la religion vint du peuple, éclairé par les bons prêtres. La population du canton est de cent cinquante-huit mille âmes la plus grande partie est catholique, mais les protestants sont assez nombreux. Le peuple dut être consulté sur l'adoption définitive des articles. C'était en 1834. Toutes les populations catholiques. les rejetèrent, et même beaucoup d'honnêtes protestants. A Rapperschwil, où avait été prononcé le scandaleux discours, sur cent soixante-dix-sept votants, il y en eut cent soixante-seize qui se prononcèrent contre la loi proposée. Dans une autre paroisse, un chapelain ou vicaire ayant dit qu'il ne trouvait rien de dangereux dans la loi ou les trente-trois articles de Baden, le peuple se souleva contre lui, et menaça de le mettre à la porte de l'église. Cette opposition du peuple ayant forcé le gouvernement révolutionnaire à plus de modération, un décret pontifical du vingt-trois mars 1856 prononça la séparation des diocèses de Coire et de Saint-Gall..

Le canton d'Argovie a été composé d'un démembrement du canton de Berne, du comté de Bade et autres territoires. C'est un canton assez étendu, moitié catholique, moitié protestant. La po

TOME XXVIII.

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pulation est de cent quatre-vingt-deux mille âmes. Les villes principales sont Arau, Baden et Zurzach. Il y a des collégiales dans ces deux dernières villes. Les abbayes de Muri, ordre des Bénédictins, et de Wetting, ordre des Bernardins, sont de ce canton. Il y a aussi des couvents de Capucins et d'autres de religieuses. Mais depuis 1830, les catholiques d'Argovie souffrent une véritable persécution. L'aristocratie révolutionnaire, qui forme le gouvernement cantonal, reproduit dans ce pays le despotisme de Joseph II, de Guillaume de Nassau, et des terroristes français. Au mépris de la constitution, qui garantit la liberté des cultes, les catholiques sont privés même du droit de pétition, leurs meilleurs prêtres emprisonnés ou bannis, les couvents de Muri, Wetting et autres, confisqués ou volés, etc. Et jusqu'à présent la confédération helvétique n'a rien fait pour réprimer cette tyrannie du fort sur le faible. C'est dire à tous les voleurs grands et petits: Il n'y a d'autre droit que la force; si vous êtes les plus forts, vous avez le droit de voler la Suisse entière.

Le canton de Thurgovie est aussi un nouveau canton; il se compose du Thurgau, qui dépendait autrefois des cantons suisses en commun. La population est de quatre-vingt-quatre mille âmes, dont le cinquième de catholiques. Frauenfeld, la capitale, a deux églises, une catholique, une protestante. Il y a dix monastères dans ce canton, mais ils sont exposés au même sort que ceux d'Argovie. Comme les quatre cinquièmes de la population sont protestants, ils continuent l'œuvre de leurs ancêtres, qui est de voler les monastères. Il est vrai que la constitution avait garanti l'existence des couvents; mais les catholiques ont le tort d'être les plus faibles.

Le Tessin est encore un nouveau canton, formé de sept bailliages d'Italie qui appartenaient à divers cantons. Ce pays est tout italien et tout catholique. Il dépend de l'évêché de Côme. Les villes principales sont Bellinzona, Lugano, Lucarno. Ce canton a dix-neuf maisons religieuses des deux sexes et une population totale de cent neuf mille âmes. C'est sur les confins des cantons de Tessin et d'Uri que se trouve le mont Saint-Gothard, qui a six mille six cent cinquante pieds au-dessus de la mer. Dès le moyen age, la charité chrétienne y avait établi un hospice, desservi par des ecclésiastiques, pour les voyageurs pauvres ou fatigués. Cette fondation étant venue à tomber, saint Charles Borromée entreprit de la rétablir. It en fut empêché par la mort; mais son neveu et successeur Frédéric exécuta son projet, fit bâtir une maison avec une chapelle, et y

Voir les détails en Hurter, p. 597-720.

mit quelques religieux de l'ordre des humiliés. Ceux-ci n'y restèrent pas long-temps. Enfin, dans l'année 1683, l'archevêque Visconti de Milan y établit des Capucins, avec obligation d'héberger gratuitement chaque voyageur pendant vingt-quatre heures. L'hospice, ruiné par les armées de la France révolutionnaire, a été rebâti en 1837 et confié de nouveau aux Capucins. Ces bons pères en furent expulsés l'an 1841 par le gouvernement révolutionnaire, soi-disant libéral, du canton.

Le canton de Vaud dépendait autrefois de Berne; il forme aujourd'hui un canton indépendant. Ce pays est tout protestant; cependant les catholiques ont báti récemment des églises à Lausanne, à Vevey, à Yverdun, à Nyon et ailleurs. L'évêque de Lausanne, qui réside à Fribourg, a visité Lausanne il y a quelques années, et y a été bien reçu. Il n'y a point de couvent dans ce canton. La population totale y est de cent quatre-vingt-trois mille ames.

Le Valais, autrefois allié des Suisses, forme aujourd'hui un canton. Ce pays est tout catholique, peuplé de soixante-quinze mille huit cents âmes, sous la juridiction de l'évêque de Sion, qui prend le titre de prince du saint empire. La cathédrale est dédiée à NotreDame. Les Jésuites avaient en 1837 des maisons à Sion et à Brigg. L'abbaye de Saint-Maurice, dans le Bas-Valais, est ancienne et célèbre; l'abbé a maintenant le titre d'évêque de Bethlehem. Il y a sur le sommet du Saint-Bernard un hospice desservi par des religieux qui rendent de grands services aux voyageurs. Ce canton se divise en deux parties, le Haut et le Bas-Valais : les habitants du premier sont d'origine allemande, et répandus dans une multitude de vallées sises bien haut, peu accessibles et encore moins visitées; c'est un peuple éminemment catholique, pieux, hospitalier, libéral, complaisant, simple, plein de vigueur, et peu en rapport avec le monde extérieur; aussi y eut-il un village reculé où, à la fin de l'année 1795, on n'avait encore rien appris de la mort de Louis XVI; dans un autre, à la fin du dernier siècle, on ne trouvait pas un seul cabaret; dans plusieurs règne encore la coutume de suspendre à la croix du cimetière les choses qu'on a trouvées, et de les y laisser pendant quinze jours, afin que le propriétaire puisse les reprendre à toute heure. Ces montagnards ont déployé un courage indomptable pour ne pas subir l'effet de la révolution française. Les habitants du Bas-Valais, mélange de Français et d'Italiens, sont également tous catholiques, mais plus accessibles aux innovations du siècle. C'est par eux que les révolutions de France et de Suisse ont pu pénétrer dans le pays et persécuter en 1847 les religieux du mont Saint-Bernard.

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