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ÉCLAIRCISSEMENS HISTORIQUES

ET PIÈCES OFFICIELLES.

Note (A), page 372.

A Paris, le 5 juillet 1789.

Je vous envoie, Monsieur, M. Berthier, officier de l'étatmajor, pour prendre des renseignemens sur la Bastille, et voir avec vous les précautions qu'il y a à prendre, tant pour le local que pour l'espèce de garnison dont vous pouvez avoir besoin; ainsi je vous prie de lui donner toutes les connaissances relatives à cet objet. J'ai été tranquille sur les premières inquiétudes que vous m'avez données, parce que j'étais sûr de mon fait; et vous voyez qu'il ne vous est rien arrivé. L'avenir est différent, et c'est pour cela que je cherche à être instruit du poste.

Réponse.

Le baron DE Besenval.

J'ai reçu la lettre que m'avez fait l'honneur de m'écrire, et que M. Berthier m'a remise. En conséquence, je lui ai fait voir la place dans le plus grand détail : il est actuellement en état de vous en rendre le compte que vous désirez. J'ai cru, Monsieur le baron, devoir vous faire part mercredi dernier de

ÉCLAIRCISSEM. Histor. et pièces offic.

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l'avertissement que j'avais eu la veille, et des précautions que j'avais déjà prises en cas que l'attaque qui m'était annoncée eût eu son effet.

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Sur le rapport fait au comité des recherches des représentans de la commune, par M. GARAN-DE-Coulon.

UNE grande accusation a été élevée contre le baron de Besenval.

La commune de Paris l'a dénoncé aux tribunaux et à l'Europe comme coupable d'être entré dans une conspiration formée contre la liberté du peuple français, celle de l'Assemblée nationale, et contre la ville de Paris en particulier (1).

Le baron de Besenval serait bien coupable, en effet, s'il était entré dans une telle conspiration.

Étranger à la France, mais dévoué à sa défense; dès ses premières années, comblé des bontés du monarque qui la gouverne: appelé par son choix à commander les provinces

(1) Page première du rapport.

qui environnent la capitale, il n'y aurait aucune excuse pour lul, s'il eût été capable de tourner contre la liberté de cette nation généreuse des armes qui ne lui avaient été confiées que pour la garantir de tous les périls.

Mais le moment de discuter cette étonnante accusation comme elle doit l'être n'est pas encore arrivé pour le baron de Besenval. La procédure qui se dirige contre lui continue encore à s'instruire, et l'information est à peine close (1).

Il ne lui convient pas de précipiter la manifestation de son

innocence.

Ce sera d'ailleurs en présence du tribunal que l'Assemblée nationale lui a donné pour juge, et au milieu même de ce peuple contre lequel on accuse d'avoir conspiré, qu'il développera toute sa conduite.

Nous ne voulons que présenter dans cet écrit quelques observations infiniment rapides sur le rapport fait au comité des recherches par un des membres de ce comité, à l'occasion de cette conspiration même, et imprimé depuis par son ordre.

D'abord il est nécessaire ici de rappeler quelques faits.

Le baron de Besenval faisait, vers la fin du mois de juillet dernier, un voyage en Suisse, sa patrie, avec la permission du roi, lorsqu'il fut arrêté par la milice nationale à Villenoxe. Aucune voix ne s'était encore élevée contre lui à cette époque.

Aucun attentat ne lui avait été reproché.

Aucune plainte n'avait été formée contre l'usage qu'il pou

(1) Au moment où nous écrivions ceci (31 décembre), nous pensions qu'en effet l'information était close, parce qu'on avait annoncé qu'elle devait l'être, et qu'après soixante-huit témoins d'entendus, dont aucun n'avait déposé à la charge du baron de Besenval, il était permis de le croire; mais nous venons d'apprendre que le comité des recherches en

annonce encore.

vait avoir fait du commandement des troupes que le roi lui avait confiées."

Cependant sa détention même devient pour ainsi dire une accusation.

Bientôt la commune de Paris, instruite de cet événement, en instruit elle-même l'Assemblée nationale.

Un décret tutélaire est porté alors par cette Assemblée, qui déclare que la personne du baron de Besenval « doit être >> remise en lieu sûr, et sous une garde suffisante, dans la » ville la plus prochaine du lieu où il avait été arrêté, et que qui que ce soit ne peut attenter à la personne du baron de » Besenval qui est sous la sauvegarde de la loi. »

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Ce décret s'exécute.

Le baron de Besenval est traduit à Brie-Comte-Robert; enfermé d'abord dans l'hôtel-de-ville, et transféré ensuite de l'hôtel-de-ville dans le château.

Là il est oublié en quelque sorte par la commune de Paris, pendant trois mois, et on se peint aisément sa situation dans cet intervalle.

Enfin la considération des frais immenses que coûtait la garde de ce prisonnier, que son infortune même rendait si célèbre, détermine la commune à s'adresser à l'Assembléc nationale pour lui demander ce qu'elle doit faire.

L'Assemblée nationale, qui ne voyait pas de coupable parce qu'elle ne voyait pas d'accusateur, paraissait d'abord n'écouter que le premier mouvement de sa justice naturelle. Elle allait prononcer la liberté du baron de Besenval.

Un de ses membres les plus distingués s'était même offert avec le dévouement le plus généreux pour lui servir de caution (1), lorsqu'un autre de ses membres qui, ce jour-là

(1) Il ne faut pas oublier de consigner ici le nom de ce citoyen si estimable, de ce véritable chevalier français, M. le duc de Liancourt.

même, venait d'être admis dans l'Assemblée comme député de nos colonies (1), affirme qu'il existait des pièces qui compromettaient le baron de Besenval, et demande qu'une accusation solennelle soit instruite contre lui dans les tribu

naux..

Cette opinion, qu'il était juste d'approfondir en effet, est adoptée.

L'Assemblée nationale décide que le procès sera fait au baron de Besenval comme prévenu du crime de lèse-nation. En même temps elle nomme le Châtelet de Paris pour l'instruction de ce procès et le jugement.

C'est le 14 octobre que le décret avait été porté par P'Assemblée nationale.

Ce n'est que le 6 novembre que le baron de Besenval est traduit de Brie-Comte-Robert dans les prisons du Châtelet.

A cette époque du 6 novembre, il n'existait encore aucune dénonciation légale contre lui.

Un'en a pas même existé non plus pendant plusieurs jours qui ont suivi.

Chose étrange! le baron de Besenval éprouvait déjà depuis long-temps le sort des coupables, et il n'était pas encore accusé !

Il l'a été enfin le 18 novembre.

Une dénonciation a été faite ce jour-là par le procureursyndic de la commune au procureur du roi du Châtelet. Et le lendemain 19, le cours régulier de l'instruction a commencé.

Il est essentiel ici d'observer que, dès le 21 octobre, il avait été formé dans le sein de la commune de Paris, par F'Assemblée générale des représentans, un comité de recherches.

(1) M. Moreau de Saint-Méry.

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