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INTRODUCTION.

Dans ce travail, je me suis proposé d'étudier d'une manière assez complète le mouvement géométrique d'une figure invariable dans son plan, en fondant cette théorie sur de simples considérations géométriques. J'ai eu surtout en vue de raisonner sans cesse d'une manière tout à fait générale et indépendante des conditions particulières qui déterminent le mouvement de la figure, comme aussi des positions relatives des différents points que l'on considère soit dans la figure mobile, soit dans le plan regardé comme fixe. J'ai cherché à introduire la même généralité dans les énoncés des théorèmes auxquels je suis parvenu, et à rendre ainsi ces théorèmes immédiatement applicables dans tous les cas possibles, sans qu'il soit nécessaire de les modifier d'après les circonstances que présente la figure.

Après avoir rappelé, dans les SS 1, 2, 3, diverses propriétés du mouvement d'une figure dans un plan, et ajouté quelques remarques à ce sujet, j'établis à priori un théorème général qui a lieu pour un déplacement fini quelconque et qui me sert de point de départ.

Je l'applique en particulier à un déplacement infiniment petit, j'en déduis quelques propriétés remarquables qui ont lieu pour une position quelconque de la figure mobile, et j'obtiens immédiatement un théorème d'un énoncé essentiellement géométrique et tout à fait général, relatif au centre de courbure de la trajectoire d'un point quelconque de la figure en mouvement.

Je rattache à ce théorème la question du centre de courbure de l'enveloppe d'une courbe qui fait partie de la figure mobile, et j'en déduis quelques conséquences assez curieuses.

Du même théorème découlent encore très-simplement une construction

géométrique générale des centres de courbure et une suite de règles pour la détermination d'un point important à considérer dans toute cette théorie.

Je termine, enfin, par des applications à certaines courbes connues, par l'exposé de nouvelles propriétés générales qui se présentent dans les mouvements plans, par l'étude analytique du cas intéressant où un point de la figure décrit une ligne droite, et par quelques propositions sur les aires des roulettes.

Lorsque je suis parvenu aux résultats qui servent de base à tout ce travail, je n'avais lu sur la question qui m'occupe que ce qui se trouve dans certains traités élémentaires. J'ai reconnu depuis que le même sujet avait occupé plusieurs géomètres. Lahire, par exemple, a reconnu l'existence du cercle que j'appelle cercle d'inflexion, bien qu'il ait commis quelques erreurs à ce sujet. J'ai eu ensuite connaissance d'un mémoire de M. Bresse, inséré dans le Journal de l'École polytechnique, et où la question des mouvements plans est envisagée d'une manière nouvelle : j'en ai profité pour perfectionner quelques points de mon travail.

Enfin, je n'ai pu lire que très-récemment le remarquable mémoire que M. Lamarle a publié sur la même question dans les Bulletins de l'Académie : tout y est ramené à des considérations d'une entière simplicité.

J'ose espérer, toutefois, que mes propres études ne seront pas tout à fait dénuées d'intérêt, même après celles de ces savants géomètres, et que j'aurai apporté, du moins en certains points, quelque perfectionnement à cette théorie. L'Académie aura égard, d'ailleurs, à la difficulté de rencontrer des résultats dignes d'attention dans une question déjà si profondément étudiée.

RECHERCHES

SUR

LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES

DES

MOUVEMENTS PLANS.

S 1.- Propositions connues sur le déplacement d'une figure
dans un plan.

M. Chasles a démontré depuis longtemps la proposition suivante :

Une figure plane peut être amenée d'une position à une autre quelconque, dans un plan, par une simple rotation autour d'un point fixe de ce plan. La démonstration peut se faire très-simplement comme il suit :

=

(Fig. 1.) Soit M un point de la figure dans sa première position, M' la seconde position de ce point, et M'M" la seconde position de la droite qui était en MM' dans la première position de la figure. Par les points M, M', M" passe une circonférence, soit O son centre on a MO M'O-M'O, et MOM' = M'OM", donc évidemment une rotation égale à MOM' autour du centre O amènera MM' sur M'M", et par conséquent toute la figure, liée invariablement à MM', passera de la première position à la seconde. C. Q. F. D.

On voit, de plus, que la droite MM', dans ce déplacement, a tourné autour du point M d'un angle égal à la rotation de la figure autour du point 0, et comme le point M est pris arbitrairement sur la figure mobile, il en résulte que lorsqu'une figure passe d'une position à une autre dans un plan, l'angle

qu'elle décrit autour d'un de ses points en même temps que ce point se transporte de sa première à sa seconde position, est de même grandeur et de même sens, quel que soit ce point.

C'est ce que nous appellerons désormais simplement la rotation de la figure autour de ce point.

Considérons la seconde position de la figure comme se rapprochant indéfiniment de la première : ce qui précède subsiste, et le centre de rotation O tend vers une position-limite que l'on appelle le centre instantané de rotation de la figure mobile, dans la première position.

De plus, MM' a pour limite la tangente à la trajectoire que décrit le point M dans le mouvement réel de la figure, MO a pour limite la droite qui joint le centre instantané de rotation au point M, et comme l'angle M'MO a évidemment pour limite un angle droit, on en conclut :

Dans le mouvement continu d'une figure plane, les normales aux trajectoires de ses différents points, à un même instant, passent toutes par un même point, qui est le centre instantané de rotation pour cette position de la figure.

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De ce théorème on déduit facilement les règles suivantes pour déterminer la position du centre instantané dans une position donnée de la figure :

Si un point de la figure mobile est assujetti à décrire une courbe dans le plan, la normale à cette courbe, menée par le point mobile, passe au centre

instantané.

Si une courbe invariablement liée à la figure mobile est assujettie à rester constamment tangente à une courbe fixe donnée, la normale aux deux courbes menée par le point de contact passe au centre instantané.

Si elle est assujettie à passer constamment par un point fixe, sa normale en ce point passe au centre instantané.

Enfin, on sait depuis longtemps que :

Tout déplacement continu d'une figure dans un plan peut être produit en construisant la courbe qui est le lieu du centre instantané sur la figure mobile,

en la liant invariablement à cette figure, et la faisant rouler ensuite sur la courbe qui est le lieu des positions du centre instantané dans le plan. Le point de contact des deux courbes est, à chaque instant, le centre instantané de rotation.

Comme nous nous représenterons souvent de cette manière le mouvement d'une figure, nous donnerons à ces deux courbes les noms respectifs de courbe fixe et de courbe roulante; leur commune normale, menée par le centre instantané de rotation, sera la normale commune.

$3. Remarques.

Si l'on considère comme fixe la courbe que l'on regardait d'abord comme roulante, tandis que la courbe primitivement fixe roulera sur elle en emportant le plan dans son mouvement, il est clair que le mouvement relatif de la figure et du plan restera le même; en sorte qu'un point fixe M de la figure trace sur le plan mobile la même courbe que précédemment, lorsque le plan était fixe et le point M mobile. D'ailleurs, le centre instantané est toujours au point de contact des deux courbes sa position est donc la même dans les deux cas.

Ce mode de description inverse d'une même courbe a été indiqué par M. Chasles: or, on peut en déduire des démonstrations très-simples de deux des propositions qui précèdent.

Considérons une courbe invariable assujettie à passer constamment par un point fixe. Renversons les mouvements: le point devenu mobile décrira la courbe devenue fixe, donc la normale à la courbe mobile menée par le point fixe, passe au centre instantané. De même, l'intersection M de deux positions infiniment voisines d'une courbe mobile a pour limite un point de l'enveloppe de cette courbe mobile dans le plan renversons les mouvements, le point M du plan devenu mobile occupera deux positions infiniment voisines sur la courbe devenue fixe; le point-limite du point M décrit donc une trajectoire tangente à cette courbe, donc la normale à cette dernière, au point de contact, passe au centre instantané, ce qui renferme une des propositions précédentes.

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