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destinée et vota la mort. Cepen~ dant, les inimitiés qui existaient contre lui devenaient de jour en jour plus vives, Un de ses collègues, nommé Gasparin, le dénonça comme royaliste; cette accusation absurde fut aisément repoussée, et Brissot ne perdit point la confiance de son parti. Ce parti était en majorité; mais il se laissait éblouir par des succès de tribune, et semblait ne pas s'apercevoir des progrès et de la consistance du parti qui siégeait à la partie la plus élevée de la salle de la convention, et qui fut désigné sous le nom de la Montagne. Brissot s'occupait de la situation de la république, relativement aux puissances étrangères. Il fit le rapport sur les actes d'hostilité que l'Angleterre avait commis contre la France, ce qui entraîna la déclaration de guerre contre cette puissance et contre la Hollande. Ses professions de foi républicaines, ses rapports, ses discours où respirait le plus ardent patriotisme, rien n'affaiblissait la haine de ses ennemis. On lui attribuait faussement une lettre é crite à l'ancien intendant de la liste civile; on dénonçait comme criminelles ses anciennes liaisons avec Dumouriez, et même avec M. de La Fayette. Les deux partis, toujours en présence, en étaient venus à un tel point d'exaspération, qu'un déchirement devenait inévitable. Les jacobins, battus à la tribune, s'assuraient des masses, et préparaient une journée décisive. Elle arriva le 31 mai, et ce fut

pour la première fois que, dans le sein de l'assemblée, la force matérielle créa le pouvoir

d'un parti. Dès lors, il fut aisé de prévoir le règne de la terreur, et l'ajournement indéfini de la vraie liberté. Le 2 juin 1793, un décret d'arrestation fut lancé contre Brissot. Il restait calme, et ne voulait rien faire pour éviter la mort à laquelle il était résigné depuis long-temps. Il fallut les plus vives instances de l'amitié, pour qu'il se décidât à se diriger vers la Suisse, muni d'un passe-port de négociant. Arrêté à Moulins, il écrivit à la convention bien plus pour manifester ses sentimens, que dans l'espoir de la justice. Sa fermeté ne se démentit pas un seul moment. Ramené à Paris, détenu à la Force, décrété d'accusation le 3 octobre, il fut traduit, ainsi que vingt de ses collègues, devant le tribunal révolutionnaire. La haine, la vengeance, la proscription, présidaient à ce tribunal de sang, devant lequel toute défense était illusoire, toute justice était méconnue. Brissot parla avec une tranquillité remarquable, et beaucoup d'élévation. La sérénité de son front ne fut altérée ni quand il entendit son arrêt, ni aux approches du supplice. Il témoigna seulement le regret d'avoir commis quelques erreurs dans sa carrière politique, et de laisser sa famille dans le dénâment. Il était âgé de 40 ans lorsqu'il périt. Brissot fut encore calomnié après sa mort; mais en l'an 4, le conseil des cinq-cents prit une résolution solennelle qui vengea sa mémoire, et qui est la plus forte réponse qui puisse être faite à ses détracteurs. Cette assemblée, sur le rapport de Bailleul, accorda à la veuve de Brissot un se

cours annuel de 2,000 livres. Brissot aimait sincèrement la I berté: toutes ses pensées, tous ses efforts, tendaient à l'établir en France; mais n'étant averti par aucune expérience, il se livra, comme tant d'autres, à de séduisantes illusions qui ne devaient point se réaliser. Il voulait la république: utopie des âmes fortes, et que la corruption de la vieille Europe ne permettra peut-être jamais. Heureux s'il n'eût point quitté le nouveau-monde, s'il fût resté citoyen de cette grande et vraie république, où la liberté, qui est dans les mœurs comme dans les lois, s'appuie sur l'intérêt de tous, sur la justice, la raison et l'humanité !

BRISSOT - THIVARS (LOUISSATURNIN), neveu du précédent, est né en 1792. Il a fait en qualité de payeur la campagne de Russie. Pendant les cent jours, il a organisé à Rouen une compagnie de gardes nationales à cheval. Après la seconde restauration, son père,qui était payeur-général dans cette ville, fut destitué. Pour lui, il fut obligé de quitter la France en 1816. Réfugié à Bruxelles, il travailla au Mercure surveillant, puis au Libéral, et il fonda ensuite le Constitutionnel d'Anvers. Le gouvernement des Pays Bas avait pris un arrêté qui imposait sur les bâtimens arrivant dans l'Escaut, des droits onéreux qu'on ne payait pas dans les ports de la Hollande. Le commerce de la Belgique, et particulièrement celui d'Anvers, firent à ce sujet de vives réclamations, qui furent d'abord repoussées. M. Brissot-Thivars embrassa la cause des Belges,

et parvint à faire rapporter cet arrêté. Peu de temps après, un négociant étant mort dans les prisons, victime des violences que la régie des impôts indirects lui avait fait éprouver, M. BrissotThivars prit de nouveau la défense du commerce. Alors il lui fut enjoint de quitter les PaysBas. Il y resta caché pendant sept à huit mois, continuant à écrire dans le Constitutionnel d'Anvers; mais les recherches devenant plus actives, il rentra en France. Lorsqu'on imagina qu'un coup de pistolet avait été tiré sur le général Wellington, M. Brissot-Thivars fut arrêté et mis en jugement, comme atteint et convaincu d'avoir publié une brochure dans laquelle il avait abordé le premier la question du rappel des bannis. Il rédigea ensuite, de concert avec M. Chatelain, auteur du Paysan et du Gentilhomme, le nouvel Homme gris, feuille périodique qui eut beaucoup de succès. Il est maintenant à la tête d'un établissement connu sous le nom de librairie constitutionnelle. On a de lui: le Guide électoral, ou biographie politique et législative des députés, depuis 1814 jusqu'en 1819 inclusivement, 2 vol. in-8°, première et deuxième années.

BRIZARD (JEAN-BAPTISTE, BRITARD dit), l'un des meilleurs acteurs tragiques dont s'honore le théâtre français, fut d'abord peintre; il était élève de Carle Vanloo. Mais il abandonna bientôt la peinture pour cultiver l'art théâtral. Un événement malheureux dont il faillit être victime, fit une grande impression sur son esprit. Il voyageait sur le Rhône:

la petite barque qui le portait chavira; il saisit un anneau de fer des piles du pont, resta ainsi suspendu en attendant du secours, et sa frayeur fut telle, que ses cheveux blanchirent long temps avant l'âge. Ces cheveux blancs, qui ajoutaient à l'expression d'une figure noble, calme et mélancolique, portèrent souvent à un haut degré l'illusion de la scène. De l'intelligence, plus de pathétique que de chaleur peutêtre, mais toujours de la dignité, mais toujours l'expression noble et simple des affections tendres; tels sont à peu près les caractères de cet acteur qui remplaça le fameux Sarazin et qui le fit oublier. Le vieil Horace de Corneille, le roi Léar de Ducis, et Henri IV, dans la Partie de chasse, de Collé, étaient ses triomphes. Brizard, qui était né à Orléans, le 7 avril 1721, mourut à Paris, le 30 janvier 1791. Ducis, dont il avait senti et si bien fait sentir le génie, en parle ainsi dans une note insérée dans la Gazette de France, le 11 octobre 1814. « Brizard, acteur célèbre, homme simple et touchant de bonté, bon mari, bon père, bon citoyen. C'était, sur la scène, le vieil Horace, don Diegue, Burrhus et Narbas vivans. La nature lui avait accordé une heureuse et noble figure, la tête la plus paternelle, ornée de boune heure des plus beaux cheveux blancs. Quand il disait, dans le Roi Léar: Je fus père, on fondait en larmes. Je le tiens de La Harpe. On disait dans Paris: 4lons voir le roi Brizard. Quand il criait: Mes enfans! dans Montaigu; Cytheron! dans OEdipe;

Les ingrats! dans Léar; il déchirait l'âme,» Il n'y a rien à ajoufer à cet éloge.

BRIZARD (GABRIEL), s'est fait passer pour abbé, et a profité sans scrupule des avantages du petitcollet, à une époque où ce costume conduisait à tout. Les ecclésiastiques ne lui reprochèrent point cet envahissement de leurs droits, sans doute en faveur d'un beau traité historique où il s'efforça d'excuser l'horrible journée de la SaintBarthélemy. Brizard, au lieu d'imiter ce bon abbé de Caveyrac qui avait franchement soutenu la légalité du massacre, en rejeta perfidement le blâme et la honte sur l'esprit du siècle, l'influence des étrangers, et ce qu'il appelle le Délire universel de l'Europe. Son ouvrage (Paris, 1790, deux parties in-8°) fut publié très-peu de temps après la représentation de Charles LX, de Chénier. Une telle insulte aux opinions qui régnaient alors, et à toute vérité historique, ne fut cependant suivie, et il faut le dire à la louange des hommes de cette époque si souvent calomniés, d'aucune persécution et d'aucune vengeance. D'abord attaché au parti philosophique, Brizard avait vécu dans la société des gens de lettres, qui dirigeaient ou suivaient dans sa marche rapide la révolution naissante. Un éloge hardi et spirituel de l'abbé de Mably, éloge qui partagea, avec celui de Lévêque, le prix décerné par l'académie des belles-lettres, avait mis le sceau à sa réputation littéraire que plusieurs bons ouvrages avaient commencée. Le fameux généalogiste et juge d'armes d'Hozier de Séri

gny, a composé un petit ouvrage tout exprès pour prouver que l'Histoire généalogique de la maison de Beaumont, en Dauphiné, par Brizard (Paris, de l'imprimerie du cabinet du roi, 2 vol. infol.), est l'un des meilleurs ou »vrages historiques que possède >> la littérature moderne.» Quelque imposante que soit une telle autorité, il est permis de croire qu'un style assez pur et une marche sage ne suffisent pas pour .constituer un chef-d'oeuvre historique. La force de la pensée, l'intérêt puissant de l'action, et le choix du sujet, sont aussi nécessaires; et les annales de quelques évêques et de quelques intendans de provinces étaient peu faites pour inspirer l'intérêt et soutenir l'attention. Parmi les autres ouvrages de Brizard, on distingue deux lettres adressées aux notables (1787); une Notice sur l'abbé de Saint-Non, et une Analyse du Voyage de Sicile et de Naples, dont ce dernier était auteur (1787); une dissertation fort curieuse sur l'Amour de Henri IV pour les lettres (1785), et un Éloge de Charles V, roi de France (1768). Peu d'énergie dans l'âme et dans la pensée, a laissé une trace de mollesse et de langueur dans les écrits de Brizard, qui cependant cherchait assez souvent l'effet académique. et trouvait quelquefois, si ce n'est la beauté, du moins l'éclat de l'expression. Son éloge de Mably commence d'une manière singulière : « Non, »> notre siècle n'est point la lie des »> siècles, etc., etc.» Plutôt rhéteur qu'éloquent, Brizard se trouve déjà confondu parmi les écrivains

dont les recueils biographiques garderont seuls le souvenir. Il naquit vers 1730, et mourut en 1793.

BRIZE-FRADIN, né en 1767, à Liége, estauteurde la Loi physique appliquée à l'artillerie de la marine, in-8° (1811), et de la Chimie pneumatique appliquée aux travaux sous l'eau, in-8° (1811). Dans ce dernier ouvrage, il indique le moyen de secourir les personnes submergées sous la glace.

BRO (LOUIS), officier de la légion-d'honneur, né à Paris, le 17 août 1781, est fils d'un notaire de cette ville. A l'âge de 16 ans, il s'embarque à Toulon pour rejoindre l'expédition d'Egypte, mais les croisières anglaises le forcent de rentrer. Il s'engage comme simple bussard (1er régiment), et part avec l'expédition de Saint-Domingue, sous les ordres du général Leclerc. Il était lieutenant, lorsqu'il fut pris le 7 frimaire an 12, par les Anglais, à l'évacuation du Cap, et renvoyé en France par suite de blessures graves. Il fait les campagnes d'Autriche en 1805, et de Prusse et de Pologne, en 1806 et 1807. Capitaine aidede-camp du maréchal Augereau, il passe, après la bataille d'Eylau, aume de hussards, et fait les campagnes de Friedland et de Wagram. Blessé à cette dernière bataille, il devient, en 1811, chef d'escadron au e de hussards, pour être employé comme capilaine aux chasseurs à cheval de la garde à la grande-armée, dont il partage les travaux en 1812 et en 1813. Nommé major, il commande successivement diverscorps de

cavalerie, notamment sous le général Pajol au combat de Montereau, où il est nommé officier de la légion d'honneur. Colonel par décret du 5 avril 1814 daté de Fontainebleau, il prend, en cette qualité, le 26 avril 1815, le commandement du 4 de lanciers. Grièvement blessé de plusieurs coups de sabre, en attaquant la gauche anglaise, le 18 juin, il est forcé de remettre ce commandement; le 9 juillet, il passe la Loire, et est licencié avec l'armée. Il est aujourd'hui en non activité, et ne touche que le traitement de lieutenant-colonel.

BROCCHI (JEAN-BAPTISTE), savant géologue et minéralogiste italien, fut nommé inspecteur des mines du royaume d'Italie. Il est auteur de plusieurs ouvrages, parmi lesquels on distingue son Traité sur les mines de fer du département de la Mella (le Bressan); son mémoire Sulla Valle di Fassa, (en Tyrol) qui, par les matières renfermées dans son sol, présente à l'étude de la géologie et de la minéralogie des avantages précieux; cette partie du Tyrol se trouvait réunie au royaume d'Italie, à l'époque où parut l'ouvrage, en 1811. A la suite de quelques autres opus cules, M. Brocchi à publié, en 1814: Conchigliolagia fossile subapennina con osservazioni geologiche sugli Apennini e sul suolo adjacente, Milan, 2 vol. in-4°.

BROCHANT DE VILLIERS (A. J. M.), minéralogiste distingué, membre de l'institut, et ingénieur des mines, est né à Paris vers 1774. Après avoir été élève de l'école des mines, il voyagea en Allemagne en 1797 et 1798, et

acheva ses études dans cette science, à Freyberg en Saxe, sous le célèbre géologue Werner. Vers 1804, il fut nommé professeur à l'école des mines de Pezai, et en 1815, à celle de Paris. L'année suivante, l'institut l'appela dans son sein, pour remplir la place vacante, par la mort du minéralogiste Duhamel, à l'académie des sciences, section de minéralogie. Les principaux ouvrages de M. Brochant sont: 1° Traité élémentaire de minéralogie, suivant les principes du professeur Werner, 1801 et1802, 2 vol. in-8°, et 1808, deuxième édition. Ce livre est cité très-honorablement dans le rapport fait à l'institut sur les progrès des sciences, au nom de la classe des sciences mathématiques et physiques. 2o Description géologique de la Tarantaise, en Savoie; 3° Mémoire sur les Gypses de transition. Ce mémoire a été lu à l'institut, lors de la candidature de M. Brochant. 4° En. fin il est le rédacteur en chef du Journal des mines.

BROCHET (J. E.), ancien juré au tribunal révolutionnaire, était, avant la révolution, dans les gardes de la connétablie. Membre du club des cordeliers, il y fut l'un des plus ardens apologistes de Marat; dans l'excès de son ze le, il parodia, en l'honneur de ce misérable, quelques hymnes religieux, et obtint du garde-meuble un vase d'assez grand prix pour y déposer son cœur. Brochet fit dans le même club la proposition de demander un décret d'accusation contre Brissot, et donna, lors du jugement d'Hébert, des renseignemens qui incriminaient

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