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Brissot Conventionel.

THE NEW YORK PUBLIC LIBRARY

ASTOR, LENOX

MLDEN FOUNDATIONS

à la Bastille. On allégua pour motif quelques libelles anonimes dont il n'était pas l'auteur, mais le véritable motif se trouve dans les principes de liberté qu'il professait, et dont le ministère francais redoutait la propagation. Ce motif n'était pas avoué; aussi Brissot ayant démontré qu'on lui attribuait faussement les écrits qui servaient de prétexte à sa détention, il fut mis en liberté. On lui fit promettre d'abandonner le Journal des lycées de Londres, et le lycée même qu'il voulait établir à Paris, pour mettre en rapport les savans, et surtout les publicistes des diverses parties de l'Europe. Ces vexations multipliées, ne firent qu'a

à 1786, il publia les dix volumes de la Bibliothéque philosophique sur les lois criminelles. Ces recherches et ces travaux ne suffisaient pas à l'activité de son esprit; il s'occupait aussi des sciences naturelles. La métaphysique même, que nous nommons aujourd'huiidéologie, eut part à ses méditations. Son ouvrage intitulé: De la Vérité, ou Méditation sur les moyens de parvenir à la vérité dans toutes les connaissances humaines (in-8°, 1782), fut bien reçu en Angleterre, et jugé diversement en France. Quelques critiques, d'une bonne foi suspecte, ne lui pardonnèrent pas d'avoir indiqué le témoignage des sens pour moyen général de discerner le vrai. Le continuateur de Fré-jouter à son aversion pour l'arbiron le traita même d'écrivain séditieux, injure banale que les partisans de l'erreur ont adressée dans tous les temps aux amis de la vérité. Ce fut aussi en 1782, que Brissot entreprit à Londres sa Correspondance universelle sur ce qui concerne le bonheur des hommes et de la société. Le but de cet ouvrage périodique était de répandre en France des principes politiques avoués par la raison. Il fut saisi, et cet acte despotique occasiona à l'auteur une perte assez considérable. Son zèle n'en fut point refroidi: son Tableau des sciences et des arts de l'Angleterre fut suivi presque immédiatement de celui de la Situation des Anglais dans les Indes orientales, et de l'état de l'Inde, d'après le rapport du comité de la chambre des communes, etc. (in-8°, 1784, 1785). Étant revenu en France, Brissot fut mis

traire. Dès 1785, à l'occasion des mouvemens de la Valachie, il publia deux lettres à Joseph II, sur le droit d'émigration, et sur le droit d'insurrection. Il prétendait que les peuples qui ne jouissent d'aucun droit, ne sont liés par aucun devoir envers leurs oppresseurs, et qu'en conséquence les habitans de la Valachie avaient le droit de se soustraire au joug ignominieux des Turcs. Chaque année, Brissot faisait paraître un nouvel ouvrage; athlète infatigable, il ne cessait de combattre en faveur de la raison. En 1786, il publia ses Lettres philosophiques sur l'histoire d'Angleterre (2 vol. in-8°), et un Examen du Voyage du marquis de Chastellux, dans l'Amérique septentrionale (1 vol. in-8°). Cet examen était une déclaration de guerre contre l'aristocratie. L'affranchissement de la patrie de Washington, modifia l'o

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pinion de Brissot sur la constitution de l'Angleterre; il lui préférait hautement la constitution fédérale, et les constitutions particulières des États-Unis. Il publia, en 1787, un ouvrage sous le titre: De la France et des EtatsUnis, ou de l'Importance de la révolution de l'Amérique pour le bonheur de la France (1 vol. in-8°). Cette production, généralement estimée, fut traduite en anglais, et il s'en fit plusieurs é ditions, soit à Londres, soit dans les États-Unis. Ce fut vers cette époque que s'organisa la Société des amis des Noirs, dont il fut Fun des fondateurs et l'un des membres les plus actifs. Il n'a cessé de réclamer l'émancipation des malheureux Africains, et l'abolition de la traite. On lui attribua dans le temps une brochure sans nom, ayant pour titre: Point de banqueroute, ou Lettre à un créancier de l'état. Mais quel ques personnes, dont l'autorité est respectable, en font honneur à Clavière. Quoi qu'il en soit, elle était dirigée contre les intentions qu'on supposait à l'arche vêque de Sens (Loménie), et elle valut une lettre-de-cachet à celui qui en était regardé comme l'auteur. Brissot se réfugia en Angleterre, d'où il passa bientôt aux Etats-Unis. Il songeait à s'établir dans cette naissante république, assez peu civilisée pour ne pas confier à des prêtres le soin de son gouvernement, et pour ignorer les lettres-de-cachet, lorsque les événemens de 1789 rappele rent l'écrivain fugitif dans sa patrie. Peu après son arrivée, il publia un Plan de conduite pour les

députés du peuple. Nommé mem.. bre du premier conseil municipal de la ville de Paris, le 14 juillet, il reçut en cette qualité les clefs de la Bastille. Il fut dans la suite président du comité des recherches de cette même municipalité; place qui lui suscita de dangereuses et violentes inimitiés. Il avait entrepris, au commencement de la révolution, un journal intitulé Le Patriote francais.. Ce journal, consacré au dévelop→ pement et à la défense des principes de la liberté, ne s'écarta jamais de son but, et resta constamment fidèle à la cause nationale. L'auteur, malgré les accu→ sations mensongères de ses ennemis, était respecté comme au homme rempli de lumières, de probité et de patriotisme. Lorsque l'assemblée constituante eut terminé ses travaux, et qu'il fut question d'élire les députés à l'assemblée législative, Brissot fut désigné candidat, et obtint les suffrages des électeurs de Paris. Ici commence pour lui une carrière toujours pénible et souvent glorieuse par la nature de ses principes et par son caractère, il se trouva dans le rang des hommes qui regardaient l'émigration et les tentatives des réfugiés de Coblentz pour soulever l'Europe contre leur patrie, comme un crime digne de la vengeance des lois. Convaincu que les ministres de Louis XVI conspiraient, sans doute en le trompant, contre les droits de la nation, et qu'il exis tait dans l'intérieur une faction toujours prête à renverser les nouvelles institutions, il combat tit les divers ministères, jusqu'àá

celui de Roland. Cependant, la première coalition était formée; elle paraissait inévitable, et il ne voulait pas que la France fût prise au dépourvu. Le discours qu'il prononça à ce sujet est très-distingué par l'énergie et par l'étendue des vues politiques. Il est remarquable que Robespierre s'éleva hautement contre la propositión de Brissot; ce fut là le premier acte d'une hostilité, que la mort seule put satisfaire. Brissot s'était lui-même séparé, ainsi que le parti connu sous le nom de girondin, des constitutionnels, dont M. de La Fayette était le chef, et qui voulaient maintenir la monarchie sur les bases posées par l'assemblée constituante. Ceuxci pressentaient les sanglantes catastrophes qui devaient suivre le renversement de la constitution. Les girondins, plus confians ou plus aveugles, se reposaient sur la sincérité de leur patriotisme, sur la pureté de leurs intentions, et ne voyaient pas que la génération, d'abord élevée sous le despotisme et corrompuc par l'aristocratie, ne pouvait encore distinguer la liberté de la licence. Ils croyaient la république possible, et ils ont été peut-être les seuls véritables républicains. Ainst disposés, ils applaudirent à la journée du 10 août, dont ils étaient loin de prévoir toutes les conséquences. Brissot avait été nommé membre de la convention par le département d'Eure-etLoir. Les crimes de septembre lui inspirèrent, ainsi qu'à ses amis, une juste horreur; et il ne cessa de provoquer contre leurs auteurs la sévérité des lois. Ge fut

à cette époque que la convention se trouva partagée entre les jaco bins et les girondins, qui protestaient également de leur attachement à la république, et qui s'ac cusaient tour à tour de vouloir la renverser. Brissot se distingua dans cette lutte par sa fermeté, et l'ascendant que lui donnaient sa réputation de publiciste et son talent d'écrivain. Il faut avouer que le parti de la Gironde, supérieur à ses adversaires par l'élo quence de la tribune et le respect des lois, ne l'égalait ni en 'audace, ni en activité, ni en prévoyance. Un mouvement terrible était imprimé à la nation; ceux qui voulaient le ralentir, devaient succomber devant les hommes qui s'efforçaient d'en accroître la rapidité. Nulle transaction ne pouvait alors être possible, entre un passé irrévocable et un présent qui venait d'écloré au milieų des tempêtes. Les girondins parlaient d'humanité et de justice! les jacobins invoquaient les passions, et faisaient de la vengeance une divinité populaire; leur triomphe était assuré. Ils forcerent les girondins de donner à la révolution ce qu'ils regardaient comme sa plus forte garantie, le supplice d'un roi. C'était un abînie entre la république et l'Europe monarchique. La Gironde recula un moment devant cette effrayante perspective; mais elle fut entraînée, soit par la force des choses, soit par sa propre faiblesse, et le malheureux Louis XVI fut la victime dévouée aux dieux infernaux. Brissot vota l'appel au peuple; cette mesure une fois rejetée, il s'abandonna à sa

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