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un rang plus honorable et une renommée plus flatteuse. La politique vint l'arracher à ces douces occupations. Il fut bientôt membre du conseil commun, député aux communes, alderman et shériff. Il soutint avec une grande énergie de paroles, les projets du ministère; mais quand l'Angleterre se vit menacée d'une invasion, il ne songea plus qu'aux intérêts de sa patrie, et il provoqua le premier la formation des milices bourgeoises. Remarquons en passant la singularité de ces Anglais ministériels, qui ne croient pas devoir appeler les baïonnettes ennemies comme auxiliaires dans leurs combats parlementaires. M. Birch a fait imprimer, ou, tre ses poésies, quelques discours politiques, et un volume de pensées, intitulé: Consilia.

BIRON (ARMAND-LOUIS DE GONTAUT, d'abord DUC De Lauzun, ensuite DUC DE), était bien digne de ces deux noms, que la gloire et l'amour ont consacrés dans notre histoire. Une belle figure, beaucoup d'esprit et d'instruction, une grâce et une affabilité particulières, une grande générosité et une valeur à toute é preuve, tant d'avantages réunis à celui d'une naissance illustre, que l'on prisait tant alors, assurèrent au duc de Lauzun les plus brillans succès à la cour et à la ville. Marié de bonne heure, suivant l'usage des grandes maisons, à une femme qu'on lui donna et qu'il ne put aimer, il entreprit de longs voyages pour se soustraire à une chaîne qui lui parut trop pesante. Le jeune Lauzun se crut encore garçon, quand il fut loin

de sa femme; l'Angleterre, la Pologne et la Russie, qu'il parcourut successivement, furent témoins de son indépendance conjugale, et conservent au moins le souvenir des qualités aimables, de la galanterie chevaleresque et de tous les moyens de plaire qui· peuvent lui servir d'excuse. Il paya cher les frais de cette gloire frivole; et s'il mit fin à beaucoup d'aventures, il mit fin aussi à sa fortune. Enfin, en 1777, le duc de Lauzun se trouva réduit à prendre un parti très-philosophique. Fatigué d'expédiens, et privé par son mariage de l'espoir d'avoir des héritiers, il abandonna au prince de Guémenée toute sa fortune pour une rente viagè→ re de 80,000 francs. Mais le prince fit banqueroute, et le revenu du duc fut réduit de plus de moitié. A cette époque, en 1778, la guerre d'Amérique appela le duc de Lauzun sous les drapeaux de l'indépendance, et attacha son nom à celui de La Fayette. Cette diversion, qui fut grande dans les intérêts de la cour, le fut également dans le caractère de M. de Lauzun. Son âme ardente, généreuse, son esprit rapide et élevé, se passionnèrent bientôt pour cette religion primitive que le nouveau monde rendait à l'ancien, et il se dévoua tout entier à la liberté, dont sa bravoure illustrait et affermissait la cause en Amérique. Cinq ans après son retour en France, en 1788, à l'aurore de la révolution, mourut son oncle le maréchal de Biron, colonel du régiment des gardes-françaises. Le duc de Lauzun prit alors le titre de duc de Biron, que

son père, encore vivant, ne voulut point porter, parce qu'il vivait loin du monde. Ici commencent les erreurs de la Biographie universelle: les unes sont innocentes, c'est affaire d'ignorance; les autres sont calomnieuses, c'est affaire de parti. Nous soumettons aux contemporains, qui ont de la mémoire et de la conscience, la réfutation des assertions mensongères des auteurs de cet ouvrage. Il est faux que l'amour de l'armée désignait le duc de Biron pour successeur de son respectable oncle dans le beau poste de colonel du régiment des gardes, et que les mauvaises impres sions que le dérangement de ses affaires avait données, l'emportèrent sur l'intérêt général qu'il inspirait. D'abord à cette époque, l'armée, qui n'était pas encore dans la nation, et qui n'avait pas fait la guerre d'Amérique avec le duc de Lauzun, ne désignait ni lui ni personne. Ensuite il était d'usage, et presque de droit, que le colonel du régiment du roi, qui, comme celui des gardes, était toujours un officier-général, passât, en cas de vacance, au commandement de celui des gardes - fançaises. Ainsi le duc de Lauzun, qui venait d'être nommé maréchal-de-camp, et qui était colonel propriétaire d'un régiment de hussards de son nom, ne fut point blessé de voir le duc du Châtelet, vieux lieutenant - général, colonel du régiment du roi, remplacer le maréchal de Biron à celui des gardesfrançaises. Voici pour l'ignorance; passons à la calomnie. Les auleurs de la Biographie universel

le concluent ainsi : par ressentiment de ce passe-droit, que méritait peut-être son attachement inconsidéré pour le trop fameux duc d'Orléans, ou dans des espérances de fortune plus blâmables encore, il est pénible d'être forcé de dire que le noble et généreux duc de Lauzun ternit son premier nom, etc., etc..... Les procédures du Châtelet l'accusèrent d'avoir paru à côté de ce prince (du duc d'Orléans), au milieu des assassins, dans la nuit des 5 et 6 octobre 1789. Les auteurs de la Biographie nouvelle des Contemporains réfutent ainsi ces louanges perfides, et ces odieuses assertions. Le passe-droit eût été pour le duc du Châtelet, si le duc de Lauzun avait eu le commandement du régiment des gardes-françaises. Celui-ci ne pouvait avoir de ressentiment contre la cour, pour n'avoir pas obtenu ce qui ne lui appartenait pas; et la nomination du duc du Châtelet ne pouvait par conséquent avoir aucune influence sur la conduite politique du duc de Biron, soit dans l'assemblée constituante, dont il était membre, soit dans l'armée. Quant à l'attachement du duc de Biron pour le duc d'Orléans, il ne pouvait être inconsidéré en 1788, année qui a précédé celle où le duc d'Orléans a été trop fameux. La liaison du duc d'Orléans et du duc de Lauzun datait de leur entrée dans le monde. Ils étaient du même âge; et une similitude de goûts, d'habitudes et d'opinions rendit cette liaison familière. A la révolution elle devint plus intime par la position du prince; et il est vrai

de dire que le duc de Lauzun est presque le seul de ses amis particuliers qui ne se soit pas éloigné de lui à cette époque. C'est peutêtre à cette intimité, qui durait depuis vingt ans, que font allusion ces espérances de fortune plus blámables encore, que la Biographie universelle suppose au noble et généreux duc de Lauzun. Il est également faux que le duc de Biron ait été impliqué dans la procédure des 5 et 6 octobre. Le Châtelet lui-même, malgré la partialité qu'il manifesta dans cette affaire, ne trouva pas de prétexte pour l'inculper, et ne sollicita pas de décret contre lui. Mais il est vrai que dans la discussion qui eut lieu dans l'assemblée nationale, sur cette procédure, le duc de Biron défendit avec chaleur le duc d'Orléans, son ami, et s'efforça de prouver la fausseté des imputations faites à ce prince. Cette même année, le duc de Biron fut nommé commandant en Corse, où il avait servi en 1769, sous les ordres du maréchal de Vaux; mais il se réserva de demander l'agrément de l'assemblée, dont il était membre. Celleci, qui crut voir dans cette nomination le dessein d'éloigner de son sein les officiers - généraux qui siégeaientau côté gauche, prit une décision qui défendait aux députés d'accepter aucune place du gouvernement. Cette théorie ne paraît pas héréditaire dans les assemblées qui ont suivi la première. A la fin de juin 1791, le duc de Biron fut envoyé comme commissaire de l'assemblée constituante, dans les départemens du Nord, pour faire prêter aux trou

T. HI.

pes le serment prescrit par elle, au moment de la fuite du roi et de son arrestation à Varennes. Il revint ensuite reprendre sa place à l'assemblée, où il continua de siéger jusqu'au 30 septembre 1791, époque de sa dissolution. Il se rendit alors à Valenciennes, où il prit le commandement du département du Nord, sous le maréchal de Rochambeau. Au mois de janvier 1792, le duc de Biron partit avec MM. de Talleyrand et de Chauvelin pour Londres, où ils étaient chargés d'une mission diplomatique. M. de Chauvelin était le seul qui fût revêtu d'un caractère officiel, parce que MM. de Biron et de Talleyrand, ayant été membres de l'assemblée constituante,n'étaient point susceptibles d'occuper des emplois à la nomination du roi. Peu après l'arrivée du duc de Biron à Londres, il y fut arrêté à la requête d'un émigré très-connu, qui avait acheté des billets, souscrits quinze ans auparavant par le duc de Lauzun. C'était toujours une manière de faire la guerre aux constitutionnels. Cette arrestation n'aurait pu avoir lieu, si le duc de Biron avait eu un caractère politique publiquement établi. Cependant, comme en fait il avait une mission, le gouvernement anglais le fit relâcher sous la condition qu'il quitterait immédiatement l'Angleterre, et il revint à Valenciennes dans les premiers mois de 1792. A la fin d'avril, il commanda l'expédition destinée à s'emparer de Mons; cette expédition fut terminée par le malheureux combat de Quiévrain. Il est faux, comme le dit

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encore la Biographie universelle, à qui les détails précédens paraissent être inconnus, il est faux que le duc de Biron ait failli étre massacré à Lille, avec Théobald Dillon, après une défaite dont les soldats révoltés les accusaient. Au contraire, ce revers ne diminua pas la confiance des troupes dans le duc de Biron, dont la loyauté ne fut jamais soupçonnée par les soldats. Il continua de commander en second sous le maréchal de Rochambeau, et ensuite sous le maréchal Luckner, à l'armée du Nord. Au mois de juillet, il fut envoyé à Strasbourg pour prendre le commandement de l'armée du Rhin, qu'il quitta pour celui de l'armée du Var, où il remplaça le général Anselme. Dans l'été de 1793, il fut envoyé à l'armée de l'Ouest, où il reprit Saumur, et fit évacuer Parthenay par les Vendéens. Mais bientôt on l'accusa d'avoir fait arrêter le général Rossignol, dont le lieutenant-général Canuel était alors aide-de-camp; on demanda l'examen de sa conduite, et il fut rappelé. Le 10 juillet, il donna sa démission, se rendit à Paris, y fut arrêté et enfermé à Sainte-Pélagie, puis transféré à l'Abbaye, d'où il écrivit à la convention nationale pour être jugé sans délai. Ce désir ne fut que trop exaucé: traduit à la Conciergerie, il comparut, le 31 décembre 1793, devant le tribunal révolutionnaire, qui le condamna à mort sans désemparer. Le duc de Biron reçut son arrêt avec un calme stoïque. Mais de retour à la prison, cette philosophie reprit, un moment avant celui de perdre la vie, le carac

tère de l'insouciance épicurienne qui avait accompagné ses belles années. Il demanda des huîtres et du vin blanc. L'exécuteur entra pendant qu'il faisait ce der, nier repas: Mon ami, lui dit Biron, je suis à vous: mais lais sez-moi finir mes huitres, je ne vous ferai pas attendre longtemps. Vous devez avoir besoin de forces, au métier que vous faites; vous allez boire un verre de vin avec moi. Biron remplit le verre de l'exécuteur, celui du guichetier et le sien, but avec eux, et se rendit sur la place de l'exécution, où il subit la mort avec ce courage qui a illustré presque toutes les victimes de cette affreuse époque. Les infidélités, les injustices et les calomnies dont l'infortuné duc de Biron a été l'objet dans certaines Biographies, ont leur origine naturelle dans la haine que les émigrés et tous les privilégiés, dont depuis quelque temps ces ouvrages se sont faits les interprètes et les panégyristes, n'ont cessé de porter à ceux qui avaient embrassé la cause de la liberté, surtout quand ceux-ci, étant nobles, leur paraissaient des renégats; comme si la noblesse était la religion du pays, et l'indépendance du pays une apostasie. Tous les ennemis de la révolution, à sa première époque, ont constamment accusé d'ambition, ou d'avidité, ou de trahison, ceux qui suivirent alors les bannières nationales. Il est douloureux d'observer que de telles assertions émanées originairement des émi→ grés, ont été répétées postérieurement en France par les partisans eux-mêmes du système ré

publicain, qui forçaient l'opinion publique à confondre les constitutionnels de 1789 avec les aristocrates. Cette injustice, si remarquable sous le gouvernement impérial, l'est bien plus encore sous le gouvernement royal constitutionnel dont nous jouissons; aucun de ces gouvernemens ne s'est occupé à réhabiliter les constitutionnels, et à les faire absoudre des calomnies de toute nature, dont nous avons, au nom de la justice, de la liberté et de l'honneur national, entrepris le redressement et la réfutation. Le duc de Biron, dont la mémoire est encore inquiétée par les héritiers des maximes contre-révolutionnaires, n'avait aucune animosité personnelle contre la cour; mais dévoué à la liberté pour laquelle il avait glorieusement combattu en Amérique, il en embrassa chaudement et sincèrement la cause en France, et fit, aux principes qui l'ont fondée malgré trente années de résistance, tous les sacrifices personnels que l'on demanderait vainement à présent à ses détracteurs.

BIROTEAU (JEAN-BAPTISTE), né à Perpignan (Pyrénées-Orientales). Officier municipal de cette ville, dès le commencement de la révolution, il fut ensuite administrateur du département, jusqu'en 1792, qu'il devint membre de la convention nationale. L'un des commissaires nommés par cetté assemblée pour prendre connaissance des papiers de la commune de Paris, il dit, dans son rapport, «< qu'on avait déjà recon»nu l'innocence d'une foule de > victimes massacrées les 2 et 3

»septembre, et que les membres » de la commune et ceux du co» mité de surveillance, auteurs de »>ces attentats, devaient être pu»nis. » Il demanda que le décret rendu pour la destitution du général Montesquiou fût annulé, et vota l'impression d'une pétition faite à l'assemblée par des patriotes qui allaient volontairement rejoindre les drapeaux de l'armée républicaine. Il appuya aussi la motion de Buzot, pour la formation d'une garde départementale. Il fut envoyé, en novembre de la même année, en mission dans le département d'Eure-et-Loir, où plusieurs émeutes s'étaient élevées à l'occasion des grains, et manqua de perdre la vie en remplissant ses fonctions. Dans le compte qu'il rendit il ne dissimula point les excès auxquels on avait porté le peuple, à l'occasion de la suppression du traitement des prêtres. Lors de la mise en jugement du roi, le 3 décembre 1792, il déclara que, long-temps avant le 10 août, il avait décidé dans son cœur que Louis XVI avait mérité la mort; mais lorsqu'il dut voter sur le sort de ce prince, il demanda l'appel au peuple et le sursis, ne se prononçant pour la mort que dans le cas où l'arrêt ne devrait recevoir d'exécution qu'à la paix, et après l'expulsion de tous les membres de la famille royale. Le 19 février suivant, il parla de nouveau sur les massacres de septembre, et demanda pour la seconde fois la mise en accusation de ceux qui les avaient provoqués. Il s'éleva sans succès, dans la séance du 9 mars, contre le pro

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