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et où il resta 8 ans. M. Coray n'avait point de fortune : il eût peutêtre été forcé de renoncer à la nouvelle profession qu'il avait embrassée, si un ministre protes tant, à qui il avait enseigné la langue grecque, ne lui eût assigné une pension de 2000 francs. Dans le cours de ses études, il se lia d'amitié avec un professeur (M. Chaptal) qui, devenu ministre de l'intérieur, lui prouva bienveillance, en le proposant au premier consul comme l'un des hommes les plus capables de traduire en français, suivant les intentions du chef de l'état, l'ouvrage de Strabon. M. Coray fut, avec M. de La Portedu-Theil, chargé de ce travail, et il lui fut accordé une pension de 3000 francs qui lui a été continuée par le roi. La traduction de la Géogrophie de Strabon jouit de la plus haute estime parmi les gens de lettres; il en a déjà paru 5 vol. in-4°, imprimerie du gouvernement (le 5 vol. est de 1819); ce travail important se poursuit avec zèle, et l'on a lieu de penser que les volumes qui suivront n'auront pas moins de succès, M. Letronne, membre de l'académie des inscriptions et de la légion d'honneur, ayant succé dé à M. de La Porte-du-Theil, mort en 1820. M. Coray a publié pour la première fois en 1800, 2 vol. in-8°, un ouvrage qui jouit d'une faveur non moins méritée; c'est le Traité d'Hippocrate, des airs, des eaux et des lieux, proposé pour un des prix déce nnaux. Le rapport du jury en rendit compte en ces termes : « Les re» marques de M. Coray ont ré

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»pandu sur le traité d'Hippocrate » une clarté nouvelle. Le nombre » des passages qu'il a mieux entendus, et de ceux qu'il a resti>>tués d'un e manière satisfaisante, » est très-considérable. La sagacité de sa critique et le bonheur » de ses conjectures semblent le >> conduire souvent jusqu'à l'évi»dence. La philologie et la scien>> ce médicale répandues avec » choix et sans profusion dans ses notes, rendent la lecture de ce » traité aussi intéressante qu'ins>>tructive, etc. » Cette opinion ne fut pas celle de M. Gail, qui prétendit que sa traduction de Thucidide méritait le prix. M. Coray, loin d'ajouter au déplaisir qu'éprouvait son confrère, en répon dant à des plaintes exprimées avec peu de modération, fut même étranger à l'article du Mercure, où M. Thurot repoussa officieusement l'attaque de M. Gail. M. Coray a donné en 1816 une deuxième édition du Traité d'Hippocrate, avec une préface en gree moderne adressée aux jeunes gens de la Grèce, la Loi d'Hippocrate, et un petit traité de Gallien intitulé: Le bon médecin est aussi un philosophe; le 1a volume de cette 2e édition ne contient que le texte et la traduction française; le 2 volume, dont la publication n'est pas éloignée, renfermera le commentaire. M. Coray n'est pas seulement un savant recommandable; c'est aussi un patriote ardent. Quoique naturalisé Français et digne de cette adoption, il est resté dévoué aux lieux où il reçut le jour; rien de ce qui intéresse la liberté, la gloire, le bonheur de ses anciens compa

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çais lors de l'expédition d'Égypte. Ce morceauen grec moderne et en français, de l'imprimerie grecqne

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triotes ne lui est indifférent; il ne laisse échapper aucune occasion de leur donner des marques de son souvenir; il leur a consa-d'Égypte (Paris), 1800, in-18, est cré une Bibliothèque hellénique, composée des meilleurs ouvrages grecs avec des notes, des remarques, etc.; et dans les circonstances actuelles, pour fortifier leur courage et leur haine contre le despotisme, il a publié, aux frais des généreux Grecs et pour le bien de la Grèce, le texte seul avec un savant commentaire et des tables de la Politique d'Aristote (in-8", 1821); la préface très-étendue de cet ouvrage est un véritable traité de morale et de philosophie, analogue aux circonstances de la guerre avec les Turcs, et dans laquelle l'auteur recommande aux Grecs, entre autres choses, de repousser avec énergie les capucins, les jésuites et les ignorantins qui s'introduisent partout, et de former un clergé purement spirituel, comme le clergé russé. Cette préface est regardée comme ce que M. Coray a écrit de plus fort et de plus éloquent en politique et en morale. On lui a attribué une proclamation en grec moderne, sous le titre de la Trompette guerrière, par Atromète de Marathon, Alexandrie (Paris), in-8", 1801. Cette proclamation a été réimprimée en 1821 avec une préface et la traduction de cette préface en français. On remarque (dans une note de la proclamation) que parmi les titres fastueux dont se glorifie Je sultan est le surnom de chounkiar qui signifie sanguinaire. On avait attribué également à M. Coray un chant de guerre des Grecs qui combattaient avec les Fran

terminé par la strophe dont voici la traduction : « Les Grecs réunis » aux amis, aux défenseurs de leur »liberté, aux intrépides Français, »n'ont besoin d'aucun autre se» cours. Liés par une amitié indisso»luble, les deux peuples n'en font plus qu'un; ce ne sont plus des » Grecs ou des Français qui combat»tent pour la cause de la liberté; c'est la NATION GALLO - GRECQUE. »Tous.ensemble ils s'écrient:que »l'horrible servitude disparaisse »de la terre! que son nom même » soit à jamais anéanti! Vive la li>>berté!» Tant de zèle et de persévérance ont été dignement appré ciés. M. Goray est regardé comme l'un des principaux restaurateurs des lettres et des mœurs en Grèce. Son portrait, qui est dans toutes les écoles, et sa statue en pied, exécutée à Rome par ses compatriotes, ont fait dire à un homme qui n'a cessé d'être son détracteur, M. Codrika (Voy. ce nom): Quoi! sommes-nous des anthropolâtres (des adorateurs d'hom mes)! M. Coray a publié, en 1819, in-8°, la 2e édition d'une ode pindarique de son parent, Antoine Coray (en grec Corais), médecin, mort en 1702. Cette ode, composée en l'honneur du chancelier d'Aguesseau, que les Grecs ont surnommé le Nouvel Aristide, est accompagnée d'une préface de M. Coray, d'une traduction par M. Nicolo-Poulo, et de l'éloge du chancelier par Thomas; elle fait partie de la nouvelle édition des œuvres de d'Aguesseau,

publiée par M. Pardessus. On doit encore à M. Coray: 1° Traduction de l'allemand de la médecine clinique de Selle, 2 vol. in-8°, Montpellier, 1787; 2° Traduction de l'anglais de Black, esquisse d'une histoire de la médecine et de la chirurgie, depuis leur commencement jusqu'à nos jours, in-8°, Montpellier, 1798; 3° Traduction nouvelle avec le texte des Caractères de Théophraste, d'après un manuscrit du Vatican, contenant des additions qui n'ont point encore paru en France, in-8°, Montpellier, 1799; 4° Traduction de l'italien en grec moderne, avec des notes, du Traité des délits et des peines, de Beccaria, in-8°, 1802; 5° Longi pastoralia de Daphnide et Chloë, édition grecque dont le texte a été revu par M. Coray, Paris, Didot, 1802, in-4°; 6° édition d'Héliodore, avec des notes, 1804, 12 vol. in-8°; 7° édition toute grecque de Strabon, avec préface, notes et table, 4 vol. in-8°, Paris, 1815 à 1819.

CORBIERE (JACQUES-GUILLAUME-JOSEPH-PIERRE), avocat à Rennes, fut élu, en 1815, membre de la chambre des députés, par le département d'Ille-et-Vilaine. Depuis la convocation des états-généraux jusqu'à ce jour, l'ancienne province de Bretagne, et particulièrement la ville de Rennes a fourni aux successives assemblées législatives des orateurs d'un mérite distingué (Voir les art. LE CHAPELIER, LANJUINAIS, LA CHALotais, Keratry, etc.) Mais aucun d'eux n'avait encore émis des opinions aussi extraordinaires que celles de M. Corbière. Proposer des lois d'exception, les

soutenir et les faire adopter, ne sont là que des choses très-communes, quoique la grande majorité des Français les désapprouve et les condamne : mais il était réservé à M. de Corbière d'aller beaucoup plus loin ; il a osé désigner la classe d'hommes à laquelle ces lois d'exception devaient être appliquées exclusivement. Écoutons cet orateur dans la séance du 29 décembre 1816. « La loi, disait-il, relative aux » mesures de sûreté générale, a »>été faite pour réprimer les ten>>tatives révolutionnaires des enDnemis de l'état et du roi, et non » pas contre les amis du roi et de »l'état. Il y a véritablement tra»hison à les employer, comme >> on l'a fait contre ces derniers. » C'est-à-dire, d'après la logique de M. de Corbière, que les amis du roi ne pouvaient commettre des crimes que très-innocemment; ou plutôt, puisqu'il faut le révéler, les seuls hommes que les lois d'exception devaient atteindre, étaient comptés d'avance, et marqués à l'index. Il n'appartenait qu'à M. de Corbière de vouloir renchérir sur la trop fameuse loi d'amnistie du 12 janvier 1816. Ce fut ce député qui, le 27 décembre précédent, fit le rapport sur cette loi. Dans ce morceau, l'orateur, tout en protestant de son respect pour la déclaration du roi, datée de Cambrai le 28 juin 1815, et pour l'ordonnance du 24 juillet suivant, proposa des amendemens dans lesquels, par un raffinement cruellement étrange, il établissait de nouvelles catégories de délits politiques. « I}

fallait, disait-il, ajouter aux exceptions portées par le projet, certains genres de crimes et non des individus, parce que l'objet des lois pénales doit être de frapper

les crimes et non les hommes. » « Voilà pourquoi, ajoutait l'ora»teur, nous ne proposons que la » mise en jugement à l'égard de » ceux qui sont l'objet de notre amen» dement, et nous nous arrêtons à »l'époque du 23 mars.» Nous nous arrêtons aussi sur le compte de M. Corbière: chacun sait qu'il a soutenu et voté toutes les lois d'exception, et qu'il siége à la première section du côté droit. Est-ce en récompense de ses services, est-ce en témoignage de sa capacité, que M. de Corbière a été appelé successivement aux fonctions de président du conseil royal de l'instruction publique et à celles de ministre de l'intérieur? (1821).

CORBIERE (LE BARON PHILIP PE-CHARLES-AUGUSTE), procureur général à la cour royale de Toulouse, chevalier de la légion d'honneur, etc., est né dans le département du Tarn en 1759. Destiné au bareau par sa famille, il vint à Toulouse faire son cours de droit, sous les habiles professeurs qui illustraient alors l'université de cette ville. M. Corbière, ayant pris la licence, fut reçu avocat plaidant au parlement, et obtint peu après dans son pays une justice banerette, sorte de tribunal inférieur qui, avant la révolution, existait dans plusieurs seigneuries. Lorsque de nouvelles chances de fortune s'offrirent, après 1789, aux hommes dont les talens étaient enfouis ou repous

sés par d'injustes préjugés, M. Cor. bière embrassa avec joie une cause qui pouvait lui être favorable. Nommé officier municipal à Lavaur, en 1790, il passa bientôt au tribunal de cette ville avec le titre de commissaire du roi; puis il devint commissaire du gouvernement près le tribunal d'appel du Tarn. Il ne montra pas à cette époque beaucoup de modération dans ses opinions; il fut exalté, mais ne se rendit jamais coupable d'aucun excès. Son exaltation lui devint utile; il fut connu à Paris, et obtint dans cette capitale une place de juge au tribunal de cassation. Après le 18 brumaire, lorsque le premier consul, en donnant la constitution de l'an 8, eut saisi de ses mains vigou reuses les rênes de l'administration, M. Corbière accepta les fonc tions de commissaire du gouver nement près le tribunal d'appel de Toulouse, dont le ressort était en ce moment composé de quatre départemens. Lors de la création de la légion d'honneur, M. Corbierereçut la croix de chevalier; il prit le titre de procureur-général, fors de la formation des cours d'appel, et obtint, peu de temps après, le titre de baron de l'empire. Enfin, les cours impériales ayant été établies en 1811, M.Cor bière continua de remplir à Toulouse les fonctions de procureur général impérial. Il eut, cette époque, une querelle assez vive avec le préfet Desmousseaux. Celui-ci lui ayant écrit que la cour devait comprendre dans l'état de son mobilier les instrumens de supplice; M. Corbière s'en plaignit vertement, et le fit encore

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semoncer par les ministres. Une grande connaissance des lois, une habitude profonde des affaires, beaucoup de fermeté, une intégrité parfaite, des formes peu agréables et même acerbes parfois, distinguèrent ce magistrat. Il vit tomber avec peine un gouvernement qui avait tant fait pour lui mais il obéit au nouvel ordre des choses; et le roi, en 1814, le confirma par la charte dans l'exercice de ses fonctions. A la suitedu 20 mars 1815, M. Corbière signa l'acte aditionnel; il fut nommé, peu de jours après, membre de la chambre des représentans. Il y parut, mais il ne parla pas. La bataille de Waterloo ayant décidé le second retour des Bourbons, le duc d'Angoulême, à son arrivée à Toulouse, destitua le baron Corbière, et nomma, pour le remplacer, le baron Gary, ancien préfet de la Gironde (voy. ce nom). M. Corbière fut poursuivi avec un acharnement extrême; à Toulouse, sa vie eût été compromise; ce fut sans doute par intérêt pour lui que la police l'exila à Amiens. Ce ne fut qu'avec peine qu'il put s'affranchir d'une pareille inquisition. Rendu à la liberté, il se retira dans le département du Tarn, où plusieurs fois une forte partie de ses concitoyens a voulu l'appeler par ses suffrages au corps législatif. Le ministère a toujours cherché à l'en écarter. Lors des dernières élections du Tarn, comme on pouvait croire qu'il serait nommé député, on voulut négocier avec lui pour obtenir son désistement; mais ce magistrat inflexible répondit avec dignité au délégué chargé d'une

mission pareille: « Si le gouver»> nement me croit son ennemi, >> il ne doit point me faire rentrer » dans mes anciennes fonctions, >> comme on me le propose. Tan»> dis que maintenant je me sens >> assez fort pour servir mon pays » à la tribune, et l'état partout où »je serai employé. » De plus heureux concurrens l'ayant emportė, le baron Corbière demeura trans quille. I cultive en paix ses champs, et attend sans impatience le jour où ses concitoyens lui rendront la justice qu'il mérite.

CORBINEAU (JEAN-BAPTISTEJUVENAL, BARON), lieutenant-général, né à Marchiennes, département du Nord, le 1er août 1776. Son père, inspecteur des haras, lé destina à la carrière militaire ; et dès le commencement de la révolution, le jeune Corbineau entra au service. Sous l'empereur, il devint successivement capitaine des chasseurs de la garde impériale; chef d'escadron, après la bataille d'Eylau, où il s'était fait remarquer, et colonel du 20° régiment de dragons. Envoyé en Espagne en1808, avec le titre de général de brigade, les services qu'il rendit à la bataille de Burgos le firent nommer officier de la légiond'honneur. Employé dans la campagne d'Autriche, en 1809, il fut blessé à la bataille de Wagram, où il se distingua. Dans la campagne de Russie, en 1812, il servait sous les ordres du maréchal Gouvion-Saint-Cyr. S'étant arrêté au passage de l'Outschatz, qu'il avait l'ordre de défendre, il fut coupé dans sa retraite, mais i se vit bientôt dégagé par le corps bavarois sous les ordres

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