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commencent les proscriptions, qui ne tombent d'abord que sur les coupables, mais dans lesquelles l'erreur ou les passions particulières enveloppent bientôt l'homme juste.

Il en est temps encore, mais il n'est plus un moment à perdre que les législateurs parlent, que le peuple écoute, et que le règne de la loi s'établisse.

Quant à moi, qui brave également l'erreur et la malveillance, parce que je ne veux que le bien de tous et que je dois le faciliter par tous les moyens qui sont en mon pouvoir, j'ai consacré ma vie à la justice, à la vérité; je leur serai fidèle.

Je reste à mon poste jusqu'à la mort, si j'y suis utile et qu'on me juge tel. Je demande ma démission, et je la donne, si quelqu'un est reconnu pouvoir mieux l'occuper, ou que le silence des lois m'interdise toute action. Le ministre de l'intérieur,

Signé: ROLAND.

L'Assemblée nationale décrète que la lettre de M. Roland, ministre de l'intérieur, sera imprimée, affichée et envoyée aux quatre-vingt-trois départements, à la municipalité de Paris et aux quarante-huit sections.

Signé : HÉRAULT, président;

GOSSUIN, MARANT, DediLLez, secrétaires.

No X (Page 110).

CIRCULAIRE DE LA COMMUNE DE PARIS, DU 2 SEPTEMBRE 1792.

Frères et amis, un affreux complot tramé par la Cour, pour égorger tous les patriotes de l'empire français, complot dans lequel un grand nombre de membres de l'Assemblée nationale sont compromis, ayant réduit, le 9 du mois dernier, la Commune de Paris à la cruelle nécessité de se servir de la puissance du peuple pour sauver la nation, elle n'a rien négligé pour bien mériter de la patrie. Après les témoignages que l'Assemblée nationale venait de lui donner elle-même, eût-on pensé que dès lors de nouveaux complots se tramaient dans le silence, et qu'ils éclataient dans le moment même où l'Assemblée nationale, oubliant qu'elle venait de déclarer que la Commune de Paris avait sauvé la patrie, s'empressait de la destituer, pour prix de son brûlant civisme? A cette nouvelle, les clameurs publiques élevées de toutes parts ont fait sentir à l'Assemblée nationale la nécessité urgente de s'unir au peuple, et de rendre à la Commune, par le rapport du décret de destitution, les pouvoirs dont elle l'avait investie.

Fière de jouir de toute la plénitude de la confiance nationale qu'elle s'efforcera de mériter de plus en plus, placée au foyer de toutes les conspirations, et déterminée à périr pour le salut public, elle ne se glorifiera d'avoir rempli pleinement son devoir, que lorsqu'elle aura obtenu votre approbation qui est l'objet de tous ses vœux, et dont elle ne sera certaine qu'après que tous les dépar

:

tements auront sanctionné ses mesures pour le salut public et professant les principes de la plus parfaite égalité, n'ambitionnant d'autre privilége que celui de se présenter la première à la brèche, elle s'empressera de se soumettre au niveau de la commune la moins nombreuse de l'empire, dès qu'il n'y aura plus rien à redouter.

Prévenue que des hordes barbares s'avancent contre elle, la Commune de Paris se hâte d'informer ses frères de tous les départements qu'une partie des conspirateurs féroces détenus dans les prisons a été mise à mort par le peuple actes de justice qui lui ont paru indispensables pour retenir par la terreur les légions de traîtres renfermés dans ses murs, au moment où il allait marcher à l'ennemi; et sans doute la nation, après la longue suite de trahisons qui l'a conduite sur les bords de l'abîme, s'empressera d'adopter ce moyen si utile et si nécessaire, et tous les Français se diront comme les Parisiens: Nous marchons à l'ennemi, et nous ne laissons pas derrrière nous des brigands pour égorger nos femmes et nos enfants.

Signé DUPLAIN, PANIS, SERGENT, LENFANT,

MARAT, LEFORT, JOURDEUIL, administrateurs du Comité de salut public, constitué à la mairie.

N° XI (Page 121).

27 janvier, l'an II de l'égalité et de la république.

LE CURÉ DU GRAND-MARISY AU CITOYEN ROLAND, CI-DEVANT MINISTRE DE L'INTÉRIEUR.

C'est avec le plus grand regret que j'apprends votre retraite du ministère, où vos lumières et votre zèle vous rendoient si utile à la République naissante.

Je ne vous connois que par la correspondance que vous avez bien voulu entretenir avec moi, depuis le mois de septembre, pour seconder le désir que j'ai d'éclairer les habitants de ma paroisse; et c'est à ce seul titre que je dois à la justice et à ma patrie, de déclarer à la face de l'univers l'opinion que j'ai conçue de vous à cette

occasion.

J'ai remarqué en vous de grands talents pour l'administration dont vous étiez chargé, et surtout un zèle infatigable. Tout m'a toujours annoncé de votre part des intentions pures, un amour extrême du bien public, un grand désir d'instruire le peuple, en détruisant ses préjugés sur le gouvernement monarchique, en lui faisant haïr les rois et la royauté, et en lui recommandant sans cesse la soumission aux loix. Si cela peut s'appeler égarer et captiver l'opinion publique, si ce sont là des crimes, je conviens que vous êtes coupable.

Voilà ma profession de foy sur votre compte : et certes elle est dictée par l'amour de la vérité; car si je vous croyois criminel, je serois le premier à vous accuser,

mais en suivant une autre marche que celle de vos délateurs, dont les dénonciations vagues ne prouvent autre chose sinon leur perversité et le désir d'éloigner à force de tracasserie et de dégoûts, un homme dont la vertu leur portoit ombrage. Aussi leurs clameurs les couvriront du mépris qu'ils méritent, tandis que vous emporterez dans votre retraite, une conscience pure, l'estime et les regrets des gens de bien. Voilà la consolation d'un homme vertueux persécuté injustement, et c'est celle qui vous attend.

Le curé du Grand-Marisy, près la Ferté-Milon.

No XII (Page 130).

ROLAND

PREMIER INTERROGATOIRE SUBI PAR LA CITOYENNE
PENDANT SA DÉTENTION A L'ABBAYE DU 12 JUIN 1793.

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Par devant nous, administrateurs au département de police soussignés, avons fait comparoir la citoyenne J.-M. Phlipon, femme Roland, détenue ès-prisons de l'Abbaye, par ordre du Comité central révolutionnaire, séant à la maison commune, salle de l'Égalité, à laquelle nous avons fait les questions suivantes : A elle demandé; si elle connaît les troubles qui ont agité la République, depuis le moment où le citoyen Roland son époux est entré au ministère, jusqu'au moment actuel? — A répondu; que n'ayant jamais pris de part aux affaires publiques, elle n'a connu ce qui les concernaît que par ce qui les fait connaître à tous les citoyens, les papiers publics et les conversations.-A elle demandé; ce qu'elle

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