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principes de l'auteur anglais sur les lois positives. Un simple roman, Les aventures de Caleb William, ou les choses comme elles sont, publié en 1794, ne produisit pas une sensation moins remarquable; il fut deux fois traduit en français, la première par M. Garnier (le comte Germain), et l'autre par des gens de la campagne. Dans cette production qu'on a beaucoup lue, beaucoup louée et beaucoup blâmée, l'auteur a voulu faire et a fait une critique judicieuse de la législation criminelle anglaise. Il a voulu peindre également dans quelle série de crimes un premier forfait peut entraîner l'homme le plus vertueux. Enfin dans le personnage de Caleb, il a présenté avec une énergie effrayante les effets d'une coupable curiosité. Ce fot dans l'année méme de la publication de cet ouvrage, que l'auteur, mettant en action les principes d'humanité qu'il s'efforçait de developper dans ses ouvrages, parvint à sauver Hardy, Horne-Tooke, etc., que l'on accusait injustement de haute-trahison. Il acheva de les justifier dans une brochure fort piquante qu'il publia quelques jours avant le jugement de ces prévenus, sous le titre de Bluettes fugitives. L'autorité essaya en vain d'en arrêter la publication. M. Godwin épousa, en 1797, mi-triss Marie Wollstonegraft (dont l'article suit). L'ayant perdue dans la même année, à la suite d'une couche malheureuse, il se remaria en 1801, et embrassa la profession de libraire. Outre les ouvrages que nous avons déjà indiqués, voici ceux qu'il a publiés jusqu'à

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ce jour: 1 Le Rechercheur (the' Inquirer), ou réflexions sur l'education, les mœurs et la littérature, dans une série d' Essais, 1796, in8; 2" Mémoires de Mary Wollstonegraft, anteur des Droits des femmes vengés (1798, in-8', traduits en français en 1802); 3° Saint Léon, nouvelle du 16 siecle (1799. 4 vol. in-12). Dans ce roman, où l'auteur a peint son caractère et ses goûts, il s'efforce de prouver que si les désirs de l'homme se réalisaient, ils de viendraient journellement la source de ses plus grands malheurs. 4° Antonio, tragédie, 1801, in-8'; 5" Histoire de la vie et du temps de Geoffroi Chancer, 2 vol. in-4°, 1803, 2e édition, 1804, 4 vol. in8°; 6° Fleetwood, ou l'homme à sentimens, 1805, 3 vol. in-12, traduit en français, même format et même année, par Villeterque. L'auteur peint avec vérité, dans cet ouvrage,les inconvéniens d'un esprit trop susceptible, et d'un cœur trop passionné. 7" Faulkner, tragédie, 1807, in-8; 8 Essai sur les sépulcres, 1809, in-8°; 9° Vies d'Edward et ohn Philips, neveux de Millon, 1805, in4; 10" Mandeville, histoire domestique du XVIITM siècle, 1817, 5 vol. in-12. C'est le tableau effrayant des maux que la haine, l'orgueil et la vengeance peuvent attirer sur celui qui s'en est laissé doniiner. Remarquables par un but constant d'utilité, les ouvrages de M. Godwinjoignent en général, à la force et à l'éclat du style, la profondeurdes pensées. Ils ont obtenu de brillans succès: on leur reproche seulement une teinte de misanthropie trop souvent reproduite..

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、 GODWIN (MARY WOLLSTONE GRAFT, MISTRISS). plus connue sous le nom de MARY WOLLSTONEGRAFT, naquit dans les environs de Londres en 1759. Un préjugé, toutefois respectable, et qui assure la paix domestique, veut qu'une femme cache dans l'obscurité de la vie privée, les qualités supérieures dont la nature l'a pourvue, et qu'elle laisse éteindre le flambeau du génie dans les humples occupations du ménage. Si, contre l'usage, elle se fait homme, par ses habitudes, par le

mouvement d'une vie aventureuse, elle n'obtient plus ces hommages touchans réservés à la vertu modeste, et elle est comme condamnée à subir la célébrité, qui donne l'apparence et rarement la réalité du bonheur. Mistriss Godwin éprouva cette destinee. Son é ducation fut loin de lui préparer le rang distingué qu'elle a obtenu parmi les femmes célèbres dans les lettres. Née d'une famille pauvre, à peine elle reçut les premiers élémens d'une instruction volgaire; cependant la lecture, la méditation, un travail assidu suppleèrent à l'insuffisance de cette éducation; et après la mort de sa mère, de concert avec ses sœurs, elle ouvrit une école, qui leur procura les moyens de subsis ter. Ayant quitté Islington pour Newingtongren, où elle réunissait un plus grand nombre d'élèves, elle y mérita la bienveillance et l'amitié du docteur Brice. Mais instruite qu'une dame, que depuis son enfance elle affectionnait beaucoup, était malade, elle abandonna son établisse ment, et se rendit auprès d'elle

à Lisbonne. Quelques jours après son arrivée dans cette ville, l'amie à qui elle venait prodiguer ses soins mourut. Mary Wollstonegraft retourna en Angleterre, et fut admise dans la maison du vicomte de Kinsborough, lord lieutenant d'Irlande, commie gouvernante des enfans de ce seigneur. Elle se fixa, en 1786, à Londres, où elle publia, dès l'année suivante, des Pensées sur l'éducation des filles, et successivement differens autres ouvrages dont nous parlerons dans la suite de cet article. En 1792, elle eut occassion de connaître un peintre, qui jouissait d'une excellente réputation acquise par ses monrs et par son mérite, FrESSL (voyez ce nom). Mary Wollstonegraft l'aima, et lui inspira les mêmes sentimens; mais Fuessli était marié, et il se fit un devoir de respecter les liens qui l'unissaient à une femme vertuense, et la confiance que lui témoignait Mary, dont il eût ambitionné la possession s'il eût été libre. Mary Wollstonegraft se rendit, cette année même (1792), en France, « dans la vue, disait» elle, de perdre au sein du bon»>heur public, l'idée de ses mal» heurs privés.» Mary s'était fait illusion sur la situation de la France. Les convulsions politiques en avaient éloigné la paix, et Mary elle-même y trouva bientôt de nouvelles sources d'affliction. Liée avec plusieurs des plus illustres membres du parti de la Gironde, elle les vit périr sur l'échafaud. A la douleur que lui causa cette épouvantable catastrophe, se joignit celle d'être la victime d'un négociant améri

cain, qui, après l'avoir abusée par les promesses les plus solennelles, abandonna bientôt dans un état voisin de l'indigence la mère d'un enfant qu'il avait refusé de reconnaître. En proie à la plus profonde mélancolie, elle retourna en Angleterre, où elle tenta plusieurs fois de se donner la mort, quoique portant à sa fille une vive affection, car il est des peines qui troublent l'esprit sans dénaturer le cœur. Dans cette situation déplorable, elle revit, par les soins d'un ami commun, M. Godwin, qu'elle avait connu autrefois. Ils se lièrent d'une tendre amitié, et bientôt se marierent. Cette union, que tout annonçait devoir être heureuse, fut de bien courte durée. A la suite d'une couche difficile, M Godwin mourut, le 10septembre 1797. On prétend qu'elle n'avait d'autre religion que celle qu'elle s'était créée. Elle n'était point sans mérite, cette religion qui lui enseignait l'obligeance, la générosité, Jes vertus les plus douces. A une figure agréable et touchante, à des manières simples et nobles,

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Me Godwin unissait les dons de l'esprit Ses erreurs furent celles d'un cœur passionné, et non d'une imagination dépravée, et elle a trouvé dans son mari le défenseur le plus généreux et le plus ardent. Il a publié, sous le titre d'OEuvres posthumes de MTM Godwin, des mélanges, des lettres et des fragmens, et les a fait précéder de l'histoire de sa vie (Londres, 1798, 4 vol. in-8"). Les principaux ouvrages de cette dane sont, outre les Pensées sur l'éducation des filles, 1 Défense

des droits de l'homme; 2° Lettre à Edmond Burke, à l'occasion de ses Réflexions sur la révolution fran raise, 1790, in-8; 3° Défense des droits des femmes, avec des réflexions sur des sujets politiques et moraux, 1792. in-8"; ouvrage qu'elle composa en moins de six semaines, et dans lequel elle s'efforce de prouver que le vœu de la nature appelle la femme à partager avec égalité les fonctions supérieures, par lesquelles l'homme prétend établir sa domination sur un sexe qui n'est faible que parce qu'il est subjugué par l'amour. Le système de Mary Wollstonecraft avait été déjà établí par mistriss Macaulay, dans son Trai té sur l'Éducation; mais Mary le développa, sinon avec plus d'art, du moins avec plus de chaleur et de sentiment. 4 Histoire originale de la vie réelle, ouvrage d'éducation; 5o Abrégé du nouveau Grandisson, traduit du hollandais; 6Le Lecteur féminin; de l'Impor. tance des opinions religieuses, traduction de l'ouvrage de M. Necker; 80 Physiologie de Lavater, abrégé du livre français; 9" Élémens de morale, 3 vol. in-12, 1796, traduits de l'auteur allemand, Salzmann, qui plus tard traduisit la Défense des droits des femmes: 10° Lettres écrites pendant un court séjour en Suède, en Norwege et en Danemark, 1796, in-8°; 11° Marie, roman dans lequel l'auteur exprime, avec cette sensibité qui fit a gloire et son malheur, ses sentimens pour l'amie de sa jeunesse, auprès de laquelle elle s'était rendue à Lisbonne; 12° Vue historique et morale de l'origine et des progrès de la révolu

tion française, et de l'effet qu'elle a produit en Europe, 1794, in-8° (le 1' vol. seul a été publié); 13° Les maux de la femme (The Wrongs of Woman); ce roman ne fut imprimé qu'après la mort de mistriss Godwin, et fut traduit en français par B. Duclos, 1798, in-12, sous le titre de Maria, ou le malheur d'être femme; 14° différens articles fournis à la Revue analyti que; 15° ie et Mémoires de mistriss Godwin, rédigés sur les matériaux fournis par son mari, traduits en français, 1802, in-12, avec por

trait.

GOENS (RYKLOF-MICHEL VAN), né à Utrecht, de Daniel-François Van Goens, membre distingué de la magistrature de cette ville, et docteur en philosophie et en droit, ne dégénéra pas de l'illustration de ses ancêtres, et se fit remarquer parmi les plus savans philologues de la Hollande. Dès l'enfance, il apprit les lettres grecques et latines, et à 11 ans, il était assez instruit pour écrire pendant ses vacances un savante dissertation De cepotaphiis, ou sur les Sépultures dans les jardins. Ce morceau mérita l'approbation de son professseur, M. Wesseling; et le jeune savant le dédia à son père, lorsqu'il le fit imprimer à Utrecht, sur la fin de 1763. Nous ne parlerons pas de tous les ouvrages qui commencèrent la réputation de ce philologue, nous ne citerons que ceux qui lui donnèrent le plus de droits à l'estime des savans. On peut mettre de ce nombre le Porphriyus de antro nympharum, en gree et en latin, suivi d'une Dissertatio Homerica, Utrecht, 1765, in-4°. Cet

ouvrage fixa l'opinion sur le mérite du précoce érudit, et décida les curateurs de l'académie d'Utrecht à le nommer professeur extraordinaire de littérature ancienne, en 1766. Il signala son entrée en fonction, par une harangue latine du plus grand intérêt De incrementis quæ humaniores litteræ, historiarum imprimis et græcæ linguæ studium sæculo XVIII ceperunt. Il s'occupa bientôt à enrichir sa langue des chefs-d'œuvre allemands, et l'on donne les plus grands éloges aux deux préfaces qu'il mit à la tête des tomes 1 et 6 de la traduction hollandaise du voyage de Volckmann en Italie. Utrecht, 1775, et 1774, 6 vol. in-8°. La traduction qu'il publia ensuite du traité de Moses Mendelssohn, sur le sublime et le naïf, et surtout les observations qu'il y ajouta, déplurent aux théologiens zélateurs de Rotterdam, qui l'attaquèrent dans un ouvrage périodique. Il répondit, on lui répliqua; mais ennuyé de ces misérables tracasseries, il résigna sa place de professeur, et entra dans la magistrature d'Utrecht. Il n'y trouva pas le repos qu'il cherchait. Il vendit sa riche bibliothéque pour ne s'occuper que des affaires politiques de la Hollande. Il avait embrassé avec chaleur le système stathoudérien; mais le parti contraire ayant prolongé sa domination, il fut contraint d'émigrer en Allemagne et en Suisse. Parmi les écrits que ces troubles avaient fait naître, celui qu'il publia sous ce titre: Mẻmoires politique sur le vrai système de la ville d'Amsterdam, in

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folio, en hollandais, fixa surtout l'attention publique.

que

GOERRES (N.), littérateur allemand, ex-directeur des écoles de Coblentz, et rédacteur, en 1815 et 1816, du Mercure du Rhin, a publié, dans sa langue maternelle, une Mythologie estimée et quelques autres ouvrages. Ce sont cependant bien moins ces productions qui ont fixé l'attention publique sur M. Goerres, que les principes libéraux qu'il a manifestés à deux époques fort différentes: pendant la domination française sur sa patrie et sur l'Europe, et après cette domination, lorsque tout semblait rentré sous l'administration paternelle des gouvernemens légitimes. Tant q M. Goerres s'est élevé contre l'op. pression étrangère, protection, encouragemens, promesses, ont excité et récompensé son zèle. Mais du moment que cet ennemi de la domination quelle qu'elle fat, a consacré avec force la seconde époque de son opposition, et a réclamé, au nom de ses concitoyens, l'accomplissement de promesses solennelles; M. Goerres n'a plus été qu'un écrivain séditieux, passible des peines les plus sévères; son journal a été supprimé, et il s'est vu en même temps frappé d'une condamnation correctionnelle. A l'expiration de sa détention, il a trouvé dans un modeste emploi qu'il exerce encore à Coblentz, les moyens de vivre pauvre, mais libre. On prétend qu'il coopère à la rédaction d'une feuille publique, rédigée dans les principes libéraux, mais exprimés avec cette mesure qui, sans éveiller les méfiances de l'au

torité, n'en parle pas moins au cœur des vrais patriotes, et leur rappelle que les droits les plus sacrés ne s'éteignent pas pour être méconnus. On a prétendu également, qu'en 1819, M. Goerres avait été nommé professeur à l'université de Bonn. Cette nouvelle n'a pas été confirmée.

GOERTZ (LE COMTE DE), diplo mate habile, fut, sous Frédéric, ministre de Prusse en Russie, et sous Frédéric-Guillaume, ministre de Prusse en Hollande. Au moment de la révolution française, il résida près de la diète de Ratisbonne, el y resta long-temps. Il passa ensuite au congrès de Rastadt, comme chef de la légation prussienne. Voici comment Mirabeau s'exprime sur le compte de ce ministre, dans sa correspondance secrète de la cour de Berlin: « Il n'est point sans habi»leté; il est froid, sec, disgracieux, » mais fin, maître de lui, quoi» que violent bon observateur, et dévoué au parti anglais.» Un historien moderne parle ainsi de sa mission dans les ProvincesUnies: En Hollande, dit-il, il se »porta pour médiateur,sans qu'on "eût demandé sa médiation; il »donna plutôt des ordres que des » conseils; qualifia d'oppression la » résistance des républicains hol>> landais; traita en province re>>belle une puissance indépendan»te, et décida la guerre, que son influence, plus sagement dirigée, »aurait pu éviter. » Depuis cette époque, il a cessé d'être en évidence.

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GOERTZ (N), général prussien et frère du comte de Goertz, dont il est parlé dans l'article

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