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HISTOIRE

DES

COLONIES BELGES

QUI S'ÉTABLIRENT EN ALLEMAGNE, PENDANT
LE XIIme ET LE XIIIme SIÈCLE;

PAR

ÉMILE DE BORCHGRAVE,

DOCTEUR EN DROIT, SECRÉTAIRE DE LA LÉGATION DE S. M. LE ROI DES BELGES
PRÈS LA COUR DES PAYS-BAS, ETC.

TOME XXXII.

(Mémoire couronné par l'Académie, le 9 mai 1864.)

Grande operæ pretium, patriæ describere fastos. (SCRIVERIUS.)

1

AVANT-PROPOS'.

Pour éviter toute équivoque, je crois devoir, dès le principe, expliquer et, au besoin, justifier l'expression Belges, inscrite en tête de ce travail et qui s'y rencontre à chaque instant.

On aurait mauvaise grâce, quand il s'agit de notre passé historique, de vouloir réduire nos provinces à la portion de territoire, désormais bien petite, qui a conquis enfin son indépendance sous le sceptre du roi Léopold. Nous ne devons pas oublier que la Belgique actuelle a vécu moralement et politiquement d'une même vie avec l'Allemagne rhénane, la Néerlande et une partie considérable de la France du Nord. Entre ces centrès actifs, auxquels se rallient nécessairement les provinces adjacentes, existait autrefois une véritable nationalité religieuse, politique et commerciale, et se perpétue une solidarité historique dont les traditions survivent à toutes les combinaisons de la diplomatie.

Partant de là et eu égard au sujet que j'ai à traiter, je n'emploie pas le mot Belges dans le sens restreint qu'on lui donne aujourd'hui et qui sert à désigner seulement les habitants du royaume sorti de la révolution de 1830; je le prends dans l'acception plus étendue qu'il avait autrefois, et j'entends par là les peuples qui habitaient le littoral de la mer du Nord, depuis Gra

Par exception à l'article 25 de son Règlement général, et considérant que ce mémoire couronné n'a pas eu de concurrent, l'Académie a cru pouvoir accéder à la demande de l'auteur de revoir son travail avant l'impression.

velines jusqu'à l'extrémité de la Frise. Le territoire qu'ils occupaient comprenait donc, outre les royaumes actuels de Belgique et de Hollande, la Flandre française, l'Artois, le Cambrésis et la Gueldre prussienne, riches provinces que convoitait l'ambition de quelques conquérants absolutistes et qui furent sacrifiées grâce à la lâcheté, à l'inertie ou à l'incapacité de nos souverains. La réunion de ces États formait, sous Charles-Quint, une monarchie compacte et homogène, qu'il transmit à son fils et que celui-ci ne sut pas conserver dans son intégrité. On l'appelait aussi Pays-Bas. Cette dénomination, considérée au point de vue géographique et appliquée à la nature des contrées qu'elle embrasse, est d'une exactitude incontestable. Je m'en servirai plus d'une fois; j'aime mieux néanmoins le nom primordial, comme ayant une signification historique plus ancienne.

Je dois ajouter que ce nom a varié si souvent que j'ai besoin de justifier ma préférence. Il n'y a qu'un peu plus d'un quart de siècle que les deux mots Belgique et Pays-Bas ont reçu, ce semble, leur consécration définitive, restreints qu'ils sont chacun à la fraction du tout auquel ils s'appliquaient autrefois simultanément, bien que l'un et l'autre fussent aussi attribués tour à tour aux provinces du Nord et à celles du Midi. Ainsi, lorsque les premières s'affranchirent pour toujours du joug de l'Espagne (1579), elles prirent le nom de Belgique-Unie (Belgium foederatum), tandis que les autres continuaient à être appelées Pays-Bas espagnols; ainsi encore l'importante colonie que les Hollandais fondèrent dans l'Amérique septentrionale, sur la Délaware, reçut le nom de Nouvelle-Belgique, et elle le conserva jusqu'en 1667, époque à laquelle la paix de Bréda la céda aux Anglais. Voilà déjà deux précédents historiques qui autorisent ma doctrine. Il en est d'autres non moins concluants. Des écrivains qui font autorité donnaient le titre de Diplomata Belgica, Elogia Belgica, Chronicon Belgicum, à des ou

1 Rien de plus explicite pour mon sujet que cette note de Miræus Galliae Belgicae typus, in exterorum gratiam. — Gallia Belgica, sive Germania inferior provinciis hodie (nam

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